La moindre des choses quand on donne rendez-vous à quelqu’un c’est d’être à l’heure, pourtant plus l’après-midi avançait et plus Lavande voyait augmenter ses chances d’être en retard à la rencontre avec la petite Akiko. On était le dernier dimanche de septembre, elle avait repris les cours depuis un peu moins d’un mois et elle était déjà à la bourre dans ses devoirs : tellement prévisible ! Elle s’était pourtant jurée que cette année, sa bonne résolution serait de ne pas tout faire à la dernière minute mais, comme d’habitude, sa résolution avait pris fin dès que le premier devoir à rendre était tombé. Sa seule consolation c’est qu’elle n’était pas encore arrivée au stade de la nuit blanche, néanmoins les dimanches consacrés entièrement à la rédaction d’un parchemin sur la concoction d’une potion anti-inflammatoire ou à la révision du sortilège de prothèse faisaient déjà légion. Et ce dimanche ne faisait pas exception à la règle. Elle avait un parchemin à rendre sur la comparaison entre la potion de Sommeil et celle de Repos pour le lendemain et dire qu’elle était loin de finir aurait été un atroce euphémisme. Elle séchait complètement, jetant des regards désespérés à son parchemin toujours aussi vide depuis bientôt une heure. Elle avait eu beau relire ses cours, les Potions ce n’était pas son truc et elle ne savait pas par où commencer. Et il ne lui restait plus que deux heures avant de devoir se rendre à Pré-au-Lard.

Finalement, lorsqu’il ne lui restât plus que trois quarts d’heure, elle fut bien obligée de s’y mettre. Elle pondit donc un plan assez bancal et commença à rédiger l’introduction. Mais, une fois la rédaction de celle-ci terminée, elle se rendit compte qu’elle ne pouvait plus se permettre de perdre une seule minute si elle voulait être à l’heure à son rendez-vous. Elle laissa donc ses affaires telles qu’elles en se disant qu’elle finirait de rédiger en rentrant, jeta un coup d’œil rapide à sa tenue –mouais elle aurait pu mieux faire, mais elle n’avait pas le temps de se changer- puis attrapa son sac à main avant de transplaner devant la poste de Pré-au-Lard. De là, elle se dirigea vers le pub où elle avait rendez-vous et en moins de deux minutes elle y fut. Elle remarqua alors la silhouette de sa jeune amie assise sur un banc sur le côté du pub, plongée dans la lecture d’un pavé impressionnant. Mais que voulez-vous, on ne change pas les Aigles. Lavande s’approcha donc doucement, ne voulant pas surprendre la gamine et se racla la gorge.

-Hey miss, je suis là. T’as pas attendu trop longtemps j’espère ? Allez viens on rentre, il fait pas super chaud.

Elles rentrèrent donc dans le pub et s’installèrent à une table dans le fond, loin des oreilles indiscrètes. Le garçon prit leur commande –un diabolo menthe pour Lavande- puis l’étudiante entama la conversation sur une note joyeuse. Elle avait beau s’être fait un sang d’encre immense depuis la découverte de ce qui était arrivé durant l’été, sa discussion avec Alan à la rentrée lui avait prouvé que s’énerver était absolument inutile et qu’il valait mieux essayer de regarder ce qui pouvait être fait plutôt que de ressasser ce qui avait déjà eu lieu.

-Alors miss, comment ça va ? Ça c’est bien passé ta reprise ? Moi j’ai l’impression d’avoir deux fois plus de boulot que l’année dernière mais en même temps c’est peut-être juste que je m’étais habituée à ne rien faire pendant l’été.

Elle lui fit un clin d’œil complice, puis termina sur un ton plus solennel et en baissant légèrement la voix pour ne pas être entendu par quiconque ne soit pas la petite Bleue-et-Bronze.

-Et sinon, je t’écoute, qu’est-ce que tu voulais me dire ? Tu peux me raconter ce que tu veux, je ne te jugerai pas mais je ne te forcerai pas non plus à me dire ce que tu n’as pas envie de révéler.

Ainsi Akiko avait visité le Loch Ness après sa mésaventure estivale, ça c’était cool comme voyage. Lavande fut tentée de la taquiner en lui demandant si Nessie était passé leur faire un petit coucou de bienvenue, mais elle sentit dans les dernières paroles de la gamine que celle-ci, malgré ses tentatives de parler de sujets insignifiants, avait l’esprit obnubilé par une seule question, ce qui était parfaitement compréhensible soi-dit en passant. Elle ramena donc la conversation vers leur préoccupation principale laissant à sa jeune amie le soin de lui expliquer comment elle se sentait et quelles étaient ses inquiétudes actuelles.

Akiko commença par prendre le temps de goûter sa grenadine, et Lavande l’imita, ne voulant pas la brusquer. Les révélations douloureuses ne devaient jamais être arrachées, elles devaient être volontaires et arriver au moment voulu. Elle se concentra donc sur la fraîcheur de l’arôme mentholé de la boisson qui se répandait dans sa bouche. C’était toujours aussi agréable, elle avait beau être une grande consommatrice de Bieuraubeurre, rien de meilleur qu’un bon diabolo menthe pour se rafraîchir en ce début d’automne encore bien chaud.

- Je désirais demander ton conseil... depuis ce... ce que tu sais je suis terrifiée, je ne sais pas quoi faire.... en fait... je me demande d'ailleurs si je ne vais pas quitter Poudlard l'an prochain... me faire transférer à Beauxbâtons. J'ai peur pour Rupert j'ai peur que mon père ne fasse de nouveau un...

Wow wow wow ! Quitter Poudlard ! Elle n’y allait pas par quatre chemins la gosse : elle n’avait jamais entendu parler de solutions intermédiaires avant de se lancer tête la première dans les issues extrêmes ? En quoi est-ce que le fait de se faire transférer en France allait changer quoi que ce soit à ses problèmes ? A la limite, ça lui permettrait de les fuir, mais c’est tout. Et encore, parce que si elle faisait 1+1=2 et qu’elle ajoutait les infos fournies par Alan et ce qu’Akiko était en train de lui avouer à mi mots, Lavande commençait à entrevoir la terrifiante vérité, une vérité que le fait de partir à Beauxbâtons ne permettrait pas d’éviter : il paraissait probable que ce fut le père de la Serdaigle qui ait passé un contrat avec le lycanthrope qui avait attaqué sa gosse. P**** de monde de m*********** ! Si les parents s’en prenaient à leur progéniture, où allait-on finir ? L’étudiante sentit une bouffée de colère l’envahir mais elle se contrôla pour le bien de la fillette qui était déjà assez terrifiée comme ça. Elle tenta donc de la convaincre que son idée ne règlerait pas ses problèmes, en lui conseillant la patience et la prudence. Oui, je sais Lavandouilleuh qui prône la réflexion avant l’action, c’est un peu l’hôpital qui se fout de la charité, mais que voulez-vous, c’est tellement plus simple de donner des conseils aux autres que de se les appliquer à soi-même.

-Oh là tout doux mistinguette ! Tu vas un peu vite en besogne. Je comprends que tu aies actuellement l’impression que la situation t’échappe complètement mais ce n’est pas une raison pour prendre des décisions à la va vite que tu risques de regretter après coup. Tout d’abord, je ne connais pas d’endroit plus sûr que Poudlard sur cette Terre –je te rappelle que c’est l’endroit où Tu-Sais-Qui est définitivement tombé-, donc le fait de partir en France t’éloignera peut-être de ton père mais s’il a les moyens de faire ce qu’il a fait, il n’aura sûrement pas beaucoup de mal à te retrouver chez les mangeurs de grenouilles, par contre réussir à forcer les défenses du château me semble nettement plus compliqué et ce quels que soient son pouvoir et ses relations. Deuxièmement, en partant, tu ne ferais que lui montrer qu’il a réussi à t’atteindre, or ce genre de personnes ne mérite pas ce type de victoires. Il faut leur montrer que malgré tout le mal qu’ils peuvent nous faire, on ne se laissera pas faire pour autant. Et puis, troisièmement, le plus important : crois-tu vraiment que c’est le moment d’abandonner ton ami ? Je veux dire avec tout ce par quoi il est en train de passer en ce moment, si tu pars, tu ne crois pas qu’il va prendre ça pour une trahison et qu’il risquerait de faire une bêtise ? Je ne le connais pas, mais s’il s’est interposé entre toi et un loup-garou c’est qu’il tient diablement à toi, alors je serais toi et plutôt que de m’éloigner de lui soi-disant « pour son bien », je voudrais rester à ses côtés et lui apporter toute l’aide que je peux. Tu n’es pas d’accord ?

Elle finit en adressant un sourire gentil à la fillette, car elle se rendit compte qu’elle avait été un peu dure dans ses paroles mais considérait qu’il fallait lui remettre les idées en place car, à son âge, on a tendance à agir par impulsions sans complètement prendre en compte les conséquences sur le long terme. Et puis, elle pensait que la petite était capable d’assimiler ce qu’elle venait de lui dire car, mine de rien, elle était plus mâture que les enfants de son âge à la base et probablement encore plus depuis l’épisode de l’été précédent.

Observer la détresse d’Akiko était une des choses les plus difficiles qu’il ait jamais été demandé à Lavande de faire. L’impression d’impuissance complète qu’elle ressentait était terrifiante. Comme si elle n’avait aucun moyen d’aider sa jeune amie : elle la voyait se noyer dans les soucis et inquiétudes sans être capable de la soulager de ne serait-ce qu’une part de son trop lourd fardeau. La petite lui avait semblé timide lors de leur première rencontre, mais là ce qui se dégageait de toute sa personne avec une force effrayante c’était une douleur et une tristesse incommensurables. L’étudiante en était physiquement affectée, les paroles désespérées de l’aiglonne étaient comme autant de lames qui s’enfonçaient dans son cœur sans qu’elle puisse se défendre. Elle ne savait pas quoi dire ou faire pour supporter la fillette. Son désespoir était si grand, si disproportionné par rapport à tout ce à quoi l’ex-Gryffondor avait eu à affaire jusque-là.

En effet, après la bataille de Poudlard, nombreux étaient ses amis qui avaient perdus un proche ou un ami, mais traumatisée par sa propre attaque, elle n’avait pas vraiment eu à y faire face. Lorsqu’elle avait enfin été autorisée à quitter Sainte-Mangouste, les blessures les plus grandes commençaient déjà à lentement cicatriser et les gens envisageaient peu à peu d’aller de l’avant. Elle n’avait donc pas subi l’après-coup immédiat, ce moment de désespoir complet où malgré la joie de savoir que tout était fini, le vide laissé par les morts semblait impossible à combler. D’un certain point de vue, elle avait eu la chance d’être du côté de ceux qui avaient été plus blessés physiquement que psychologiquement car tout le monde sait que le premier type de blessures est bien plus facile à surmonter que le deuxième. Mais, là, devant la détresse d’Akiko elle était face à quelque chose d’une toute autre ampleur. Et le fait que la victime d’un tel malheur soit seulement en deuxième année lui brisait d’autant plus le cœur. Comment une enfant de cet âge-là était censée aller de l’avant après tout ce qui lui était déjà arrivé ? Pas étonnant qu’elle soit terrifiée, et l’amour inconditionnel qu’elle semblait porter à son petit ami n’arrangeait rien.

Lavande était d’ailleurs franchement étonnée de voir le lien qui attachait Akiko et Rupert. Elle avait des souvenirs de son couple avec Kaelir, mais ça lui semblait tellement plus naïf et enfantin comparé à ce que disait Akiko. Comme si avoir échappé à la mort ensemble avaient rapprochés les deux enfants au-delà de tout ce qu’elle pouvait imaginer. Peut-être aussi qu’avoir grandi dans un monde où le Lord Noir était au sommum de sa puissance les avait amenés à grandir et mûrir plus vite alors qu’elle n’était encore qu’une gamine insouciante à douze ans ? Quoiqu’il en soit, voir la douleur de son amie la touchait au plus profond de son cœur. Elle choisit donc de ne plus réfléchir et d’agir selon ce que lui dictait ledit cœur sur le moment. Elle se leva donc brusquement de sa chaise, fit le tour de la table, s’installa sur la banquette où était assise Akiko et, sans prévenir, prit la fillette dans ses bras. Elle la serra contre elle aussi fort qu’elle put sans l’étouffer. Elle ne dit rien, ne voulant pas gâcher ce moment par des mots inutiles, et surtout car elle ne savait pas quoi dire. Elles restèrent comme cela plusieurs minutes, en silence, se réconfortant mutuellement. Lavande eut l’impression qu’Akiko s’était remise à pleurer mais elle n’en était pas sûre et, de toute façon, elle s’en fichait, si ça lui faisait du bien et bien tant mieux, qu’elle ne se gêne pas pour elle.

Puis, au bout d’un moment, quand elle sentit qu’elles étaient toutes les deux légèrement calmées, elle relâcha son étreinte et sortit sa baguette. D’un geste, elle fit alors apparaître un mouchoir qu’elle tendit à Akiko au cas où celle-ci voudrait s’essuyer les yeux. Quant à elle, elle finit son diabolo d’une gorgée, le piquant de la boisson la revigorant et lui remettant un peu les idées en place. Voilà, elle se sentait un peu mieux maintenant, il était temps de reprendre la discussion. Elle était l’adulte des deux, c’était donc à elle d’essayer d’envisager une solution raisonnée.

-Ça va un peu mieux ma belle ?

Elle adressa un sourire chaleureux à Akiko puis poursuivit.

-Bon, et maintenant raisonnons avec la tête et pas le cœur, parce que contrairement à ce qu’on pourrait penser, il n’est pas toujours un allié de choix, parfois il peut constituer un handicap de première catégorie, lorsqu’il empêche de penser clairement.

Et là, pour le coup, elle savait de quoi elle parlait. Combien de fois avait-elle foncé comme une idiote, suivant juste ses instincts, pour se manger un mur en pleine tronche, au lieu de s’arrêter vingt secondes pour réfléchir et voir la porte à quelques mètres ? Elle ne les comptait même plus.

-Les vacances ne sont pas si proches que cela, donc tu auras le temps de réfléchir à une solution d’ici là. Pour commencer, il faudrait voir à parler de la situation à un adulte responsable, genre un auror ou si tu te sens pas de les impliquer là-dedans, au moins un prof. Ton père n’est clairement pas apte à s’occuper de toi, et puisque ta maman n’en est pas capable non plus, je suis sûre qu’il serait envisageable que les Turner soient autorisés à être tes gardiens provisoires en attendant que ta mère se réveille. Je crois te connaître assez pour savoir que tu ne vas pas vouloir impliquer qui que ce soit, mais là ça dépasse tes compétences et les miennes aussi.

Enfin, maintenant qu’elle y pensait, c’était peu probable qu’une autorité sorcière autorise une famille dont un des gamins venait de devenir un lycanthrope, ce qui impliquait des changements majeurs, à s’occuper d’une enfant en plus, mais peu importe, il y aurait sûrement d’autres familles parfaitement prêtes à prendre Akiko chez eux. S’il fallait, elle convaincrait ses parents, elle était sûre qu’ils accepteraient au vu des circonstances, et puis franchement la gamine était adorable alors qui n’en voudrait pas ? Ce n’était pas non plus comme si elle demandait à ramener un garçon hypra turbulent ou une adolescente en pleine crise.

-Et pour ce qui est des nuits de transformation, j’imagine très bien tes angoisses, mais le mieux à faire c’est de lui faire savoir que tu es là pour lui. Et j’irais même jusqu’à te conseiller de demander des potions de Sommeil parce que le fait de rester éveillée toute la nuit ne va l’aider en rien, au contraire il risque de se sentir encore plus mal en sachant qu’il t’empêche de dormir. Je sais que ça paraît égoïste de dormir tranquillement pendant qu’il souffre, mais dis-toi qu’il vaut mieux que tu sois en pleine forme le lendemain lorsqu’il sera épuisé et qu’il aura besoin de tout ton soutient. Tu n’es pas d’accord ?

[Hj : Ne trouvant pas de solution miracle au problème, surtout que ça aurait semblé très peu crédible, j'ai choisi de dévier la discussion comme Lavnouille sait si bien le faire. N'hésites pas à me dire si tu veux changer quelque chose ]

-Je refuse... de le laisser endurer ces moments tout seul. Je ne veux pas le laisser seul. Les autres nuits je veux bien, mais pas ces nuits-là. Je souffre ces nuits, mais... comment dire... c'est stupide et déraisonnable je sais... mais... je... j'ai l'impression de m'amender de cette manière. Je m'en voudrais trop sinon. C'est naïf ma réaction mais je n'y peux rien... je ne peux pas m'y résoudre... tout mais pas cela

Elle aurait dû s’y attendre, demander à Akiko de dormir tandis que son petit ami était forcé de passer par la douloureuse transformation en lycan c’était comme de demander à une lionne d’aller chasser en laissant ses petits souffrir le martyr de leur côté. L’instinct de protection était trop fort. Même en sachant que le fait de rester éveillée dans son dortoir n’aiderait en rien le jeune griffon, la petite aiglonne se sentait obligée de l’accompagner au moins en pensée. C’était sa façon à elle de gérer la situation et la culpabilité qu’elle ressentait bien que sans raison. Lavande retint à temps un soupir ne voulant pas vexer la petite. Surtout que dans le fond, elle arrivait parfaitement à se mettre à la place de la Serdaigle. C’était bien beau de parler dans le vide lorsqu’on n’était pas concerné mais si jamais elle s’était retrouvée dans les baskets de la Bleue-et-Bronze, elle aurait probablement été incapable d’agir différemment. Comment peut-on dormir alors qu’une personne qui nous est chère est en train de souffrir et que l’on est au courant ?

Incapable de trouver des mots pour contrer les arguments de la fillette, Lavande passa une nouvelle fois son bras par-dessus les épaules d’Akiko et posa sa tête sur celle de l’enfant.

-T’embêtes pas à essayer de m’expliquer, je comprends parfaitement. Le problème c’est qu’étant ton amie, te voir te ronger les sangs comme ça, ça me tue.

Voilà c’était dit, elle ne pouvait pas être plus claire. Elle augmenta la pression qu’elle exerçait sur les épaules de la gamine de façon à lui transmettre par les gestes ce qu’elle était incapable de lui transmettre par les mots. Toute cette histoire avait réveillé une sorte d’instinct maternel en elle vis-à-vis de la petite métisse. Alors qu’elle n’avait pas pris de nouvelles pendant presque un an, elle se sentait désormais liée à Akiko comme si elles se connaissaient depuis toujours. La tragédie que la petite avait vécue donnant l’impression à l’étudiante qu’elle était désormais responsable du bien être de sa jeune amie. Puisque personne n’avait l’air de s’occuper des sentiments de la choupinette autour d’elle, l’ex Rouge-et-Or avait décidé d’en faire sa mission. Elle ne laisserait pas cette enfant s’enfoncer dans le tourbillon du désespoir toute seule, elle serait sa bouée de sauvetage. Dans la limite de ses faibles moyens, elle lui maintiendrait les pieds sur terre. De cette façon, elle avait l’impression de rendre un peu de ce qui lui avait été donné jusque-là.

En effet, elle se rendait désormais compte qu’elle était extrêmement chanceuse, venant d’une famille unie et qui n’était pas dans le besoin, entourée par des amis fidèles et ayant échappé à la mort, que pouvait-elle demander de plus ? L’homme parfait ? Peut-être, mais ce n’était pas le moment de se lancer dans ce débat, non maintenant elle se devait de donner à quelqu’un qui avait besoin d’elle le même genre d’aide qu’elle avait reçue lorsqu’elle-même en avait eu besoin. Et Akiko remplissait parfaitement les conditions. Qui plus est, étant donné leur différence d’âge, le fait que Lavande était fille unique et qu'elle venait d'une famille composée à 95% de garçons, il lui était d’autant plus facile de voir en Akiko la petite sœur dont elle avait toujours rêvée. Certes une petite sœur bien tourmentée, mais justement c’était son rôle en tant que grande sœur d’alléger son fardeau. Et pour ça, puisqu’elle était incapable de trouver une solution dans l’instant, elle devait au moins chercher à changer les idées de la p’tiote. Elle sourit donc à Akiko et lui dit :

-Allez souris ma belle, ça ne te va pas bien de froncer les sourcils ça ruine ton adorable minois. La pleine lune est encore loin et même si tu choisis d’être à ses côtés ce soir-là ce que je respecte, ça ne veut pas dire qu’il faut avoir l’air déprimée en permanence. Même Rupert ne le voudrait pas, au contraire il faut que tu lui montres ton plus beau sourire pour lui remonter le moral. D’ailleurs …

Soudain son sourire se fit plus malicieux et une lueur intéressée s’alluma dans son regard.

- … comment vous vous êtes rencontrés ? Et depuis combien de temps vous êtes ensemble ? Je veux tout savoir ! Bah oui c’est vrai quoi, la dernière fois qu’on s’est vus, il te plaisait mais c’est tout vous n’aviez pas encore fait le grand saut.

Et oui, même dans les situations les plus sérieuses, Lavande ne pouvait s’empêcher d’avoir une curiosité maladive pour la vie amoureuse de ses connaissances. Enfin, on ne la changera jamais alors à quoi bon essayer ? Autant aller dans le sens du courant.

Parfaite, l’histoire qu’Akiko était en train de lui raconter était juste PAR-FAI-TE ! Elle avait tous les éléments pour faire une belle histoire d’amour. Le garçon qui invite la fille au bal, puis le moment consolation suivi de la période où rien ne se passe et on s’inquiète de la distance qu’a pris l’autre et enfin la déclaration avec tout ce qu’il faut de maladresse pour rendre le tout absolument craquant. A croire que le fameux Rupert avait tout prévu dans les moindres détails pour faire craquer la jolie Française. En même temps, c’était peu probable qu’un gosse de treize ou quatorze ans élabore pareil stratagème juste pour séduire une fille. A cet âge-là, c’était plutôt l’époque des grands questionnements existentiels du style « Est-ce que je suis assez grand pour lui plaire ? Est-ce qu’elle ne préfère pas les bruns ? Est-ce que je l’embrasse direct ou bien je lui demande d’abord de sortir avec moi ? Mais si je lui demande j’utilise quoi comme phrase ? » et j’en passe et des meilleures. Rupert avait donc plutôt l’air d’avoir profité de l’occasion qui s’était présentée à lui qu'autre chose. Un garçon intelligent ! En même temps, il avait intérêt à l’être s’il sortait avec une Serdaigle sinon bonjour le complexe d’infériorité. Lavande par exemple n’avait jamais envisagé de sortir avec un Bleu-et-Bronze pour cette raison plus ou moins inavouée. Elle n’avait pas besoin que les gens insistent encore plus sur ses capacités mentales limitées en la comparant à un petit ami au QI surdimensionné.

-Mais c’est trop cool comme histoire ce que tu me racontes là ! J’en veux un pareil à la maison dis donc. Pff ... pourquoi faut-il que les mecs autour de moi ne sont intéressés que par le s… saut à l’élastique ?

OK rattrapage complètement ridicule mais en même temps elle n’avait jamais été très douée pour inventer sur le tas. Elle avait beau avoir une imagination débordante, quand il fallait créer une excuse ou un mensonge tout de suite, elle se foirait systématiquement. En même temps, elle préférait encore qu’Akiko se fiche d’elle que de parler sexe avec la gosse. Certes, elle n’était pas assez naïve pour s’imaginer que l’aiglonne était innocente au point de ne pas savoir de quoi il s’agissait mais c’était quand même trop dérangeant de causer de ça avec une gamine prépubère. A son âge, l’amour c’était se tenir la main, s’embrasser, parfois même avec la langue –waouh c’était trop cooooool, j’te jure il le fait comme dans les films ! J’ai même fermé les yeux comme Jessie Blake dans "Bewitched"- et aller voir le dernier film à l’eau de rose ensemble. Bref, elle tenta de se rattraper comme elle put en déviant légèrement la conversation sur quelque chose qui avait attiré son attention. Un autre nom qu’elle n’avait jamais entendu.

-Et sinon, comme ça ton meilleur ami est un mec maintenant ? C’était pas une Gryffondor plus âgée la dernière fois ? A moins que je sois dépassée et que maintenant on utilise le mot de meilleur ami autrement qu’à mon époque.

Et voilà maintenant elle avait l’impression d’avoir quarante balais et de parler comme son père qui se moquait constamment d’elle en exagérant les différences générationnelles entre eux. En réalité, c’était juste qu’elle n’était pas habituée aux amitiés filles-garçons à l’âge d’Akiko. A l’époque, pour elle, les garçons c’était l’objet de tous les fantasmes puis de la réalité à partir du moment où elle était sortie avec Kael mais ils restaient toujours de l’autre côté de la barrière amitié/amour. Ce n’était qu’en grandissant qu’elle avait découvert qu’à part être mignons, les garçons pouvaient être sympas et qu’ils pouvaient même faire de super amis. Alan en était une preuve vivante.

-Quoique maintenant que j’y pense tu peux aussi avoir une meilleure amie et un meilleur ami. C’est bien mon cas, alors bon j’ai rien à dire sur le sujet. Enfin, je me tais et je te laisse parler.

Oui, dans le fond, c’était le mieux à faire sinon elle allait encore dire une connerie grosse comme elle ou bien finir par ennuyer Akiko à force de raconter sa life. C’était pour causer de la vie de la petite qu’elles s'étaient réunies pas pour discuter de la vie de l’étudiante après tout.

Merlin soit loué, Akiko n’avait soit pas capté soit délibérément ignoré son sous-entendu foireux. Lavande pencha d’ailleurs plutôt pour la première solution étant donné le discours de la petite. C’était rafraîchissant de discuter avec une gamine qui avait gardé une dose de candeur. Elle sourit ainsi à la fillette lorsque celle-ci entreprit d’essayer de lui remonter le moral. C’était mignon de sa part vu tout ce qu’elle vivait en ce moment. Elle répondit donc avec un clin d’œil.

-Merci de ton soutien mais ne t’en fais pas pour moi, je ne vais pas mourir parce que je suis célib’ … enfin à condition que ça reste une condition temporaire, finit-elle avec humour. Et, en attendant je serais honorée de rencontrer l’élu de votre cœur Miss Velon, car s’il est curieux de me rencontrer parce que tu lui as beaucoup parlé de moi, l’inverse est tout aussi valable.

Du topic « petit ami réel ou potentiel », elles passèrent ensuite à la case « meilleurs amis » et Lavande fut contente d’entendre que la Bleu-et-Bronze avait des personnes sur qui elle pouvait compter. Personnellement, elle n’avait pas d’ami(e) mentor mais elle voyait parfaitement ce que la gosse voulait dire lorsqu’elle parlait d’« un de ces êtres avec qui l’on se sent immédiatement proche ». Que ce soit avec Parv’ à Poudlard puis plus tard avec Alan à l’UMA, le courant était tout de suite passé. Elle s’était immédiatement sentie à l’aise en leur présence, pouvant discuter de tout et de rien librement, sans gêne aucune. Et établir un tel degré de confiance si vite, ce n’était pas donné à tout le monde. Elle était donc fort heureuse que sa jeune amie ait trouvé chaussure à son pied dans ce domaine. Par contre, lorsque l’aiglonne lui demanda naïvement si elle avait une idée concernant la raison pour laquelle son meilleur ami et son petit ami ne s’entendaient pas très bien, elle ne put s’empêcher de rire.

-Vraiment Akiko tu n’as aucune idée sur la question ? Je veux dire deux mecs et une fille, c’est forcé qu’ils soient jaloux l’un de l’autre. Chacun ressent la présence de l’autre à tes côtés comme une menace, un risque d’être évincé au profit du « rival ». Et la question n’est pas de savoir si leurs inquiétudes sont fondées, car ils comptent probablement autant l’un que l’autre pour toi, ce qui compte c’est que eux sont persuadés –consciemment ou pas- qu’ils ont un risque de te perdre. Et je parle en connaissance de cause, quand ma meilleure amie s’est mise avec son copain actuel, je suis devenue super jalouse et encore aujourd’hui j’ai parfois du mal à réfléchir avec ma tête et pas avec mon cœur en ce qui les concerne. J’ai l’impression qu’elle me délaisse pour lui, ce qui en réalité est faux mais un sentiment est toujours dur à supprimer, même avec des faits solides pour le contredire.

Enfin, contrairement aux amis d'Akiko, elle avait l'âge d'être légèrement plus mâture donc elle se rendait compte du problème –ce qui n’était peut-être pas forcément le cas de Rupert et Nikolaï- et pouvait tenter de faire des efforts pour s’améliorer en la matière. Quoiqu’il en soit, l’ingénuité d’Akiko était vraiment agréable à côtoyer. Elle rendait tout si simple et évident. Sa façon de l’interroger sur sa vie par exemple, démontrait une curiosité non intrusive, qui donnait envie de lui expliquer tout ce qu’elle voulait savoir. L’étudiante sourit donc de nouveau et entreprit de raconter à l’écolière les principaux détails de sa vie.

-Je te préviens quand je commence à parler sur moi je ne m’arrête plus donc n’hésites pas à me freiner si tu ne suis pas ou si ça te gonfle, commença-t-elle avec un clin d’œil complice. Mes meilleurs amis s’appellent Parvati et Alan. J’ai rencontré Parvati lors du festin de première année à la table des Gryffondors et nous sommes très vite devenues inséparables car, même si elle a une jumelle, cette dernière était chez les aigles comme toi. Maintenant Parv’ est dans une école de mode à Londres où elle a rencontré Sergio, son copain dont je te disais tout à l’heure que j’étais jalouse par moments. C’est drôle d’ailleurs que je n’ai jamais considéré Padma –c’est sa sœur- comme une menace, par contre Sergio tout de suite. Peut-être que c’est lié au fait qu’ils se voient tous les jours à l’école alors que je ne la vois plus si souvent que ça … Bref, je ne suis pas malheureuse pour autant parce qu’à l’UMA j’ai rencontré Alan, le garçon que tu as … rencontré, elle n’avait pas trouvé de verbe plus approprié, cet été. C’est un ancien Pouffy –d’ailleurs je dois avoir un truc pour les blaireaux vu que mon premier copain était aussi chez les Jaunes-et-Noirs mais je m’éloigne du sujet- et on peut vraiment compter sur lui, même s’il a tendance à faire des farces de franchement mauvais goût et qu’il a un don certain pour se fourrer dans tout type d’emmerdes.

Elle leva les yeux au ciel.

-Enfin, vu les circonstances de votre rencontre, je crois que je n’ai pas vraiment besoin de te faire un dessin. Et sinon pour ce qui est des cours, j’ai l’impression que cette deuxième année va être plus intense que la première avec une première spécialisation –perso j’ai choisi Magicosoins et pas Magibiologie- mais bon pour l’instant ça va l’année vient tout juste de commencer. Et toi ça se passe comment ? J’ai cru comprendre qu’il y avait pas mal de nouveaux profs non ?

Voir Akiko réaliser progressivement que le problème entre son petit ami et son meilleur ami relevait tout bêtement de la jalousie pure et simple avait un côté assez comique. Elle avait l’air sincèrement désolée de la nouvelle et accumulait les situations qui prenaient soudain un tout nouveau sens à ses yeux. Une stupide histoire de place en cours –mais si le placement n’était qu’un détail infime les futurs mariés ne se prendraient pas autant la tête au moment de faire les plans de table pour le repas de mariage tout le monde le savait- et une discussion tendue entre les deux garçons furent mentionnées et Lavande n’eut pas grand mal à s’imaginer le tableau général. Rien de bien grave mais étant donné que les protagonistes de l’histoire était à l’époque des hormones en folie et des premiers émois, tout prenait vite des proportions démesurées. Elle sourit donc à Akiko pour la rassurer.

-Bah ne t’inquiète donc pas tant, il faut leur laisser le temps de s’adapter l’un à l’autre. Ils finiront bien par se rendre compte que leur jalousie est infondée et, là, ils se sentiront bien bêtes, l’un comme l’autre. Crois en quelqu’un qui parle d’expérience.

Elle eut alors un flash-back de sa dernière grosse engueulade avec Parvati qui avait eu Sergio pour sujet. Lavande avait piqué une crise de jalousie stupide parce que Parv’ avait annulé un rendez-vous avec elle parce que Sergio était malade et qu’elle voulait rester à ses côtés. L’indienne lui avait clairement fait comprendre que si elle continuait à agir comme une gamine pourrie gâtée, elle allait réellement se retrouver sans meilleure amie, ce qui était loin d’être le cas sur le moment. L’ex Gryffondor s’était alors sentie on ne peut plus bête et avait présenté ses plus plates excuses à son amie. Elle espérait donc que les amis d’Akiko n’en arriveraient pas à ce stade, mais elle avait bon espoir, tout le monde n’était pas aussi immature qu’elle sur certains points. Parce que, certes, elle avait beaucoup mûri dans certains domaines mais pour ce qui était de sa relation privilégiée avec Parv’, elle avait parfois l’impression d’être encore en première année. Après sept ans de vie commune, pour ne pas dire de relation fusionnelle, la séparation lui avait drôlement coûté donc découvrir qu’elle avait « remplacée » -par un garçon qui plus est !- avait été un coup dur. Et il lui avait fallu du temps pour se rendre compte que le fait que sa meilleur amie soit en couple, ne changeait en rien les délires qu’elles partageaient à deux. Le véritable changement était bien plus lié au fait qu’elles faisaient des études différentes qu’à la présence du bel Italien dans l’équation. Et c’est avec cette perspective en tête qu’elle exposa ses amitiés à la petite Bleue-et-Bronze. Elle eut d’ailleurs un rire sincère en entendant la description d’Alan que la fillette lui fit.

-Oui c’est ça, Alan a un côté ours mal léché. Surtout qu’il ne supporte pas d’être soigné, les médecins et toute forme d’autorité en général ont une certaine tendance à lui donner de l’urticaire. Môôôsieur aime vivre « libre et sans attaches ». D’où le voyage en Ecosse de cet été qui a provoqué votre rencontre d'ailleurs. Enfin, comme tu l’as dit, dans le fond, il est adorable et on peut vraiment compter sur lui et c’est ça qui compte avant tout. D’ailleurs pour répondre à ta remarque sur le hasard, je pense que toutes les rencontres sont un peu dues au hasard. Prends ma première rencontre avec Alan, on a fait connaissance à la piscine avec un autre ami, Tomas. Si on n’avait pas décidé de faire trempette tous au même moment, on ne serait peut-être pas devenus amis. Mais dans le fond, c’est ce qui fait tout le piquant de la vie, on ne sait jamais lorsqu'on rencontrera la personne qui changera notre vie. T’imagines un peu l’ennui si tout était déjà prévu d’avance ?

Elle eut une moue de dégoût à l’idée. Un monde où tout serait déjà écrit : quelle horreur !

-Et bah finalement à t’entendre, t’as plus en commun avec Alan qu’on ne le penserait au premier abord !, s’exclama Lavande en entendant les projets d’avenir d’Akiko. Il n’envisage certes pas d’être Auror mais quand il a choisi de devenir tu sais quoi –pas besoin que tout le bar entende la condition illégale du brun- c’était pour les même raisons qui te poussent à envisager la carrière d’Auror. Vous avez ce même côté justicier surprotecteur, c’est drôle quand on sait à quel point vous êtes différents sur le reste, rajouta-t-elle amusée.

En effet, il était difficile de trouver plus différent que la petite Bleue-et-Bronze et l’ex Jaune-et-Noir. L’une suivait les règles à la lettre tandis que l’autre était quasiment allergique à toute forme d’autorité. La première était une tête plutôt timide alors que le second était un flemmard invétéré doublé d’un gars hypra sociable. Bref le jour et la nuit quoi. Et pourtant à étudier le fond de leurs caractères respectifs de plus près, on se rendait compte que la même flamme brûlait au fond d’eux : celle de la justice. Tous deux désiraient ardemment un monde meilleur pour demain et ils étaient prêts à mettre du leur pour voir ce nouveau monde arriver. C’était ce qui avait tant attiré Lavande chez eux, cette manière qu’ils avaient de considérer les autres avant leurs propres intérêts et ce quelle que soit la situation. C’était désormais si rare de tomber sur des gens dont la modestie et la compassion n’étaient pas feintes. Même elle doutait parfois de la véritable raison de ses actes. Avait-elle agi dans telle ou telle circonstance pour aider les autres ou pour se faire bien voir ? La ligne entre les deux était si mince qu’il était bien difficile de la distinguer et souvent elle concluait qu’un peu des deux avait joué.

Laissant ses réflexions bien trop sérieuses pour le tour qu’avait pris la conversation de côté, elle sourit à Akiko et, après quelques secondes de réflexion, répondit à la question sur ses propres projets d’avenir.

-Perso, je ne sais pas trop ce que je veux faire. Il est clair que je veux bosser dans le domaine de la Médicomagie sinon je n’aurais pas continué dans ces études –bien qu’il faille avouer que je les ai un peu choisi par défaut- mais dans quel domaine précisément je sais pas trop. J’avais envisagé de devenir soigneuse d’une équipe de Quidditch parce que je n’ai aucune envie de m’occuper de blessures dues à de la magie noire –trop de mauvais souvenirs- et que dans le milieu du sport je devrais pas trop y être confrontée mais, je sais pas, j’ai envie de quelque chose de plus tu comprends. Ça peut paraître idiot et prétentieux mais j’aimerais faire un peu de différence même à mon niveau, faire un job qui aide réellement les gens. Rendre un peu de ce qu’on m’a donné quand j’en ai eu besoin. D’ailleurs, depuis cet été, j’ai une idée qui me trotte dans la tête mais je sais pas, ça paraît un peu fou …

Elle laissa ses paroles en suspens, repensant à cette idée qu’elle n’arrêtait pas de retourner dans son esprit depuis la carte d’Alan. Puisque Rupert et tant d’autres n’avaient pas eu la chance qu’elle avait eu de sortir indemne de leur rencontre avec un lycanthrope, elle voulait faire quelque chose pour eux. Mais quoi, telle était la question. Elle s’était trituré les méninges pendant des semaines et puis un jour en regardant un reportage à la télé sur des chercheurs travaillant sur le sida, l’idée lui était venue. Si les Moldus arrivaient à créer des traitements contre leurs maladies, pourquoi n’en serait-il pas de même pour les sorciers. Il devait bien y avoir des chercheurs Médicomages non ? Le problème c’était le niveau requis pour un tel job. Chez les moldus, être un chercheur voulait dire avoir fait une thèse et ce n’était pas à la portée du premier venu, or elle n’avait jamais été un génie des études même s’il fallait avouer qu’en Soins Magiques elle s’en sortait pas mal du tout. Alors prétendre devenir chercheuse Médicomage et spécialiste en lycanthropie qui était une des malédictions les plus compliquées du monde sorcier qui plus est, ça lui semblait d’un utopisme profond. Seulement, ça ne voulait pas dire qu’elle n’en avait pas envie pour autant, là était tout le problème.

-Quelle idée ? Dis-m'en plus ! Est-ce lié à ces... ces malheureux souffrant de tu sais quoi suite à une mauvaise rencontre ?

Les paroles d’Akiko tirèrent Lavande de ses pensées et la ramenèrent sur la planète Terre. Elle n’avait même pas eu conscience de laisser sa phrase à mi-parcours, trop préoccupée par ses maigres chances de réussite dans la carrière qu’elle envisageait de plus en plus sérieusement. Elle n’en fut pas pour autant moins surprise de la perspicacité de l’aiglonne. Etait-elle transparente au point qu’une gamine de douze ans lisait en elle comme dans un livre ouvert ? C’était un peu effrayant. En même temps, Akiko n’était pas n’importe quelle gamine de douze ans, pour commencer c’était une Serdaigle et ils avaient une réputation d’être de grands analystes. N’empêche que Lavande ne put cacher son étonnement devant la faculté de déduction de son amie.

-Euh ouais c’est ça.

Elle s’apprêtait à développer un peu plus, mais Akiko la coupa pour lui poser une question qui semblait hautement la torturer. L’étudiante laissa donc ses propres soucis de côté et s’intéressa au problème de sa jeune compagne. Elle s’imagina un instant la situation que lui peignait Akiko et la réponse s’imposa d’elle-même.

-Absolument pas ! Même si qui que ce soit s’interposait entre vous, je doute qu’il puisse faire quoique ce soit si vous désirez rester ensemble. Il n’existe bien heureusement aucune loi contre la socialisation des tu sais qui, y manquerait plus que ça ! T’imagines un peu la discrimination ?! C’est déjà assez dur de vivre avec les préjugés si, en plus, ils devaient faire face à des obstacles légaux leur vie serait un enfer et pas qu’une fois par mois. Et puis, je sais pas si t’es au courant mais il existe un job qui s’appelle assistant social pour LG donc bon c’est bien la preuve que le ministère essaye plutôt de les intégrer à la société que de les en exclure. Car, ne serait-ce que d’un point de vue de sécurité, mieux vaut savoir où ils se trouvent, même si l’idée principale est loin d’être celle-là. Enfin, j’espère au moins sinon bonjour le système Big Brother.

Ouais elle connaissait le bouquin d’abord. Bon OK, elle l’avait pas lu mais elle avait vu le film alors c’était pareil, elle avait le droit d’y faire référence. Elle continua donc sur sa lancée –ouaip fallait pas lui donner la parole, après c’est quasi impossible de la lui retirer, tant pis pour le malheureux interlocuteur.

-Et puis qui voudrait vous séparer alors que tu es clairement une source d’aide immense pour lui ? Ce serait totalement contreproductif, fit-elle remarquer avec une logique à toute épreuve.

Elle sourit alors à Akiko, espérant que ses paroles l’aient quelque peu rassurée. Puis, pour s’en assurer définitivement, elle entreprit de lui expliquer un peu plus en détail son projet de carrière. Bon elle le fit peut-être aussi parce qu’elle avait besoin d’entendre quelqu’un lui dire que ce n’était pas complètement idiot de sa part de croire à un rêve pareil, mais l’un n’excluait pas l’autre.

-En tout cas, personnellement j’aimerais essayer de faire avancer la recherche contre tu sais quoi pour éviter que d’autres personnes n’aient à subir le sort de ton ami. Je suis passée à deux pas d’en pâtir également, alors je me sens d’autant plus impliquée et puis je sais pas mais les Soins Magiques me passionnent vraiment alors si je pouvais combiner une volonté profonde et des études qui me plaisent enfin, ce serait cool quoi. Mais bon j’ai du boulot en perspective, finit-elle avec un petit rire mi-moqueur, mi-gêné.

-C'est un très beau projet ! Aider les gens, c'est encore plus noble que le mien qui n'est basé que sur de la vengeance surtout à mes yeux... mais je crois vraiment qu'on peut arriver à ses fins si on donne tout ce que l'on a et que l'on y croit vraiment. Maman... maman me disait beaucoup cela avant...

Lavande sourit en entendant la fillette tenter de lui redonner confiance en elle alors qu’elle-même semblait douter de ses choix de carrière. Elle était vraiment trop craquante c’te gosse ! Néanmoins la référence à sa mère amena une légère touche amère à ses paroles. Il était clair que la petite souffrait de l’absence si ce n’est physique du moins morale de sa mère, mais qui ne ferait pas de même à sa place ? Lavande avait beau avoir une relation des plus conflictuelles avec sa mère –elles se ressemblaient énormément question caractère et par conséquent leurs tempéraments entiers faisaient souvent des étincelles- elle ne voulait même pas imaginer ne plus l’avoir à ses côtés. Encore plus en tant que fille unique, ses parents étaient son repère principal dans la vie. La seule constante qui ne changeait pas malgré les années et le bouleversement qu’avait constitué la découverte du monde de la magie et toutes les aventures qui s’en étaient suivies, alors ne serait-ce qu’envisager leur disparition lui faisait froid dans le dos.

Ainsi, se mettant à la place de l’aiglonne sevré d’amour maternel depuis trop longtemps, elle la reprit dans ses bras et déposa un baiser sur ses beaux cheveux couleur d’ébène, comme son propre père avait l’habitude de le faire quand elle avait besoin de soutien moral. Pour une raison qui la dépassait un peu, elle avait adopté Akiko comme sa petite sœur de cœur depuis l’accident avec le lycan durant l’été et, en l’absence d’une figure maternelle dans la vie de la gamine, elle était prête à remplir ce rôle en attendant que les Médicomages de Sainte-Mangouste trouvent la cure au mal dont souffrait Mrs Velon.

-Ta maman avait bien raison, après ce qu’a réussi Harry il y a déjà plus d’un an, je crois qu’il n’est plus possible de douter de cela. Certes, nous ne sommes pas tous des Elus, mais je pense que chacun à notre manière nous pouvons réussir les objectifs qu’on se fixe. Et puis, Harry lui-même dit tout le temps que s’il a réussi à vaincre Tu-Sais-Qui ce n’est pas parce qu’il était l’Elu mais parce qu’il avait des gens qui l’ont aidé à ne jamais abandonner donc bon si même Mr Potter le dit ça doit être vrai non ?, termina-t-elle taquine avec un clin d’œil.

Elle avait entendu Harry tenir ce discours plus d’une fois et, si sur le coup, elle avait plutôt cru à une manifestation de la modestie si caractéristique du garçon, elle commençait à mieux comprendre de quoi il voulait parler. Mais assez philosophé, il était temps de se remuer un peu. Cela faisait bientôt deux heures et demie qu’elles étaient là à discuter et il était temps de raccompagner Akiko jusqu’aux grilles du château avant le couvre-feu. Et puis, ça lui donnerait l’occasion de revoir la silhouette de Poudlard et l’idée lui plaisait bien. Elle lâche donc Akiko, se mit debout, laissa le prix de leurs deux consommations sur la table –c’était elle la plus âgée, c’était elle qui invitait pas de discussion possible - et proposa à Akiko de la raccompagner jusqu’à l’enceinte du château.

[Hj : Selon ta réponse, ceci sera mon dernier post ou bien je ferais une dernière petite conclu ]

Elle rougit légèrement lorsqu’Akiko commença à la combler de compliments et déclara qu’elle espérait devenir comme elle en grandissant –elle n’était pas vraiment habituée à servir de modèle, plutôt l’inverse, bon sauf en matière de mode bien évidemment - mais elle réussit à cacher sa gêne en payant l’addition au serveur. L’aiglonne protesta bien pour la forme mais elle se conforma bien vite en comprenant que, pour Lavande, il s’agissait d’une question d’honneur. Elles quittèrent ensuite le bar ensemble et prirent la direction du château.

Le trajet fut rempli de discussions sur tout et rien, comme deux filles de leurs âges normales. Qui était l’actrice la plus glamour ces derniers temps ? Qui était le groupe le plus tendance ? (Les Bizzar Sisters cela va sans dire. ) Si elles devaient choisir un acteur avec qui passer la journée, qui serait-il ? Elles rirent bien en observant un sorcier courir après un hibou ayant une lettre pas complètement détachée accrochée à sa patte. Le pauvre homme était fichu si l’animal décidait de prendre son envol vers les immensités du ciel, quoiqu’il pouvait toujours utiliser la magie comme le fit intelligemment remarquer Akiko. Lavande répondit en riant qu’elles devraient peut-être le lui faire remarquer vu qu’il n’avait pas l’air d’en avoir confiance mais le type avait déjà disparu de la circulation quands elles se décidèrent.

Elles finirent par arriver aux grilles du château et s’embrassèrent. Lavande fit promettre à Akiko de lui envoyer régulièrement des lettres et la Bleue-et-Bronze lui répondit qu’elle le ferait à condition qu’elle réponde. L’étudiante accepta bien volontiers puis, après un dernier sourire, transplana dans le Parc de l’UMA. Elle n’était pas directement allée dans sa chambre parce qu’elle voulait passer par chez Alan pour lui dire que les gosses allaient bien. Elle l’avait mis au courant qu’elle voyait Akiko ce jour-là et lui avait promis de le tenir au courant de l’état physique et mental des gamins qu’il avait sauvés. C’est ainsi qu’alors qu’elle cherchait son fond de teint dans son sac pour se remaquiller rapidos avant de frapper à la porte de son meilleur ami, elle tomba sur un paquet de chocogrenouilles. Sacrée Akiko ! Elle sourit et frappa à la porte de son ami, puis, lorsqu’il ouvrit, elle lui planta le paquet devant les yeux.

-Courtoisie d’Akiko, ça te dit de le déguster en ma superbe compagnie ?