Coeur à prendre... (Terminé)

Avec tous les événements- sa dispute avec Lynn et leur impossible réconciliation, les ennuis de Mathias, notamment- William avait complètement oublié la deuxième sortie à Pré-au-Lard. Il fut étonné, le samedi matin, lorsque ses camarades de Gryffondor la lui rappelèrent à la table du petit déjeuner... Le rouquin termina rapidement son repas et remonta à toutes jambes pour prendre sa cape et sa bourse dans son dortoir. Dire qu'il avait envisagé de passer la journée à la bibliothèque... Il serait mieux au village, pour sûr.
Son pas manquait cependant de conviction lorsqu'il prit la route de Pré-au-Lard, après les contrôles rusardiens. Il repensait à la première sortie qu'il avait faite, quelques semaines auparavant, en compagnie de Lynn. Bien sûr, ce serait moins bien tout seul...
Mais il ne tenait qu'à lui de ne pas rester tout seul, pensa-t-il soudain. Rien ne l'obligeait à se morfondre en pensant à Lynn- c'était fini entre eux, il fallait l'admettre. Elle ne lui avait plus adressé la parole depuis qu'ils s'étaient vus dans la salle sur demande, et le préfet en avait d'abord souffert... avant de décider qu'il s'en fichait. Pas question de continuer à se faire du mal pour une fille qui ne se souciait pas de lui. Qu'elle reste donc avec son frère bien-aimé, puisque c'était le garçon le plus important pour elle...
Fort de ces résolutions, William accéléra un peu, resserrant autour de son cou son écharpe aux couleurs de Gryffondor. Des tas d'élèves se trouvaient déjà au village, l'idéal pour faire des rencontres...
Pourtant, en arrivant à Pré-au-Lard, le jeune homme ne prit pas la direction des commerces, mais celle de la cabane hurlante. Il s'était toujours demandé si la demeure était réellement hantée... il irait voir ce matin même. Les filles aiment bien les garçons courageux... ça lui ferait quelque chose à raconter.
Le rouquin enjamba sans peine la barrière à demi-écroulée autour de la bâtisse, et s'avança vers la Cabane. Sa baguette en main, il poussa la porte et fit quelques pas dans la poussière...

Rien. Pas un fantôme.

Il se déplaça silencieusement, le coeur battant à tout rompre. Il explora ainsi tout le rez-de-chaussée, et il en était venu à la conclusion que la maison n'avait jamais abrité de fantôme, lorsqu'un craquement derrière lui le fit sursauter.

Une sortie à Pré-au-lard. Avec tous les décrets qui étaient sortis cette année, Aïlin s'étonnait de voir que les élèves avaient encore la possibilité de mettre un pied dehors. Enfin, s'était-il dit, cela ne lui ferait pas de mal, compte tenue de l'humeur irrémédiablement morose dans laquelle il évoluait depuis plusieurs jours. Et sa surchage de travail ne l'aidait pas à se sentir mieux.
C'est donc sans vraiment de joie mais avec un effort de volonté que le jeune homme se rangea dans l'immense queue d'élève qui attendait le contrôle de Rusard afin de pouvoir enfin quitter les murs de Poudlard, devenus horriblement étouffants ces dernières semaines.
Aïlin aurait apprécié trouver Clarisse dans la file, qu'il n'avait pas vu de la journée, et qu'il voyait rarement ces derniers temps, à cause d'un des décrets d'Ombrage interdisant un garçon de se tenir à moins de 20 centimètres d'une fille...! Au moins, à pré-au-lard, il était plus facile d'éviter les membres de la Brigade Inquisitoriale.

Enfin, même après avoir passé l'épreuve de contrôle de Rusard et s'être engouffré dans la ville animée, Aïlin ne parvint pas à trouver Clarisse du regard. Encore moins enthousiaste, il se laissa porter hors de la masse compacte de la foule d'élève qui innondait la rue principale.
Comme il en était depuis le début de l'année, le monde et le bruit finissait par l'exaspérer. Seul, il préfèrait fuir l'ambiance festive des rues d'un pas pressé.

Après plusieurs longues minutes à marcher, une vieille bâtisse à l'aspect délabré se profila à l'horizon : la cabane hurlante. Le jeune Bower en avait déjà entendu, mais ne s'en était jamais approché. Non pas qu'il en ait une quelconque crainte, mais plutôt parce que ce genre de racontard ne l'interressaient ni ne l'impressionaient. Un mauvais esprit, il y en avait déjà un à Poudlard : Peeves. A part les blagues douteuses qu'il faisait, était-il si terrible que cela ? Non, le Serdaigle se demandait donc pourquoi tant d'élève frissonaient de s'approcher de cette cabane miteuse. Cabane qui, d'ailleurs ferait un bon lieu de recueillement, pour lui...

C'est avec cette idée en tête qu'Aïlin s'approcha. Les fenêtres étaient scellées par des planches en bois et la porte ne semblait pas très encline à s'ouvrir. Etrange, tout de même. Pourquoi toutes les entrées avaient été bloquées ? Peut-être qu'après tout, les racontars avaient une once de vérité, au moins sur le fait que la cabane avait un jour, même si ça ne devait plus être d'actualité, abrité quelque chose...
Un coup d'épaule lui permit d'ouvrir la porte tout à l'heure réticente et la poussière lui prit la gorge et s'engouffra désagréable dans ses narines. Une chose était sûre, la cabane n'avait plus dû servir depuis des décennies, pensa-t-il tandis que son regard s'habituait à la pénombre et observait le mobilier brisé et la poussière épaisse. Il referma la porte d'un coup sec, faisant ainsi grincer toute la maison, et après un nouveau regard autour de lui, conclut que la cabane hurlante n'était rien d'autre q'une vieille bâtisse abandonnée, impressionant les élèves en mal de sensations fortes. Un sourire vaguement amusé passa sur son visage : combien d'élèves s'étaient lancé le pari d'entrer dans la cabane, et combien avaient osés ? Tout ça pour une rumeur qui n'avait à l'heure actuelle aucune raison d'être...
Une araignée lui tomba sur l'épaule qu'il écarta d'un mouvement de main tandis qu'il visitait le rez-de-chaussée. Un regard aux escaliers branlants l'avait dissuadé d'essayer de les grimper : le bois devait sûrement être rongé par les nuisibles, et si Aïlin n'avait aucune crainte de trouver autre chose que des araignées et de la poussière, il ne voulait pas courir un risque stupide en empruntant des marches vermoulues.

Dans un coin de la salle, enfoui dans la pénombre, se devinait la silhouette d'un fauteuil vers lequel Aïlin s'avança. En s'approchant, il trébucha sur une planche de parquet gondelée. Sa main partant en avant se posa directement sur un accoudoir recouvert de tissu désagréable au toucher. Sous ses doigts, la matière était sale, mais ne semblait pas faire partie intégrante du vieux siège. Un coup sec vers lui lui permit de retirer un plaid libérant quantité de poussière suffocante qui fit tousser le jeune homme.
Ce n'était pas un luxe de confort, pensa-t-il, mais un rire noir s'échappa de sa gorge tandis qu'il s'imaginait la cabane hurlante toujours plus chaleureuse que le manoir Bower.

A peine s'était-il installé dans le fauteuil en poussant un soupir que la porte s'ouvrit à nouveau. Se levant d'un bon, plus déçu par une intrusion que surprit.
Le rayon de lumière qui s'était infiltré dans la cabane s'estompa mais, là dans le coin de la pièce, pas trop loin de la porte, Aïlin avait put reconnaître le dos et les cheveux roux... William... Un rictus passa sur ses lèvres et il se laissa lourdement retomber dans le fauteuil, non sans faire grincer le parquet. Dans la pénombre, il put deviner le sursaut effrayé de Craig. Sans qu'il ne puisse le retenir, un court rire moqueur s'échappa de sa gorge. Craig, malgré les remords dont il avait fait preuve ces derniers jours, rien que la présence de ce personnage lui rappelait toute la rancoeur qu'il lui vouait. Sa présence l'exaspérait, et il se rendit compte qu'il était bien la dernière personne qu'il aurait aimé voir.
Aussi, sans un mot, il détourna la tête sans pouvoir faire disparaître la grimace qui déformait le coin de sa bouche...

En entendant grincer quelque chose, William avait sursauté, mais aussi levé sa baguette comme pour attaquer. Il ne savait pas à quoi il fallait s'attendre dans cette demeure- des fantômes, certainement pas, et de toute façon, les fantômes ne craignent guère les baguettes magiques... Un rat, peut-être, un simple rat qui aurait détalé en faisant craquer le parquet...
Un rire guttural s'éleva dans le coin, et William ne reconnut pas immédiatement la personne qui riait ainsi. Il marmonna la formule qui éclaira le bout de sa baguette, projetant un rai de lumière sur le visage dédaigneux d'Aïlin Bower... Finalement, il ne s'était pas trompé en pensant à un rat. Le Serdaigle ne valait pas beaucoup plus cher...
Nonchalamment installé sur un riche fauteuil mangé aux mites, dans la posture d'un prince (mais d'un prince environné de poussière et de saleté), Aïlin regardait William du coin de l'oeil, une grimace dégoûtée sur le visage. De son côté, le rouquin observait son camarade avec hostilité, comme si rien n'avait pu lui faire davantage plaisir que de le réduire en charpie... Mais il ne bougea pas, et se contenta de lâcher:

-Tiens, Bower.

Il avait presque craché ce nom, tant il l'avait prononcé avec mépris... C'était plus fort que lui. Voir Aïlin le mettait en rage. Cet idiot avait gâché l'un des meilleurs moments de sa vie, et il rendait à présent impossible toute réconciliation avec Lynn... Il devait être bien content du mal qu'il avait fait. William enchaîna:

-Toujours dans les endroits les plus conviviaux, à ce que je vois...

Il imaginait sans peine la famille Bower dans un château sans fenêtres, dévoré d'humidité et parcouru par des serviteurs fantomatiques... Ils ne pouvaient pas vivre dans une jolie maison lumineuse et calme, avec un jardin fleuri... A cette pensée, William eut un sourire, en imaginant les deux fils Bower qu'il connaissait arrosant les géraniums- non, impossible...
Aïlin avait ostensiblement détourné la tête, et Will lui trouva soudain une forte ressemblance avec Lynn. De profil, cela sautait aux yeux. Son regard s'attarda sur ce visage si semblable à celui de la brune, et il sentit son coeur cogner frénétiquement contre ses côtes....
Le jeune homme avait momentanément oublié sa baguette magique, pointée sur le visage d'Aïlin. Une telle attitude pouvait être interprétée comme de l'hostilité ouverte- d'ailleurs, elle n'en était pas loin. La dernière fois qu'ils s'étaient vus, les deux garçons s'étaient battus, malgré les cris de Lynn. Cette fois, personne n'était là pour les séparer...

Aïlin prit une longue inspiration qu'il bloqua dans ses poumons. Entendre cracher son nom de la sorte était une hostilité qui le visait lui, et même s'il ne tenait pas à ce nom qu'il portait et porterait toute sa vie durant, l'insulte avait fait redoubler les battements colériques de son coeur. Ses yeux se fermèrent un instant, le coin de sa lèvre trembla, crispée, mais il ne répondit rien, se contentant seulement de relacher sa respiration dans un souffle seulement audible pour une oreille attentive.

- Je peux te retourner la constatation, j'ai autant le droit de chercher le calme que toi, je crois, non ?
Répliqua-t-il le plus calmement qu'il le pouvait, donnant alors à sa voix une note de sècheresse et de lenteur qui mettaient en valeur la mesure utilisée pour formuler ses mots.

Malgré la colère qui s'était éveillée à nouveau, il avait réussit à s'empêcher d'ouvrir de nouvelles hostilités, évitant de pousser le vice à demander comment allait Lynn. Après cette effort de volonté, il se força une nouvelle fois pour tourner la tête vers William.
Ses lèvres étaient pincées, son regard avait une lueur hostile étouffée au fin fond de ses yeux bleus, ces derniers s'attardant d'ailleurs sur la baguette pointée vers lui. IL prit une nouvelle inspiration et posa ses deux mains sur les accoudoirs, comme pour mettre en évidence le fait qu'il était désarmé et que sa baguette, si elle se trouvait dans la poche de son élégante robe de sorcier indigo, ne risquait pas de quitter l'endroit où elle était rangée pour le moment. Qu'il attaque, si cela lui faisait plaisir ! Il l'attendait de pied ferme. Cette fois, Lynn n'était pas là, et il le sentait, si William tentait quoi que se soit contre sa personne, il ne retiendrait plus ses coups. Mais il n'attaquerait pas le premier, il se le devait, au moins pour sa soeur, il ne le pouvait et ne le voulait pas.

- Encore en train de m'agresser hein... Te gêne pas, je suis désarmé, tu vois je n'ai même pas envie de prendre ma baguette...

Il fronça légèrement les sourcils tandis qu'une mimique quelque peu méprisante déformait son visage. S'il retenait ses mots, c'était par respect pour sa soeur, pour éviter de la perdre elle, qu'il n'avait plus osé contacter depuis l'altercation qu'il avait eu avec William en sa présence.

- Mais c'est à tes risques et périls, personne ne viendra nous chercher ici, personne ne peut nous entendre et si c'est le cas, ils seraient assez stupides pour penser qu'il s'agit de fantômes enragés...

La conversation entre les deux jeunes gens promettait d'être vraiment charmante et détendue... En quelques mots, ils avaient réussi à exprimer toute leur hostilité, tout leur mépris. William ne releva pas la réponse de son interlocuteur, mais il avait bien perçu toute la sècheresse que l'autre avait mise dans ces quelques mots... Aïlin lui avait déjà parlé de cette façon, au stade de Quidditch, et aussi dans la forêt interdite, la nuit où il avait trouvé le rouquin cueillant des fleurs... Des fleurs pour elle... La gorge de William se serra, et ses doigts se crispèrent sur sa baguette.
Aïlin observait tranquillement la baguette en question, ses deux mains bien à plat sur les accoudoirs de son fauteuil. Lorsqu'il déclara que William l'agressait, un éclat de rire narquois franchit les lèvres du rouquin, qui répliqua:

-T'agresser... pauvre petite chose, il ne t'en faut pas beaucoup pour te sentir agressé...

Il n'abaissa pas sa baguette, mais ne fit aucun geste d'attaque. Si Aïlin se sentait agressé simplement parce que le préfet tenait sa baguette de façon à voir son adversaire éventuel, qu'il allume sa propre baguette, et les agressions seraient égales... Will n'avait aucune intention de donner satisfaction au jeune Bower- après tout, si la lumière le gênait, il n'avait qu'à se lever, et elle ne l'importunerait plus. Car parler debout à un type confortablement installé dans un fauteuil ne plaisait pas du tout à William... Il se sentait inférieur, un peu comme un domestique.
Il serra les dents quand Aïlin l'invita à attaquer. Ce n'était pas l'envie qui lui manquait, mais cette buse ne valait pas la peine qu'il s'abaisse à lui jeter un sort... Le jeune préfet gratifia le Serdaigle d'un sourire condescendant et rétorqua:

-T'en fais pas, je n'ai pas l'intention de me salir les doigts avec toi... Un pauvre petit bout de chou comme toi, je m'en voudrais... n'oublions pas que je t'ai déjà agressé...

Il mit sur ce dernier mot l'intonation la plus déplaisante qu'il put, pour le simple plaisir de blesser Aïlin. Il n'avait jamais imaginé qu'un Bower, un de ces sorciers si fiers de leur sang, soit une femmelette...

A la vue du creux qui se formait autour de ses doigts, sur les accoudoirs, on pouvait bien constater la crispation d'Aïlin, alors qu'il était assit sur son siège. Ses yeux lançaient des étincelles malgré l'air tranquille qu'il tentait d'arborer, trahit par eu et le pli de sa bouche.

- Ce n'est pas moi qui crache mes mots, Craig.

Il avait prononcé son nom sur un ton dénué d'émotions, cherchant ainsi à marquer la différence de ton entre lui et William. La répartie piqua sévèrement son orgueil, mais alors qu'il eut un mouvement rapide de buste, comme s'il allait partir en avant pour se lever, il se ravisa et cala de force son dos contre le dossier du fauteuil. Tout cela était ridicule. Qu'il le frappe, s'il en avait envie, mais tout ce qu'il dirait ne changerait rien, s'envoyer des piques ne feraient que retarder le moment où il ne pourraient s'empêcher, ni l'un ni l'autre, d'en venir aux mains.

- C'est vrai, tu préfères attaquer quand l'autre à le dos tourné, j'oubliais.
Ne put-il cependant s'empêcher de rétorquer, non sans lui lancer un sourire mauvais.
- Pourquoi tu n'irais pas voir ailleurs dans ce cas ? Je n'ai pas envie de perdre mon temps avec toi, Craig. Surtout pas à ce petit jeu là, c'est ridicule.

Alors qu'il croisait les jambes, Aïlin semblait avoir reprit contenance et sérieux. C'était vrai, si beaucoup se sentaient fort et fiers à tenir tête verbalement, s'amusant à chercher le point sensible de l'autre, Aïlin n'était pas de ces personnes qui aimaient tenter de briser l'autre par une joute verbale ridicule. S'ils devaient en finir, se serait en hommes, pas cachés derrière des mots en attendant que l'adversaire craque, et son regard perçant tentait de le faire comprendre à William.
Il avait trop subit, trop souffert, pour perdre du temps en vaints pseudos affrontements visant à clouer le bec de l'autre. A ses yeux, William avait même l'air d'un pauvre coq aventuré hors de sa basse-cour. Cela l'énervait au plus haut point.

- Si tu n'as pas passé l'âge, moi si, et tu me fatigue, j'ai assez de gens sur le dos comme ça. Sors d'ici si tu n'es pas foutu de faire quelque chose d'utile.

William constata avec satisfaction qu'Aïlin, malgré ses efforts, commençait à se laisser gagner par l'exaspération. Il crispait les mains sur les accoudoirs du fauteuil et parlait, lui aussi, sur un ton tendu, irrité. Il fit remarquer à Will qui lui ne crachait pas ses mots- et Will ne répondit rien. Il aurait pu dire qu'il se bornait à prononcer le nom de Bower avec tout le dédain qu'il méritait, mais il n'en eut pas le temps. Aïlin continuait de parler, et son accusation toucha William en plein dans le mille. Attaquer par derrière... lui? Où avait-on vu ça? Où avait-on vu que lui, William Craig, était un lâche? Résistant à l'envie de se jeter sur le Serdaigle, Will s'obligea à répondre d'une voix calme:

-C'est ça... et toi, comme tout Bower (à nouveau, il prononça le nom avec mépris) qui se respecte, tu préfères taper sur les filles...

L'accusation était fondée ; Will avait vu Aïlin brutaliser Lynn- même si le Serdaigle avait prétendu y avoir été obligé. Le Gryffondor se doutait que c'était la meilleure façon de faire sortir Bower de ses gonds, mais puisqu'on en était aux basses attaques...
Visiblement, Aïlin ne voulait pas utiliser sa baguette magique. William, quant à lui, n'avait aucune intention de ranger la sienne ; et il n'avait pas non plus l'intention d'obéir à Bower en allant voir ailleurs.
La phase préliminaire était terminée. Les deux adolescents s'étaient lancé à la tête assez d'accusations graves pour ne plus rien avoir à se dire.

Là, William venait de toucher Aïlin en plein dans une plaie à peine refermée. Malgré tout ce qu'il pensait, malgré le fait qu'il n'avait pas envie de se livrer à un combat de jeunes coqs, l'adolescent bondit hors de son siège et s'immobilisa, penché dans la direction de Craig, comme s'il s'était stoppé net avant d'en faire plus.

Plus pâle, il dévisagea William comme l'on regarde une personne qui venait de dépasser une frontière à ne pas franchir. Comment osait-il remettre ça sur le tapis ?! N'en avait-il pas assez bavé ?!
Une nouvelle inspiration se bloqua dans sa gorge, cette fois trahit par le son de l'oxygène que l'on inspire avec force. Il aurait aimé lui répondre, les mots lui brûlait les lèvres, mais une voix dans son esprit criait d'une petite voix de ne pas faire ça, il devait lui faire comprendre, lui expliquer une bonne foi pour toute, faire rentrer l'information dans son crâne : il n'y était pour rien.

- A la différence que tu n'as pas eu besoin de te retrouver sous imperium pour me sauter dessus alors que je ne m'y attendais pas. Tu sais ce que c'est l'imperium, Craig, ou même ça tu n'es pas capable de le comprendre ?

Le ton de sa voix s'élevait au fur et à mesure que les mots défilaient hors de sa bouche, et avant même d'avoir prononcé le dernier, il s'était avancé d'un pas et avait tenté d'attrapé le poigner de William pour le tirer vers lui tout en mettant la pointe de la baguette du Gryffondor loin de son torse.

- Peut-être que tu veux que je te fasse un dessin sur ce qu'il s'est passé, ou que je te retourne le sort pour que tu comprenne ce que ça fait ?

La menace n'avait pas l'air d'être en l'air, les yeux d'Aïlin s'étaient plissés, noirs de toute la colère et la rancoeur qu'il éprouvait pour William de lui avoir reproché encore une fois cela.

- Quand on ne sait pas de quoi on parle, on se la ferme, Craig.
Lança-t-il d'un ton plein de sècheresse avant de lui lacher le poignet sans douceur, mais sans brutaliser outre mesure le rouge et or. Ca allait, les affrontement physiques, il s'était promit, pour Lynn, de ne pas recommencer le premier.
Tout à sa colère, il n'avait même pas relevé le fait qu'il en avait beaucoup dit, et des mots qu'il ne pourrait peut-être pas rattraper par la suite...

Physiquement, William ne pouvait pas grand-chose contre Aïlin. La croissance du rouquin était plutôt lente, de sorte qu'il était l'un des troisième année les plus petits, ce qui n'était pas peu dire. Il avait plutôt la carrure d'un garçon de onze ans, et à côté de lui, le Serdaigle faisait figure de colosse. Mais William rattrapait sa petite taille par sa vivacité un peu teigneuse, et se battre à mains nues ne lui faisait pas peur. Il avait assez eu l'occasion de le faire au cours de sa scolarité moldue, sur les terrains et dans les vestiaires sportifs, sous l'égide d'un professeur un peu réactionnaire selon lequel "ça leur forge le caractère"...
Aïlin venait de saisir le poignet de William, et il écartait sa baguette magique tout en parlant. Encore cette histoire d'Imperium... Il remettait ça : il n'était pas responsable de ses actes, il avait été forcé... Will ne savait pas s'il devait le croire ou non- depuis la dernière fois, il avait appris que la famille Bower comportait des Mangemorts, ce qui tendait à accréditer l'histoire du Sortilège Impardonnable. Mais cela n'expliquait pas tout, surtout pas l'attitude d'Aïlin sur le terrain de Quidditch. Sans se soucier des conséquences de ce qu'il allait dire, William lança:

-Et j'imagine que tu étais encore sous Imperium quand tu es venu mettre ton nez dans des affaires qui ne te concernaient pas? Je suppose que tu es content de ce que tu as fait... quel déshonneur pour la famille Bower, un Sang-de-Bourbe a osé embrasser Lynn...

C'est exactement ce qu'aurait dit Ultan, si c'était lui qui avait surpris les deux adolescents. Aïlin ne l'avait pas dit, mais Will n'en avait pas moins interprété sa réaction violente comme un rejet à l'encontre d'un inférieur... un fils de Moldus qui osait s'approcher d'une sorcière au sang pur!
La voix de William tremblait légèrement à présent- pas de colère, pas de rage, mais de tristesse et d'humiliation. Le souvenir de cette soirée était encore vif dans sa mémoire, incroyablement précis... Les deux baisers timides échangés avec Lynn (timides, mais si agréables) ; l'arrivée d'Aïlin ; la bagarre... et la tristesse qui avait suivi, et qui était d'autant plus forte que le moment agréable était précis dans l'esprit du rouquin.
William recula d'un pas, sans cesser d'observer Aïlin, et il reprit d'une voix sourde:

-J'imagine qu'ils t'ont félicité... Ultan, par exemple... même si tu as encore été trop tendre, tu as au moins éloigné le Sang-de-Bourbe... Il doit être content...

Et voilà, encore une fois William ne le croyait pas et s'entêtait à tenir tête alors qu'il ne savait rien à l'histoire. Comportement typique de l'ignorant qui veut avoir raison. La colère fourmillait au creux du ventre du jeune Bower qui serra les dents avant de répliquer d'un ton sec :

- Non, je savais ce que je faisais. A ton comportement, j'ai l'impression que j'ai eu raison finalement.

Mais quand William insinua qu'il ne l'avait chassé que parce qu'il était un sang-de-bourbe, sa vue sur la situation sembla chavirer, puis se retourner violemment. Il se recula légèrement, les yeux écarquillés cette fois de stupeur. William croyait-il vraiment qu'il entretenait les même préjugés que ses frères ? Pensait-il vraiment que sa présence le dégoûtait, qu'il le considérait comme inférieur à lui, lui qui n'était même pas sang-pur ?!

- Tu te trompes complètement.

Répliqua-t-il, sur la défensive. Mais le rouge et or continuait, laissant aller toute la rancoeur qu'il lui vouait et Aïlin s'en sentit plus blessé que n'importe quelle insulte sur son nom. Comment pouvait-il penser une chose pareil, quand avait-il put laisser entendre qu'il méprisait les sang-de-bourbes ? Il n'était pas comme ça, il serait temps que le Gryffondor s'en rende compte !

- Ce n'est pas pour ça que je t'ai éloigné d'elle ! C'est ma soeur, tu ne comprend pas ? Tu peux être Merlin où un troll, ça ne fait aucune différence ! Lynn est tout pour moi, je ne veux pas que tu la fasse souffrir...

Etonné par ses propres mots, Aïlin se recula d'un pas, avant de froncer les sourcils et d'enchaîner, sans laisser à William le loisir de reprendre la parole.

- Et tu l'as fait, sous prétexte que j'ai mal réagit tu t'en ai prit à elle comme si elle était responsable. Si je n'avais rien fait, je suppose qu'un jour ou l'autre tu te serais retourné contre elle de la même façon, toi et on petit esprit buté et fermé.

Aïlin revoyait encore la façon dont William s'était retourné contre Lynn, dont il l'avait bousculé sans réelle raison d'agir ainsi à son encontre. Le ton sec qu'il avait employé n'était pas de trop pour lui rappeler l'étendue de son erreur.

- Et le fait que tu sois un sang-de-bourbe comme tu le dis si bien ne m'interresse pas, je m'en fou, comme de mon premier sort. Mais peu m'importe ta paranoïa et ce que tu pense de moi, tout ce dont je me soucie, c'est d'elle.

Cette fois, il espérait avoir été assez clair, mais son regard planté sur William semblait s'attendre à ce que ce dernier vienne buter à nouveau contre ses mots sans les comprendre, tel une vague colérique qui s'écrase sur les rochers.

Incrédule, William écouta la réponse d'Aïlin- et une étrange lassitude s'empara de lui à mesure que le Serdaigle parlait. Ainsi, il ne s'en était pas pris à lui à cause de ses origines... Il disait même qu'il était paranoïaque, et on ne pouvait pas lui donner entièrement tort. Depuis son entrée à Poudlard, et surtoit dans l'équipe de Quidditch de Gryffondor, Will en avait tant entendu qu'il en était venu à anticiper les insultes- et Sang-de-Bourbe était la plus fréquente. Il avait été tellement blessé les premières fois où il s'était entendu traiter ainsi... il avait fini par se donner l'air de celui que rien n'atteint, mais ces insultes lui faisaient plus de mal qu'il ne voulait bien l'admettre... La preuve : il les voyait là où elles n'étaient pas.
Aïlin parlait rapidement, comme s'il avait peur que William l'interrompe, mais le rouquin n'en avait aucune envie. Les explications du Serdaigle le mettaient au désespoir, et il songea avec détresse que son interlocuteur avait raison... Premier pas vers la capitulation : penser que l'adversaire a raison.
Soudain très abattu, William se laissa tomber sur le sol, faisant voler un petit nuage de poussière autour de lui. Il avait été si sûr d'être victime de l'éternel préjugé anti-Moldus... mais le ton d'Aïlin était sincère, et il voyait juste en disant que le Gryffondor était parano. Et s'il était en train de devenir fou? il commençait par se faire insulter, puis trouvait des insultes là où elles n'existaient pas, et pour finir devenait un fou dangereux... ça expliquerait beaucoup de choses...
Il avait oublié sa baguette magique dans sa main droite, oublié son envie de sauter à la gorge d'Aïlin. Une seule évidence s'imposait à son esprit : il devrait aller voir Madame Pomfresh, et lui raconter ce qui lui arrivait... Peut-être existait-il un traitement...
Quelque chose, cependant, troublait un peu William dans les propos du Serdaigle. Il leva les yeux vers lui et demanda- d'une voix étouffée qui ne ressemblait plus au ton méprisant qu'il avait affecté jusque-là :

-Je l'embrassais, Aïlin... Tu sais ce que ça veut dire... tu l'as déjà fait... Je n'avais aucune intention de la faire souffrir... Pourquoi as-tu réagi comme ça? Tu ne pensais pas que c'est toi qui allais lui faire du mal? c'est ta soeur, d'accord, mais elle a le droit d'avoir sa vie, non? je ne lui faisais pas de mal...

Non, il n'avait pas le sentiment d'avoir mal agi en embrassant Lynn. Maintenant qu'il y pensait, il se disait qu'il n'aurait pas dû, que ça avait attiré trop d'ennuis- mais il ne pouvait pas se résoudre à s'en vouloir. Il baissa la tête et ajouta, en regardant ses chaussures :

-Et quand tu dis que je m'en suis pris à elle, je t'arrête. Je n'étais pas maître de moi-même... Tu peux comprendre ça, non? Tu veux qu'on te croie quand tu dis que tu as été forcé, alors essaie de me croire aussi... Elle venait de me repousser, de me frapper même, de prendre ton parti... je ne sais pas ce qui m'a pris...

Tout s'était enchaîné si vite que William n'aurait su expliquer ce qui l'avait poussé exactement à se retourner contre Lynn- sinon le fait qu'elle lui avait reproché son attitude, et qu'il s'était senti trahi...

Aïlin s'attendait tellement à ce que William tente de lui prouver par A+B qu'il avait tort et qu'il était un moins que rien qu'il eut l'air démuni lorsque le Gryffondor se laissa tomber sur le sol. Incrédule, il le regarda les sourcils relevés, hésitant sur l'attitude à avoir face à une telle réaction.
Cependant, face à ce geste, sa colère retombait petit à petit, et le pli crispé de sa bouche s'apaisa doucement.
Maintenant, William lui demandait pourquoi il avait réagit comme ça, et la vraie question qu'il se posait tomba entre eux, le rebutant plus que de raison. Pourquoi avait-il réagit comme cela ? Il l'ignorait... Mais jamais, non, il n'avait pensé lui faire du mal en désapprouvant ce comportement.

- Je ne sais pas... C'est ma soeur...

Ne put-il que répondre, sans savoir ce qu'il pouvait bien répondre à cela. A présent, il était troublé, mais la suite des propos de William l'agacèrent légèrement. S'il considérait le petit coup de Lynn comme un acte violent à part entière, comment pouvait-il le comprendre lorsqu'il disait avoir fait des choses contre sa volonté, ou comment pourrait-il un jour se rendre compte de tout ce qu'avait vécu Lynn, et à quel point elle était, au final, fragile ?

- Arrête, elle ne t'as pas vraiment frappé, elle a eu peur c'est tout.
Répliqua-t-il d'un ton mesuré.
- Et... Excuse moi de te dire ça, mais n'imagine pas qu'un jour elle puisse se retourner contre moi, c'est comme ça. On a vécu trop de choses pour qu'elle prenne le parti de qui que se soit d'autre, même de quelqu'un qui l'a embrassé.

De cela, Aïlin en était sûr, il ne pouvait même pas s'imaginer que sa soeur prenne parti contre lui, un jour ou l'autre. Pourquoi, dans quel but ferait-elle ça ? Elle était tout pour lui, et le savait. Se retourner contre lui était la pire blessure qu'elle pouvait lui infliger. Préférer quelqu'un d'autre à elle, il n'en était pas capable, il devait en être de même pour elle, il n'y avait pas de raisons.
A gestes lents, il retourna s'assoir, cette fois sur l'accoudoir même du vieux fauteuil. Il poussa un soupir et sortit sa baguette pour jeter un lumos.
La lumière éclaira son visage creusé, un trait noir se devinait sur sa joue gauche : l'ombre de la fine cicatrice qu'il portait désormais. Il avait l'air fatigué, mais aussi sûr de lui, de ce qu'il disait. Ses yeux bleus se tournèrent en direction de William ; la lueur de colère s'était apaisé, mais avait été remplacé par une étincelle étrange dont la nature ne s'expliquait pas.

- Je n'aurais pas du m'énerver, mais je ne peux pas me forcer à avoir des regrets. Ca m'a mit hors de moi, c'est comme ça. Je ne l'explique pas.

Le dos contre le mur, William rejeta la tête en arrière, les yeux fermés, et enserra ses tempes de ses deux mains. Sa baguette magique, abandonnée au sol, s'éteignit immédiatement, mais le Gryffondor n'y prit pas garde. Une tristesse insondable s'était emparée de lui en écoutant Aïlin, et il n'avait même pas la force de formuler tous les arguments qui passaient dans sa tête. Lynn était sa soeur, certes, mais elle n'en avait pas moins le droit de vivre... Aïlin allait-il l'empêcher de se marier, de fonder une famille, au motif qu'elle était sa soeur? Will pensait tout cela, mais sans le dire. Il était trop accablé, même pour se rendre compte que le sort de Lynn lui importait encore beaucoup...
Gardant les yeux clos, il essaya seulement d'expliquer sa réaction de colère aveugle:

-Je sais bien qu'elle ne m'a pas vraiment frappé... Mais c'était le geste... c'était comme si... non, laisse tomber...

Comment expliquer ce que ce geste avait pu signifier à ses yeux? comment dire l'immense peine qu'il avait ressentie, et aussi la certitude d'avoir été trahi? c'était cela qui l'avait rendu fou, une douleur morale, et pas une douleur physique inexistante. Comment expliquer aussi qu'il ne s'était pas attendu à ce que Lynn prenne parti contre son frère, mais simplement qu'il avait espéré qu'elle ne repousserait pas son ami? Du coup, son geste avait été vraiment terrible pour William... Rouvrant les yeux, il reprit:

-Je sais que je n'aurais pas dû, mais je ne me maîtrisais pas.

Il se leva lentement et ajouta:

-Je ne sais pas si tu me crois, et d'ailleurs je m'en contrefous. De toute façon, tout est fini, on ne se regarde même plus, Lynn et moi. Alors tu crois ce que tu veux, c'est pareil.

Il se baissa pour ramasser sa baguette qu'il fourra dans sa poche, et renifla. S'il devait se mettre à pleurer, il préférait que ce ne soit pas devant Aïlin. Cette histoire lui faisait décidément plus de peine qu'il ne l'avait cru...

-Je ne vais pas te déranger plus longtemps, annonça-t-il d'une voix blanche, en se forçant à ne pas pleurer.

William lui disait de laisser tomber, peut-être imaginait-il qu'Aïlin ne comprendrait pas l'émotion qu'aurait put ressentir William s'il lui expliquait. Mais l'espace d'un instant et malgré lui, il imagina que ce fut Lynn qui se serait retourné d'abord contre lui en lui donnant ce petit coup, comme un gamin mal élevé. Comment aurait-il réagit ? Qu'avait-il lui même ressentit quand Lynn lui avait reproché son comportement ? De la honte, certes, mais de la colère aussi...

- Je ne me maîtrisais pas non plus.
Répondit-il d'une voix grave et calme.

Il observa William se remettre sur pied, et se mordit la lèvres inférieure face aux déclarations de William. Ainsi, comme il l'avait redouté, par sa faute le jeune Craig et sa soeur ne se voyaient plus du tout... Tout ça pour lui, et le pire dans cette histoire, c'est qu'il n'arrivait pas à savoir s'il en était désolé ou satisfait. Les deux sentiments se mélangeaient en lui, mettant la confusion dans son esprit déjà embrouillé par maints problèmes.
Perdu dans ses réflexions, il observa le rouge et or ramasser sa baguette sans vraiment le voir, et n'entendit même pas son reniflement. Que ressentait-il ? S'en voulait-il du chaos qu'il avait créé ? Est-ce que par sa faute, comme l'avait dit William, Lynn souffrait ?

"Je ne vais pas te déranger plus longtemps."
La phrase sortit à peine Aïlin de ses pensées, qui hocha la tête, un air vague peint sur le visage, rendant flous ses yeux.
Mais alors qu'il se rendit compte qu'il était en train de laisser partir William, au risque de laisser sa soeur malheureuse si cela était vraiment le cas, au risque qu'elle lui en veuille si elle apprenait qu'il l'avait laissé partir alors qu'ils étaient tous deux parvenus à entretenir une conversation - courte certes mais sans cris - il se releva souplement de l'accoudoir sur lequel il était installé et tendit une main vers William.
Cette dernière se posa sur son épaule tandis qu'il se détournait, et d'une voix étouffée, le jeune Bower parvint à mettre sa fierté et ses sentiments confus de côté pour murmurer d'une voix étouffée un....

- Attends.

Il eut une légère torsion du poignet pour faire tourner le Gryffondor vers lui, mais il le relacha aussitôt tandis qu'il le regardait dans les yeux, surprit par son propre geste. Malgré ce dernier, on percevait encore une lueur d'hésitation dans son regard. De plus, il ne savait pas quoi lui dire.
Devait-il commencer par être un minimum sincère avec lui ? Il ferait bien sûrement, pour Lynn, pas pour améliorer ses relations avec William ou réconforter ce dernier, mais pour sa soeur qui devait à l'heure qu'il est regretter un instant qu'il lui avait volé.

- Lynn n'aimerait pas savoir que je t'ai laissé partir alors qu'on avait l'occasion de s'expliquer dans le calme. Je n'aurai pas dû non plus m'interposer. C'était si soudain, je ne m'y attendai pas et... Je te l'ai dit, je crois que je ne supporterai pas de vous voir ensemble...

Une nouvelle fois, il se mordit la lèvre, le coeur battant. Pourquoi diable ne supportait-il pas que sa soeur ait une amourette alors que lui même passait la plupart de son temps libre auprès de Clarisse ?

- Et ce n'est pas parce que tu es un enfant de moldu, ça n'a rien à voir, je n'ai jamais eu de telles idées. Mais Lynn en a le droit, elle en a sûrement besoin... Votre désaccord vient de moi alors je...

Il prit une longue inspiration, comme si ce qu'il s'apprêtait à dire était une chose qu'il lui coûtait de dire, et qu'il ne pensait au fond pas. C'était d'ailleurs le cas, mais il savait devoir dire une telle chose, au moins pour elle. Après tout, depuis quand faisait-il attention à ce qu'il pouvait ressentir avant le reste ou plutôt, avant les besoins de sa soeur ?...

- Je dois te dire que je ne m'interposerai plus, si jamais... Mais... Si vous... Si ça doit à nouveau se produire, je te demande de ne pas le montrer devant moi.

C'était tout ce qu'il pouvait demander, ou exiger de William et il le savait, alors, en toute sincérité et sans montrer quelque rancoeur ou colère que se soit, il lui demanda dans l'espoir que le garçon respecte ce besoin. Et tout en espérant au fond de lui qu'ils n'aient pas à se cacher, que Lynn reste la petite fille qu'il avait connu et protégé.

William avait déjà tourné les talons lorsque la main d'Aïlin se referma sur son épaule. Il n'aimait pas du tout ça ; dans la forêt interdite aussi, le Serdaigle l'aavit pris par l'épaule, pour l'obliger à l'écouter et l'empêcher de filer. Allait-il faire de même cette fois? allait-il retenir Will malgré lui (alors que le rouquin s'apprêtait à lui donner satisfaction en partant) pour lui raconter des trucs affreux?... Le Gryffondor pivota et regarda son camarade, qui s'empressa d'ôter sa main de son épaule. C'était mieux, même si ce n'était pas idéal ; William avait envie de partir, de prendre ses jambes à son cou pour mettre le plus de distance possible entre lui et Aïlin... ou plutôt, entre lui et le reste du genre humain. Mais au moins, le jeune Bower ne le retenait plus, il n'avait pas ce geste si désagréable qui donnait à Will le sentiment d'être minuscule....
Aïlin avait mis de l'eau dans son vin. Il déclara qu'il n'aurait pas dû intervenir, ce qui soulagea légèrement William- mais le mal était fait, et les regrets n'y pouvaient rien. Le rouquin hocha brièvement la tête pour montrer qu'il comprenait et qu'il appréciait ce que disait le Serdaigle ; mais il ne trouva rien à répondre, du moins jusqu'à ce qu'Aïlin évoque l'avenir.
"Si ça doit à nouveau se produire"... à ces mots, William leva vers le brun un regard triste. Comment pouvait-il croire un mot de ce qu'il racontait?... Il n'avait donc pas entendu quand Will lui avait dit que c'était fini?... ou alors, il disait cela sans y croire, juste par politesse... Mais c'était une politesse qui faisait de la peine au rouquin. Avec un sourire désabusé, William murmura:

-Ne t'en fais pas, ça ne se reproduira plus.

Ou alors, c'est qu'un cataclysme allait se produire... Lynn et lui ne s'adressaient plus la parole, et leur complicité d'avant était bien loin. A moins d'une intervention dicine, Will ne voyait pas comment ils pourraient jamais reconstruire ce qui s'était effondré avec l'intervention d'Aïlin...
Ils s'étaient tout dit. William fit demi-tour et sortit de la Cabane Hurlante à pas lents, en resserrant son écharpe autour de son cou. Il n'avait plus aucune envie de passer la journée à Pré-au-Lard et il prit la direction du château, avec une lenteur qui en disait long sur son état d'abattement.
Une larme perla au coin de son oeil, mais le rouquin l'attribua au vent froid et il l'essuya rageusement.