Lynn n'avait pas beaucoup dormi, trop perturbée par les évènements de la veille. Elle était allée chercher William après son entrainement de quidditch, sans autres raisons que celle de passer un peu plus de temps avec lui. Ils avaient regardé le coucher de soleil, et le rouquin avait fini par l'embrasser...

Malheureusement Aïlin était arrivé, et ne supportant pas la vision d'un garçon collé à sa soeur, les avait séparé. Une dispute avait commencée entre les deux garçons et Lynn avait tenté d'intervenir, pour finir par braquer définitivement William contre elle.... Elle n'arrivait pas à le croire... elle se sentait si malheureuse depuis.... Il ne voulait plus la voir... plus lui parler...

En ce samedi, Lynn errait donc dans la salle commune comme une âme en peine. Elle n'avait absolument aucune envie d'aller petit-déjeuner, elle s'était donc blottie dans un fauteuil juste en face de la cheminée et regardait les flammes, comme hypnotisée. La plupart des élèves étaient soit déjà descendu dans la grande salle, soit dormait encore et la salle commune était deserte....

C'est pourquoi elle tourna machinalement les yeux lorsqu'elle entendit des bruits de pas dans l'escalier.

Elle reconnu William et se sentit encore plus mal. Elle ne savait pas comment elle devait réagir, si elle devait lui parler, ou simplement rester immobile.

- Bonjour... finit-elle par dire d'une petite voix lorsqu'il la vit enfin.

Il semblait toujours en colère et elle préfera ne rien dire de plus.

Lynn aurait voulu disparaître sous terre lorsqu'elle vit le regard que lui jeta William. Il ne semblait pas triste ou abbatu, comme elle l'était, mais simplement enervé et toute sa colère était dirigée contre elle...

Lynn se mordit la lèvre lorsqu'il lui demanda, avec le plus d'indifférence possible, ce qu'elle voulait. Enfin, c'est ce qu'elle comprit au ton de son "oui?". Il avait l'air de se forcer d'être le plus poli possible -alors qu'il devait surement rêver de l'insulter et de la planter là- tout en gardant ses distances.
La jeune fille soupira et se leva, hésitante:

- Non... rien... désolée...

Elle se dirigea vers le portrait, ne voulant pas lui imposer sa présence plus longtemps si elle lui était tant désagréable, mais elle se ravisa juste avant de sortir. Elle ne pouvait pas baisser les bras... il ne voulait pas l'écouter mais il allait l'entendre... elle devait essayer de lui expliquer... c'était trop bête...

- En fait... murmura-t-elle alors qu'elle était toujours dos à lui. J'ai un problème...

Il était préfet... il devait l'aider à régler ses problèmes s'il le pouvait...

Elle se retourna pour lui faire face et rassembla tout son courage pour ne pas baisser les yeux et contrôler les tremblements de sa voix:

-Je me suis disputée avec quelqu'un de très important pour moi... je ne lui ait pas dit certaines choses et il a cru que c'était parce que je ne lui faisais pas confiance... mais ce n'est pas ça du tout ! Je suis juste terrorisée... et je n'ai pas réussi à lui expliquer pourquoi...

Elle soupira, les yeux embués, avant de continuer:

- Je ferais n'importe quoi... je lui dirais tout si seulement cela pouvait arranger les choses... mais il ne veut pas m'écouter... qu'est-ce que je dois faire...?

Le regard bleu de William, ordinairement plutôt doux, flamboyait de colère. Le souvenir de la soirée de la veille était encore trop vif pour qu'il puisse écouter Lynn sereinement... Lorsqu'il entendit qu'elle avait un problème, il exhala un soupir narquois. Tiens donc, un problème?... Lui aussi avait des problèmes, et il ne bassinait pas le monde avec ça... Il écouta l'exposé laborieux que faisait la brune, avec des mouvements des pieds qui trahissaient son impatience... Et lorsqu'elle eut fini, il la regarda un instant en silence avant de répliquer:

-Tu sais quoi? Je m'en fiche. Débrouille-toi avec tes problèmes, ça changera un peu... Le gentil William, la bonne poire qui prend tous les problèmes sur ses épaules, c'est fini. Tu n'as besoin de personne? Message reçu. Ne compte plus sur moi, pour rien.

Il n'avait pas crié, pas même élevé la voix- il avait parlé dans un murmure qui avait quelque chose d'impressionnant, et qui n'était pas sans rappeler Rogue. Pour qui connaissait William, c'en était même inquiétant... Jamais il n'avait employé ce ton lourd de menaces pour s'adresser à quelqu'un... C'était bien la preuve qu'il en avait, comme le disent familièrement les Moldus, gros sur la patate. Il allait tourner les talons, mais il se rendit compte qu'il tenait toujours le carnet de croquis de Lynn. Il le jeta sur le fauteuil, d'un geste dédaigneux, et marmonna:

-Tiens, j'ai trouvé ça dans mes affaires... Je suppose que c'est la seule raison qui te poussait à adresser encore une fois la parole à un minable tel que moi, eh bien le voilà.

Il se sentait terriblement malheureux- mais pas question de le montrer devant elle. Il se forçait donc à garder ce masque de froideur et de colère, tout en sachant que dès qu'il serait seul, il craquerait et se remettrait probablement à pleurer. Il avait été si douloureux de se rendre compte qu'il n'était qu'un objet entre les mains de Lynn...

Il n'y avait rien à faire... rien du tout... c'était sans appel...

Lynn ne répondit rien et baissa les yeux, quelques larmes s'en échappant qu'elle vint essuyer en soupirant.

- D'accord.... murmura-t-elle.

Elle avait compris... Elle ne pourrait pas le faire changer d'avis. Elle devait être maudite, condamnée à voir les gens auxquels elle tenait se retourner contre elle.... D'abord Aïlin, puis maintenant William....

Il jeta son carnet de croquis sur le fauteuil et Lynn s'approcha pour le prendre. Il ne comprenait pas.... S'il lui avait laissé un peu de temps... les choses auraient été différente.... il n'avait pas le droit de lui reprocher ce qu'elle était ! Elle n'avait pas choisit sa famille ou son passé, ces choses qui la rendaient, malgré elle, si fragile... Mais s'il ne pouvait pas voir qui elle était derrière tout ça, alors elle s'était trompé....

- Si c'est vraiment tout ce que tu penses de moi, alors on a plus rien à se dire.

Elle le regarda dans les yeux puis retourna son attentiotn sur le carnet et secoua la tête avant de le jeter au feu.

Puis elle se détourna de lui et quitta la salle commune.

William resta planté sur place, silencieux, et presque triste. Il avait été dur avec Lynn, beaucoup plus dur qu'il ne l'avait jamais été avec personne... Le Gryffondor n'aimait pas faire de la peine aux gens, et même s'il pensait que Lynn méritait sa colère, il s'en voulait presque de l'avoir traitée si mal. Mais après tout, c'était elle qui avait voulu cette situation, non? Elle qui l'avait traité comme un moins que rien, elle qui lui avait fait comprendre qu'il n'était pas digne de confiance... Peu lui importait qu'il se soit mis en danger pour elle, qu'il ait été un ami dévoué...

*Elle ne s'est pas posé autant de questions à ton sujet*, songea-t-il tristement en se décidant enfin à bouger.

Deux élèves de première année venaient de rentrer dans la salle commune en riant comme des fous, et William leur jeta un regard presque haineux avant de franchir à son tour le trou du portrait. Il fallait qu'il aille prendre son petit déjeuner... même s'il n'avait pas faim, même s'il se demandait s'il aurait de nouveau faim un jour. Dans son esprit revenaient sans cesse les souvenirs de la veille, de ses lèvres sur celles de Lynn... Il avait beau repousser ces images, elles n'avaient de cesse de réapparaître, comme pour attrister encore le rouquin. Le bonheur avait été de si courte durée...