Lucy Ann était une fille au grand cœur, et cela la perdrait bien un jour, surtout en ce qui concernait ceux qu’elle aimait. Dans le cas présent, la maxime « trop bon, trop con » lui revenait sans cesse en tête, pendant qu’elle furetait à l’aveuglette dans les lugubres catacombes de l’UMA.
Comment avait-il pu lui faire ça à elle ? Elle si dévouée, qui prenait si bien soin de lui ? La trahir à cause de cette stupide testostérone ? Elle en connaissait un qui n’allait pas tarder à se faire castrer …

Non, elle ne pensait pas à son Manny chéri, mais à son chat, Bizarr.
En effet, elle avait toujours eu pitié de lui, et des traumatismes qu’elle lui infligerait si elle, sa maîtresse adorée, attentait à son intégrité virile de mâle dominant en le faisant castrer. Elle l’avait donc gardé entier, toutes ces années, se jurant à toutes les saisons des amours d’y remédier au plus vite, oubliant sa bonne résolution dès que les choses revenaient à la normale.
L’infernal matou avait une tendance certaine à se comporter comme un rustre, miauler de façon intempestive, se frotter partout et être d’humeur massacrante, mais le plus gros problème était sa tendance à prendre la poudre d’escampette pour courtiser la minette.

En rentrant ce soir là, elle avait trouvé la porte du dortoir ouverte, et son lit vide.

*Et c’est reparti pour un tour !*

Elle s’était donc munie de son géolocalisateur de chat, une boussole ensorcelée qu’elle avait déniché à la ménagerie magique qui lui indiquait dans quelle direction chercher le vil fugueur
Ce gadget pour le moins pratique l’avait tout d’abord mené dans un dédale de couloirs « Biiizaaaaar, où es-tu vilain canaillou ? » avant de passer par le parc « Miiiiiinouuuuu ? T’es où mon pépère ? » et finalement l’emmener dans ces catacombes putrides « Mais t’es où s*****rie de chat à la c**, p***** de b***** de m****? »
Le moins que l’on puisse dire était que l’animal était un Dom Juan actif.

Les vieux murs voûtés avaient une excellente acoustique et réverbéraient très bien les sons, c’est pourquoi elle décida d’arrêter de s’époumoner afin d’éviter de finir muette ET sourde. De plus, il y avait fort à parier qu’avec le ton tout sauf amical qu’avait pris l’étudiante au cours de l’avancement de sa recherche, ça aurait plutôt tendance à le faire fuir qu’autre chose.

*Pff, les catacombes… Tu me déçois là, mon minet… T’es pas du tout romantique sur ce coup-là, tu aurais pu trouver mieux quand même comme endroit pour te la faire, ta minette !*

Elle avançait donc à pas feutrés, sa baguette allumée brandie vers l’avant ainsi que sa boussole, lorsqu’elle entendit du bruit dans un couloir voisin

*Je t’ai eu, sale bête !*
" Qui va là? Montrez-vous, lâche! "
*Heu… Je ne pensais pas être cette sale bête-là !*

Elle pris à droite au prochain couloir, et aperçut un peu plus loin ce qui était vraisemblablement une demoiselle, qui pointait son lumos vers elle de façon plutôt menaçante.

Ha non, y a erreur, moi c’est pas lâche mais Lucy Ann, enchantée ! dit-elle sur un ton plutôt dubitatif, surprise de trouver âme qui vive dans cette partie reculée et totalement glauque de l’UMA.

Tu peux baisser ta baguette et lâcher ta grenade, fit-elle en pointant ce que l’étudiante tenait en main, Je suis là dans un but totalement pacifique, levant son cat-GPS.

Lucy Ann leva les yeux vers l’étudiante d’un air blasé, et soupira :
J’en viens du parc… Et force m’est de constater que soit ce truc est défectueux, soit mon chat a des mœurs sexuelles douteuses. Quoi qu’il en soit, ça m’indique que je suis sur la bonne piste.

Une salve de pensées sur les diverses façon de se venger de l’animal, comme le coller au régime « croquettes allégées 1er prix » eurent le temps de lui traverser l’esprit avant que son interlocutrice aie le temps de poursuivre sur son idée saugrenue de chasse aux trésors.
Perplexe, elle se gratta le nez d’un air abasourdi pendant quelques secondes avant de répondre.
Hmmm… Donc moi j’ai une bonne excuse pour me trouver comme une galérienne dans ce dédale miteux, mais toi tu es une martyre volontaire ! Il a intérêt à valoir le coup ton trésor !

Un nouveau soupir, les yeux cette fois fixés sur les jolies mèches blondes de l’étudiante avant de poursuivre :
Enchantée de faire ta connaissance Rosalie l’aventurière, moi c’est Lucy-Ann la cat-sitter. Je dois avouer que chercher le butin d’une femme pirate dans les catacombes de la fac ne faisait pas partie de mes plans, mais je suppose que retrouver mon chat et l’étriper pour le transformer en paire de moufles peut attendre un peu plus tard, surtout si tu m’aides à le chercher, on ira plus vite… Par contre faudra pas être trop regardante sur le partage de nos trouvailles respectives : si on retrouve ton trésor je veux bien que tu me donnes une bonne vieille bouteille de rhum pirate qui doit être bien millésimée depuis le temps, mais si on retrouve le mien je ne sais pas quoi te proposer… Une moufle en peau de chat ça fait pâle figure à côté de ce qui t’attend ! fit-elle en souriant.

Lucy Ann ou l’art de se retrouver dans des situations improbables. Elle devrait en faire un bouquin un jour. Une petite voix dans sa tête lui criait de passer son chemin et de ne pas s'écarter de sa voie, que cette situation n'allait lui apporter que des choses dont elle se serait volontiers passée. Mais le démon de l'épaule gauche titillait un de ses pires faiblesses: la curiosité. Et puis la vie n'était pas fun si on ne quittait pas les rails de temps en temps... Bon, quitte à se lancer dans cette aventure étrange et zapper quelques cours pour cause de zombiisme aigu le jour suivant, autant se documenter.

En tant que magiebiologiste, je n’y connais strictement rien en matière d’histoire, et mes connaissances en chasse au trésor se limitent à celle des œufs de pâques et des félins aux mœurs légères. Que sais-tu de cette Mimi la Flamboyante ? Est-ce que tu as un plan ou des indications quelconques pour te guider ? Et surtout, as-tu la moindre idée de ce que ce fameux trésor est censé contenir ? demanda-t-elle en fixant Rosalie d’un air interrogateur. Parce que mine de rien, pour avoir préparé ce qui ressemblait à des potions défensives et être à ce point sur le qui-vive, il devait y avoir un truc pas clair là-dedans. Allaient-elles tomber sur une horde de monstres affamés ? Une armée de fantômes vengeurs ?
Théoriquement, celui qui était censé passer un sale quart d’heure était Bizarr, pas question d’inverser les rôles.

Sinon, je ne sais pas où tu comptais avancer tes recherches, mais moi je serais théoriquement censée aller par-là, fit-elle en pointant du bout de sa baguette illuminée un long couloir obscur qui se profilait à leur gauche.

Lucy Ann soupira : Mon chat, oui, c’est une longue histoire… Disons que j’adore le détester, ça sera plus simple.

Elle regarda ensuite l’étudiante farfouiller dans sa paperasse, remarquant qu’au moins elle ne s’était pas lancée dans l’aventure à l’aveuglette, elle avait l’air un minimum préparée, ce qui était assez rassurant… Ou pas. Se lancer à l’aventure, comme ça, « just for fun » avait un petit côté grisant et divertissant, mais dès lors que l’on s’appuyait sur des cartes, des bouquins ou tout autres document « officiels », l’aspect sérieux reprenait le dessus, rendant le butin potentiel aussi tangible que les pièges qui devaient l’entourer. Pas une mauvaise chose si l’on comptait vraiment mettre la main dessus, déjà plus si on tenait à sortir indemne.

Avant qu’elle aie pu dire un mot, Rosalie avait utilisé la potion qu’elle tenait en main pour dézinguer un mur.

*W*** the f*** ? C’est bien ce truc là qu’elle voulait me balancer quand je suis arrivée? Ben ma Lucy, t’as eu sacrément chaud aux fesses…*

L’étudiante se secoua un peu afin de se débarrasser de la poussière et des morceaux de gravats dont l’explosion l’avait recouverte, avant de demander :
Heu… Tu t’es renseignée un peu sur l’architecture de l’UMA avant ? Pas que j’y connaisse grand chose, mais si ce mur avait été porteur, c’est nous qui serions devenus les trésors enfouis ! J’ai pas spécialement l’intention de finir momifiée sous un tas de cailloux moi !

Malheureusement, force lui était de constater que sa comparse avait eu raison, et que malgré l’incongruité de la situation un long couloir se profilait derrière le mur en question. Bizarre, vous avez dit bizarre ? Comme c’est bizarre !

*Quel est le clampin qui s’amuserait à murer des couloirs ?..*

De plus, ce corridor tranchait visiblement avec le reste, il avait l’air beaucoup plus accueillant : plus lumineux, plus olfactivement correct… Trop beau pour être honnête en somme, il ressemblait un peu à la pomme d’Adam : regarde comme je suis beau, comme je suis attrayant, prends-moi… Je te conduirais jusqu’aux enfers.

Malheureusement, avant qu’elle aie le temps de faire part de ses inquiétudes à sa camarade, celle-ci s’était déjà engouffrée dans le couloir… Enfin pas trop longtemps, jusqu’à ce qu’elle disparaisse.

* B**** réveille-toi Lucy, ça va pas là, stop aux hallus*
Au final, elle réalisa assez rapidement que Rosalie ne s’était pas évaporée mais était tombée dans un trou.
* Et m**** ; pour une fois je déteste avoir raison, il était trop beau pour être honnête ce couloir !*
Elle se rapprocha, sans mettre un pied à l’intérieur du vestibule maudit – on ne savait jamais- afin d’entendre ce que sa camarade lui disait.

Ca va, rien de cassé ? Quoi ? Traverser le couloir sans marcher sur les dalles piégées ? Mais je fais comment moi, pour savoir où poser les pieds, c’est pas marqué dessus !

Lucy Ann fronça les sourcils en se grattant la tête. Dans quel pétrin était-elle allé se fourrer ?
Bon, Rosalie n’avait pas l’air trop amochée, c’était déjà ça. Maintenant ne lui restait plus qu’à trouver un moyen d’arriver jusqu’à elle pour lui porter secours.
Elle commença à faire les cent pas devant l’entrée du couloir. Ne pas marcher sur les mauvaises dalles… Un sort de lévitation ? Non, elle aurait du mal à se déplacer après, et ça avait tendance à lui donner le mal de mer. Un sort de détection des pièges ? Non, c’était un truc d’aurors ça, et elle n’en était plus très sure…

Restait une dernière alternative… Un peu bancale certes, mais là tout de suite elle n'avait pas d'autres alternatives en tête.
Brandissant sa baguette, elle exécuta un sort d’apparition, faisant ainsi se matérialiser son vieux balais datant de Poudlard et qui ne lui avait jamais servi depuis. Le transplanage, il n’y a que ça de vrai.
Elle enfourcha donc son vieux balai, priant pour que ça soit comme le vélo, que ça ne s’oublie pas, et avança ainsi dans le couloir, d’un vol mal assuré mais respectant globalement une trajectoire rectiligne. Une fois arrivée au niveau de sa collègue, elle se pencha un peu- mais pas trop quand même, pas question de se casser la figure- pour voir de quoi il en retournait.

He beh, tu t’es pas loupée… Bon, je m’excuse d’avance pour ce que je vais faire, mais là tout de suite j’ai pas d’autres idées.

Après un accio rapide pour récupérer les affaires de la belle qui étaient restés par terre, elle toussota un peu, pris une grande inspiration et :
Mobilicorpus ! pointa sa baguette sur Rosalie, se concentrant pour la faire léviter hors de son trou, se concentrant pour la maintenir dans une position la moins inconfortable possible mais qui au final aurait quand même fait rire n’importe quel observateur extérieur. Fronçant les sourcils, tirant légèrement la langue sous l’effet de la concentration, elle la fit ensuite léviter jusqu’à l’autre bout du couloir, et la pose de façon un peu brutale sur la première marche des escaliers en colimaçon, espérant que cette fois, il n’y aurait pas anguille sous roche, ou plutôt sous marche.
Elle vola ensuite jusqu’à elle, d’une trajectoire digne d’un individu ayant 2g dans le sang, l’effort dont elle venait de faire preuve l’ayant légèrement sonnée. Une fois arrivée à son niveau, elle manqua de tomber de son balai à cause d’une immobilisation ratée, mais réussit à se rattraper in extremis.

Bon alors miss intrépide, je ne sais pas ce que tu comptes faire, mais je refuse de passer devant, c’est clair ?

Lucy Ann était relativement épatée par l’attitude de sa camarade. Elle venait de dégringoler dans un trou au fin fond de catacombes relativement glauques, et à peine un pied posé à terre qu’elle pensait déjà à se remettre en quête, pas de temps de pause ni rien. En voilà une qui tenait la forme !

Si tout se passe bien tu n’auras pas besoin de revenir en plusieurs morceaux, j’ai quelques années (3, ça suffisait pour dire « quelques » non ?) de médicomagie derrière moi, le rafistolage ça me connaît, lança-t-elle d’un ton ironique en calant son vieux balais contre un mur avant le lui tirer la langue – pas à Rosalie, mais au balais. Elle avait vécu des heures détestables dessus, ayant le vertige comme pas permis et surtout volant comme un pied, de grands moments de solitude jusqu’en 5e année où elle avait enfin pu arrêter cette matière de malheur… Elle traça un R.I.P du bout du pied devant lui dans la poussière du sol, qui signifiait non pas « Rest In Peace » (repose en paix) mais « Rot In Pieces » (pourris en morceaux). Une fin digne de l’existence qu’il avait mené.

Une fois son balai « enterré », elle reporta toute son attention sur sa camarade et les étranges gribouillis qu’elle avait mis en évidence sur le mur.
Hmm, tu es sure de ton coup ? Je ne sais pas moi, si je planquais un trésor inestimable quelque part, je mémoriserais le chemin, ou au moins je ferais une carte que je garderais pour moi, je ne laisserais pas trainer d’indices pour les pique-assiettes éventuels qui lorgneraient sur mon butin, au contraire, je mettrais des fausses pistes pour les aiguiller sur des pièges qui les feraient mourir dans d’atroces souffrances ! Tu vois où je veux en venir ? demanda-t-elle d’un air inquiet, voulant s’assurer que sa camarade n’avait pas suivi le célèbre adage sur les blondes et s’était bien renseignée sur cette possible éventualité.

Bon, elle fonçait à présent droit devant, c’est qu’elle devait être sure d’elle après tout…
S’agrippant à sa baguette comme un naufragé à sa bouée de sauvetage, elle suivit alors Rosalie (après tout, c’était elle la guide), aux aguets, interprétant le moindre bruit ou craquement comme suspect et potentiellement capable d’être responsable d’une mort longue et atroce.

Heureusement, rien de ceci ne se produisit (pour le moment), mais les deux jeunes femmes durent changer leur itinéraire de base, le couloir initialement prévu s’avérant être un cul de sac. La blonde exploratrice bifurqua alors vers un autre couloir, qui plaisait bien moins à l’étudiante, sans doute à cause du fait qu’il avait été conçu pour des nains, pardon, des personnes « vertically challenged ».
Ses doigts se resserrèrent alors autour de la baguette, maintenant carrément crispés.

*J’ai jamais été claustro, mais je crois que je vais commencer maintenant, c’est carrément flippant*

Hey, tu crois pas que ?...

Le temps de relever la tête pour s’adresser à sa camarade, et son regard s’échoua sur un fort charmant tableau : le postérieur de l’étudiante, fort bien mis en valeur par la cambrure qu’elle avait pris afin de progresser dans le bas couloir. Certes, le pantalon qu’elle arborait était loin de la mettre au mieux en valeur, mais tout de même, il y a des visions qui vous mettent en émoi lorsque vous ne vous y attendez pas.

Lucy Ann bafouilla quelque chose d’inaudible, puis se ressaisit en toussant.

*Un peu de sérieux que diable, tu es une femme prise, et c’est pas moment de consulter le menu même si tu as le droit en étant au régime !*

Je disais donc, tu es sure que c’est la direction indiquée par les signaux ? Parce qu’à moins que ta Mimi soit un gobelin, je ne vois pas pourquoi elle se serait enquiquinée à faire des passages aussi exigus !

*Peut-être qu’elle voulait séduire un collègue pirate en lui montrant sa chute de rein ?*