La décision de Lynn avait été prise bien longtemps auparavant. Il lui avait fallu plus de temps que prévu pour tout mettre au point et elle venait d'effectuer la dernière ligne droite en acquérant un joli petit appartement au coeur de Londres. La transaction s'était faite dans le plus grand secret et avec toute la discretion possible. L'affaire avait vite été reglée. Lynn n'étant pas encore majeur, le vendeur s'était d'abord méfié, mais devant la somme en liquide qu'elle lui avait donné, avec un petit bonus, il avait volontier fermé les yeux sur ce petit détail. Bien sûr, personne ne devait encore être au courant, afin d'éviter que cela ne parvienne aux oreilles de son frère aîné. En quel cas, elle serait perdue et tout ses efforts et ses sacrifices auraient été vains.

Il lui restait néanmoins quelques petites choses à régler qui lui posaient particulièrement problème. Elle avait prévu de quitter le manoir d'ici quelques semaines, début Juillet. Maintenant qu'elle avait reglé les derniers préparatifs pour mettre sa petite soeur à l'abri et qu'elle s'était acheté, avec une partie de l'héritage de son père, son nouvel appartement, il lui fallait maintenant se protéger. Nul doute que Torin tenterait de la retrouver et de le lui faire payer lorsqu'il comprendrait qu'il s'était fait dupé. Sa fureur serait sans précédents, elle en était persuadée. Bénéficiant de l'aide de ses collègues aux pratiques peu reluisantes, il aurait peu de difficultés à retrouver sa trace et à exercer sa vengeance.

Lynn avait donc décidé de prendre les devants. Elle savait bénéficier d'informations importantes et elle comptait en jouer pour obtenir une protection, même minime du ministère. Bien sûr, elle avait entendu plusieurs fois son frère faire des allusions au caractère "collaborateur" du ministère et de certains de ses membres haut placés, mais elle comptait sur sa chance pour trouver quelqu'un qui n'était pas encore tout à fait corrompu... Tout miser sur le hasard était risqué, mais elle n'avait pas d'autres alternatives. Les sorts de protection qu'elle souhaitait pour son nouveau foyer était d'un niveau autrement plus elevé que le sien, et elle ne pouvait pas se permettre d'attendre davantage. Il fallait le rendre incartable, peut-être choisir un gardien du secret, y interdire le transplanage... beaucoup de choses que même avec un manuel sous les yeux, elle risquait de rater ce qui pouvait s'avérer dangereux. Elle n'avait pas traversé tant d'épreuves pour mourir bêtement à cause d'un sort mal effectué.

Et, dernier point épineux, elle devait s'émanciper. D'après elle, avec un frère mangemort, un père décédé mais mangemort lui-même, et une réputation familliale assez ambigüe, sans compter qu'elle était très mature pour son âge, on ne pouvait pas lui refuser. Encore fallait-il s'adresser à la bonne personne.

Alors qu'elle arrivait devant l'entrée des visiteurs et qu'elle composait le numéro de téléphone lui permettant d'accéder aux visiteurs, Lynn se rememora les personnes auxquelles elle ne devait surtout pas faire appel et celles qu'elle devait tout bonnement éviter. La liste était longue mais Lynn avait une bonne mémoire et avait enregistré tous les noms qu'elle avait pu entendre ou deviner lors des conversations de son frère avec d'autres Mangemorts. Torin étant d'un naturel prudent et avisé il n'avait jamais eu la bêtise de parler ouvertement d'un confrère en donnant son nom, mais ses interlocuteurs ne se donnaient pas toujours cette peine et Lynn en avait profité. Elle savait donc qu'elle devait éviter le bureau des aurors, départemetn qu'elle serait pourtant probablement allé voir en premier...

Secouant la tête, Lynn chassa ces pensées et répondit à la voix qui lui demandait de décliner son nom et le but de sa visite:

"Lynn Bower, demande d'aide ministerielle."

Un petit badge apparu qu'elle s'empressa d'attacher alors qu'elle entrait enfin dans l'immense hall du ministère. Elle était peut-être déjà venu une fois, alors qu'elle n'était encore qu'une enfant, mais elle ne s'en souvenait guère. Il regnait une véritable effervescence dans ces locaux et Lynn imagina que cela devait être infernal de courir dans tout le ministère par les temps qui couraient.

Elle se planta près d'un panneau d'information qu'elle parcouru afin de savoir à quel étage elle devait se rendre.

Le choix était difficile et pourtant primordial. Le seul qui lui paraissait véritablement correspondre à son cas était le département de la justice, mais il contenait également le bureau des aurors qu'elle vouait éviter.

Elle soupira, retourna la situation dans sa tête, relu une 5ème fois le panneau et prit sa décision, empruntant l'un des ascenseurs pour le deuxième étage.

Les portes s'ouvrirent sur un petit couloir au bout duquel se trouvait un secrétariat.

Lynn s'approcha de la vieille femme qui s'y tenait:

"Bonjour, excusez-moi, j'aurais souhaité parlé à quelqu'un qui s'occupe..."

Mais la vieille femme avait déjà scruté le badge de Lynn et, probablement méfiante à cause de son jeune âge, ne la laissa pas terminer:

"Vous n'êtes pas au bon endroit."

Lynn fronça les sourcils. Elle savait où elle était et elle savait que c'était ici qu'elle trouverait de l'aide et pas ailleurs. Alors ça n'allait pas être cette vieille frustrée qui allait l'en empêcher.

"Je crois que si, au contraire, si vous me laissiez simplement avoir une entrevue avec un responsab..."

"Vous êtes au département de la justice, jeune fille, nos employés, le Ministre en tête, ont des choses bien plus importantes à faire que de reçevoir une petite éffrontée qui fait l'école buissonnière ! Maintenant je vous prie de quitter cet étage, nous avons du travail, ici."

Lynn la dévisagea surprise. Elle n'avait pas pensé, qu'effectivement, les examens avaient lieu à cette époque de l'année à Poudlard. L'école n'était de toute façon pas obligatoire et c'était son droit de ne pas y être, mais cela la rendit un instant mélancolique. Elle avait fait son maximum au cours de l'année pour ne pas penser à Poudlard et à ses amis qui lui manquaient or ce n'était pas tous les jours facile... Pour retourner là-bas à la rentrée, elle avait besoin de réussir aujourd'hui. De trouver des alliés prêt à l'aider.

"Ecoutez, je suis Lynn Bower, et j'ai des informations importantes à fournir alors j'exige de parler à quelqu'un immédiatement !" Dit-elle d'une voix volontairement plus forte.

Si cette vieille bique n'appelait pas quelqu'un sur le champ, elle allait faire un scandale, et au moins, quelqu'un serait obligé d'intervenir !

"Je vous préviens si vous ne partez pas immédiatement, j'appelle la sécurité !" Menaça la vieille, outrée.

Le bureau à côté étant pleins d'Auror, Lynn n'avait aucun doute sur la rapidité de l'intervention, mais elle ne céda pas. Reprenant une attitude plus douce, qui lui correspondait davantage, Lynn acquiesça:

"Très bien, faites ce que vous avez à faire, mais je ne bougerai pas d'ici avant d'avoir parlé à quelqu'un de compétent."

Elle croisa les bras et resta debout devant le bureau à fixer la vieille femme avec un regard serein et un sourire innocent. Et voilà, elle n'avait plus qu'à prier Merlin...

Lynn était bien décidée à ne pas bouger tant qu'elle n'aurait pas parlé à quelqu'un (d'autre). Elle se tenait droite et fière devant le bureau de la secrétaire la dévisageant sans scrupules, comme pour la défier d'appeler la sécurité pour une fillette de 15 ans.

Comme elle l'avait esperé le petit tapage avait attiré l'attention et bientôt un homme au port élégant et à la démarche assurée les rejoignit pour s'enquérir de la situation. Lynn se tourna vers lui et reconnu le Directeur du Département ce que confirma très vite la vieille employée dans une exclamation suraïgue de surprise. Quel était son nom déjà ? Hokins ? Howksworld ? Quelque chose comme ça...

Aussitôt le comportement de la vieille employé changea, elle s'empourpa et essaya négligemment de se débarrasser de lui en lui assurant un peu haletante qu'il n'avait pas à se déranger. *Comme si elle avait la situation en main..* pensa Lynn avec une pointe de fierté.

La jeune fille observait la scène avec soulagement. Finalement l'horrible bonne femme n'aurait pas gain de cause et quelqu'un était enclin à l'écouter. Pas n'importe qui d'ailleurs ! Le Directeur lui-même !
Lynn essayait de se remémorer si elle avait entendu quelque chose à son propos récemment quand il posa finalement les yeux sur elle, lui donnant la parole.

Lynn savait qu'elle devait bien choisir ses mots mais il lui était difficile de parler alors qu'ils n'étaient pas seuls, d'autant que la vielle femme devait également adorer les comérages.

"Merci." Dit-elle avec un petit sourire de soulagement.

Elle inspira profondément et finit par dire :

"Je pense être en possession d'informations qui pourraient vous intéresser."

Elle savait que cela allait lui sembler prétention et qu'il finirait par penser que Doris -car tel était en fait le nom affiché sur son bureau- avait raison et qu'elle leur faisait perdre leur temps.

Sans perdre davantage de temps, elle ajouta la seule chose qui pouvait vraiment attirer l'attention et la curiosité du Directeur:

"Je m'appelle Lynn Bower. Je crois que vous avez bien connu mon père..."

Et également ses frères mais il n'était pas nécessaire d'en dire plus. Son ton était pleins de sous-entendus. Elle ne voulait pas en dire plus devant Doris, qui bien sûr, elle aussi, savait forcément qui avait été Devin Bower. Elle lui jeta un regard avant de reporter son attention sur l'homme qui lui faisait face:

"Croyez-moi, nous avons des choses à nous dire..." Murmura-t-elle d'une voix où l'on pouvait presque sentir le desespoir.

*Mais pas ici..*

Il était son dernier espoir, il fallait qu'il l'écoute. Il avait toutes les cartes en main et elle esperait qu'il les jouerai bien... l'enjeu était bien trop important pour perdre maintenant...

Lynn regarda calmement le directeur remettre son employée à sa place et la pria de le suivre ce qu'elle fit docilement. Elle pensa qu'il la menait à son bureau mais elle comprit très vite qu'elle faisait erreur. Visiblement, bien qu'il ait l'air de donner de la valeur aux informations qu'elle disait posséder, il ne souhaitait pas se charger lui-même de les récolter.
Bien sûr Lynn n'avait jamais eu l'intention de s'adresser directement à lui, elle n'était pas assez sotte pour viser aussi haut, mais l'opportunité s'était présentée et elle avait voulu la saisir. Et voilà que finalement d'un air condescendant il lui faisait comprendre que bien qu'il vienne de lui sauver la mise, elle n'avait pas attendre quoi que ce soit de plus de sa part.
Lorsqu'il lui annonça qu'il l'accompagnait au bureau des Aurors, Lynn se figea laissant le juriste prendre quelques pas d'avances avant qu'il ne s'arrête à son tour.

Elle savait parfaitement qu'une grande partie du bureau des Aurors était corrompue. Et il n'y avait que deux explications au fait que cet homme, dont le nom exact lui échappait toujours, l'enmène auprès de ce service. Deux explications totalement contradictoires. Soit il était des leurs et voulait se débarasser d'elle avec discretion et sans avoir à se salir les mains, soit il le faisait en toute bonne foi. Lynn esperait sincèrement que c'était la deuxième solution mais elle n'avait aucun moyen de le découvrir.

"Non." Dit-elle simplement d'un ton ferme qui n'appelait aucune contradiction.

Devant son regard interrogateur, peut-être un peu agacé, elle insista:

"Je regrette mais je ne peux tout simplement pas accepter d'être mise en relation avec des Aurors."

Elle croisa les bras et plongea son regard d'acier dans celui de son aîné, pour qu'il prête une attention toute particuliers aux mots qu'elle allait prononçer:

"J'ai de bonnes raisons de croire que la loyauté de certains de vos collègue devrait être remise en question... Croyez-moi, ce ne sont pas que des accusations en l'air, je sais ce que j'avance."

Essayant de maîtriser les tremblements de sa voix, Lynn décida de jouer sa dernière carte, celle de l'honnêté. Elle ne savait pas à qui elle avait affaire et peut-être se jetait-elle dans la gueule du loup mais elle n'avait plus le choix.

"J'ignore si je peux vous faire confiance, murmura-t-elle en écho à ses propres doutes, mais je n'ai pas le choix. Accordez-moi juste quelques minutes... Je sais que votre temps est précieux mais le mien est compté..."

Elle prit une profonde inspiration, toujours plantée au milieu du couloir et ajouta d'une voix vibrante de sincérité et de peur contenue:

"...je mets ma vie en danger en venant vous trouver, Monsieur le Directeur, et si vous me laisser repartir ainsi vous signez mon arrêt de mort..."

Elle ne plaisantait pas. Elle n'avait jamais été aussi sérieuse...

Lynn savait qu'elle dépassait les limites avec un tel comportement mais l'urgence de son départ lui faisait quelques peu perdre de son assurance et surtout de son savoir-vivre. Elle n'était encore qu'une gamine et de toute évidence, il avait simplement l'impression qu'elle lui faisait perdre son temps. Malgré cela, elle avait titillé sa curiosité et il consentit finalement à la reçevoir. Son visage était impassible tandis qu'ils prenaient le chemin de son bureau. Ils passèrent devant un nouveau secrétariat où d'un simple geste le directeur lui fit comprendre de continuer à vaquer à ses occupations. Elle semblait bien plus compétente -et accesoiremment plus gentille- que la précédente.

Ils arrivèrent enfin à la porte de son bureau où le nom du juriste était annoncé en lettres d'or. Voilà ! Hawkesworth ! Elle n'était pas si loin que ça...

Il lui ouvrit et la laissa entrer. Elle pénétra à l'interieur et tandis qu'il refermait la porte, lui proposa de s'asseoir. C'est ce qu'elle fit et ce n'est qu'une fois installée que la jeune fille commença enfin à se détendre. Peu importait la suite des évènements, elle avait fait tout ce qui était en son pouvoir...
Le visage pâle, fatiguée par le stress et par plusieurs nuits d'insomnie, Lynn repoussa une mèche de cheveux de son visage et reporta son attention sur le juriste.

Il plongea son regard dans le sien et la prévint qu'elle aurait des ennuis si les informations qu'elle souhaitait lui transmettre étaient éronnées ou sans valeurs.

Lynn acquiesça gravement:

"Je comprends."

Elle se doutait bien qu'elle ne pouvait pas impunément déranger le Directeur du Département de la Justice. Si elle le dérangeait pour rien elle devrait en payer les conséquences, mais elle esperait bien que cela ne se serait pas le cas.

Finalement, un silence l'invita à prendre la parole. Lynn inspira profondément et se lança, en regardant Hawkesworth droit dans les yeux, sans ciller:

"Vous n'êtes pas sans savoir que mon Père était un Mangemort. Je sais que son assassinat a fait grand bruit dans les bureaux du Ministère. Mon père était un homme abjecte qui avait bien plus que ses activités de partisants du Seigneur des Ténèbres à se reprocher. Le monde sorcier a eu beaucoup de chance de le perdre avant qu'il n'ai atteint un poste important au sein du ministère. S'il vous faut des informations au sujet de ce qui s'est passé ce jour-là, je suis à votre disposition. Mais ce n'est pas ça qui m'amène, bien que tout cela soit lié à cette histoire..."

"Mes deux frères aînés sont des Mangemorts." Annonça-t-elle le plus directement possible.

Ne voulant pas laisser de blancs distiller le doute sur ses propos, elle s'expliqua:

"Je suis sous la tutelle de Torin depuis la mort de mon père et je vis avec lui au manoir familliale depuis un an. Je sais ce qui se passe. J'entends beaucoup de choses que je ne devrais pas entendre, je vois des gens qui ne devraient pas être là..."

D'un ton d'excuse elle ajouta:

"Le bureau est infiltré. Vous en voulez la preuve ? Je sais que Bradbury est suivi. Je sais même qui est chargé de cette mission, quel en est le but et beaucoup d'autres choses encore...et c'est la raison pour laquelle je ne pouvais pas leur parler. Je ne voulais en aucun cas vous insulter vous ou votre département... Certaines des personnes qui travaillent ici savent qui je suis, certains d'entres elles sont les comparses de mes frères, d'autres sont sous leur contrôle...Je ne pouvais pas prendre de risques..."

Elle se tut, attendant de voir la réaction de son interlocuteur et de répondre aux questions qu'il pourrait être amené à poser. Sa réaction lui permettrait de savoir quelle attitude adopter. Qu'il ai l'air surpris ou non, selon les questions qu'il allait lui poser, elle essairait de deviner si oui ou non il était au courant et par conséquent s'il était l'un d'entre eux... dans quel cas, elle n'aurait plus qu'à fuir... s'il lui en laissait le temps...

Il n'avait pas l'air d'être du "mauvais côté", mais Merlin savait à quel point les apparences pouvaient être trompeuses...