Deux jours à peine après sa dispute avec Lynn et Aïlin, William errait dans les couloirs, en proie à un cafard tenace. Le souvenir de cette altercation était encore vif, de même que le sentiment de profonde amertume que suscitait en lui toute évocation de Lynn. Malgré lui, malgré sa certitude d'avoir été traité injustement, il sentait que leur séparation lui coûtait. Mais une fierté peut-être excessive l'empêchait de l'admettre, et encore plus de faire quoi que ce soit pour favoriser une réconciliation.
Le jeune préfet accomplissait une ronde de surveillance dans les couloirs- on lui avait laissé entendre que cela entrait dans les attributions des préfets, mais il n'en avait encore jamais fait. Il était presque huit heures et demie du soir, et on ne rencontrait plus grand-monde dans les couloirs... Les élèves n'avaient plus le droit de quitter leurs salles communes après neuf heures, et la plupart d'entre eux anticipaient ce couvre-feu. William n'avait croisé en tout qu'une petite dizaine d'élèves, dont la moitié au moins venait visiblement de se faire pousser hors de la bibliothèque par Madame Pince... Tous se hâtaient en direction des dortoirs, et le rouquin songea avec satisfaction qu'il pourrait probablement achever sa ronde sans ennuis.
Dans sa main gauche, il pliait et dépliait d'un geste machinal une lettre, écrite non sur du parchemin, mais sur du papier- une lettre moldue. Il l'avait reçue le matin même, et c'est cette lettre, plus que tout le reste, qui l'avait complètement démoralisé. Son père lui demandait (lui ordonnait, plutôt) de renoncer à passer Noël au collège...

Citation :

Je veux absolument vous voir, Susan et toi, pour vous faire part d'une nouvelle grave. Je préfère ne pas t'en dire plus dans cette lettre...

Ces deux phrases avaient trotté toute la journée dans l'esprit du Gryffondor, qui s'interrogeait sans relâche sur leur signification. Que pouvait-il bien se passer pour que son père semble si inquiet? La nouvelle concernait-elle sa mère? Plus bas dans sa lettre, Mr Craig ajoutait:

Citation :

Maman t'embrasse très fort. Elle ne peut pas l'écrire elle-même car elle est un peu fatiguée et a dû s'allonger (rien de grave, rassure-toi).

Pour rassurer William, c'était râpé. Jamais ses parents ne lui avaient envoyé de lettre si grave, si solennelle. Quel était le problème? Will repassait dans sa tête toutes les hypothèses, et se demandait s'il devait écrire à Susan pour en discuter.
Perdu dans ces réflexions, il ne regardait pas vraiment où il allait, et en tournant le coin du couloir, il heurta une personne qui arrivait en sens inverse, visiblement assez précipitamment.

Enfer et damnation... La personne que William venait de tamponner n'était autre que Liliana Vanloock, une élève de Serpentard... Attention, le problème n'était pas que Will n'aimait pas cette demoiselle, pas du tout. Simplement, il associait sa présence à un souvenir particulièrement désagréable, celui d'une virée nocturne qui s'était terminée en retenue dans le bureau de Rogue... Liliana, appartenant à la maison dirigée par le maître des potions, avait échappé à la retenue, mais William avait été forcé de passer la moitié de la nuit à récurer la réserve personnelle de Rogue. Bref. Dès qu'il voyait Liliana, Will évoquait avec amertume le souvenir de cette retenue- une simple retenue n'aurait été que moindre mal, mais celle-là avait été vraiment terrible.
Le rouquin ne prit pas garde au ton narquois de la demoiselle (Jaina l'avait assez habitué), et il répondit à mi-voix:

-Tiens, Miss Vanloock... toujours aussi aimable, apparemment...

Non mais... quand on se heurte au coin d'un couloir, c'est autant la faute de l'un que de l'autre, non? William aurait très bien pu, lui aussi, râler contre ces gens qui ne regardaient pas où ils allaient. Il s'en abstint, pas par amabilité, mais parce qu'une discussion le fatiguait d'avance.
Une autre jeune fille se trouvait là, une élève de Gryffondor, dans la même classe que Will. Elle portait un gros sac, et le préfet se demanda un instant ce qu'il contenait- mais là encore, il n'avait pas envie de s'embêter avec ça. Il lui sourit, en remerciement de ses paroles empreintes de sympathie (il songea qu'il devait d'ailleurs avoir une sale tête pour qu'elle lui parle si doucement, comme à un malade). Non, il n'avait pas envie de parler... mais il ne dit rien. Susi avait proposé cela sans penser à mal, sans savoir que son camarade aspirait surtout à être seul et à réfléchir à sa lettre.
Le rouquin se rendit compte soudain qu'il n'avait pas parlé à Susi depuis des mois, alors qu'ils étaient dans la même classe, et dans la même maison. Etait-il un peu asocial, par hasard? Il creuserait la question plus tard. Pour le moment, Liliana lançait des sarcasmes à Susi, et cela aussi fatiguait William. D'une voix lasse, il salua sa camarade de Gryffondor, et ajouta :

-Tu ne pourrais pas baisser un peu ta baguette, Liliana? à te voir comme ça, on dirait que tu veux attaquer.... Et en plus, cette lumière dans les yeux, c'est pénible.

Liliana faisait des efforts, et William lui en fut reconnaissant. Il connaissait peu la Serpentard, mais suffisamment pour savoir qu'il était traité avec les plus grands égards... Quand on a fait la guerre ensemble, certains liens se créent, et les deux adolescents avaient livré un rude combat dans la réserve de Rogue, l'année précédente... D'un sourire un peu éteint, le Gryffondor remercia Liliana de sa coopération, avant de se tourner vers Susi qui se mettait à faire des propositions absolument...
Insensées?
Malvenues?
Périlleuses?
Les mots se bousculaient dans l'esprit de William, même si le principe ne lui déplaisait pas. Braver les interdits d'Ombrage, par une action pacifique et symbolique, pas mal... Non, l'idée en elle-même n'était pas trop débile. Le seul problème était l'état d'esprit du préfet... Cette nuit-là, il avait d'autres choses en tête. A cette pensée, il froissa nerveusement la lettre de son père, et répondit à mi-voix:

-Merci, Susi, mais ce sera sans moi... Je ne suis vraiment pas motivé pour le camping dans les couloirs, ce soir. Par contre, moi aussi, je serais partant pour un biscuit!

Avec du chocolat, de préférence, mais n'abusons pas... William se mit lui aussi à observer l'énorme sac de sa camarade, se demandant ce qu'il contenait, et surtout si elle accepterait de partager ses biscuits avec des non-manifestants.
Un bruit derrière eux lui fit brusquement tourner la tête ; William était terriblement nerveux, ces temps-ci, et le moindre bruit le faisait sursauter. Dans ce cas, c'était, apparemment, une porte mal fermée qui avait claqué quelque part près d'eux, mais cela n'arrangea pas l'anxiété du préfet, qui reprit :

-Tu sais que c'est très dangereux ce que tu nous proposes, Susi? Si jamais quelqu'un se fait prendre hors des dortoirs la nuit, il risque d'y avoir des représailles... assez graves, d'après ce que j'ai compris. Rusard répète partout que bientôt, il aura le droit de pendre les élèves par les pieds...

Il imagina trois élèves au plafond comme de grosses chauves-souris endormies, la tête en bas, leurs robes leur couvrant le visage... Une Serpentard, deux Gryffondor... très mauvaise idée, tout ça...


[HJ: désolé, c'est assez minable, mais je ne voulais pas vous retarder]

Cette situation étrange avait au moins une conséquence positive : William avait momentanément oublié son inquiétude. Il avait fourré la lettre de son père dans sa poche, et ne pensait plus aux soupçons qu'il avait eus en la lisant. Il n'avait d'ailleurs pas trop la possibilité de penser à autre chose qu'aux deux filles qui l'entouraient... Elles n'attendaient apparemment qu'une occasion pour se voler dans les plumes, et semblaient n'avoir baissé les armes que par égard pour lui... Le Gryffondor leur en était reconnaissant ; se trouver au milieu de chamailleries féminines n'était pas vraiment sa tasse de thé.
Le rouquin observa, stupéfait, le grand déballage de Susi- un véritable vide-grenier, son sac... Will n'en revenait pas qu'un si petit sac puisse contenir tant de choses. Susi étala ses coussins et sa couette sur le sol, improvisant un vrai petit campement... Encore un peu, et on se serait cru chez les scouts. Il ne manquait que le feu de camp et la guitare pour chanter du Hugues Aufray...
William hésita. La veillée scoute, avec Susi et Liliana, était-ce une bonne idée? Le jeune préfet n'avait pas spécialement envie de se faire coincer par un prof, ou par Rusard, en compagnie de deux hystériques en puissance. Car il était certain qui si un adulte débarquait, les demoiselles se mettraient à se tirer dans les pattes et à aggraver la situation.
L'invitation ironique de Liliana le décida à se joindre aux deux filles, pour quelques minutes au moins. Prenant un air pincé, il répondit:

-Ces coussins sont-ils dignes de recevoir mon divin postérieur? Sont-ils suffisamment moelleux et propres? Songez que ce postérieur est quelque chose de précieux, il est plus intelligent que le professeur Ombrage...

Il s'assit avec mille cérémonies, écoutant la question plutôt optimiste de Liliana. Même s'ils détestaient Ombrage, il lui semblait incroyable que les professeurs ne les punissent pas pour vagabondage nocturne. Le préfet prit un biscuit aux noisettes, croqua une petite bouchée qu'il avala avant de dire:

-Tu rêves, Liliana... Tu imagines... Rogue, McGonagall ou n'importe qui... Ces gens sont des maniaques de la punition, ils ne vont pas se priver, Ombrage ou pas...

D'un bref coup d'oeil, il vérifia que personne ne traînait dans les parages. C'était devenu une habitude pour beaucoup d'élèves, depuis qu'Ombrage était Grande Inquisitrice...

Après ce qui s'était passé au cours de DFCM Gabin estimait qu'il avait une revanche à avoir par rapport à ce salle gros crapaud (rose^^) de Mme... mme comment déjà? tout le monde l'appelaient crapaux désormais, Ah oui Madame Ombrage, cette salle folle qui donnait des punitions odieuses (d'ailleurs Gabin s'était demandé s'il n'y avait pas de risques de transmissions de SIDA avec ce truc mais il n'avait préféré rien demandé...). Le couvre-feu n'était pas encore tombé: en effet il avait exactement 20 minutes pour agir et il préférait agir tout de suite: les élèves rejoignaient déjà leurs dortoirs et il risquait beaucoup moins de rencontrer du monde... et puis s'il se faisait prendre avant d'être passé à l'action, il ne risquait rien puisque les élèves avaient encore le droit de se balader dans les couloirs jusque 9 heures.
Gabin avait préparé son plan d'action depuis pas mal de jour déjà et il avait été voir un peu sur les futurs lieux du crime à quels heures il y avait le moins de monde etc... étant un élève de 1ère année, personne n'avait rien remarqué de suspect dans son comportement!
Il revérifia une dernière fois son matériel:
-Pétard moldu, ok...
-Boule-puante moldue, ok...
-Gélatine, ok
-Ketchup, ok
-Fléchettes, ok
-Ficelle, ok
-Baguette magique, ok
C'était bon, Gabin était fin prêt à exécuter son plan diabolique. Il remit tout dans son sac, chaque chose à sa place puis sortit dans les couloirs, l'air le plus naturel possible: quiconque croiserait Gabin croirait en son innocence, il n'avait pas du tout l'air suspect (à part son petit sourire malicieux peut-être?).
Il monta les escaliers... personne en vue! Quel chance... il était maintenant devant la porte du bureau d'Ombrage. Il se mit alors à mettre la gélatine dans un grand arc de cercle de 2mètre de diamètre ce qui assurerait la chute de la profs puis disposa pleins de pétards par terre et les raccorda entres eux à l'aide de la ficelle. Il avait posé son pot de ketchup par terre au cas où elle aurait l'envie soudaine de sortir... il lui suffirait de le prendre et d'envoyer un jet de ketchup dans ses yeux pour qu'elle ne puisse pas s'apercevoir qui était le coupable. Maintenant que tout était prêt il pouvait commencer les choses pratiques: voilà qui devenait intéressant.
Il sortit alors son lot de fléchette en se frottant les mains.

*Gabin, tu es merveilleux...*

Puis il commença à tirer sur la porte. D'abord pas trop fort, les flèches s'enfonçait alors mollement dans la porte, puis il tira avec de plus en plus de force! Les flèches s'enfonçait profondément dans la porte... il entendit alors des bruits à l'intérieur de la pièce. Il alluma une boule puante, la jeta juste devant la porte puis alluma son lot de pétard qui se mirent à exploser un par un, créant un véritable carnage (de plus comme il y avait des pétards dans la gélatine celle-ci était envoyé partout à travers les couloirs...). Estiment qu'il était temps de partir, Gabin envoya une giclé de ketchup sur les murs et la porte (sinon il aurait servit à rien son ketchup...) puis prit ses jambes à son cou alors que les couloirs commençaient sérieusement à empester. Il partit donc du coté opposé en courant (comme c'était prévu) et puis là... il marcha sur quelque chose de mou puis bouscula quelqu'un....

*Quoi? du camping!*

Il les regarda un instant... puis tenta de s'expliquer, étrange qu'ils n'aient pas été avertis par le bruit...

"Euh désolé pour l'odeur... je viens d'embêter le crapaud... En fait je crois qu'il vaudrait mieux que vous fichiez le camp d'ici, elle risque de débarquer dans deux secondes!"

On put alors entendre un grand cri à quelques mètres de là...

Finalement, on n'était pas si mal sur ce coussin, un gâteau dans une main, un gobelet de chocolat chaud dans l'autre... Pour quelques instants, William mettait de côté ses soucis, et en premier lieu cette inquiétante lettre... Il se laissait aller, en compagnie des deux jeunes filles qui s'étaient décidées à enterrer la hache de guerre. Même la menace d'être trouvés par Rogue ne parvenait pas à assombrir son humeur- et pourtant, si le charmant directeur de Serpentard venait à passer par là, ça risquait de se corser vraiment... Will termina son chocolat chaud : au moins, si Rogue montrait son nez crochu, le rouquin n'aurait pas le regret de devoir laisser cet excellent breuvage. Il croqua dans son biscuit, et plissa le nez en sentant une drôle d'odeur... Liliana aussi l'avait sentie, et elle demanda d'où ça venait... Mais une salve d'explosions couvrit presque sa voix. Des pétards... Qui diable pouvait avoir l'idée saugrenue de faire exploser des pétards dans le château, surtout avec Ombrage sans cesse sur le qui-vive?
La réponse ne tarda pas ; elle arriva même à toutes jambes, et se prit les pieds dans le campement improvisé des troisième année. Un élève, de première année à en juger par sa taille, qui eut l'extrême obligeance de leur conseiller de filer (c'est vrai qu'ils n'y avaient pas pensé tout seuls). William allait répondre, mais Liliana fut plus rapide, et elle expliqua son point de vue au garçon avec une certaine hargne... mais Will ne pouvait pas lui donner tort, vu que son propre point de vue était assez proche de celui de la Serpentard. Lorsque sa camarade en eut terminé avec le première année, le préfet prit la parole :

-En tout cas, on ferait mieux de filer... Ombrage va arriver, et en plus ça pue vraiment ici! C'était vraiment pas malin comme idée, tu sais, ajouta-t-il à l'adresse du garçon.

Avec des gestes rapides, le Gryffondor se mit à ramasser les affaires dispersées autour d'eux, pour que Susi puisse les ranger... Ils avaient intérêt à faire vite. Il lui sembla d'ailleurs entendre un bruit de porte... peut-être était-ce un simple effet de son imagination, mais Ombrage pouvait tout aussi bien être réellement sur leurs traces...