Le Chemin de Traverse en été... Il y régnait une agréable ambiance de vacances ; des élèves de Poudlard faisaient leurs premières courses pour la rentrée ("je t'assure, maman, je n'ai plus rien à me mettre !"), ou dépensaient les derniers Gallions sauvés de l'année scolaire ("j'ai économisé toute l'année pour me le payer, ce jeu de Bavboules !"). Des flâneurs se mêlaient aux sorciers pressés qui slalomaient parmi la foule, chargés de paquets ; une sympathique agitation, paisible et souriante.
A la terrasse du Grand Dragon- l'une des brasseries magiques les plus réputées de Londres- un jeune homme brun, vêtu en Moldu, sirotait tranquillement un whisky Pur Feu, les pieds posés sur la chaise face à lui. Ce garçon semblait à peine sorti de Poudlard ; les traits de son visage avaient encore quelque chose d'adolescent, même s'il avait omis de se raser depuis plusieurs jours pour se vieillir un peu. Devant lui, un carnet ouvert venait renforcer l'impression qu'il était un élève ou un étudiant en maraude ; mais le jeune homme, tenant un crayon, s'appliquait non à apprendre quelque leçon, mais à dessiner la rue.
James avait toujours été assez bon dessinateur, mais il ne pratiquait guère ce passe-temps, jugé inutile par sa famille. Désormais, il était seul, et libre de se livrer aux occupations qu'il voulait ; comme dessiner le Chemin de Traverse, avec un luxe de détails et- un oeil exercé s'en serait aperçu- un certain respect de l'échelle.
Un claquement de doigts, et le serveur apporta un autre whisky. L'homme- chauve, rondouillard, écarlate- jeta un regard avide sur le carnet de croquis et commenta :

-C'est drôlement bien fait, votre truc. On s'y croirait.
-Merci, répondit James en souriant, malgré l'irritation que lui inspirait la curiosité du larbin.
-C'est votre métier ?
-Pas vraiment... disons plutôt ma passion. Je fais le croquis préparatoire, et je ferai le dessin définitif chez moi...

Empli de fierté que son établissement ait été choisi pour quelque chose d'aussi sérieux qu'un "croquis préparatoire", le serveur souhaita bonne continuation à James, et s'éloigna en direction de deux sorcières qui le hélaient.
Le jeune homme posa son crayon, trempa ses lèvres dans le whisky, et fouilla dans la poche de sa chemise pour trouver un paquet de cigarettes moldues ; il tira une longue bouffée en observant l'endroit qu'il achevait de dessiner, pour vérifier qu'aucun détail d'importance ne manquait. Des détails tels que les issues de chaque boutique- portes, fenêtres, soupiraux- ou la présence de recoins sombres...
Car l'amour de l'art n'animait pas le jeune homme ; son dessin aurait une autre utilité, puisqu'il lui permettrait d'avoir à domicile un plan précis du Chemin de Traverse, et -pourquoi pas- de préparer quelque chose...
Le jeune Kirkby eut un sourire en pensant à son père qui tonnait que dessiner ne servait à rien, que c'était un passe-temps de Moldu... et pourtant, c'était un talent que son fils mettait au service du Seigneur des Ténèbres... la plus belle utilité qui soit, songea James tandis qu'un nouveau client, s'installant à la terrasse, lui cachait un instant la rue ensoleillée.

[Puis-je ?]

Dans quel autre endroit pourrait-on trouver de quoi entamer des vacances d'été aussi ensoleillées que celles-ci ? C'est la question qu'avait posé Elanor à ses camarades de dortoirs par une belle journée d'été, une des premières de l'année. Ses nouvelles amies lui avaient conseillé d'aller soit à prés-au-lard, soit sur le chemin de Traverse. Etant à Londres et n'ayant pas énormément de temps à disposition, Elanor avait donc opté pour le chemin de Traverse qui de plus se trouvait à proximité du square grimaurd où elle comptait retourner faire un tour avant de rentrer à l'UMA.

Elle avait passé une bonne partie de l'après-midi à faire des achats divers, elle avait notamment fait l'aquisition d'une nouvelle robe pour l'été de couleur mauve avec un joli ruban bleu pastel. Elle la trouvait charmante et se promit de la mettre en arrivant à l'UMA.

Lassée pour un temps de rentrer dans les boutiques pour y vider sa bourse de gallions, Elanor entreprit de se poser sur une terrasse au soleil afin de profiter de s'hydrater avant de rentrer. Elle opta pour la brasserie du Grand Dragon, dont elle avait bcp entendu parlé. Elle choisi une table et posa ses paquets sur une des chaises et s'assit sur l'autre, ce qui lui fit faire face à un jeune homme habillé en moldu qu'elle ne reconnu pas tout de suite, occupée à faire tenir sa pile de paquet.

Elle commanda une bière-au-beurre au serveur et entreprit d'observer les alentours de la magnifique rue qu'elle trouvait vraiment des plus charmantes. Elle commença également à détaillé l'acoutrement de moldu du client assis en face d'elle.

*Tiens, il me dit quelque chose. Je suis sure de l'avoir déjà vu.

L'aspect du personnage ne laissait pas penser à Elanor qu'elle le connaissait car buvant du whisky pur feu et fumant des cigarettes de moldus, il avait de quoi la faire fuir à des km. Pourtant, elle ne mis pas long à reconnaître James, camarade de classe très énigmatique avec qui elle n'avait jamais eu l'occasion de discuter.

Ah salut !

Elle le saluat d'un air un peu géné et détourna le regard pour observer le reste de la terrasse.

Le nouveau client était une femme- il suffisait, pour s'en convaincre, de jeter un coup d'oeil à la quantité de paquets qu'elle trimballait. Seule une femme pouvait faire autant d'achats, songea James, plutôt amusé malgré l'agacement que lui inspirait généralement la gent féminine. Mais là... il faut croire que le beau temps influait même sur l'humeur des Mangemorts ; James appréciait la chaleur du soleil sur son corps et se sentait enclin à une indulgence peu habituelle chez lui. Un agréable vent tiède s'était levé, ébouriffant légèrement les cheveux noirs du jeune homme, et envoyant la fumée de sa cigarette vers la table voisine. James n'y prit pas garde, occupé à analyser son dessin d'un oeil critique. Il ne manquait rien, semblait-il... rien, sauf un "petit quelque chose" qui aurait fait de ce dessin une oeuvre d'art. Là, il ressemblait davantage à un plan, à un relevé... quelque chose de froid, de dépourvu de sentiment, à l'image de l'idéal Mangemort... rien de superflu, uniquement des informations brutes et sans fioriture. On n'est pas là pour s'émouvoir...
Le jeune homme balaya son dessin d'un regard, vaguement déçu du manque d'âme de son oeuvre, puis il le reposa et reprit son verre de whisky. Cette partie du Chemin de Traverse était terminée, cartographiée avec précision... La portion suivante, il l'attaquerait quelques jours plus tard, à la terrasse d'un autre bar...
James écrasa sa cigarette, prit une nouvelle gorgée de whisky, et se laissa aller contre le dossier de sa chaise, dans une posture plutôt avachie, mais non dépourvue d'élégance. Il ferma les yeux un instant, et savoura son bien-être... Il était tranquillement installé au soleil, il avait achevé un dessin important, ses recherches du Parchemin semblaient avancer... la belle vie.
La jeune femme qui venait d'arriver avait enfin fini d'entasser ses paquets en une pile à peu près stable, et elle salua le Mangemort d'une voix timide. Surpris, il se redressa, et la regarda- chose qu'il n'avait pas faite depuis son arrivée... Tiens, elle était étudiante à l'UMA... James ne lui avait jamais parlé- il parlait peu à ses camarades- mais il connaissait son nom et put répondre courtoisement :

-Oh, Elanor, quelle bonne surprise !

Elle se détourna immédiatement, visiblement gênée, pour observer autour d'elle, et James n'insista pas ; il allait reprendre son carnet de croquis, mais un léger bruit lui fit tourner la tête : le paquet posé au sommet de la pile avait glissé et était tombé, laissant entrevoir un morceau d'étoffe mauve. Le jeune Kirkby, en galant homme, bondit de sa chaise pour aller ramasser le paquet, qu'il remit sur la pile en commentant, le sourire aux lèvres :

-Il semble que ce beau temps soit propice au shopping...

Elanor s'était détournée, et James se demanda si elle refusait de lui parler ou si c'était par timidité. Les deux étudiants ne s'étaient jamais parlé jusque-là, et James comprenait parfaitement que son comportement n'attire pas la sympathie ; il se mêlait peu aux autres, et ses camarades avaient très vite dû le cataloguer asocial. Il ne pouvait cependant pas continuer ainsi ; le Seigneur des Ténèbres souhaitait qu'il s'intègre au mieux à l'UMA, et il se devait d'obéir, quelle que soit sa répugnance à fréquenter ses condisciples. Il adressa donc un sourire à Elanor, et prit la peine de ramasser un de ses paquets ; ce qui sembla convenir à la demoiselle. Elle se retourna vers lui, un peu gênée, et lui expliqua qu'elle découvrait le Chemin de Traverse... James hocha la tête, souriant toujours, et songea qu'elle était simplement timide ; en aucun cas elle ne refusait de lui parler, et il en était rassuré. Il était conscient d'avoir été assez rébarbatif à son entrée à l'UMA, mais l'attitude d'Elanor lui prouvait qu'il n'avait pas définitivement gâché ses chances de s'intégrer.
Le jeune homme sentait, cependant, une gêne chez son interlocutrice ; il n'y prit pas vraiment garde, car il était fréquent que les femmes ne se sentent pas à l'aise avec lui ; il était beau garçon, mais dégageait indéniablement quelque chose de sulfureux et d'un peu machiste qui faisait de lui un personnage ambigu, tantôt gentleman, tantôt macho. Pour l'heure, il avait fait taire ses tendances misogynes, et jouait au jeune homme charmeur qu'il savait être à ses heures.
Faisant mine de ne pas avoir remarqué l'embarras de sa camarade, il désigna d'un geste nonchalant la pile de paquet, et répondit sur un ton badin :

-Vous vous trouvez dans un haut lieu de tentations en tout genre, Elanor... Je n'ai jamais vu une femme résister à toutes ces boutiques.

Le Chemin de Traverse rassemblait des enseignes prestigieuses, renommées dans le monde entier, et il constituait une sorte de paradis pour les amatrices de shopping. James but une gorgée de son whisky et reprit, l'air rêveur :

-D'une certaine façon, je vous envie. Il vous reste des endroits merveilleux à découvrir dans cette rue...

Il se rappela son émerveillement la première fois qu'il avait pénétré chez Fleury et Bott, ou chez l'apothicaire... des magasins qu'il pouvait, aujourd'hui encore, visiter durant des heures sans se lasser.
Le jeune Kirkby tira son paquet de cigarettes de sa poche, et il s'apprêtait à demander à Elanor la permission de fumer, lorsqu'une jeune femme s'approcha. Sans se démonter, elle se saisit du carnet de croquis encore ouvert, l'observa sans mot dire, et tourna les talons. Choqué par tant de désinvolture, James l'interpella :

-Eh bien... ça va, vous ? Ne vous fatiguez pas à demander la permission, ce serait dommage...

Il adressa un signe de tête désabusé à Elanor, comme pour la prendre à témoin du manque d'éducation de cette jeune femme.

-Eh bien... ça va, vous ? Ne vous fatiguez pas à demander la permission, ce serait dommage...

*Oups prise sur le fait et puis pourquoi dommage ? ce fut la première chose à laquelle elle pensa, amusée et gênée à la fois, lorsque le dessinateur lui parla.

Elle se tourna donc vers le couple et se passa une main dans les cheveux avec un air gêné, puis se leva de sa chaise et s'approcha d'eux. Il était vrai qu'elle n'aurait pas dû faire ça et comme il l'avait dit à la limite elle aurait dû demander l'autorisation mais bon... Elle ne voulait pas couper leur conversation qui avait l'air très intéressante vu de loin et sa passion pour l'art et l'histoire avait refait surface sans qu'elle s'y attende.
Hum... Comment pouvait-elle s'excuser de son impolitesse ? Elle ne voyait pas d'autre moyen que de s'excuser à haute voix tout simplement.

Hum... Veuillez excuser mon impolitesse, il est vrai que j'aurai dû vous demander l'autorisation.
Puis-je au moins essayer d'hériger une maigre défence qui n'est autre que la vérité ?

Comme aucune des deux personnes en face d'elle ne répondait, elle prit cela comme une invitation à parler. Après tout qui ne dit mot consent.

Hum... Je suis passionnée par l'histoire et l'art et en voyant votre carnet je n'ai pas pu m'empêcher d'y jeter un coup d'oeil... Veuillez m'en excuser... D'ailleurs cela va vous paraître déplacé au mileu des excuses mais vous avez un don pour le dessin mais il est dommage que vous n'ayez dessiné qu'un plan...

Houlà cela faisait deux fois qu'elle s'excusait et en plus elle osait dire ce qu'elle pensait du dessin alors qu'il devait être furieux qu'elle l'ait vu, l'hydromel lui montait-il déjà à la tête ? Hum... non elle devait être juste fatiguée, très fatiguée, pour avoir cette attitude, d'habitude elle leur aurait envoyé une remarque sarcastique. Elle espérait au fond d'elle quand même qu'aucun d'eux n'engagerait une dispute. Elle adressa un sourire que beaucoup auraient qualifié de timide à la jeune fille et s'adressa aux deux personnes.

Heu...
Bon et bien voilà...
Il n'empêche que cela doit paraître bizarre...
Sinon vous êtes à l'UMA ?

Puis elle détourna les yeux et attendit leur réaction, elle venait de remarquer qu'elle était passée de la baguette magique au chaudron. Elle espérait que cela ne les avait pas trop destabiliser car on lui reprocher souvent de destabiliser les gens en changeant de sujet comme ça bien qu'elle s'en rende rarement compte lorsqu'elle le faisait.

Des excuses. A la bonne heure, pensa le jeune Kirkby qui les accepta d'un hochement de tête- le moment n'était ni à l'agressivité, ni aux démonstrations de violence propres à trahir le Mangemort. Mieux valait jouer à l'offensé magnanime ; c'est pourquoi le jeune homme préféra laisser courir l'affaire. En d'autres temps, il n'aurait peut-être pas réagi de façon si débonnaire ; mais le Seigneur des Ténèbres lui avait ordonné de soigner sa couverture et de ne pas dévoiler inconsidérément son allégeance, d'où l'attitude pacifique de l'étudiant.
Oubliant toute intention de fumer, James jeta son paquet de cigarettes sur la table, près du carnet de croquis objet du litige. Ce faisant, il jeta un regard à son dessin, cherchant ce qui suscitait la critique de la curieuse demoiselle. Evidemment, pas de personnages, pas de couleurs, pas d'animation ; difficile de reconnaître un quartier aussi animé que le Chemin de Traverse dans ce dessin désert. James allait mentir en affirmant qu'il rajouterait des personnages sur le dessin définitif, mais la jeune femme lui épargna cette peine en essayant d'engager la conversation. Elanor lui répondit et s'assit à la table de James, qui songea qu'elle n'avait pas tort ; inutile de rester debout. Lui-même reprit donc place sur sa chaise, referma le carnet d'un coup sec et but une gorgée d'alcool avant de préciser, pour le simple besoin de participer à la conversation :

-Nous nous destinons aux métiers de Médicomage (il désigna Elanor d'un geste gracieux, bien qu'un peu maniéré) et de Langue-de-plomb. Et vous-même, si ce n'est pas indiscret ? hormis l'histoire de l'art, bien sûr... ajouta-t-il avec un sourire, pour montrer que l'affaire du carnet était classée.

Sa main retrouva par hasard le paquet de cigarettes moldues posé sur la table, et son envie de fumer revint. Ouvrant le paquet, il demanda en regardant tout à tour les deux jeunes femmes :

-La fumée vous dérange-t-elle, mesdemoiselles ?

Tout en posant sa question, il tira deux cigarettes un peu hors du paquet et les proposa à ses interlocutrices. Il allait sortir son briquet de sa poche, mais il songea qu'il serait sans doute plus avisé d'utiliser sa baguette magique.

L'historienne de l'art accepta une cigarette, et James fouilla ses poches pour y prendre un briquet tout aussi moldu que les cigarettes. Bien sûr, il aurait pu allumer les deux cigarettes en utilisant sa baguette magique ; mais il préférait éviter de l'utiliser en public lorsque ce n'était pas nécessaire, de peur qu'elle soit reconnue en d'autres circonstances... Il s'agissait peut-être d'une précaution superflue et légèrement paranoïaque, mais le jeune Kirkby estimait qu'offrir du feu était dangereux ; à cette distance, la jeune fille pourrait certainement noter quelque particularité de sa baguette, propre à l'identifier, comme cette rayure profonde vers l'extrémité... Le briquet était cent fois préférable ; cet objet moldu ne risquait pas d'attirer les soupçons ; tout au plus pouvait-il conduire à cataloguer son possesseur parmi les adorateurs des Moldus, c'est-à-dire tout l'opposé d'un Mangemort.
James tira sa première bouffée et sourit à Elanor qui venait d'avouer, passablement gênée, qu'elle avait oublié son nom de famille. Rien de grave, au contraire... Amusé, le jeune homme précisa à mi-voix :

-James Kirkby... Enchanté.

Il n'avait pas parlé fort, car il était manifeste qu'Elanor voulait poursuivre. Il avait simplement donné son nom par politesse, mais il ne voulait pas s'imposer dans la conversation. Il but une gorgée d'alcool et eut un instant d'hésitation avant de répondre à la question de l'étudiante en médicomagie. Erika le regardait, lui laissant visiblement l'honneur de répondre le premier. Lentement, James expliqua :

-Eh bien... Je ne me destinais pas vraiment à la carrière de Langue-de-Plomb, en fait... Je ne voulais pas m'inscrire à l'UMA, et j'ai commencé à travailler après Poudlard, au Ministère de la Magie... J'étais coursier. Et puis, l'un des cadres du Ministère m'a indiqué que l'embauche de Langues-de-Plomb était prévue dans les prochaines années, et il m'a fortement conseillé de reprendre mes études... Finalement, je ne le regrette pas... La formation est vraiment intéressante, et elle me permettra sans doute d'obtenir un meilleur poste au Ministère... Et vous ? acheva-t-il avec un sourire.

Il avait dit la vérité, du moins en partie ; il avait simplement omis de parler de son conflit avec son père, et de son rêve de devenir fabricant de baguettes magiques. Ces détails familiaux n'avaient pas à être exposés à tout venant, décréta-t-il en tirant une profonde bouffée de sa cigarette.