L'esprit en ébullition, Isaac était entré dans les vacances d'été. Il ne se passa pas un jour sans qu'il ne songeât au défi lancé par Samaël. Défi reporté, faute de temps, à la rentrée. Lui, songer à la rentrée à l'aube de ses vacances ? Qui l'eut cru. Même ses parents n'avaient su comment réagir lorsque, quelques jours après son retour, il leur avait annoncé qu'il devait acheter des livres de potion au chemin de traverse pour « compléter » ses études. Ces maudits sorciers avaient-ils réussi là où ils avaient lamentablement échoué ? Isaac avait passé de longues après-midi à feuilleter d'épais grimoirs, à prendre des notes incompréhensible sur des... parchemins et à entourer des bouts de phrases et marquer des pages pour des raisons obscures. Parfois, il renversait sa tête sur le dos du fauteuil et observait pensivement la rosace du plafond. Il pouvait se perdre longtemps dans ses méditations. « Tu as des devoirs de vacances ? », avait fini par lui demander sa mère. « Si on veut... » avait-il vaguement répondu. Il avait réagi un peu plus vivement lorsque son père avait laissé sous-entendre qu'il avait une punition. Comment ses propres parents pouvaient-ils tomber aussi à côté de la plaque ? S'il avait reçu une punition, il l'aurait bâclée dans les règles de l'art ! Il refusait de leur expliquer l'objet de ses études cependant. Ses parents étaient bien trop droits pour approuver les mauvais coups qu'il préparait. Il aurait alors droit à un discours moralisateur, des mise en garde, et tout ce genre de choses ennuyeuses dont les parents ont le secret, à croire que, frustrés d'avoir perdu leur jeunesse, ils faisaient tout pour rendre leurs enfants plus vieux trop tôt... Certains y arrivaient. Ils se construisaient un fils model en croyant bien faire. Vous savez, ceux qui font la fierté de leur famille mais qui, à l'extérieur, font surtout pitié. Les 'premiers de la classe' autrement dit. Les cas désespérés, les irrécupérables.

L'esquive ne fut plus possible quand son bulletin arriva. Rogue avait estimé utile de préciser qu'il avait fait exploser son chaudron en potion... Quel idiot ! Comme s'il avait besoin de mettre ses parents, des moldus qui n'entendaient rien à la magie, au courant ! «.Et dans le cours de ton professeur principal ! », s'était exclamée sa mère au prix de nombreuses montées dans les aigus. « Directeur de maison... », avait-il marmonné le regard sombre. Et il avait eu droit à tous les repproches qu'il cherchait à éviter. Les pratiques magiques sont dangereuses ! Il aurait pu se tuer ! Comment pouvait-on proposer de telles activités à des enfants de onze ans. Jusqu'au : « Mon chéri, une bien meilleure place t'attend au collège, tu y trouveras des professeurs bien plus compétents et des matières bien plus concrètes ! ». L'éternelle rengaine... Heureusement, ses recherches étaient là pour prouver qu'il voulait ratrapper ses maladresses. Il pris ce prétexte et put monter ses « petits plans » en paix. Ses parents n'eurent plus aucuns soupçons. Ils ne le connaissaient pas assez pour déceler tous ses mensonges, pour s'apercevoir que leur fils ne se perdait pas dans les études s'il ne pouvait rien obtenir d'autre qu'une bonne note. C'était triste dans le fond, mais ça l'arrangeait. Le fossé qui les partageait se creusait ineluctablement depuis qu'il était entré dans le monde des sorciers. Il affrontait cette séparation précoce sans s'inquiéter, comme si ce n'était pas une fatalité à laquelle il devait se résoudre mais une réalité à laquelle il s'était toujours préparé.

Ses recherches intensives avaient duré... Deux semaines tout au plus durant lesquelles il avait fait plusieurs allées et venues au Chemin de Traverse pour se réaprovisionner en ouvrages. La bibliothèque de Poudlard ne proposait que des livres « corrects » et emprunter un livre laissait toujours une trace compromettante. Certains grimoirs s'étaient avérés inutile mais c'était sans importance, il avait de l'argent, il pouvait se permettre de faire des dépenses inutiles. Contrairement à la plupart des gens, Isaac achetait d'abord et vérifiait la qualité du produit ensuite. On ne lui avait jamais appris à économiser et mettre 30 livres dans un livre, ce n'était Vraiment rien ! Mais pourquoi s'impliquait-il autant dans cette affaire me diriez vous ? Après tout, Samaël n'avait lancé le défi qu'à Emilien. Certes, mais ils s'étaient mis d'accord pour modifier les règles. Se donner quelques petites missions individuelles ce n'était pas assez « grand », l'imagination d'Isaac avait été bien au-delà, et il avait besoin de monter un projet pour la rentrée afin d'apaiser son esprit bouillonnant. Son plan esquissé, il n'avait plus songé qu'à retrouver Emilien et Samaël pour le leur exposer. Ah... Si seulement les sorciers possédaient le téléphone ! Cette lacune était décidément terrible ! D'après ce qu'il avait compris, la poudre de cheminette permettait de discutter à distance, mais allez mettre une cheminée dans un appartement ! Ses parents en avaient tout de même installée une, mais une fausse, pour faire « genre ». Et il se voyait mal demander aux amis de New York chez qui il avait passé de mois d'août s'il pouvait « utiliser » leur cheminée... A moins de vouloir griller un poulet... Et encore, ça restait suspect, surtout chez des personnes qui vivaient à la campagne pour se payer le luxe d'une grande maison et non pour le pittoresque du paysage, le plaisir d'une vie bucolique, rythmée par le chant du coq, la traite des vaches, la cueillette des pommes et... heu... enfin, je m'égare.

La rentrée était arrivée (enfin !) et il allait retrouver Emilien et Samaël. Il avait cependant fallu attendre quelques jours avant d'espérer une entrevue. Leur premier cours de potion avait déterré leur projet et Emilien lui avait proposer une « réunion » à la fin des cours. A dater de cet instant, il fut très difficile pour Isaac de rester concentré sur ses cours. Son esprit bouillonnait à nouveau et il devait retenir quelques sourire espiègles lorsques ses rêveries lui peignaient les scènes des mauvais tours qu'il se plaisait à imaginer. Et finalement, l'heure des « retrouvailles », des vraies, était arrivée ! En espérant ne pas trouver dans le dortoir ses camarades qui ne participaient pas à leur « jeu » Isaac avait regagné sa salle commune et avait monté quatre à quatre les marches qui menaient aux chambres. Il ouvrit sans frapper (normal, c'était Son dortoir) et... stoppa net devant le capharnaüm de la pièce. Des pulls dépliés, des livres ouverts, des papiers de bonbons, des cartes jonchaient le sol tandis que sur un lit, Emilien lisait un vieux livre avec une extrême concentration. Il haussa un sourcil perplexe, il ne se souvenait pas avoir déjà vu le jeune garçon plongé dans un ouvrage.

- J'espère que tu ne m'as pas demandé de venir pour ranger tout ce bazar, dit-il simplement en le rejoignant et en repoussant du pied les affaires qui s'étendaient sur son chemin au lieu de les enjamber.

Puis, il s'assit sur le lit d'Emilien et observa sans discretion le titre du roman. Les trois mousquetaire de Dumas. « Un pour tous et tous pour un », s'exclama une petite voix dans sa tête. Combien de fois avait-il scandé cette réplique lorsqu'il jouait aux héros avec ses amis ? Il ne connaissait pas vraiment l'histoire pourtant et il avait découvert le nom de son auteur en même temps que le Comte de Monte Cristo cet été, une histoire qui ne lui avait en rien permis d'oublier ses petites combines. Ce comte était un génie ! Sa tante lui avait offert le livre en lui affirmant qu'il allait aimer – une chance qu'elle connaisse mieux ses goûts que ses parents qui n'avaient jamais réussi à l'intéresser à la littérature mais allez proposer Hemingway à Isaac ! - et, même s'il s'était tout d'abord montré dubitatif, il avait vite été conquis. Jamais il n'aurait pensé que de vieux livres puissent être si prenant et si stimulants. Il était assez curieux cependant de trouver Emilien en possession de ce livre. Les sorciers, et surtout les Serpentards, tendaient à rejeter la culture moldue.

- Tu t'intéresse à la littérature moldue ? Lui demanda-t-il. J'ai lu un autre titre de Dumas cet été et j'ai beaucoup aimé.

Il préféra éviter de lui demander si « c'était bien » puisque Emilien ne semblait pas trop avancé dans sa lecture et il savait à quel point il était agaçant de devoir répondre à ce genre de question lorsque le roman était à peine entamé. Un peu comme quand on vous demande si un plat est bon alors que vous n'avez même pas eu le temps d'avaler votre première bouchée... Puis il se tourna vers la porte et, comme celui qu'il attendait ne faisait pas surface :

- Samaël aussi doit venir non ?

Une question pour la forme avant d'entrer dans le vif du sujet.

[ Du retard, sincères excuses... ]

Voila, ca y était ! Les vacances terminées, la masse d’élèves se ruaient à nouveaux dans les couloirs de Poudlard, jacassant à cœur joie. Ces vacances n’avaient été en rien différentes de toutes celles qu’il avait vécu auparavant, à ce détail près qu’il connaissait l’existence de la magie et était capable de s’en servir. Malheureusement, cette soif de découverte et d’utilisation de ses nouveaux dons avaient été nettement freinée pendant ces deux mots car, n’étant pas majeur, il ne pouvait utiliser les quelques sorts qu’il connaissait en dehors de Poudlard. Ce furent alors deux mois d’abstinence magique difficile, dans un centre de vacances pour orphelins où de nombreuses activités diverses et amusantes étaient organisées, chaque journée. Et si cela avait pu lui plaire, l’année précédente, sa récente découverte de la magie avait donner à ces loisirs un gout fade qui le lassa dès le début.

Pour la première fois de sa vie, le jeune garçon avait attendu avec impatience la rentrée scolaire, songeant parfois avec une certaine nostalgie à l’étrangeté de cette école de Sorcellerie. Ses pensées s’étaient d’ailleurs très souvent dirigées sur les défis que lui et deux autres garçons de son année s’étaient lancés. Ceux-ci avaient été au début plutôt faciles, comme dénicher à la cuisine une part de gâteau, puis, grimpant sur l’échelle des difficultés, Isaac avait dû faire exploser son chaudron en potion, - et Samael n’était pas prêt d’oublier le regard de Rogue et son fou rire si difficilement répréhensible -, et enfin, Emilien devait réussir une potion qui n’était pas au programme, et donc en toute illégalité ! Voila qui annonçait une année prometteuse…

Samael poussa alors la porte de son dortoir, impatient de recommencer leur jeu. Emilien leur avait proposé de se retrouver dans leur dortoir pour continuer leurs défis, et le Vert et Argent avait été ravi de voir qu’aucun de ses deux camarades n’avaient oublié et ne souhaitait abandonner. Le désordre qui régnait dans leur chambre était indescriptible qui tira un fin sourire amusé au Serpentard. Dans son coin, au pied de son lit, trainassait aussi quelques livres, de nombreux vêtements… Cela ne l’avait jamais gêné, mais avec un peu de recul, Samael se disait qu’il lui faudrait peut-être ranger un peu de ce chaos avant que ce ne devienne invivable. Il leva ensuite les yeux vers les deux autres garçons déjà présents, et leur adressa un fin sourire de salutation. Il se débarrassa de ses chaussures, les balança près de sa table de nuit en même temps que ses bonnes résolutions question rangement, avant de se frayer tant bien que mal un chemin sur le terrain miné qu’était devenu leur dortoir pour se jeter finalement sur son lit, faisant ainsi face aux autres.

Samael remarqua alors le livre que tenait Emilien dans ses main, et lut le titre à voix haute : « Les Trois Mousquetaires ». Son regard sombre s’éclaira car il avait vraiment apprécié ce bouquin, histoire de défi, de combat, de victoire et d’amitié… Un de ces livres qui l’avaient tant fait rêver, à partir du quel il avait, lui et son frère, inventé tant de jeux. Ce fut pourtant un air étonné qui s’afficha sur son visage fin, intrigué de la présence d’un tel livre dans Poudlard, et entre les mains d’Emilien. D’un geste de la tête, il désigna le bouquin avant de prendre la parole.

« Je ne savais que tu lisais ce genre de livre ! »

Samael se rendait compte qu’en fait, il ne connaissait pratiquement rien de ses deux camarades de dortoir. Rien de leur origine, de leur famille, de leur vie… Etrange tout de même ces relations qu’on pouvait avoir à Serpentard. A moins qu’il n’en fût le seul responsable… C’est sur ces réflexions que le garçon se raisonna à leur demander quelques détails sur leurs vacances.

« Vous avez passé d’agréables vacances ? »Demanda-t-il alors, sur un ton badin, presque indifférent.

Mais là n’était pas le plus important ! Le Vert et Argent était en effet impatient de commencer leur défi, de savoir quelle potion ils pourraient bien fabriquer, et surtout sur qui ils allaient l’utiliser. Ignorant le fait que les deux autres s’étaient déjà pré-choisit une cible, Gatween, il se demandait encore quel serait l’élève qui aurait le malheur de subir la foudre de leurs envies. Ce fut donc avec un air impétueux que le jeune garçon se redressa avant d’apostropher ses deux camarades, attaquant directement le sujet qui les intéressaient et les avaient fait se réunir ici.

« Alors, vous avez des idées pour cette fameuse potion ? Et pour la cible ? »

Son visage habituellement stoïque s’était éclairé d’une lueur amusé et joyeuse. En espérant que cette fois-ci, ils n’auraient pas à subir la poussée d’autoritarisme d’un élève un peu plus âgé en mal de respect…

Emilien avançait dans sa lecture plus vite qu’il ne l’aurait cru tout d’abord. S’il avait eu un peu de mal avec le premier chapitre – le fait qu’il n’aimait pas le personnage de d’Artagnan aidait peut-être un peu – il en était maintenant arrivé au quatrième, après avoir enfin découvert les trois mousquetaires. Son préféré restait encore et toujours Athos, bien sûr, lequel venait d’être heurté violemment par d’Artagnan. Quel abruti celui-là ! Il ne pouvait pas regarder où il allait, non ? Et dans l’épaule blessée du mousquetaire, en plus. Athos s’exclamait « Monsieur l’homme pressé, vous me trouverez sans courir, moi » et après s’être arrangé un premier duel, le héros repartait. Pourquoi avait-on fait de d’Artagnan le héros ? C’était le moins intéressant des quatre ! Trop de qualités tuent la qualité. Il fallait bien, pour qu’un personnage soit digne d’intérêt, qu’il possède quelques traits de caractère autres que le courage, la loyauté et la politesse. Enfin. On se contenterait des autres. Athos, Porthos et Aramis, les vrais mousquetaires, avec leur casaque bleue, contre les gardes du cardinal, avec leur casaque rouge. Tiens, si l’on changeait ce bleu contre du vert, on aurait pu comparer avec l’éternelle amitié entre Serpentard et Gryffondor … Mais c’était peut-être aller un peu loin. Emilien allait entamer le cinquième chapitre lorsqu’une voix le tira de sa lecture.

Pour ranger tout ce … ? Emilien leva les yeux de son livre et contempla d’un air presque surpris le spectacle qui s’offrait à lui. Décidément, ce n’était pas dans le même état que lorsqu’ils avaient repris les cours. Comme quoi il ne leur avait pas fallu longtemps pour transformer la pièce … Bon, Emilien y était peut-être pour quelque chose, mais pas tant que ça ! Il avait dérangé sa propre valise, et puis un peu celle de Gatween, mais sans plus. Quoique peut-être que le livre qui traînait sous le lit de McLane était à lui, enfin, c’était à vérifier. Emilien eut un petit sourire : ranger ? Pour quoi faire ? Pour le moment, ça ne le dérangeait pas. Ses parents n’avaient jamais compris que même lorsque sa chambre était dérangée, il savait où se trouvaient ses affaires et n’avait par conséquent pas besoin de ranger quoi que ce soit. Ici, il partageait ce dortoir avec d’autres élèves, alors évidemment, si eux pensaient qu’il fallait ranger, il faudrait bien s’y mettre … On n’en avait jamais parlé, ça n’avait pas l’air d’ennuyer qui que ce soit. Peut-être Gatween. Et dans ce cas ? On ne ferait rien de plus, en tout cas Emilien ne comptait pas se mettre au rangement pour lui faire plaisir. Et puis quoi encore ? Depuis quand obéissait-on à cet abruti ?

- T’inquiète pas, au pire on en fait un tas et on laisse tout du côté de Michel …

Puis Isaac s’intéressa au livre qu’il avait à demi fermé. Ah, ça devait être étrange de le voir ainsi, lui qui n’avait jamais semblé être un grand lecteur – on se souviendra notamment du sort qu’il avait réservé à quelques ouvrages au dernier Noël : la vie de Jésus avait dû servir de nourriture au calamar géant. De plus, le père d’Emilien travaillait dans il ne savait plus quelle partie de « l’industrie » du livre : peut-être bien l’édition, ou la vente, peu importait. En tout cas Mr Backhand aimait beaucoup la littérature, ce qui avait encouragé Emilien à la repousser violemment. Il n’était jamais trop tard pour s’y intéresser, après tout. Et puis il s’agissait d’un livre particulier, qu’il soit moldu ou non. Peut-être l’exception qui confirmait la règle, qui sait ? Quand il était très jeune, son père lui lisait souvent des histoires, ce qui logiquement aurait plutôt dû le pousser à vouloir en lire par lui-même. Peut-être que son évolution reprenait un cours normal ? Au lieu de détester l’Italie, il redécouvrait le pays comme quelque chose de nouveau, et au lieu d’avoir en horreur les livres, il s’essayait à la lecture ?Emilien se demandait si ça tenait debout, comme raisonnement, lorsque Isaac ajouta qu’il avait lu un autre livre du même auteur. Tiens donc. Emilien pensait que la littérature moldue était très peu appréciée au sein des Serpentard, mais … Après tout, il ne savait même pas ce que faisaient les parents de ses condisciples. Le sujet n’avait jamais été lancé, sans doute …

- Il était dans la valise de Gatween, je crois, précisa-t-il. Puis il fronça les sourcils et ajouta : Ou peut-être pas. Qui sait ?

Autrement dit, à partir de maintenant, il était à lui. D’ailleurs, si ça se trouvait, au départ il n’appartenait même pas à Gatween. Emilien n’était pas un voleur, en général, mais « emprunter » des affaires à Michel ne lui posait aucun problème de conscience : de toute façon, tout qui touchait à Gatween ne méritait pas la même réflexion que le reste. Comme Isaac l’interrogeait sur la venue de Samael, à qui Emilien avait également passé le mot dans la journée, celui-ci franchit la porte. Eh bien voilà ! Athos, Porthos et Aramis enfin réunis ! pensa Emilien avec un petit sourire. Après s’être confortablement installé, Samael à son tour s’intéressa au livre d’Emilien. Il fallait croire que les Serpentard n’étaient pas aussi anti-moldus qu’on le disait ! Ou alors était-ce juste eux en particulier ? On disait que la grande majorité des Serpentard étaient de sang pur : c’était obligatoirement faux, les vrais sang-pur étaient bien plus rares qu’on ne le croyait. Seulement, pour conserver leur image de Serpentard pur et dur, beaucoup d’élèves mentaient sur leurs origines, gardaient pour eux tout lien avec quelque moldu que ce soit. Si ça se trouvait, nombreux étaient ceux qui possédaient une grande culture moldue … Les Trois Mousquetaires, c’était bel et bien moldu. Pourtant, ça faisait déjà trois élèves qui connaissaient le livre. Plus un autre, à qui avait appartenu l’ouvrage au départ. Emilien doutait de plus en plus qu’il s’agisse de Gatween : on l’aura sans doute mis dans sa valise par hasard, à moins qu’il ne soit qu’un sale petit voleur. Ça devait être ça. Saleté de Michel !

- J’aime bien l’histoire, répliqua-t-il simplement. Les trois mousquetaires contre les gardes du cardinal …

Emilien passa sous silence le parallèle qu’il avait fait entre les personnages du livre et eux trois : il n’était pas sûr que ses camarades aient le même genre de réflexion que lui … Le fait qu’ils connaissaient le livre ne voulait rien dire. Il choisit d’abord de répondre à la question de Samael, bien qu’elle soit posée sur un ton qui laissait entendre que la réponse lui importait peu.

- Excellentes. Pas très propices à la réflexion, par contre …

Mais l’on entrait déjà dans le vif du sujet, et le regard de chacun se fit plus intéressé. Si les Serpentard feignaient d’être très peu intéressé par ce qui se passait autour d’eux en général – ils étaient bien trop supérieurs aux autres – les trois deuxième année ne cachaient pas leur enthousiasme pour ce défi. Depuis le début, on pouvait facilement sentir leur motivation. Emilien n’était pas en reste : au départ, c’était à lui qu’était adressé le défi, mais ils avaient trouvé plus amusant de s’y mettre tous ensemble. Préparer une potion interdite … L’interdit était attirant, à n’en pas douter. Les trois mousquetaires ne s’étaient cependant pas encore mis d’accord sur la potion en question. Bien sûr, ils n’avaient pas eu le temps. Pendant ces dernières vacances, Emilien y avait un peu réfléchi : le choix était vaste, car le nombre de potions existant était énorme et les possibilités incroyables. Restait à savoir ce qu’ils voulaient exactement. Il avait semblé évident à Emilien qu’ils n’allaient pas préparer une potion pour le simple plaisir de cette préparation : et le plus drôle était certainement de choisir une victime. Aussitôt, il avait pensé à Michel. Seulement, il avait déjà subi une explosion de chaudron, et moins Serpentard perdrait de points, mieux ça vaudrait. Pour cela, il fallait rester un minimum uni, même si ce n’était qu’en apparence. Alors qui ? Un pauvre élève de première année ? Enfin, il fallait tout d’abord choisir la potion. La victime viendrait ensuite naturellement.

- Malgré tout j’ai réussi à noter quelques trucs, reprit Emilien, comme s’il avait accompli un acte d’un inégalable courage. Le philtre de confusion, la poudre à verrue – même si au final c’est plus une potion – ou la potion de ratatinage …

La rumeur voulait que les garçons soient moins ordonnés et moins soigneux que les filles. Si d’aventure vous osiez entrer dans l’antre des deuxièmes années de Serpentard, vous n’en douteriez pas un seul instant. Moins d’une semaine était passée depuis la rentrée et, il devenait déjà impossible d’imaginer que cette pièce ait jamais eu un semblant d’ordre. Le paysage était ravagé, comme si tout un bataillon l’avait traversé. Et si Isaac s’était assis sans hésiter sur le lit d’Emilien, c’était en partie parce qu’en fin de journée, il devenait difficile de trouver une place sur le sien. Dans la journée, son lit tenait lieu de rangement. Il y jetait ses affaires, ses cours et tous les objets qu’il pouvait recevoir avant le soir. Quand venait l’heure de se coucher, il posait tout à côté de son lit – Il fallait donc enjamber un bon mètre de papiers et de livres pour atteindre le matelas et posait ses vêtements sur la première chaise qu’il trouvait, en les amassant parfois sur les affaires de ses camarades. Nous pourrions presque faire une épopée de leurs réveils, lorsqu’il s’agissait de restituer à chacun ce qui lui appartenait. De petites rixes éclataient de temps à autres, et l’on sortait de suite les grands mots « Qui m’a volé ma chaussette ! » avant de retourner toute la pièce sans la moindre délicatesse, ou on accusait ses camarades d’attentat quand un petit objet piquant venait poser sa douloureuse empreinte dans la plante d’un pied.

Ranger ? A quoi bon en effet. Quoiqu’ils fassent il ne faudrait pas deux jours pour que le dortoir soit remis en état. Seul Michel gardait un beau petit lit bien lisse, bien parfait, comme lui – aux antipodes de son lit qui offrait un aspect assez bancal depuis qu’il en avait malencontreusement arraché la tringle quelques jours plus tôt -. Ça donnait envie d’aller sauter dessus ! Peut-être qu’ainsi, il aurait le sentiment d’écraser Michel. Il s’amusa un instant à s’imaginer sautant sur son ventre tandis que ses yeux lui sortaient bêtement des orbites à chaque fois qu’il enfonçait ses talons dans sa chair de noble amish. Emmène moi avec Michel au royaume des amish ! Aussi, la suggestion d’Emilien l’amusa beaucoup. Depuis ‘l’affaire du chaudron’, Gatween était devenu un grand sujet de plaisanterie entre eux, et il avait très vite adopté le surnom que son compagnon lui donnait. Michel. Oui, on nom parfait pour lui, bien que Stanislas soit déjà ridicule, mais puisqu’il portait ce prénom il ne devait pas le réaliser. Il l’avait probablement hérité de son arrière grand-père ou même de son père. Peut-être même que tous les hommes s’appelaient ainsi dans sa famille ! Stanislas junior, Stanislas senior, Stanislas doyen, ou avec des numéros, un peu comme les gâteux qui s’amusent à créer des dynasties de chien et qui sont si fiers de leur premier toutou qu’ils vont donner le même nom aux remplaçants. Pilou I, Pilou II, Pilou III, … Et puis Michel, contrairement à Stanislas, ça faisait paysan.

Après avoir ri à la plaisanterie de son camarade, Isaac s’intéressa à son livre. Les trois mousquetaires, un roman moldu. Alors qu’il s’étonnait de son origine, Emilien déclara, comme pour se justifier, qu’il était dans la valise de Michel. Tient donc ? Ce type avait le profil même du Sang Pur coincé dans son monde et abruti par les mariages consanguins. Il était étonnant de le trouver en possession d’un tel ouvrage. Mais pourquoi pas après tout ? Il se vantait souvent de pratiquer l’escrime. Et il était tout à fait capable de s’être mis cette idée en tête en lisant cette histoire. Ce qui était certain, c’est qu’Emilien venait d’être interrompu dans son aventure romanesque. Connaissait-il ce titre ? Etait-il issu d’une famille de sorciers ? Il n’en savait rien. Ils n’en parlaient pas. Il avait lié amitié avec Emilien, comme avec Samaël d’ailleurs, grâce à un goût partagé pour les moqueries et les coups bas. Quand une telle relation se nouait, il devenait difficile de franchir les barrières de l’intimité et on finissait par se retrouver avec des personnes qu’on devinait plus qu’on ne connaissait. N’allez pas croire cependant que le lien qui se crée de cette façon est plus fragile que les autres. Au contraire. Les non-dits entendus tenaient une part non négligeable dans leur complicité. Comme Emilien mettait en doute l’identité du propriétaire du livre, Isaac susurra avec un sourire malicieux :

- Qui sait oui… Il est peut-être à moi. Dans ce cas, je suis certain que tu ne verras aucun inconvénient à ce que je te demande de me le prêter. Quand tu l’auras terminé.

C’était l’occasion de découvrir la fameuse histoire des mousquetaires. Isaac ne doutait pas qu’elle lui plairait. Il adorait regarder des films de cape et d’épée. Avide d’aventures il se serait volontiers imaginé en plein XVIIe siècle. En mousquetaire pourquoi pas… Mais, surtout, en pirate, au gouvernail d’un majestueux bateau. La pointe de sa lame aurait été crainte dans les sept océans. Oui, sa vie aurait été fantastique s’il avait vu le jour quelques siècles plus tôt. Mais à Poudlard, plus qu’ailleurs, il lui était encore permis de jouer aux héros. S’il n’avait pas une épée il n’en possédait pas moins une baguette et des duels meurtriers éclataient encore entre sorciers… Tout en se laissant aller à ses rêveries, il se tourna vers la porte pour guetter l’arrivée de Samaël, le dernier élément du trio, le troisième mousquetaire, songea-t-il amusé sans se douter qu’il partageait cette pensée avec Emilien. Celui-ci ne se fit pas attendre. A peine eut-il le temps de demander s’il allait venir que la porte s’ouvrait. Il l’accueillit avec son sourire. Leurs projets allaient enfin être concrétisés ! Mais avant, il fallait passer par la surprise puis par les règles de bienséances. Samaël semblait ravi de reconnaître le titre du livre qui était entre les mains d’Emilien. Tient donc, se pourrait-il qu’il l'ait également lu ? Comme quoi, il n’était jamais bon de faire des généralisations. Tous les Serpentard ne méprisaient pas les moldus et les prétendus « sang impurs » n’étaient pas en reste. Peut-être se trouvait-il avec des garçons comme lui sans le savoir. Il s’en réjouissait. Il est toujours réconfortant de rencontrer des personnes qui vivent, à peu de choses près, une situation similaire à la vôtre.

Emilien déclara que l’histoire des mousquetaires lui plaisait. D’Artagnan, Athos, Aramis et Porthos face au cardinal de Richelieu. Quel moldu pouvait ignorer ces noms ? La littérature avait révélé ces personnages, l’imagination populaire avait fait le reste. Il n’y a pas très longtemps encore, il avait regardé des dessins animés avec des mousquetaires. Ses souvenirs les plus proches lui peignirent le portrait de quatre mousquetaires ridicules, d’un cardinal aux airs de bouffon et d’un petit nain blond plus malin que les autres qui était, selon la chanson, le héros oublié de l’Histoire. Albert était son nom… Mais il y avait peu de chose à tirer de cette série grossièrement parodique. Un plus grand bond dans le passé lui permit de retrouver des mousquetaires aux allures de chiens. Rien de plus. Il empruntait des chemins trop nébuleux… L’enfance des petits moldus était donc marquée par ces chers mousquetaires. Isaac se demandait si les sorciers avaient aussi des héros de ce genre… Sans doute. Mais il n’en avait jamais entendu parler… Et, quoiqu’il advienne, ces héros ne le feraient jamais autant rêver que ceux de son monde d’origine. Les passions qui puisent leurs racines dans la petite enfance ont une douce saveur de nostalgie. Une saveur qu’il ne retrouverait jamais dans le monde des sorciers. Il hocha donc la tête avec un sourire aux propos d’Emilien puis, il se tourna à nouveau vers Samaël qui leur demandait, en feignant l’indifférence, s’ils avaient passé de bonnes vacances. Il était évident que personne n’avait envie d’entrer dans les détails. Comment l’auraient-ils pu lorsqu’ils étaient là pour parler affaire ? Néanmoins, Isaac répondit avec quelques précisions mesurées :

- Pas mal oui. J’ai passé un mois aux Etats-Unis, enfin, surtout à New York, chez des amis boursiers de mes parents – ennuyeux à mourir soit dit en passant.

Il avait pris un air détaché et, avait su dans cette réponse laconique, donner un certain nombre d’informations à ses amis. Il n’avait rien de spécial à cacher, et certainement pas son origine moldue, il pouvait bien leur laisser voir une partie de sa vie. Etats-Unis, New York, amis boursiers, trois mots qui laissaient deviner une situation sociale plutôt aisée et une vie de moldus. Sa réponse était dénuée de vantardise, on y décelait même une intonation quelque peu désabusée. Sans les enfants des amis de ses parents et surtout leur fille de dix sept ans, avec qui il s’entendait très bien malgré son jeune âge, il aurait passé de très longues journées… Pendant les vacances, les parents aiment souvent faire des choses plus ennuyeuses que d’habitude : visiter un petit village perdu on ne savait où, profiter de leur présence à New York pour assister à de longues conférences, etc. Et quand il s’agissait de faire du shopping, d’aller au cinéma ou de passer la soirée dans un parc d’attraction ils criaient presque à l’éréthisme. Heureusement, la fille des-amis-de-ses-parents était là… A peine avait-il terminé sa réponse que Samaël entrait dans le vif du sujet. Ils frémissaient tous trois d’impatience depuis leur arrivée. Il fallait bien que l’un d’entre eux craque le premier. Avaient-ils une potion ? Une cible ? Le regard d’Isaac pétilla de malice et ses lèvres s’arquèrent d’un sourire à la fois espiègle et inquiétant.

Emilien déclara qu’il avait trouvé quelques idées. Les trois étaient intéressantes, mais tout dépendait de leurs projets. Une poudre de verrues ne causerait des ennuis qu’à un seul élève, une potion de ratatinage ridiculiserait ce même élève, cependant, l’ambition s’arrêterait là. Personne ne pourrait ignorer l’œuvre d’une potion. Personne ne s’en affolerait non plus. La ‘plaisanterie’ était gentille, sans conséquence, digne de n’importe quel élève. Ce n’était donc pas assez intéressant pour stimuler l’imagination malicieuse et fertile du petit Isaac. Il n’avait rien de bien méchant en tête cependant. Mais il se plaisait à imaginer des scénarios plus insidieux. Plus utiles éventuellement. Quand il y avait une fin véritable au bout d’un projet, tout devenait bien plus amusant… Les philtres de confusion étaient nombreux, et certains n’étaient pas forcément décelables… Il fallait savoir opter pour une recette raisonnable, qui ne ferait pas tomber la victime dans un crétinisme profond et suspect. Aussi, lorsque Emilien se tut, il enchaîna, plus sérieux :

- J’ai aussi pensé au philtre de confusion. Comme j’habite à Londres, j’ai pu me rendre facilement au chemin de Traverse avant mon départ en vacances et j’ai fait pas mal de recherches… - Il s’agenouilla près de sa valise, dans laquelle régnait un désordre chaotique, et, après avoir brassé ses affaires, il en tira un épais grimoire qui avait pour titre « Ces philtres qui égarent l’esprit. ». – J’ai consulté un certain nombre de livres mais celui-ci me semblait le plus intéressant. On y trouve notamment des potions qui manipulent l’esprit sans que l’on puisse diagnostiquer une crise de folie… J’ai préféré le ramener pour que nous avisions ensemble. De toute façon, il ne serait pas très prudent de faire des recherches à la bibliothèques, ça pourrait se retourner contre nous… - Il laissa tomber le livre sur le lit d’Emilien et retrouva sa place. – Peut-être est-ce voir un peu loin mais… Je me suis dis que tant qu’à faire une potion interdite, autant trouver une cible, et tant qu’à trouver une cible, autant qu’elle serve d’autres projets. Non ? Par exemple… - Il fit mine de réfléchir. Et, avec un sourire espiègle : - Imaginez ce qui pourrait arriver si on se débrouillait pour faire avaler un philtre de confusion à un élève d’une autre maison avant le cours d’un professeur… particulièrement sévère et inique…

Voila, ils étaient réunis, une deuxième fois pour leurs défis. Un frisson d’excitation et d’impatience traversait régulièrement le dos du Vert et Argent qui, ravi, n’aspirait qu’à commencer leur préparation de potion. Pourtant, en entrant, il commença par leur demander quelles avaient été leurs vacances, si elles s’étaient bien passées, sans s’intéresser de trop près aux réponses. Sans doute ses deux autres camarades n’avaient pas moins envie que lui d’évoquer le sujet qui les avaient réuni puisqu’Emilien se contenta d’une réponse vague, rapide tandis que Isaac leur racontait qu’il était parti à New-York, chez des amis boursiers. Samael haussa un sourcil furtivement, marquant ainsi l’information que venait de leur offrir Isaac. Car si sa condition aisé ne lui importait nullement, savoir qu’il venait, lui aussi, d’une famille moldue avait quelque chose d’étonnant et d’agréable. Il savait n’être pas le seul « sang-de-bourbe » dans ce nid de Serpent, mais vu leur réputation, ces enfants de moldus étaient principalement discret, et ce n’était pas toujours un statut que l’on pouvait avouer en toute sécurité. Il n’ajouta rien, cependant, et hocha légèrement la tête comme pour approuver les deux Serpents, n’ajoutant que quelques mots sur ses propres vacances, si peu intéressantes par rapport au sujet qui titillait.

« Les miennes ont été des plus communes, et finalement, il me tardait de revenir ici. »

Et ce fut lui encore qui, impatient, lança la conversation sur cela, sur l’Important. Il s’agissait de savoir quelle potion ils feraient, mais aussi, point très important, sur qui la testeraient-ils. L’idée avait un rôle considérable, d’elle résulterait certainement des conséquences plus ou moins graves s’ils se faisaient prendre, et ce n’était pas une possibilité à exclure, et Samael refusait de se prendre une série de retenues pour une potion de petite envergure. Il leur fallait une idée à la hauteur de leur ambition, de leur enthousiasme. Emilien répondit d’abord, lançant quelques idées amusantes et très certainement plaisantes à jouer mais sans autres conséquences que leur amusement furtif au détriment d’un autre. Rien qui laisserait des traces ou dont le récit pourrait s’étendre aux oreilles de ceux qui n’étaient pas là. Isaac proposa à son tour une idée de potion, potion de confusion, indécelable, qu’il comptait faire boire à un élève avant un cours particulièrement inique et habituellement calme. Un fin sourire carnassier étira les lèvres de Samaël qui n’imaginait que trop bien quelques cours qui avaient grand besoin d’être un peu, ou même beaucoup, chahutés. Cependant, avant d’approuver les idées de ses camarades Vert et Argent, le garçon donna à son tour les quelques idées qui lui avaient traversé l’esprit pendant ces deux mois d’été.

« J’avais pensé aussi à quelques postions, comme celle d’enflure que je me ferrais un plaisir de mettre dans le jus de citrouille du matin d’Ombrage, histoire de s’amuser un peu. Il y avait aussi cette potion, le polynectar, mais elle est, à mon avis, hors de portée pour notre niveau dans cette matière…. »Estimait-il.

Il se tut un instant, avant de donner son avis sur les idées des deux autres garçons.

« L’idée de Confusion me plait bien. Pourtant, j’imagine que ce sera aussi plus risqué, j’aime assez l’idée qu’on puisse en verser dans le verre d’un professeur…. »

Au risque de paraitre obsédé par Face-De-Grenouille, c’était encore à elle que Samael pensait. Ses cours, plus ennuyeux que jamais, méritaient bien un peu d’animation ! Cependant, s’ils réussissaient à faire cette potion, rien ne les empêchaient de faire boire un peu de leur précieux nectar à un élève et à un professeur… Le sourire joyeusement sadique qui éclairait le visage du Vert et Argent pendant qu’il imaginait les réactions des ceux qui assisterait à la déchéance de leur victime. Il imaginait déjà à quels élèves ils pourraient s’en prendre, cherchant parmi les multiples cibles possibles celle dont le comportement crétin étonnerait le plus, peut-être…

Emergeant de ces généreuses réflexions, le garçon posa son regard sur les deux Vert et Argent, puis sur le livre qu’avait toujours Emilien, alors que son cerveau faisait plus lentement le lien entre leur groupe et les personnages du bouquin, à la suite des deux autres, sans le savoir. Enfant, il avait toujours rêvé de ressembler à un de ces héros dont la camaraderie et les actes avaient fait d’eux des légendes, peut-être plus encore qu’il ne l’avait imaginé puisque même les sorciers connaissaient ces hommes. Athos, Aramis et Porthos, contre le cardinal de Richelieu. Un fin sourire amusé naquit un instant sur les lèvres du garçon, imaginant sans peine comment pouvait-être attribuer ces rôle à chacun d’entre eux, eux, sans savoir comment en faire part aux autres, n’imaginant pas un instant qu’ils puissent y avoir pensé, bien avant lui de plus. Il s’étira alors, prit un nonchalant pour ajouter ces quelques mots.

« Peut-être nous faudrait-il un nom de groupe, et pourquoi pas, un surnom personnel… »

L’idée lui était très tentante, et pour un gamin de 12 ans, ce genre de détails donnait toujours à leurs jeux un aspect plus sérieux et plus amusant. Samaël se demandait cependant si les deux autres ne trouveraient pas cette idée dérisoire, inutile et infantile, tandis qu’elle lui paraissait si attrayante. Former un groupe, lui donner un nom, lui apporterait une certaine solidité et une existence inébranlable. Ils avaient encore de nombreuses années à Poudlard, et ils pouvaient très certainement accomplir encore ensemble de nombreux défis. Du moins, Samaël y comptait bien.

Soudain, un détail lui revint à l’esprit, alors qu’il pensait à cette potion. Il avait trouvé un lieu parfait pour leur méfait, un lieu dans lequel ils pourraient faire leur potion sans problème et sans risque de se faire prendre. Il l’avait découvert en même temps qu’une jeune fille de leur maison, Liliana, et s’étaient amusés à la transformer en piscine…

« Je connais un lieu où nous pourrons faire notre potion… Je ne sais pas si vous connaissez la Salle Sur Demande, mais elle me parait être la pièce idéale ! »

Samaël abordait alors un fin sourire fier, content de cette découverte qui lui était immédiatement apparue contre une merveilleuse possibilité pour leurs défis. Le quartier général des Trois Mousquetaires de Serpentard… La classe ! Le jeune garçon était vraiment impatient de commencer leur méfait, et encore plus de l’utiliser, histoire d’humilier une ou deux personnes… Certains Serpents plus vieux qu’eux le méritaient bien, après tout ! Seb’ !

[ Désolée, j'ai du mal à suivre votre longueur de post... ]

- Bien sûr, répondit Emilien, comme Isaac lui parlait du livre.

Puis ils parlèrent de leurs vacances respectives, et Emilien en profita pour noter quelques détails : à propos d’Isaac, surtout, qui avait passé un mois à New York … Le voyage n’était pas donné. Enfin, les parents d’Emilien n’étaient pas pauvres non plus, pour lui payer l’avion tous les mois, pour faire la navette entre l’Angleterre et l’Italie. De plus, tout le laissait penser que son camarade avait des origines moldues, depuis sa connaissance d’Alexandre Dumas jusqu’aux « amis boursiers » de ses parents. Ce n’était pas le genre de choses dont on se vantait, à Serpentard, mais comment Emilien aurait-il pu juger sur ce critère ? Il considérait sa famille encore « pire » que les moldus : ses parents avaient abandonné la magie, et ne voulaient plus en entendre parler. Encore heureux qu’ils n’aient jamais été connus parmi la communauté – son grand-père était mort trop tôt pour qu’on s’intéresse à sa descendance – car autrement, Emilien aurait droit aux moqueries des Serpentard, à n’en pas douter. Pour le moment, qui connaissait sa situation familiale ? Lucy, bien sûr, Bill également. Mais ça devait être tout, il ne se souvenait pas en avoir parlé avec qui que ce soit d’autres. Enfin, ce fut à Samael de déclarer qu’il avait passé des vacances « des plus communes » et qu’il avait attendu la rentrée avec impatience. Emilien ne jugea quant à lui pas nécessaire d’ajouter des détails à propos de ses propres vacances.

Et maintenant, les potions. Emilien parla le premier, et proposa quelques préparations, un peu au hasard. Il était vrai que pendant les vacances, contrairement aux deux autres, il n’avait pas vraiment eu la tête à ça … Le philtre de confusion et la potion de ratatinage lui plaisaient davantage, pour leurs effets plus visibles. En tout cas, il n’avait pas beaucoup cherché. Par contre, Isaac – il apprit au passage qu’il habitait à Londres – avait été autrement plus studieux, et sortit un livre de sa valise. Les répercussions qu’eut la chute de ce livre sur le lit firent comprendre à Emilien qu’il pesait lourd, et donc qu’il contenait une grande quantité d’informations … Ces philtres qui égarent l’esprit ? Intéressant … Les parents d’Isaac le laissaient-ils acheter n’importe quoi, comme ça ? D’un autre côté, s’ils étaient moldus, il ne devait pas être difficile de leur faire croire qu’il s’agissait d’un travail pour l’école. Et c’était presque ça, d’ailleurs. Emilien commença à feuilleter le livre, pendant qu’Isaac continuait sur sa lancée. Lorsqu’il parla d’un professeur sévère, Emilien pensa plutôt à Rogue qu’à Ombrage – certains élèves n’avaient pas besoin de philtre de confusion pour la provoquer, alors que Rogue faisait autrement plus peur à ses élèves. Quelle cible, dans ce cas ? Un Serdaigle ? Ils étaient premiers au classement, en plus …

- Tiens, celle-là, par exemple, intervint Emilien sans lever les yeux du livre. Par contre, pour les ingrédients, ça va pas être évident, mais si on devait s’arrêter à la moindre petite difficulté …

Samael approuvait l’idée du philtre de confusions. Bien, il semble qu’ils soient tous les trois d’accord sur ce point-là ! Maintenant, restait à définir quelle « recette » choisir précisément, et surtout, quelle victime. Emilien avait tout naturellement pensé à un élève, mais Samael – et si on l’appelait Sam ? Ou Sammy ? – semblait viser plus haut. Un professeur ? C’était plutôt risqué ! Même si l’idée était attirante, comment verser quoi que ce soit dans le verre d’un professeur sans se faire remarquer ? Les élèves n’étaient pas censés approcher de la table des professeurs … Et quand bien même ils trouveraient une bonne excuse pour cela, si jamais ils se faisaient prendre ? Les conséquences seraient terribles ! Sans doute seraient-ils renvoyés sur le champ … Emilien ne voulait pas passer pour un peureux, mais tout de même, il convenait d’être un peu prudent, sur ce coup. Peut-être, lorsqu’ils auraient mené à bien quelques idées de ce genre sur des élèves, alors ils pourraient s’attaquer à une plus grosse – c’était le cas de le dire si on pensait à Ombrage – proie. Le Serpentard releva la tête pour observer ses camarades, avant de prendre la parole :

- Ce serait même trop risqué, à mon avis. Mieux vaut commencer par des élèves, et puis quand on sera plus entraînés, on pourra essayer avec un prof … Pour le moment, moi je penserais plus à un Serdaigle, histoire de leur faire perdre quelques points …

Il fit à son tour mine de réfléchir, comme si ça ne lui paraissait pas évident, alors qu’il y pensait depuis le début. Enfin il ajouta :

- Par exemple, on pourrait lui en faire avaler juste avant le cours de Rogue …

Mais enfin, ça restait à faire. Comment s’approcher de la table des Serdaigle sans que cela paraisse suspect ? En temps normal, Emilien aurait pu prétexter une envie de déjeuner avec son amie Lucy, par exemple, seulement … Depuis le début de l’année, il l’évitait, alors bon. Dommage, il aurait pu servir à quelque chose, de ce côté-là. Il faudrait trouver une autre solution. Soudoyer un Serdaigle ? Mais si celui-ci savait que des points allaient être perdus, il n’accepterait jamais. De plus, si, après coup, il se rendait compte de ce qu’il avait fait, il pouvait encore dénoncer les trois Serpentard. Que leur restait-il ? La force ? Mais l’élève s’en souviendrait peut-être. Lui faire avaler le philtre dans un gâteau qu’ils lui offriraient ? Ah ! Si ça, c’était pas suspect ! Des Serpentard qui offrent des gâteaux ! Et puis encore ? Des Serpentard qui montent une association pour venir en aide aux hiboux maltraités ? La bonne blague. Ah, ça méritait réflexion … Emilien était pensif. Peut-être que cela pouvait marcher, avec un Serdaigle très naïf … Dans les première année, il devait bien y en avoir … Il imaginait déjà ce que ça donnerait, dans un cours de potions, et il se mit à sourire sans raison visible. La voix de Samael le tira de ses pensées.

Celui-ci proposait de choisir un nom pour leur groupe. Enfin, ça n’avait pas été dit comme ça, et on aurait presque pu croire qu’il plaisantait, mais Emilien devinait une part de sérieux là-dessous. Peut-être simplement parce qu’il voulait en voir une. En effet, cette idée lui plaisait bien, à lui, mais, en se mettant à la place de Sammy – puisqu’on a dit qu’on l’appelait comme ça – il comprenait parfaitement sa façon de dire les choses : comment savoir si les autres penseraient comme lui ? Et s’ils préféraient se moquer ? Emilien n’eut même pas besoin de réfléchir. Un nom pour le groupe ? Après la lecture qu’il faisait tout à l’heure, un seul lui venait à l’esprit : les Trois Mousquetaires. Ça leur convenait parfaitement, non ? Ils étaient trois, et puis les mousquetaires, ça n’était pas n’importe qui. Quant à choisir un surnom personnel, il paraissait également évident de s’appeler Athos, Porthos et Aramis. Un instant, Emilien se demanda si Samael n’avait pas pensé à la même chose que lui, après tout, si on ne pensait pas aux mousquetaires, pourquoi parler de surnom pour chacun d’entre eux ? Peut-être qu’il se faisait des idées. Finalement, c’était ce qu’il voulait bien croire, bien comprendre. Toutefois, il répondit, sur un ton un peu détaché lui aussi :

- Moi j’propose les Trois Mousquetaires ! Il se mit à rire, comme s’il n’était pas sérieux, alors qu’en réalité il souhaitait plus que tout que ses deux camarades approuvent. Dans ce cas, moi j’veux être Athos …

Il retrouva son sérieux apparent lorsque Samael évoqua un lieu pour préparer leur potion. Il était vrai que le dortoir, c’était bien pour discuter, mais … Déjà, il faudrait avoir la place de mettre un chaudron, et donc ranger, ce qui leur demanderait beaucoup de temps et de travail. Ensuite, ils n’étaient pas seuls dans ce dortoir : il y avait par exemple Michel, et puis n’importe quel autre élève de Serpentard pouvait débarquer. Mais où s’installer d’autre pour faire la préparation ? Emilien quant à lui n’avait aucune solution à proposer. Mais si Samael en parlait, ce n’était pas par hasard, et lorsqu’il parla de la « Salle sur demande », Emilien fronça les sourcils. De quoi parlait-il ? C’était la première fois qu’il entendait parler de cette salle … Il demanda alors à Sammy :

- C’est quoi, cette salle, au juste ?

Au retour des vacances, la plupart des écoliers ne songent qu'à retrouver leurs camarades pour leur raconter les merveilleuses aventures qu'ils avaient vécues sans eux. Avant d'entrer à Poudlard, Isaac n'avait jamais échappé à la question de la destination. C'était très important dans son milieu. Celui qui osait répondre qu'il n'avait pas quitté sa campagne anglaise passait chez les 'has been', du côté de ceux qui n'avaient pas assez d'argent pour se prétendre digne du Groupe. La première chose que l'on vous demandera si vous souhaitez entrer dans ce groupe sera la marque de vos vêtements. Evidemment, si le reste ne suit pas, vous pouvez de suite rejoindre le clan des « pauvres ». Une fois la destination validée, venait la question des hôtels, ou plutôt, des « suites », puis, des restaurants, des plages et des yoats éventuellement. Ensuite, chacun énumérait ses achats et ceux de sa famille. Oui, et alors ? Me diriez-vous ? Et alors on les écoutait avec intérêt évidemment. Il fallait savoir se faire admirer et envier si l'on voulait garder sa réputation dans cet univers de petits requins. Isaac n'était pas le plus riche de la bande. Cependant, personne ne s'était jamais avisé de remettre sa place en question. Même s'il avait déclaré, comme il venait de le faire, que ses parents avaient préféré se faire héberger chez des connaissances plutôt que d'opter pour une suite (oui, il y avait de sacrés abrutis dans le tas) on n'aurait rien dit. Le Serpentard avait été amené à s'affirmer très jeune. Il était incisif, il pouvait calquer à la perfection l'attitude de ses pairs et, surtout, son père était magistrat. Auriez-vous idée de rejeter le fils d'un magistrat ? Ç'aurait été stupide. Plus on était 'proche' de la Justice, plus on pouvait se permettre de contourner ses règles.

Et après l'entrée à Poudlard ? Ô, ce type de comportement se retrouvait. On ne pouvait pas passer à côté quand on appartenait à la maison de Serpentard. Mais voilà... Isaac était passé de l'autre côté. Il pouvait bien citer la suite la plus prestigieuse de Paris, le nom ne tinterait pas plus aux oreilles de ces « hauts classés » que celui de l'hôtel le plus miteux de Londres. Cette chute sociale lui était passée en travers de la gorge au début mais, en cet, instant, il pouvait l'affirmer : il était guéri. Déclassé et fier de l'être ! Oh oui... N'était-il pas agréable de classer les vacances dans les « évènements » normaux de la vie ? Evènement si anodins que Samael et Emilien n'estimaient pas nécessaire de préciser leur itinéraire. S'il l'avait fait, ce n'était pas seulement pour fournir des informations à ses amis, c'était aussi par habitude. Et, quand il vit les sourcils de Sam' se hausser légèrement il ne put s'empêcher de songer : « Oui ! Chez des amis ! Et alors ? Ça te pose un problème ? ». Les habitudes sont tenaces... Vous pouvez donc imaginer sa surprise, et presque son incompréhension, lorsqu'il entendit son camarade déclarer qu'il avait passé des vacances communes et qu'il était heureux de retourner à Poudlard. Wah... Parce qu'il considérait que ses vacances à Lui étaient exceptionnelles ? S'il s'était contenté de cette phrase, l'opinion de ses camarades moldus aurait été toute autre. Et ces derniers n'auraient jamais osé parler de vacances communes et déclarer que le retour en classe ne leur déplaisait pas. Il était bien vu de s'exclamer « aah si j'avais pu rester ! Vivement les vacances de Noël... Mes parents ont prévu de.... ». C'était lassant à la longue. Et il y avait fort à parier que nombreux étaient ceux qui, à son instar, le faisaient plus par convenance que par enthousiasme véritable. Aussi Isaac accueillit la déclaration de Samael avec un sourire visiblement approbateur. Oui, il se sentait bien, avec eux.

Ce qui est incroyable c'est que je viens de commencer ce rp par une page qui ne traite pratiquement pas du sujet. A la base, je voulais simplement dire que la plupart des élèves étaient heureux de raconter leurs vacances à leurs camarades tandis que nos trois compères se contentaient de vagues allusions. Que s'est-il passé ? Je l'ignore... Alors je vais essayer de recentrer le sujet à présent... Les trois Serpentard avaient très vite quitté les plages ensoleillées pour plonger dans l'ombre des machinations. Isaac avait très vite développé ses idées en mentionnant l'idée de prendre une cible. Personne ne s'en offusqua. Loin de là. Samael lui rendit un sourire encore plus mauvais que le sien et Emilien parcourut le livre qu'il venait de sortir de sa valise. Après un petit silence marqué par le frôlement du papier, le jeune garçon s'arrêta pour désigner une potion. Isaac se pencha aussitôt vers lui pour lire le nom du philtre... « Pudding à l'arsenic » [Obligé XD]. Ah oui... Il avait corné la page pour la retrouver. Cette recette remplissait précisément les critères qu'il venait de donner, et elle pouvait être dissimulée dans un gâteau... Du plum pudding plus précisément. Quelle différence ? Il suffisait de lire la recette pour le comprendre. Le plum pudding n'était pas un dessert à déguster après la cuisson. Il fallait attendre au moins un mois pour le déguster, et, cette longue attente permettait au poison de se confondre avec la pâte au point de devenir indécelable. Pas de preuves donc. C'était parfait. Cependant... S'ils n'agissaient pas durant la période de Noël, proposer un plum pudding à quelqu'un pourrait surprendre. Isaac n'avait bien évidemment pas l'intention d'offrir une part lui-même à sa victime mais quand même... Il se voyait mal aborder quelqu'un en mai en lui disant « hey ! J'ai trouvé dans les cuisines les restes d'un plum pudding de Noël ! » .... Soit. Ils y réfléchiraient plus tard. Si le gâteau permettait de dissimuler le poison, ils trouveraient bien quelque chose. De plus, la recette n'était pas très compliquée... A côté de ce qu'on pouvait lire en tournant les pages du moins...

- Elle m'avait semblé intéressante aussi. Niveau ingrédients, il y a mieux c'est sûr mais regarde, il n'y a que deux chaudrons de difficulté. Ça devrait être abordable... Par contre... Vous êtes doués en cuisine vous ? Dit-il en regardant tour à tour Emilien et Samael, à qui il tendit le livre afin qu'il sache de quoi il en retournait.

Préparer la potion était fontamental, certes. Mais si leur gâteau était immangeable et/ou s'il présentait une allure lamentable au point de faire douter de sa comestibilité, ils n'iraient pas loin. Isaac n'avait jamais cuisiné de sa vie... Ah si... Il savait faire des crêpes... Bien obligé, ses parents ne voulaient jamais en préparer. Et ça pouvait aussi devenir une activité comme une autre quand on a neuf ans, que l'on s'ennuie un après-midi avec ses amis et que vos parents, absorbés dans leurs dossiers, vous laissent faire ce que vous voulez pourvut que vous les laissiez en paix. « Alors... On fait quoi ? » « ah ben on a qu'à faire des crêpes ! ». Il n'y a pas à dire, Isaac a un lourd passé. Mais nous en resterons à ce flash back, sinon le suspens serait gâché. Il faut savoir gérer les révélations. Donc, passé cette question qui, étrangement, lui avait donné envie de manger des crêpes, Samael leur fit part de ses idées. Potion d'enflure dans le jus de citrouille d'Ombrage... Oh ce serait beau ! Un sourire amusé parut sur son visage tandis qu'il essayait de se représenter la scène. Cependant, qui, à part une certaine catégorie de Serpentard, n'avait pas une dent contre Ombrage ? Des têtes brûlées de Gryffondor devaient préparer des plans de bataille de leur côté. Ils pouvaient bien leur laisser cette proie de choix non ? La mention du polynectar l'interrompit. Du polyquoi ? Il était sensé connaître ? Un regard furtif vers Emilien lui indiqua que ce nom ne soulevait pas ses interrogations. Bon... Rogue en avait peut être parlé en cours ou quelque chose comme ça. Comme Sam' venait de se taire, il revint sur Ombrage et s'exclama sur le ton de la plaisanterie :

- Pour Ombrage ce serait drôle ! Quoique... vu sa laideur actuelle une potion d'enflure serait bien capable de la rendre moins repoussante.

Puis Samaël poursuivit en déclarant qu'ils pourraient verser une potion de confusion dans le verre d'un professeur. Oui, ce serait certainement très amusant mais... Autant la potion pourrait passer inaperçue pour un élève – c'était d'ailleurs ce qui était intéressant – autant son usage deviendrait évident si un professeur était touché. Même si l'on découvrait que du poison avait été donné à un élève, les enquêtes ne seraient pas très poussées. En revanche, s'il s'agissait d'un professeur, ils auraient du soucis à se faire. Le moindre faux pas pourrait les trahir. Frapper un élève pouvait se faire pardonner au bout de quelques mois, voire même quelques semaines, mais quand un professeur était volontairement touché, les enjeux différaient... Ils seraient probablement obligés de cacher leur mauvais coup durant toute leur scolarité. L'acte n'était donc pas à prendre à la légère. Ils pourraient y songer plus tard... Quand ils auraient plus d'expérience... Pour nourrir une vengeance par exemple... Et nous en revenions à cette question d'intérêt. Selon Isaac, elle était primordiale. Voyez un peu le travail que représentait la planification d'un « petit coup monté » ! Ils n'allaient pas se donner tout ce mal et risquer leur place pour n'être payé qu'en rires. La plaisanterie avait sa place, évidemment... du moment qu'elle était justifiée et qu'elle pouvait servir d'autres projets... Isaac approuva donc la réflexion d'Emilien. Son sourire s'élargit lorsqu'il parla de Serdaigle et de cours de Rogue... Sa voix se fit doucereuse :

- Exactement... Depuis la rentrée ces piaffs rafflent tous les points... Il serait grand temps de faire désenffler leurs têtes trop pleines. Si pleines qu'elles pourraient saturer... Et qu'arrive-t-il lorsque le cerveau sature ? C'est tout l'esprit qui craque ! - s'exclama-t-il en abattant ses poings sur chaque côté de sa tête. - Nous ne ferions qu'accélérer le processus... Et Rogue aurait un nouveau prétexte pour s'en prendre à leurs points.
Rogue leur avait prouvé aujourd'hui qu'il avait une dent contre les bleu et bronze. Sans doute ne leur pardonnait-il pas d'avoir gagné la coupe.
Enfin, nous verrons bien où en sera le classement lorsque nous frapperons, ajouta-t-il après une brève interruption. Gryffondor n'est pas loin derrière je crois. Et si nous devions leur permettre indirectement de gagner la coupe ce serait vraiment stupide.

Isaac n'avait rien de particulier contre les Gryffondors – ç'aurait sans doute été sa maison si Serpentard n'avait pas existé -, mais il ne fallait pas pousser non plus. Gryffondor et Serpentard se détestaient par principe. De ce fait, on lancerait à tort la pierre à ces derniers. Des rouges et or stupides (pléonasme ?) passaient leur temps à insulter sans motif des vert et argent dans les couloirs. Ils trouvaient ça drôle. Alors, forcément, au bout d'un moment, le jeune Deniel avait fini par en conclure que ces individus étaient peu fréquentables et par apprécier les moqueries que ses camarades lançaient à leur sujet. Mais revenons à nos moutons [comment ça je me trompe de topic ? ]. Le tout ne serait pas de trouver une cible. Il faudrait encore ruser pour lui faire absorber la potion sans éveiller de soupçons. Leur ingéniosité allait être mise à rude épreuve. Chaque chose en son temps cependant. La potion n'allait pas se faire en deux temps trois mouvements [okok j'arrête >>]. Il faudrait d'abord trouver une cachette et préparer une expédition dans le bureau de Rogue. Autant dire qu'ils avaient du pain sur la planche.

Isaac en était à ces graves réflexions quand... « Peut-être nous faudrait-il un nom de groupe, et pourquoi pas, un surnom personnel… ». Il se tourna vers Samael en fronçant légèrement les sourcils, le temps d'atterrir. Un surnom ? Mais oui ! Bien sûr ! Ils n'allaient tout de même pas opérer dans l'ombre sans s'attribuer un nom de groupe. Il fallait officialiser l'existence de leur clan et... concrétiser leur amitié ? Voyons... Son regard frôla le livre de Dumas. Sa présence dans le dortoir prit alors une valeurs prophétique. Les Mousquetaires ? Ils étaient trois. La référence était assez classe et... et... il n'avait pas d'autre idée. Emilien traduisit ses pensées, en se donnant, à l'instar de Samael, un air détaché par crainte sans doute que l'on prenne au sérieux quelque chose qui, bien qu'il soit pensé, paraîtrait ridicule. Isaac connaissait bien ce type de comportement. Il l'adoptait souvent lorsqu'il s'agissait de parler de lui ou de sa famille. Les mousquetaires... Oui. C'était parfait ! Emilien s'était attribué sans préavis le rôle d'Athos. Quel était son rôle dans l'histoire ? Il n'en savait rien, mais Isaac soupçonnait son camarade d'avoir opté pour le personnage le plus valorisé du livre. Bien. Chacun pour soi !

- Alors je serai Aramis ! S'exclama-t-il vivement, et, se tournant vers Samael avec un air taquin : dis Sammy, tu permets que je t'appelle Porthos ?

La première fois qu'il s'était adressé au jeune garçon « c'est quoi ton petit nom ? » avait été sa phrase d'accroche. La référence l'amusait, mais il perdit son sourire pour revêtir un air à la fois interrogateur et intéressé lorsque son ami mentionna la Salle sur Demande, une pièce idéale pour préparer leur potion selon ses dires. Ah ? Et pourquoi donc ? Il n'en avait jamais entendu parler de cette salle lui ! Et Emilien ? « C’est quoi, cette salle, au juste ? ». Non. Il n'en savait pas plus que lui. Il pouvait donc se permettre d'afficher son ignorance.

- Oui... C'est quoi ?

[ Absolument pas le temps de cooriger, je fais ça dès demain... ]

Que font trois Serpentards dans leur dortoir quand ils ne se tapent pas ou ne s’insultent pas ? Ils complotent bien sur ! Et c’était une activité infiniment plus intéressante, plus excitante que de se maltraiter à coup de mots cinglants, de phrases insultantes ou toutes autres armes de ce genre. Il n’y avait sans doute que les batailles d’oreillers et de polochons qui rivalisaient… Quelle plaisir que de sentir un traversin s’aplatir sur la tête de son adversaire dans un bruit sourd, provoquant un grognement étouffé et une vengeance souvent immédiate. Mais on s’éloigne du sujet. Le complot. Une potion qu’ils allaient, eux, trois élèves de Serpentard, concocter pour leur bonheur et faire avaler à quelqu’un d’autre pour son malheur et leur intérêt personnel.

Leur choix semblait tendre plutôt pour l’instant pour un philtre de confusion qui retirerait à leur victime toutes facultés intellectuelles. Emilien s’était arrêté sur une page qui proposait un gâteau dans lequel ils pourraient verser leur potion et qui aurait tout le temps de se confondre avec le gout de la pate puisqu’il fallait attendre un mois avant de déguster, dans tous les sens du terme. Comme le faisait remarquer Isaac, le niveau ne semblait pas trop dur, il y avait cependant des ingrédients qu’ils devraient se procurer autrement que chez l’apothicaire scolaire… Un sourire d’excitation éclair un instant le visage du Vert et Argent, tandis qu’Aramis questionnait les deux autres sur leurs talents culinaires. A sa question, Samaël haussa les épaules. S’il savait cuisiner ? A peu près. Lorsqu’on était moldu, on était souvent confronté à cette activité, non. Le Serpent haussa alors les épaules avant de répondre :

« Ca m’est déjà arrivé, je pense qu’un gâteau ne me posera pas trop de problème… »

Du moins, c’était ce qu’il pensait. Faire cuir des nouilles et cuisiner un gâteau ne devrait pas être trop différent non ? Facile même ! Si des elfes de maison y arrivaient, Samaël ne voyait pas pourquoi il échouerait. Il lança ensuite l’idée de s’attaquer à un professeur, mais les deux autres, sagement sans doute, semblait penser que c’était encore une action prématurée, qui demandait entrainement et expérience. Le serpent esquissa une moue un peu déçue, avant d’approuver. Bien sur, ils n’avaient pas tort, et il connaissait sa capacité à s’emporter parfois un peu vite, mais l’idée d’humilier Ombrage était quelque chose de trop tentant pour qu’il admette directement la pertinence de la patience de ses camarades. Il ne put cependant s’empêcher de sourire largement alors qu’Isaac affirmait que faire enfler leur cher professeur de Défense ne pourrait que la rendre moins hideuse.

« Ce n’est hélas que trop vrai ! » Renchérit le garçon, en riant. « Un crapaud infirme ne voudrait pas de cette vieille grenouille là. »

Il fut ensuite question de choisir leur victime, autre qu’un professeur donc, et leur choix s’arrêta bien vite sur les Serdaigle qui raflaient tous les points en ce moment, menant la Coupe des Quatre Maisons d’une main de fer. La petite théorie d’Isaac sur les cerveaux surchauffés des oisillons lui tira un sourire amusé, et Samaël acquiesça à nouveau alors que le Vert et Argent ajoutait qu’ils ne pouvaient risquer d’offrir la victoire à Griffondor, en seconde place. Peu lui importait que leur cible sois Rouge ou Bleue, seuls comptaient le résultat et leur complicité.

Puis ce fut Samaël qui proposa ensuite de créer un nom pour leur groupe, et pourquoi un surnom personnel, histoire de renforcer un peu le sentiment de clan, de groupe qui s’installait doucement entre eux. Son idée, bien qu’il en eut peur, ne sembla pas paraitre ridicule aux yeux des deux autres qui approuvèrent. Emilien proposa immédiatement le nom des Trois Mousquetaires, avec cette même nonchalance que Sam avait lui-même employé peu de temps auparavant, et s’attribua le nom d’Athos. Isaac renchérit rapidement, choisissant à son tour son surnom, qui fut celui d’Aramis. Il ne restait pour lui que Porthos, compagnon fidèle et droit, pourvu d'une force herculéenne, mais aussi sans grande délicatesse et vaniteux. Un coup d’œil sur sa musculature moyenne et sa taille encore légère lui tira un sourire amusé, estimant que quiconque connaissant un tant sois peu le mythe des Mousquetaires trouverait bien à redire. Isaac lui demanda alors s’il lui permettait de l’appeler Porthos, sur un ton familier qui lui rappelait leur première véritable discussion.

« On m’appelle Monsieur Porthos. » Répondit-il du tac au tac, avec un sourire suffisant.

Il lui vint alors à l’esprit de proposer la Salle sur Demande comme lieu de fabrication pour leur potion, avec cette fierté qui accompagne une récente découverte. Athos et Aramis eurent l’air interloqués alors qu’il annonçait sa pièce idéale, et ce fut sans se faire prier qu’il leur décrivit avec enthousiasme l’endroit.

« C’est une salle très étrange ! Même pour des gens habitués à la magie, je crois. Elle se situe au septième étage, et, une fois à l’intèrieur, il suffit de penser à ce que l’on souhaite, et cela apparait, comme par magie. » Samaël esquissa une grimace contrite en employant cette expression moldue qui, dans le contexte de Poudlard, ne voulait plus dire grand-chose. « C’est assez impressionnant ! Nous étions dans un salon, et l’espace d’une seconde plus tard, en plein milieu d’une piscine… »

Les yeux expressifs du gamin exprimaient encore l’émerveillement qu’avait pu provoquer cette découverte qu’il ne comprenait toujours pas. Samaël avait vécu toute son enfance dans un monde moldu, et il avait gardé l’habitude de toujours chercher cette explication rationnelle qui rassurait les gens non-magique, face à un étrange évènement. Avec le temps, il pensait s’être habitué à l’idée que la magie était la cause de tant de ces manifestations incongrues, mais la cette Salle, si particulière, l’avait fait retombé dans cette rassurante habitude moldue.

« Je peux vous montrez=r où elle est, si vous voulez. »Finit-il, ne sachant si les deux Serpents le croiraient ou s’ils comprendraient l’ampleur des capacités de la Salle sans l’avoir tester à leur tour.

Emilien avait lu et relu longuement la préparation de la potion, pensivement. En elle-même, elle n’était pas très difficile à préparer, et les trois Serpentard n’étaient pas mauvais en potions … En tout cas lui ne l’était pas. C’était peut-être même la seule matière dans laquelle il pouvait prétendre être doué. Les sortilèges ne lui posaient pas de problème mais il n’avait jamais le courage de persévérer en cas d’échec, il avait complètement décroché des cours de métamorphose depuis que Palumbo leur faisait cours – ce professeur était d’un ennui et d’un ridicule terrifiants – et ne parlons pas de l’histoire de la magie … Mais les potions étaient non seulement un cours sérieux, mais en plus une matière dans laquelle il pouvait réussir. Dès le début, il n’avait pas été mauvais, ce qui l’avait encouragé à s’améliorer, à travailler davantage. De plus, le professeur donnait facilement des points à Serpentard au début du cours, ce qui l’avait poussé à apprendre ses cours plus sérieusement, pour pouvoir répondre à toutes les questions. C’était bien la première fois qu’une matière l’intéressait à ce point, d’ailleurs … A l’école primaire, il n’avait jamais aimé quoi que ce soit. Ça ne l’intéressait pas de répondre aux questions de la maîtresse. Pour quoi faire ? Il n’y avait rien à gagner, sauf à s’attirer les foudres des autres élèves. A Poudlard, certes il n’était pas apprécié des Gryffondor, des Serdaigle ou des Poufsouffle lorsqu’il levait la main en cours de potions. Mais il remportait des points pour Serpentard, et c’était tout ce qui comptait.

Non, la potion n’était pas difficile. Le problème, c’était les ingrédients … Tous n’étaient pas dans leur « petit kit de chimiste », ou plutôt de préparateur en l’occurrence. Bien sûr, le défi précisait qu’il fallait aller chercher dans la réserve de Rogue, mais Emilien aurait préféré qu’il y ait davantage d’ingrédients à leur portée. Comment savoir ce que le professeur aurait enfermé dans son armoire ? Si après ça, il leur manquait encore des choses ? Et surtout, comment fouiller dans la réserve sans se faire prendre ? Certes pendant les travaux pratiques, Rogue laissait son armoire ouverte pour les élèves à qui il manquerait des ingrédients, mais ils ne pouvaient pas y prendre n’importe quoi … Emilien relut la liste encore une fois et il s’arrêta sur un nom. L’essence d’ellébore. Pour lui qui apprenait sagement ses leçons dans cette matière et qui était même du genre à s’avancer, comme un Serdaigle normalement constitué le ferait pour n’importe quel cours, c’était facile. L’essence d’ellébore entrait dans les ingrédients du philtre de paix, destiné à apaiser la personne qui le boit … la personne, ou l’élève stressé qui était à l’infirmerie parce qu’il souffrait de son angoisse. Emilien était persuadé que l’infirmière en avait dans son armoire. Le philtre de paix n’était pas difficile à préparer, elle devait le faire elle-même, donc posséder les ingrédients à l’infirmerie … Ce serait facile à avoir, dans ce cas. Il suffisait de se rendre malade, d’attendre à l’infirmerie de se retrouver seul, et d’aller ouvrir l’armoire dans laquelle elle gardait ses différents flacons. Ça, Emilien en était capable.

Isaac leur demanda alors s’ils savaient cuisiner. Oui, parce que l’intérêt de la potion, c’était qu’on pouvait la mettre dans un gâteau pour la faire avaler à l’élève de leur choix … Euh … Emilien n’était pas sûr de pouvoir réussir un gâteau, mais après tout, c’était du plum-pudding. Un gâteau anglais. Qui dit gâteau anglais, dit gâteau à consistance louche et à forme peu engageante. Peu importait qu’il soit réellement réussi, puisque de toute façon il aurait l’air bizarre. Dans sa petite enfance, Emilien n’avait pas passé beaucoup de temps dans la cuisine. Ses parents n’étaient pas de grands cuisiniers et lui-même, lorsqu’il avait du temps libre, préférait sortir, ou s’enfermer dans sa chambre s’il pleuvait. Certes depuis que sa mère était retournée vivre en Italie, elle se remettait à la cuisine – peut-être que les spécialités de son pays natal étaient plus appétissantes que les plats anglais … — Mais Emilien n’était pas devenu meilleur en cuisine pour autant. Aurait-il su faire des pâtes ? Sûrement pas ! Un gâteau ? A la limite, il suffisait de suivre une recette, ça devait être faisable. Les autres semblaient plus confiants : Sam avait déjà cuisiné, selon ses dires. Bien ! Parce que si Emilien s’y mettait, il n’osait pas imaginer ce que ça donnerait. Le tout serait donc de faire ledit dit gâteau à un élève de Serdaigle, en première ou deuxième année afin qu’ils puissent observer le résultat de ces mois de recherche et de travail – presque – acharné. Evidemment, Emilien pensait à Lucy, mais … Pour le moment, il avait décidé de ne pas lui parler. Ni à elle, ni à Bill, ni à Ashley, ni à Mariana. Quoique pour cette dernière ce n’était pas bien dur.

- Plus ou moins, répondit Emilien à son tour.

Ce qui, en fait, voulait dire « non ». C’est une expression qui revient souvent quand, pour engager la conversation, on vous dit « Machin, t’as fait tes devoirs de latin ? » et que vous répondez « Hmm … Plus ou moins … ». Parce que vous avez fait semblant de les faire, comme d’habitude. Mais Emilien lui, ne faisait pas de latin, chanceux comme il était. Passée la discussion sur Ombrage, on en vint à proposer un nom de groupe. Dans l’esprit d’Emilien, c’était un peu comme signer un pacte entre eux, comme quand les enfants s’amusent à écrire leurs noms côte à côte pour prouver l’existence de leur bande. Pour le moment, ils se contentaient de se réunir pour se « lancer des défis ». Avec un nom, leur groupe prenait une importance plus grande, et on ne pouvait plus en nier l’existence. Le nom des « Trois Mousquetaires » fut adopté aussi bien par Isaac, qui choisit le surnom d’Aramis, que par Samael, qui prit celui qu’il restait, à savoir Porthos. Emilien avait pu s’exprimer le premier, il avait choisi son préféré, à savoir Athos. Le grand le beau le fort l’intelligent le mystérieux. Ils n’avaient pas de d’Artagnan. Pour quoi faire ? Dans le livre, au début, il n’y avait que trois mousquetaires … Le Gascon arrivait ensuite, et était en quelque sorte pris en charge par les trois autres, pour ne devenir mousquetaire que bien plus tard. Les trois Serpentard de deuxième année n’avaient pas Besoin d’un d’Artagnan. S’il se trouvait un jour qu’un autre élève doive entrer dans leurs plans, il n’en serait pas pour autant intégré au groupe …

Samael leur proposa alors la salle sur demande, pour faire leur potion. Emilien ne savait absolument pas de quoi il parlait, et apparemment Isaac non plus. Ils attendirent donc tous les deux des explications de la part de Porthos, qui ne tardèrent pas à venir : c’était une salle sur septième étage, où tout ce que l’on demandait apparaissait. Emilien haussa les sourcils : il n’en avait jamais entendu parler ! Pourtant, ça paraissait être une salle intéressante. Lorsque Samael ajouta « comme par magie », Emilien eut un sourire en coin. Ce n’était pas quelque chose que l’on disait spontanément lorsqu’on avait été élevé par des sorciers. Conclusion, la famille de Porthos était probablement moldue. Chose qui ne se disait pas, à Serpentard, bien entendu, tout comme Emilien ne révélerait pas sa propre situation familiale à n’importe quel élève, surtout de sa maison. Ce pourquoi ils ne parlaient jamais de leurs familles, de leurs vies avant Poudlard, et même s’ils le faisaient, Emilien doutait que ce soit bien sincère et intéressant. Mais il notait chaque détail qui pouvait échapper à ses amis, par curiosité. Pour en revenir à la salle sur demande, Samael proposait de la leur montrer tout de suite. Emilien se tourna vers Isaac pour voir ce qu’il pensait. Après tout, pourquoi pas ! Ils étaient réunis, c’était le moment, même si le couvre-feu ne tarderait pas à être dépassé. Et puis il fallait s’y mettre sérieusement.

- Oui, allons-y ! En plus les autres vont pas tarder à aller se coucher, on sera plus tranquilles là-bas.