C'était une magnifique fin de journée. A travers les fenêtres du château se faufilaient les rayons dorés du soleil, illuminant ainsi les couloirs et les pièces de Poudlard d'une couleur orangée. Se promener dans l'école en plein milieu d'après midi représentait déja un spectacle éblouissant mais, à ce moment-là, ce que l'on pouvait voir était ni plus ni moins qu'unique. Aux endroits les moins éclairés du château, les torches commençaient d'ores et déja à s'enflammer, présage de l'arrivée pressante de la nuit...

Marvin Blue avait eu une journée particulièrement chargée et pesante au niveau cours... Il n'avait que rarement été aussi fatigué et ressentait un grand besoin de confort, comme jamais il n'en avait ressenti. Certes, la salle commune de Serdaigle était très réchauffante et les fauteuils près de la cheminée extrêmement douillets et reposants, mais Marvin avait l'impression que ces quelques qualités ne suffiraient jamais à combler son manque de confort grandissant. Quelques pièces dans Poudlard semblaient avoir le pouvoir de le faire : la Salle sur Demande ou bien les Salles de Bains. Le problème était que la première pièce se trouvait au septième étage et Marvin n'avait pas le courage de grimper jusque là-haut. Les salles de bains, par-contre, étaient situées au cinquième étage, ce qui était déja beaucoup plus près de l'endroit où se trouvait le jeune bleu et bronze, autrement dit, la Grande Salle. Marvin Blue prit alors son courage à deux mains, se leva de la table réservée aux Serdy, ramassa ses livres et partit affronter les terribles escaliers, direction les salles de bains, en espérant vivement qu'ils l'amènent directement au cinquième étage, sans lui faire prendre d'autres chemins encore plus longs.

Néammoins, il y avait un problème, et pas des moindres. S'il se baignait, il fallait bien qu'il s'essuit nan ? Mais, avec quoi exactement ? En effet, le troisième année n'avait pas encore appris à maîtriser le sortilège d'attraction. Aussi, ses connaissances en métamorphose étaient assez importantes et Marvin avait déja lu une formule sur un livre permettant de transforme n'importe quel objet en serviette. Quelle chance ! Le Serdaigle n'avait encore jamais pratiqué ce sortilège et, apparemment, le moment était venu de tester ses capacités. Il alla alors se retrancher dans un coin reculé du premier couloir qui s'offrit à ses yeux et posa un de ses livres par-terre. Il sortit de sa robe sa baguette d'un noir d'encre et la pointa rapidement vers le bouquin. Il se mémorisa rapidement la formule et la récita, d'une voix assurée. Rien de spécial ne se produisit. Le résultat fut toujours le même durant les autres fois où il avait essayé. Alors qu'il avait perdu l'espoir de voir apparaître l'objet qui lui permettrait d'assouvir son grand besoin de confort, le troisième année récita une toute dernière fois la formule, mais cette fois-ci d'une voix beaucoup moins assurée et forte. Ce fut alors que le livre commença à bouger, à se tortiller bizarrement. Les coins commencèrent à se plier d'une façon étrange, ainsi que tout le reste du livre. Quelques centièmes de seconde après, ce n'était plus un livre postée aux pieds de Marvin mais une serviette aux couleurs de Serdaigle. Il la ramassa alors rapidement, fier de ce qu'il venait d'accomplir, et la cacha du mieux qu'il le put sous sa robe.

Il emprunta le premier chemin qui vint à lui pour se rendre aux salles de bains. Son pas était devenu très rapide et vif, pressé d'arriver dans la pièce de tous ses désirs. D'ailleurs, il arriva plutôt rapidement à destination, sous les yeux ébahis des différents élèves, se demandant où pouvait-il bien aller aussi rapidement. Dès qu'il fut face à la porte de marbre, le jeune Blue hésita quelques secondes puis appuya sur la poignée. Il la poussa lentement et entra dans la pièce. Un gigantesque bassin, surplombé par de nombreux robinets en fer forgé, semblait attendre qu'une personne se jette à l'intérieur de lui. Marvin posa ses livres et sa serviette sur le bord de ce fameux bassin et commença à se déshabiller. Il ne restait désormais sur lui que son caleçon, le reste de ses vêtements étant disséminés un peu partout dans la pièce. Son magnifique torse ainsi que ses cuisses hors-du-commun (hum... hum... ) étaient désormais à l'air.

Le Serdaigle plongea finalement dans le bassin et se dirigea vers les robinets. Il les ouvrit tous très rapidement, deux par deux, n'ayant plus la patience d'attendre encore plus longtemps l'eau lui masser le corps. Le bassin ne tarda pas à se remplir et, la minute suivante, Marvin put se blottir contre le mur du bassin, détendant ainsi tous ses muscles. L'eau chaude lui procurait un plaisir qu'il n'avait encore jamais réussi à égaler jusqu'à maintenant. Il ferma les yeux, écoutant très attentivement la mélodie que produisait l'eau des robinets lorsqu'elle touchait celle du bassin...



[HJ : En espérant que ça te plaise !]

A Poudlard, chaque jour était une nouvelle épreuve. Il fallait, dès le réveil, survivre à LA dispute du matin, rituel quotidien pour un dortoir de Serpentard qui se respecte, puis supporter la mauvaise humeur de ses camarades au petit-déjeuner, prêter une oreille attentive aux dernières rumeurs jusqu’à la sonnerie fatale et subir une série de cours disséminés à tous les étages de ce vaste château. Potions au sous-sol, astronomie au sommet d’une tour, botanique au fond du parc. Dire que les étudiants moldus se plaignent dès qu’il est question de monter deux malheureux étages ! Le cercle des vieillards décatis – je veux bien sûr parler des professeurs –, jaloux de leur honteuse jeunesse, avaient sans doute ourdi un vil complot pour les épuiser avant l’heure. Les marches et les devoirs défilaient allègrement, surtout avec Rogue qui, quelque soit sa matière, se faisait un point d’honneur à surpasser les exigences de ses collègues. Mais, ne le blâmons pas. Le pauvre avait bien besoin de copies noircies d’inepties pour occuper sa non-vie lorsque la sonnerie finale retentissait, que les élèves, abêtis de fatigues s’élançaient gaiement dans les couloirs pour expérimenter sur des sujets concrets les sortilèges appris en dehors des salles de classe. L’assaut était lancé. Les moins drôles filaient têtes basses, les autres désignaient une victime à voix basse pour l’éternel, mais efficace, ‘sac-percé’ et les préfets… menaient l’attaque ? Ben quoi ? Admirez ce badge ! Il signifiait qu’il n’y avait pas d’autorité supérieure dans le couloir pour l’arrêter. Pratique n’est-ce pas ? Ce n’était là qu’un petit écart aux règles. Si un Gryffondor ou un Serdaigle tentait la même action devant lui, il ne serait évidemment pas assez irresponsable pour oublier qu’il avait le pouvoir, et même le devoir, de distribuer des heures de colle. Finalement, adapter à vos exigences de nouveau monarque, le Pouvoir avait du bon.

Les élèves dissipés retrouvaient une énergie scellée par des cours assommants. Et Isaac n’était évidemment pas en reste. Que serait une journée d’écolier sans ses mauvais tours, ses rixes puériles qui pouvaient impliquer toute une classe, sa série de paris, ses rumeurs à colporter, à sertir de critiques bien acides et ses moqueries hilarantes ? Les devoirs attendaient toujours. Son emploi du temps était chargé voyez-vous ? Et les Serpentard le sollicitaient plus volontiers depuis qu’il était préfet. Privilège qui ne déplaisait pas ce garçon avide de gloire mais qui, au bout d’un moment, développait un profond agacement. Isaac ne savait pas se poser de limites. Il dépensait toute son énergie sans temps mort, s’éployait dans le bruit, parlait à s’en sécher la gorge, courait, riait, critiquait tout ce qui passait à sa portée, exprimait les milles idées qui fusaient dans son esprit et, soudain, de manière tout à fait inattendue, sa colère explosait au beau milieu d’un rire, tout le monde devenait stupide et inutile, et il s’en allait. En direct, c’était toujours celui qui faisait l’erreur de répondre à une plaisanterie au moment où il saturait qui recevait l’aimable « Oh ! Mais ferme là à la fin ! T’es lourd ! », et, devant une assemblée perplexe, le prince capricieux se redressait avec un gratifiant « Bon, c’est pas tout mais j’en ai marre de vous. ». Le Serpentard était de bonne compagnie tant que son humeur ne basculait pas. Il fallait apprendre à encaisser les coups. A force d’observer ses algarades, je vous assure qu’avec un peu de bonne volonté vous parviendrez à en sourire.

Le pas encore porté par une colère dont le motif et la force s’obscurcissait à mesure qu’il avançait, le jeune préfet gravissait les étages du château pour s’accorder une heure de vide dans les salles de bain magiques. Ce qui avait été un prétexte pour quitter la salle commune devenait une initiative brillante. Seulement, sous le joug de son élan orageux, Isaac le conquérant avait oublié son équipement dans le dortoir. Certaines omissions étaient plus impardonnables que d’autres, puisqu’irrécupérables. Il faudrait renoncer à un shampoing parfaitement adapté à sa merveilleuse chevelure, à son gel douche onéreux pour « peaux délicates » - dispensable en réalité, mais il serait mal avisé de contrarier ses critères – et, drame entre tous les drames, à un peigne. Soit, il éviterait de se mouiller la tête. Le voyez-vous quitte la salle de bain avec une coiffure informe faute de matériel ? C’était absolument inenvisageable. Quand à la serviette… Un pan de rideau métamorphosé ferait l’affaire. Isaac n’avait en effet aucun scrupule à découper le bas d’un rideau, après s’être assuré que personne ne pouvait le surprendre, pour servir ses besoins personnels. Heureusement, il était toujours plus facile de se fournir l’essentiel. Son allure s’allongea furtivement, et il s’enferma dans une salle de bain. L’ennuie avec ces pièces était que le système de verrouillage magique n’était pas automatique. Et, dans leur empressement, des élèves oubliaient parfois, dans leur empressement, d’utiliser un sortilège. Les vastes baignoires ornées de robinets aux étonnantes propriétés exerçaient une trop forte attraction. Ainsi, le constat tomba vite, il n’était pas seul. Un visage connu, puisqu’il appartenait à un Serdaigle de son année, dépassait de l’eau fumante. C’était bien sa veine. Depuis qu’on lui avait raconté quelques histoires de rencontres fortuites (ou pas d’ailleurs) dans les salles de bain, le Serpentard espérait sans trop l’avouer tomber ‘accidentellement’ sur Milou Momo ces garçons plus âgés dont on vantait les beautés du corps. Il avait droit à un garçon, certes, mais on ne pouvait pas dire que Marvin Blue soit la merveille des merveilles attendue. Ça ne méritait pas que l’on s’y arrêtât. Pouvait-il s’excuser et se retirer cependant ? Ah non ! Ce n’était pas un stupide Serdaigle qui allait le faire changer de salle ! Et puis ce n’était pas comme si il devait subir sa présence d’un monstre à la Goyle dans son bain. Il soupira de mauvaise grâce. Que dire à propos du rideau qu’il pensait transformer en paix à l’abri des regards ? La situation était stupide, et il voyait mal comment s’en tirer sans avouer la vérité. S’abstenant de toute politesse, il lança :

- T’aurais pu verrouiller.

Puis, il étendit le velours pourpre déchiré sur le parquet et tira sa baguette de sa poche pour lui donner un aspect moins lamentable. Il ne fallait pas que le bleu et bonze pense qu’il comptait s’essayer avec ça, comme le dernier des gueux. D’ailleurs, il avait de merveilleuses serviettes dans son dortoir !

- J’ai quitté la salle commune un peu trop vite, expliqua-t-il avant que le Serdaigle ne se fasse des idées et il prononça de tête une formule pour obtenir une serviette blanche, très simple, mais il serait probablement très agréable de s’envelopper le corps.

La métamorphose était son domaine de prédilection. Ça ne vaudrait pas la bonne serviette chauffante qui reposait dans son armoire mais il ferait avec. Il s’assit dessus et entreprit d’enlever ses chaussures en poursuivant nonchalamment :

- Le recyclage a parfois du bon…

Oui, il avait découpé ce rideau. Et alors ? semblait dire son sourire insolent. Qu’avait-il à craindre de Marvin, et que pourrait-on lui faire pour une histoire de rideau amputé ? Le coller, lui enlever des points, lui mettre un avertissement ? Encore fallait-il que le Serdaigle parle et… il ne ferait pas. En tant que seul témoin, il pouvait risquer encore plus gros. Isaac préférait souvent la provocation à la prudence. Il assumait jusqu’au bout, assez fièrement même. Ceci-dit, tout bien considéré, la décision de rester ici n’était pas des plus brillantes. Bien qu’il ne fût pas grandement pudique, l’heure n’était pas aux longues discussions et rien n’était plus pesant qu’un silence dans une pièce fermée avec un quasi-inconnu. Mais, désespérément buté, il préférait renoncer à sa quête de tranquillité, pour s’imposer là où il avait décidé d’aller.

Marvin était tranquillement appuyé sur le rebord du bassin qu’il avait rempli. Bizarrement, l’eau qui lui procurait autant de bien avait aussi une odeur de lavande, ce qui ne faisait qu’augmenter le plaisir que ressentait le jeune bleu et bronze. Cette odeur extrêmement agréable lui titillait les narines. Mais ce fut alors que quelqu‘un osa le déranger, lui qui était si tranquille jusqu’à maintenant. Machinalement, il regarda le nouveau venu. Il avait apparemment le même âge que lui et était donc dans la même année. L’une des premières choses que Marvin remarqua fut son insigne étincelant de Préfet, attaché soigneusement sur sa robe. Mais, il y avait un problème. A en juger par la couleur de sa robe, le nouveau venu était un… un… SERPENTARD ! Le genre de personne qu’on désire plus que tout éviter… Le Serdaigle avait apparemment toujours attiré les personnes qu’il ne fallait pas. Ça en devenait même une habitude… Néanmoins, la sagesse innée de Marvin prit finalement le dessus sur les apparences… En effet, il ne fallait pas relativiser… Peut-être que cette personne là était différente ? Peut-être représentait-il l’exception ? Le troisième année essaya donc du mieux qu’il le put de se convaincre de cette hypothèse là. Par réflexe, Marvin s’écarta un peu du fameux Serpentard, lui laissant assez de place pour qu’il puisse s’installer tout à son aise sans être trop proche de lui. Il le regardait dans les yeux, analysant attentivement tous ses faits et gestes. Si l’on pouvait encore se fier à la vue de l’aiglon, on pouvait affirmer sans nul doute que le bout de tissu arraché vulgairement que le Serpentard transforma rapidement en serviette de bain provenait d’un rideau du château. Comment avait-il pu oser abîmer quelque chose appartenant à Poudlard ?! Marvin, outré, fronça légèrement les sourcils puis reprit sa bouille normale.

Et dire que ce Serpentard n’avait même pas daigné se présenter dès qu’il fut rentré dans la pièce où Marvin régnait en maître, ou du moins jusqu’à maintenant. Quel affront ! La serviette que le nouveau venu avait réussi à métamorphoser était nettement moins belle que celle du jeune bleu et bronze. Comme quoi, les goûts, et puis surtout les talents, sont dans la nature . Marvin écoutait attentivement chaque parole que prononçait le Serpentard. Malgré le fait qu’elles fussent prononcées nonchalamment, cet élève avait un timbre de voix attirant. Marvin ne savait même pas pourquoi il pensait cela, et surtout d’un vert et argent… La folie le prenait-il ou alors était-ce le reflet des envies du jeune Serdaigle ? Celui-ci espérait grandement la première proposition, bien que le fait qu’il trouvait tout ce personnage autant attirant que sa voix lui indiquait bien que la seconde hypothèse était la plus probable. Marvin baissa les yeux un moment, n’osant plus regarder le Serpy après avoir pensé cela, mais il ne put se retenir plus longtemps et son regard replongea à peine quelques secondes plus tard sur tout ce que faisait Isaac. Le troisième année attendit alors que le Serpentard se déshabille, simplement pour voir s’il allait oser rentrer dans le même bassin que lui. Il était quasiment certain que oui, les vils serpents étant particulièrement réputés pour leur fourberie et leur culot inégalables. Au départ, Marvin n’avait même pas remarqué que le Serpentard lui avait déjà adressé la parole à plusieurs reprises. En effet, pour lui, une discussion entre deux inconnus devait absolument commencer par les présentations et, ne les ayant pas faites dès le départ, Marvin n’avait pas daigné l’écouter. Cependant, par pure politesse, l’aiglon essaya de se rappeler ce qu’il lui avait été dit. Cela mit quelques secondes puis tout lui revint. Aussi, il décida de ne pas répondre à sa première ainsi qu’à sa dernière phrase, ne les jugeant pas spécialement intéressantes. Il ne fit alors que répondre à la deuxième, sur un ton déjà beaucoup plus courtois que celui du Serpy, ce qui était souvent significatif des Serdaigle :

« Il se trouve que moi j’ai quitté trop rapidement la Grande Salle. J’ai oublié d’aller en chercher une aussi mais, comme tu le sais, on se débrouille toujours avec ce qu’on a… »

La fin de sa dernière phrase était accompagnée de son doigt pointant la magnifique serviette de bain aux couleurs de Serdaigle. Marvin n’était vraiment pas orgueilleux d’habitude, bien au contraire, mais avec les Serpy, mieux valait prendre ses précautions et devenir aussi orgueilleux qu’eux ou, du moins, c’était ce que pensait le bleu et bronze. Cependant, ce nouveau caractère masquait un certain attrait envers le Serpentard, une certaine... attirance. Marvin ne savait pas le moins du monde pourquoi il ressentait cette sensation là et essaya donc de passer outre, bien que ce fut chose difficile. Le Serdaigle, comme pour cacher son gêne et sa timidité vis-à-vis du nouveau venu, mit tout son poids contre le mur du bassin et ouvrit grand ses bras, qu’il reposa sur le sol de la salle de bain. Il ferma alors les yeux et pencha la tête en arrière. Il ne savait plus trop quoi faire ni quoi dire mais se rappela alors qu’il ne connaissait même pas le nom du jeune garçon. A première vue, ça ne l’importait que très peu de savoir comment il s’appelait mais quelque chose en lui le poussa à le lui demander. Il se mit alors debout dans l’eau, le haut de son magnifique torse ne baignant plus dans le bassin, et prononça ces quelques paroles, toujours sur un ton extrêmement courtois :


Marvin laissa le temps au Serpentard de rentrer dans l’eau. Par la suite, il pensa qu’il irait certainement lui serrer la main, bien que sa méfiance envers le vert et argent soit toujours au rendez-vous. En effet, il préférait attendre sa réaction, les élèves de cette maison n’étant pas prévisibles ou, du moins, avant qu’on ne les connaisse vraiment. Il regardait l’élève de la tête au pied, essayant de deviner son caractère par rapport à son physique. Mais en vain. D’un côté, le Serpentard paraissait orgueilleux et inquisiteur mais de l’autre doux et innocent. Marvin ne put alors s’empêcher qu’il cachait bien son jeu, intentionnellement ou non…

Le premier réflexe de son malheureux compagnon fut de se décaler pour lui laisser, semblait-il, plus de place dans une baignoire qui pouvait aisément accueillir quatre personnes. Dans certaines situations, l’être humain obéissait à des lois stupides [et non pas stuîdes je vous prie /n’écrit pas ce rappel parce qu’il a manqué de modifier à nouveau l’orthographe du mot], et se poussait sans raison à votre arrivée, comme si votre passage devait réduire l’espace. Avez vous déjà noté ce phénomène qui, pour un peu, vous donnerait presque le sentiment d’atteindre le panthéon des êtres d’exception ? Les gens se replacent nerveusement sur leurs sièges, retirent leurs pieds du chemin alors que vous aviez déjà envisagé l’obstacle, ou s’écartent sans raison si vous vous arrêtez trop près d’eux, sait-on jamais, vous pourriez enfler d’un coup. Isaac souriait intérieurement. Allons, que s’imaginait ce pauvre garçon ? Qu’un élan de sociabilité allait l’attirer aux côtés d’un inconnu ? Qu’il allait profiter de ce merveilleux hasard pour entamer une joyeuse discussion avec lui ? Il n’était pas à ce point. Il avait quitté la salle commune pour couper court aux conversations stériles, ce Serdaigle ne l’intéressait pas et, s’il pouvait le soulager de sa présence, il ne s’en porterait pas plus mal. Mais, d’expérience, le vert et argent savait que le commun des mortels n’imaginait jamais qu’il pût déranger et accueillait chaque nouvelle personne à bras ouverts. Il fallait bien trouver un remède au démon de la Solitude qui, selon un cercle d’artistes tourmentés, menaçait tout individu.

La volonté d’établir un contact était même si forte que son camarade garda sa désapprobation dans son regard ridiculement choqué lorsqu’il révéla l’infâme acte de vandalisme qu’il avait commis. Avait-il peur de lui ? Ou était-il trop bête pour réagir intelligemment à ses propos ? Devant son silence, son regard tantôt fuyant, tantôt inquisiteur, Isaac commençait à se poser des questions. La maison de Serdaigle rassemblait de personnages si étranges que la balance des jugements oscillait parfois dangereusement entre le génie incompris et le crétinisme profond. Son esprit d’analyse était trop arrêté en cet instant pour envisager une autre explication, elle n’aurait été valable que si Marvin avait été une fille, puisqu’il était assez logique qu’une personne du sexe opposé fût embarrassée par une présence masculine, ou si le garçon l’avait d’emblée attiré, mais pour ça, il manquait quelques années à l’aiglon. Dans ce domaine, le Serpentard, encore peu averti, ne voyait jamais que par rapport à lui. En attendant que la carpe trouve, par un miracle quasi divin, la parole, le préfet dénoua sa cravate, ôta son gilet – en prenant bien garde à ne pas ébouriffer ses cheveux au passage – et déboutonna sa chemise sans la moindre pudeur. N’étaient-ils pas entre adolescent de treize ans ? Ils n’allaient partager qu’une camaraderie virile, même les hommes le faisaient. On le voyait souvent dans les films, et ça n’avait rien de sensuel, à part peut-être lorsque ça se passait dans un sauna romain, mais je ne vois vraiment pas comment Isaac aurait pu tomber sur une scène de ce genre. Au pire, ça le renverrait à une bd d’Astérix et Obélix et… non vraiment n’allez pas chercher de l’érotisme là dedans, nous avons déjà bien assez sur internet avec Tintin et les Schtroumpfs [et wahou, je vois que Word a les mêmes grandes références culturelles que moi en fait].

Il marqua cependant une hésitation lorsque le moment fut venu de retirer son pantalon. Ils étaient entre garçons, ça ne devait pourtant pas le déranger. Mais lorsque vous vous sentez comme épié par un regard peu connu voyez-vous, l’acte perdait un peu de son naturel. Qu’avait-il à la fin ? Il ne voulait pas qu’il lui fasse un streap-teese aussi ? Dans quelle histoire ses caprices l’avaient-ils emporté ? Il fut presque soulagé d’entendre son ‘partenaire de bain’ parler, même s’il se fichait éperdument de ce qu’il pouvait bien lui dire. « Il se trouve que… » nianiania, la tournure laissait déjà deviner le personnage ennuyeux et il se retint de lever les yeux au ciel. Il fallut évidemment qu’il mette en avant son grand talent pour la métamorphose. Encore un Monsieur parfait alors… Joie. Ainsi, ils avaient tous deux été victimes d’un problème de serviette. Ils venaient de se trouver un point commun ! Le hasard ne faisait-il pas bien les choses ? N’était-ce pas incroyable ? Isaac jeta un œil négligeant sur l’œuvre de notre « prodige ». L’esthétique était réussie, il fallait le reconnaître, mais elle ne valait pas le confort de SA serviette. Jugeant inutile d’engager un débat si vain, il s’abstint de tout commentaire et acheva de se déshabiller. La totale ? Moins le string léopard boxer et tout ? Mais oui, soyons fous les amis ! Marvin était trop insignifiant pour qu’il joue les jeunes vierges effarouchées. C’était un garçon poli, attaché aux civilités, qui prit soin de lui rappeler son nom, sa classe, sa maison, comme si ça ne faisait pas deux ans qu’ils s’apercevaient tous les jours dans les salles de cours… Il était tenté de le lui faire remarquer, mais ce serait lui accorder une importance non méritée en avouant qu’il connaissait au moins son prénom. Mais si une camarade stupide n’avait pas fait une fixation sur lui pendant deux longues semaines, il découvrirait peut être Lui aussi le visage de Marvin pour la première fois. Comment pouvait-il ignorer le nom du préfet de Serpentard ? Sa fierté ne le supportait pas. Tous les troisièmes années, au moins, devaient connaître Isaac Deniel ! Il se glissa dans l’eau tiède en soupirant.

- Je pourrais te dire n’importe quel nom que tu me croirais, trancha-t-il. Mais je découvre que nous sommes dans la même classe. Venant de moi, le constat tardif est assez… - Il marqua un silence d’où sourdait le mépris. - logique mais toi, tu l’as oublié ou ce n’était que pour le plaisir de me faire une présentation complète, conventionnelle, comme celles qu’on nous apprend en cours de langue étrangères ?

Sa question nonchalamment posée, il plissa la nez. L’odeur de lavande était trop entêtante à son goût.

- J’ai l’impression d’avoir plongé dans une bassine de produits d’entretient pour wc. Tu permets que je change ?

Evidemment, il n’attendit pas de réponse et, déjà stratégiquement placé près des robinets, il tourna celui qu’il avait choisi d’avance afin d’imposer un parfum sucré de cerise à l’eau, qui se teinta doucement d’un rose pâle.