-Merci, ça va passer, répondit Will, les dents serrées.

Encore un étirement et la douleur finit par disparaître, ce qui permit au jeune Gryffondor d'adresser un vrai sourire à son amie. Il hocha la tête en écoutant ses explications, secrètement rassuré que la séance de travail n'ait pas été annulée pour des raisons plus graves... Enfin, il ne comprenait toujours pas pourquoi Clarisse parlait d'une si petite voix, mais il n'aurait pas été très poli de le lui demander... autant cela pouvait provenir d'un mauvais hume, chose banale, autant cela pouvait être la marque d'une émotion, ce qui était déjà plus intime. A la question de savoir s'il avait froid, William répondit par la négative, tout en attrapant le petit sac à dos qu'il portait lorsqu'il allait courir. Il en sortit une veste soigneusement pliée, et sourit à son amie pour la remercier de lui avoir rappelé qu'il devait se couvrir. C'est en posant son sac qu'il aperçut le papier- un simple papier blanc, semblait-il. Il le ramassa et le retourna machinalement, découvrant la photo d'un garçon qu'il ne connaissait pas, et qui semblait légèrement plus jeune qu'eux. Il montra l'image à Clarisse en demandant:

-C'est à toi?

Il lui donna la photo et garda le silence un instant. Elle venait de lui parler si gentiment... il était toujours un peu déconcerté lorsque quelqu'un exprimait ainsi ses sentiments, lui à qui on avait appris à les garder secrets. Puis il réfléchit qu'il ne risquait rien à dire ce qu'il pensait... Sans regarder Clarisse, il répondit:

-Moi aussi je suis content de te voir. Il y a un moment qu'on ne s'est pas vus... en-dehors des cours, je veux dire! J'ai été très occupé au premier trimestre, je ne sais pas si ça t'a fait pareil mais j'avais l'impression d'avoir tout oublié pendant les vacances!

C'était bien possible, d'ailleurs. Deux mois sans pratiquer la magie, même s'il avait fait ses devoirs de vacances, lui avaient fait oublier pas mal de choses, qu'il avait vite rattrapées cependant.

A voir Clarisse réagir ainsi, William craignit d'avoir manqué de tact, ou d'avoir découvert un secret inavouable. Pour rougir de cette façon, surtout face à un ami, il fallait une bonne raison! Mais non. Le jeune homme sur la photo était le frère cadet de Clarisse, rien de plus croustillant. S'il avait regardé la photo avec un peu plus d'attention, Will aurait décelé une ressemblance entre la Serdaigle et le garçon de la photo, mais il n'avait guère pris le temps d'examiner le cliché. Le Gryffondor ne laissa rien paraître de sa surprise. Pourquoi Clarisse faisait-elle tant de manières pour parler de son frère?... Peut-être qu'il était mort, et c'est ce qui mettait Clarisse dans cet état?... Non, elle en parlait au présent... William hocha la tête en souriant, pour montrer qu'il ne demandait pas de détails, et pensa un instant à sa soeur. Il n'avait pas de photo d'elle- elle n'en avait pas de lui non plus, à ce qu'il savait. Etre séparé d'elle lui avait paru très difficile au début (Susan étudiait près de Brighton dans un prestigieux collège moldu), et il avait ainsi bien senti sa différence avec le reste de la famille. Alors que Susan rentrait à la maison tous les week-ends, lui qui était à l'autre bout du pays devait attendre les vacances. Et ses parents n'accordaient qu'un regard distrait à son bulletin, pour la bonne raison qu'ils n'y comprenaient rien. Il n'en souffrait pas vraiment, mais il se sentait dans une position un peu étrange par rapport à sa famille, à la fois en-dedans et en-dehors...
Il secoua la tête comme pour en chasser ces pensées et proposa:

-Tu veux bien qu'on fasse quelques pas? On va geler sur pied si on reste là!

Un coup de vent glacé ébouriffa William et leur fit venir les larmes aux yeux. Le Gryffondor appréciait l'hiver écossais (à Brighton, il n'avait jamais un tel temps) et il désigna l'immense étendue blanche du parc avec enthousiasme:

-C'est magnifique, tu ne trouves pas? J'adore l'hiver ici. Chez moi, il ne gèle pas, il ne neige pas, il pleut. Ici, c'est vraiment superbe... Finalement, l'Ecosse, c'est pas si mal, conclut-il malicieusement, en adressant un clin d'oeil à la rousse Ecossaise.

William approuva en souriant, d'un signe de tête enthousiaste, lorsque Clarisse affirma qu'il devait y avoir des choses bien à Brighton... Déjà, il y avait la mer, chose qui manquait cruellement à Poudlard. Lorsqu'il était chez lui, Will se rendait presque chaque jour au bord de la mer, pour regarder et écouter les vagues... ici, il éprouvait un manque. Le lac ne pouvait pas tenir la comparaison, et le Gryffondor savait que lorsqu'il regagnerait Brighton, l'une de ses premières actions serait d'aller voir la mer.
Bien que William n'ait pas posé de questions, Clarisse parla de son frère, avec une certaine réticence... Will garda le silence un instant puis répondit simplement:

-Moi, je pense qu'il sait que tu l'aimes.

Les deux enfants firent quelques pas de plus, chacun plongé dans ses pensées. William était touché d'être la première personne à qui Clarisse ait parlé de son frère, mais il la sentait mal à l'aise sur le sujet et ne savait pas trop quoi dire. Au bout de quelques mètres, il reprit:

-Moi aussi j'ai une soeur... tout le contraire de moi. Susan. Elle a quatorze ans, et elle étudie près de Brighton, dans un collège moldu... Je crois qu'elle est un peu jalouse de moi. Mais moi aussi, je l'aime beaucoup...

Susan avait cessé de montrer ouvertement sa jalousie envers son sorcier de frère, mais certains signes ne trompaient pas. Lorsqu'elle avait remis sa liste de fournitures scolaires à ses parents, elle avait déclaré en regardant William: "Pas besoin d'aller à Londres pour moi!"... et son uniforme à elle était nettement plus classique que celui de William. Lorsqu'elle entrait dans sa chambre, elle observait avec intérêt ses robes de sorcier, et le jeune Gryffondor sentait qu'elle se demandait pourquoi lui avait des pouvoirs magiques et pas elle. Will était content de la revoir, mais il souffrait de son attitude un peu sèche... Avec un sourire, il se tourna vers Clarisse comme pour lui dire: "tu vois, tu n'es pas seule!"

William prit le parchemin que lui tendait Clarisse en se demandant s'il pourrait trouver une carte reproduisant l'odeur de la mer... l'odeur des algues, du sel, l'odeur du sable... Cela lui semblait très difficile à rendre sur une simple carte, mais après tout, la magie pouvait faire de grandes choses... Il était encore souvent étonné de voir à quel point l'inimaginable devenait possible, simplement en utilisant le sort approprié... Quoi qu'il en soit, il essaierait de trouver une carte sonore pour Clarisse. Les vagues sans le bruit, c'était seulement la moitié du plaisir...
William prit le parchemin que lui tendait Clarisse et inscrivit son adresse dessus, en s'appliquant pour que son écriture soit bien lisible...

-Et voilà... 17, Grafton Street, Brighton. Tu peux m'envoyer une carte de l'Ecosse, tu sais... à part Poudlard, je ne connais pas l'Ecosse. Sinon, tu n'as qu'à m'envoyer une photo de toi à cheval...

Ils en avaient déjà parlé, et Clarisse lui avait dit qu'elle aimait beaucoup monter à cheval. William rêvait d'apprendre à monter, mais sa mère avait toujours refusé... Trop dangereux, répétait-elle. Will sourit à Clarisse pour lui montrer qu'il n'avait pas oublié cette conversation, puis soudain, il s'exclama:

-Tiens, j'allais oublier... Tu crois que tu pourrais prendre une photo de nous tous en uniforme... Tu sais, nous, Nervia, Mathias, Ambre, Lynn... Je pourrais la montrer à mes parents... et je voudrais l'envoyer à la mère de Mathias, en cachette bien sûr... Rends-toi compte, elle me prend pour un Serdaigle, confia-t-il comme s'il s'agissait d'une honte pour lui.

William écouta Clarisse, soudain soucieux. Effectivement, il n'avait pas pensé à la difficulté qu'il rencontrerait pour rassembler tous ses amis, en uniforme en plus... et sans éveiller les soupçons de Mathias... Il n'aurait qu'à leur dire, presque franchement, qu'il voulait faire une photo pour l'envoyer à ses parents... et que les parents en question étaient curieux de voir leur fils et ses amis en uniforme... Après tout, ils avaient bien une photo de Susan et de quelques-uns de ses amis en uniforme de leur collège, pourquoi pas de William? Le jeune Gryffondor retrouva son sourire et certifia :

-Je m'arrangerai.

Il fronça légèrement les sourcils en entendant la réflexion de Clarisse sur sa maison. Non qu'il fût offensé par ses paroles, mais elles venaient de lui remettre en tête les paroles du Choixpeau... Rien que d'y penser, son coeur se remit à battre frénétiquement, comme lorsqu'il était assis à attendre le verdict du Choixpeau. Il ne savait alors rien des maisons de Poudlard, et ne pouvait qu'attendre... et le Choixpeau avait pris son temps... "Tu as la loyauté d'un Poufsouffle, l'avidité de savoir d'un Serdaigle, le désir de faire ses preuves d'un Serpentard... Je pense que tu feras un excellent... GRYFFONDOR!" Il entendit encore le nom de sa maison résonner, comme si le Choixpeau venait de lui répéter sa décision. L'air dégagé, William répondit simplement :

-Oh, je crois simplement que le Choixpeau ne peut pas mettre tous les bosseurs ensemble... Il faut bien en mettre quelques-uns ailleurs qu'à Serdaigle, sinon ce serait trop injuste...

Il préférait ne pas parler de cette répartition qui lui faisait l'effet d'un choix par défaut. Dès son admission à Gryffondor, il s'était persuadé qu'il avait atterri là parce qu'il n'avait aucune des qualités déterminantes pour aller ailleurs. C'était bien ce qui ressortait des propos du Choixpeau...
Et de toute façon, William estimait qu'il ne faisait pas honte à Gryffondor. Il s'était imprégné des valeurs de sa maison, et comme l'avait prédit le Choixpeau, il faisait un bon Gryffondor... enfin, il l'espérait...

[hj] Depuis quand Will est roux ??? J'étais persuadée qu'il était blond!!![hj]

Après la longue tirade de la petite, son ami lui avoua que le choixpeau ne lui avait pas révélé les raisons de sa décision. A Clarisse non plus, il ne lui avait pas révélé quoi que ce soit. Il avait juste fait certains commentaires, comme lorsqu’on lit un magazine, parfois, quand on voit certaines informations, on ne peut s’empêcher de commenter ce qu’on lit. Là, c’était pareil. Mais contrairement à ce que disent les humains, les paroles de ce vieux machin restent gravées à vie dans l’esprit de ceux qui l’entendent, en rendant certains fous à force d’en chercher la signification. Clis’ n’oublierait jamais ce qu’il lui avait dit : « Tu ferais une bonne serpentarde.. en apparences… hum.. mais ça serait dommage, trop dangereux, du gâchis… non, poufsouffle ? … Gryffondor ? non ! je sais ou tu seras le mieux, ce sera… SERDAIGLE ! ». Qu’est ce qu’il avait voulu dire par là ? Clis’ l’ignorait !


La petite aigle s’interrogea là dessus, profitant pour cela du silence de son ami. C’était un souvenir lointain, et à la fois si proche ! Elle secoua la tête, revenant à la blanche réalité, et à la neige qui ne tarderait pas à tomber. Son ami frissonna et approuva quant à rentrer au château. Ils s’étaient beaucoup éloignés de ce dernier, tout en discutant. Clarisse et Will firent donc demi-tour, en pensant très certainement déjà à la chaleur qui envahirait leurs petits corps transis lorsqu’ils pénétreraient à l’intérieur. Mais le froid ambiant et la tempête qui se préparait n’arrangeait pas tellement la serdaigle. Si elle ne pouvait pas rester à se balader dehors, que pourrait-elle bien faire ? Aller à la bibliothèque, sans doute…

_ Tu veux ma cape ?
Je préférerai que tu ne tombes pas malade…
…
ça ne me regarde probablement pas, mais tu fais quoi cet après-midi ?

La main sur le nœud qui retenait son chaud vêtement, Clis’ attendit la réponse du jeune homme…

La conversation sur la Répartition semblait tracasser Clarisse autant que William. Elle resta silencieuse quelques instants avant de se décider à revenir à l'instant présent... tout comme Will lorsqu'il avait revécu sa propre répartition, et avait entendu une nouvelle fois les propos du Choixpeau...
Le Gryffondor refusa d'un geste la cape de son amie, et répondit:

-Garde-la, sinon toi aussi tu vas attraper la crève. De toute façon, tu as raison, on ferait mieux d'aller se mettre au chaud...

Une cheminée, un feu, un thé brûlant, et peut-être après un bain bouillant, voilà tout ce qui intéressait William à ce moment. Il réfléchit un instant et répondit, de façon fort inattendue, à la question de Clarisse:

-Cet après-midi... Je pense que je vais aller à la bibliothèque... j'ai quelques petites choses à terminer... le devoir de potions, et quelques recherches pour le cours de Maugrey... et toi, tu fais quoi?

Une journée sans travail, et sans bibliothèque, n'était pas concevable dans l'esprit de William... c'était d'ailleurs ce qui le rapprochait beaucoup d'un Serdaigle, et ce qui faisait, probablement, qu'il s'entendait si bien avec les Aigles. Il sourit à Clarisse et proposa:

-On rentre? vite?

Ils pressèrent le pas en direction du château, courbés en deux contre le vent glacial qui soufflait contre eux.

[HJ: Will a toujours été roux^^]

[hj] autant pour moi. Bienvenue au club [hj]

Il y eut un silence, chacun était perdu dans ses pensées, dans ses souvenirs, et il fut difficile à la jeune fille de ne pas replonger avec avidité dans ce flot de pensées, heureuses, ou un peu moins. Will refusa poliment sa cape, prétextant qu’il ne fallait pas qu’elle prenne froid elle aussi. Au fond, Clarisse était bien certaine qu’il ne l’acceptait pas par timidité ou politesse. Peu importait après tout, elle aussi tremblait sous les assauts répétés du vent. Sans doute moins que lui, mis elle ne pouvait le nier. Sa main retomba, discrète, dans un mouvement lent et fluide. Elle offrit un petit sourire à son ami. Il lui répondit soudain qu’il irait peut être à la bibliothèque, pour finir ses devoirs et faire des recherches, en élève assidu. Cela amusa la petite. Elle aussi elle irait, peut être, mais plus par habitude que par réelle nécessité.

_ Oh, je ne sais pas encore.
J’avais envie de faire une petite pause et d’aller me promener dans le parc, de m’asseoir au bord du lac, et d’y rester jusqu’à ce que je ne sente plus mes mains à cause du froid... pouvoir profiter du spectacle splendide qu’il nous offre...Regarde comme c’est beau...

Elle designa d'un geste de la main l'étendue paisible qui s'étalait à côté d'eux. Dans ses yeux de glace scintillaient mille petites étoiles, rien que de penser à la merveilleuse après-midi qu’elle aurait pu passer, seule, devant cette étendue d’eau calme et gelée. Elle adorait cet endroit, que ce soit à l’automne, le matin, le soir, en hiver, au printemps, à midi, l’été, la nuit. Elle secoua la tête, laissant les étoiles qui y avaient prit place rejoindre le ciel. L’Ecossaise eut un petit rire nerveux, avant de répondre.

_ Je crois qu’aujourd’hui aussi je serai à la bibliothèque, ou alors je resterai dans la salle commune, ça dépendra des autres. Je n’aime pas le bruit et l’agitation...

Nouveau coup de vent, comme pour les inciter à avancer encore plus vite, à se presser encore un peu pour rejoindre la sécurité et le confort du château, de leur salle commune...

Silence...on entendait seulement le bruit de leur pas, étouffés par le manteau blanc qui recouvrait le sol...Silence.

Ils arrivèrent enfin devant la porte du château, qui grinça sur ses gonds lorsqu’ils l’ouvrirent. Une fois à l’intérieur, Clarisse sourit. Il faisait nettement plus chaud que dehors ! Leurs chemins allaient se séparer à cet endroit, dans le hall. Ils ne prenaient pas les mêmes escaliers pour regagner leurs maisons respectives.

_ Bon, Eh bien Salut William !
J’ai été contente de t’avoir vu ce matin...

Elle lui lança un clin d’oeil avant de tourner les talons, légère mais rêveuse, comme toujours.

William et Clarisse couraient presque maintenant, et le petit Gryffondor repassait dans sa tête ce qu'il voulait faire dans l'après-midi... le devoir de potions, les recherches pour Maugrey, écrire à ses parents, travailler le sort de Réduction pour le cours de sortilèges... l'après-midi s'annonçait chargée...
Les deux adolescents arrivèrent aux lourdes portes de chêne du château, et tous deux poussèrent un soupir de soulagement en entrant dans l'atmosphère tiède du hall... William essuya ses yeux qui s'étaient remplis de larmes à cause du froid, et il salua sa camarade:

-On se verra peut-être à la bibliothèque... Avec ce temps, les salles communes vont être pleines à craquer!

Il frotta ses mains vigoureusement pour les réchauffer, et adressa un sourire à la rouquine:

-J'ai été content de discuter avec toi, Clarisse. Pour la photo, je te tiens au courant, j'essaierai d'arranger tout ça... Pour le moment, je te laisse, j'ai besoin d'un bain bien chaud, je ne sens plus mes orteils!

Ils se sourirent une dernière fois, et William se précipita dans la Grande Salle. Quelques élèves attardés déjeunaient encore, et le Gryffondor avait envie d'une bonne tasse de thé brûlant... rien de tel pour se réchauffer...