Le week-end précèdent, une sortie à pré-au-lard avait été organisée. Avant de rejoindre Clarisse, Aïlin avait prit le temps de faire quelques emplettes. Sa bourse n'était pas ce qu'il y avait des plus consistantes, si l'on la comparait à celle d'Ultan, cependant le jeune Bower disposait d'assez d'argent pour acheter deux trois choses, son père étant un homme trop orgueilleux pour laisser entendre que son fils, aussi indigne de lui était-il, était dans le besoin.
Aïlin n'aimait pas cet argent, cependant, il en avait besoin. Après avoir acheté de nouvelles plumes, encriers et refait un stock respectable d'ingrédients pour les cours de potions, il avait prit la direction de plusieurs boutiques. Il s'était arrêté à Derviche & Bang et avait fait plusieurs fois le tour de la boutique pour se décider à acheter quelque chose suceptible de plaire à Lavande Brown. Car, comme il l'avait dit à Lynn, il tenait à offrir quelque chose en gage de remerciement mais aussi pour honnorer le courage dont avait fait preuve la Gryffondor pendant l'été. Malgré le fait qu'il n'y était pour rien dans cette triste affaire, Aïlin se sentait responsable de ce qu'il s'était passé.

Le lundi matin, avant le petit déjeuner, le Serdaigle avait chargé un hibou de transmettre une lettre à la jeune fille, n'ayant lui même pas le temps entre le petit déjeuner et ses cours qui commençaient ensuite pour aller lui même adresser la parole à Lavande.
C'était donc à l'heure du courrier, le jour même, que Lavande avait reçut une lettre ainsi écrite :

Citation :

Lavande,

Lynn t'en as peut-être déjà touché quelques mots, et je t'envoie cette lettre faute de temps pour venir faire ma requête moi même. J'aimerais vraiment pouvoir te remercier d'avoir autant prit soin de ma soeur, et si je ne peux m'excuser de la part de ceux qui t'on malmené, je me sens cependant responsable de ce qu'il s'est passé.
Si tu le veux bien, rejoins moi samedi après le déjeuner, au lac. Réponds à cette lettre si tu as un empêchement, autrement je t'attendrais là bas, au pied du vieux saule pleureur.

Amitiés,
Aïlin.

Etant samedi et n'ayant pas reçut de missive d'annulation, Aïlin avait donc prit après le repas du midi la direction du lac, laissant Clarisse après lui avoir expliqué à demi-mots ce qu'il désirait faire. Il ne pouvait pas, bien sûr, lui dire qu'il allait remercier une fille qui avait manqué de se faire dévisager par son plus vieux frère, mais il ne tenait pas à la laisser sans explication, de peur qu'elle n'interprète mal cette entrevue.

Ne sachant pas à quelle heure Lavande viendrait exactement, le Serdaigle avait amené avec lui un livre qu'il avait emprunté à la bibliothèque, relatant l'histoire d'un sorcier qui après avoir raté un sort s'était retrouvé coincé dans la peau d'une chèvre. Vous en conviendrez, l'histoire était plutôt cocace, cependant le thème léger libérait l'esprit d'Aïlin déjà trop chargé de sujets sérieux pour se pencher sur des histoires plus sombres.
Assit au pied du saule pleureur, le livre ouvert sur ses genoux redressés, Aïlin lisait, un sourire vaguement amusé dessiné sur ses lèvres mais malheureusement caché par ses longs cheveux noirs qui retombaient sur son visage.

En ce début d'après midi un peu venteux, le jeune homme ne portait qu'une robe noire à col montant, avec en guise de coupe vent une cape bleue nuit brodée de fils d'argent. Ses mains fines étaient cachées par une paire de gant en peau de dragon teintée de la même couleur que sa cape, afin de protéger ses doigts de la fraîcheur de l'air.
Sa lecture n'étant pas vraiment passionante, l'esprit du jeune Bower s'égarait sur sa rencontre prochaine avec Lavande. Depuis l'année précèdente, il ne l'avait pas revu. Cependant, son changement temporaire d'attitude aux premières semaines de la rentrée scolaire avait circulé parmis les personnes qui le connaissait, et Aïlin espérait que ce qu'il s'était passé n'était pas remonté jusqu'aux oreilles de la rouge et or. Cette idée l'angoissait, ignorant ce que Lavande pourrait en penser et de ce fait, quelle genre de réaction elle aurait envers lui. Ceux qu'il pouvait autrefois qualifier de bons copains avaient eut quant à eux une réaction plutôt froide voir mauvaise envers lui après l'avoir rayé définitivement de leur liste de fréquentation. Cependant, ne sachant pas ce qu'elle savait ou pas, il ne pouvait qu'attendre son arrivée, le ventre un peu serré.
Chassant ces pensées, Aïlin se reconcentra sur sa lecture.

Retourné à sa lecture, Aïlin oubliait doucement le monde qui l'entourait. Il arrivait au fameux passage du sorcier raté qui se retrouvait coincé dans un corps de chèvre et en son fort intérieur, le Serdaigle ne pouvait qu'être sceptique quant aux sensations que cela devait prodiguer. Mais après, tout, il n'en avait aucune idée, n'ayant jamais vécu cette expérience et ne souhaitant d'ailleurs jamais la vivre.
Cependant, une voix féminine qui manqua de le faire sursauter se mit à contester le savoir de l'auteur en matière de métamorphose humaine. Reconnaissant la voix de Lavande, il ne put qu'avoir une drôle d'image lorsqu'il l'entendit dire qu'elle savait ce que ça faisait pour la simple et bonne raison qu'elle avait été transformé en chèvre par une certaine miss Belacqua.
Sa première réaction fut la plus naturelle. Aïlin se tourna en riant, l'air quelque peu hilare, vers la jeune Brown qui se trouvait à côté de l'épais tronc de l'arbre contre lequel il se tenait.
Cependant, lorsqu'il vit l'air tout à fait sérieux de la Gryffondor, son sourire s'affaissa en même temps que son rire.

- Désolé.
S'excusa-t-il en se levant pour lui faire face. L'angoisse qu'il avait ressentit précèdemment était à nouveau apparue, et c'est d'un air hésitant qu'il oberva la demoiselle.
En comparaison à l'année précèdente, Lavande semblait bien moins enjouée à l'idée de lui adresser la parole, et le jeune homme s'en sentit peiné. Ainsi face à lui, elle semblait même moins enjouée tout court et malgré son accoutrement plutôt joyeux, si bien qu'il se demandait si cela venait de lui ou de ce qu'il s'était passé durant l'été.
- Bonjour... Tu... tu veux t'assoir ?
Demanda-t-il en désignant l'herbe verte et fraîche en signe d'invitation.

Ne sachant si la jeune fille s'executerait s'il se contentait de rester bêtement debout, le jeune Bower se rassit sans la quitter des yeux.
En réalité, il cherchait une façon d'engager la conversation, sans aller directement aux faits qui l'avaient poussé à lui demander de venir le rejoindre.
Il ferma son livre et le posa à côté de lui sans plus y prêter attention avant de se tourner lentement vers la rouge et or. Dans son imagination, engager la conversation lui avait semblé plus facile qu'elle ne l'était à ce moment précis.
- Je suis désolé de ne pas être venu te voir moi-même. Finit-il par dire. Je n'ai pas beaucoup de temps en ce moment.

C'était vrai. Lorsqu'il n'était pas en cours ou avec Clarisse, il révisait ou passait beaucoup d'heures à la bibliothèque à chercher une chose qui semblait résignée à lui échapper. Depuis son entretien avec le professeur de Sortilèges, il n'en avait pas apprit beaucoup plus sur l'Occlumancie, à son grand regret.
- Avant tout, je voudrais savoir une chose pour pouvoir parler sans gêne. Est-ce que tu as entendu des choses sur moi ?

Il en était presque certain, mais désirait savoir ce qu'avait entendu Lavande à son sujet. Peut-être devait-il lui expliquer ce qu'il lui était arriver, malgré le fait qu'il n'avait guère envie de parler de cela. Expliquer, se justifier lui pesait de plus en plus, mais après tout, Lavande, elle, était peut-être en mesure de comprendre mieux que les autres. N'allait-il pas aborder les propres horreurs qu'avait dû subir la Gryffondor ? N'avait-elle pas eu son lot de malheur durant l'été ?
S'accrochant à l'espoir que Lavande était suceptible de l'excuser, il attendit sa réponse, l'air faussement impassible.

[HJ : Désolée c'est nul mais je voulais pas te faire attendre plus longtemps]

Les paroles d’Aïlin lui firent l’effet du plus puissant des calmants, il ne voulait pas qu’elle lui raconte sa rencontre avec son frère aîné, il lui laissait le choix de parler ou de se taire. Elle eut l’impression que l’étau qui lui enserrait la poitrine s’évaporait la laissant de nouveau respirer normalement. Elle fut on ne peut plus reconnaissante au garçon de sa compréhension et comprit à ses dernières paroles et à son ton amer qu’il avait du vivre quelque chose de similaire au début de l’année. Elle s’en voulut alors des paroles blessantes qu’elle lui avait adressé quelques instants auparavant, elle aurait mieux fait d’attendre de savoir ce qu’il s’était passé avant de parler. Elle voulut s’excuser mais le Serdaigle était sur sa lancée et il continua de parler.

- En fait, je voulais te remercier. ...Enfin non, je trouve ça déplacé de te remercier parce que tu as vécu quelque chose de ce genre.

**Me remercier ? Sait-il seulement mon rôle réel dans l’histoire ? Je n’ai strictement rien pu faire le moment venu, j’étais juste spectatrice et qui plus est morte de peur, j’étais nulle, après tout c’est moi qui me suis évanouie, c’est pathétique ! Franchement je me fais honte !**

- Non en fait je voulais en quelque sorte honorer ton courage... Ca paraît un peu dérisoire dit comme ça, mais ça me tient à coeur que tu sache que je ne suis pas... indifférent.

**Mon courage ! Oh mon Dieu, il pense que j’ai protégé Lynn, mais qu’est-ce que je vais bien pouvoir lui dire ? C’est Maugrey qui a fait tout le boulot moi j’ai juste servi de cobaye à son taré de frangin, oh j’y crois pas, j’y crois pas il me prend pour une sorte de super-héroïne !**

Lavande était si paniquée par ce qu’elle venait de découvrir que lorsque le jeune homme reprit la parole, elle faillit sursauter de peur. Elle tenta de cacher son angoisse et se tourna vers lui, attentive, il lui tendit alors deux petits cœurs rouges et lui expliqua leur utilité. Tandis qu’il lui disait qu’elle pouvait garder les deux et donner le deuxième à quelqu’un d’autre si elle voulait, elle tentait désespérément de retenir ses larmes. Non, surtout ne pas pleurer, elle avait déjà suffisamment joué les fontaines dans les derniers mois, pas la peine d’en rajouter, elle se contenta alors de fixer les deux petits cœurs pour essayer de juguler l’eau qui s’accumulait sur le rebord de ses yeux. Tandis qu’elle se livrait à cet exercice périlleux, Aïlin termina son discours :

- Je sais que c'est un peu ridicule, mais je ne peux pas m'excuser ni te remercier alors je n'ai trouvé que cette idée. Maintenant, si tu as envie de savoir ce qu'il s'est réellement passé, et c'est normal, je vais essayer de te le raconter, les faits marquants du moins.

Cela lui remit les idées en place, il fallait qu’elle lui dise d’abord la vérité avant qu’il lui parle, car il avait le droit de savoir qu’elle n’avait pas fait ce qu’il pensait avant de décider de lui confier ou pas ses secrets. Elle dit alors :

-Attends !

Une fois qu’elle eut capté son attention, elle lui rendit les deux cœurs et continua :

-Je ne peux pas les accepter tant que tu ne connais pas toute l’histoire parce que je suis désolée de te l’apprendre mais tu as une idée complètement fausse de ce qui est arrivé.

Elle s’arrêta, respira profondément et commença le récit du pire moment de sa vie. C’était la première fois qu’elle ressentait le besoin d’en parler mais elle ne savait pas vraiment par où commencer ni quels mots utiliser.

-On était chez moi au bord du Lac, en train de faire ce stupide test sur notre avenir, on était totalement insouciantes, j’en ai honte mais mon problème majeur était de savoir quand est-ce que Seamus me répondrait. Tout ça pour que maintenant on se soit séparés.

Elle rit jaune, évita le regard du garçon et continua :

-Et soudain, il est apparu de nulle part, Lynn semblait paralysée, il a pointé sa baguette vers moi tandis qu’il demandait à Lynn la sienne. J’ai alors demandé à Lynn de façon cryptée de sortir le miroir qui nous reliait en permanence à Maugrey sans qu’il s’en aperçoive, elle a compris et c’est elle qui a pris tous les risques alors que moi je n’avais fait que le provoquer pour détourner son attention de l’information principale de ma phrase. Il s’est regardé dans le miroir et j’ai prononcé la phrase, alors il a compris. Il a lancé un Doloris à Lynn puis il m’a paralysé je sais pas comment et il s’est approché de moi et …

Elle s’arrêta, bloquée, on arrivait au pire passage.

-Il a voulu me faire le sourire de l’ange et il ma balancé un coup de poing hyper violent dans le plexus, ça m’a défoncé la trachée et quelques secondes plus tard j’étais dans les vapes tandis qu’il se battait avec Maugrey … Alors tu vois tes chimères de courage et je sais pas trop quoi … Bref j’ai rien pu faire donc t’a pas besoin de me remercier ni de me donner ces cœurs … c’est à toi de voir et je comprendrais d’ailleurs que tu veuilles plus rien me dire.

Elle se tut, angoissée, se sentant horriblement mal mais refusant par-dessus tout de pleurer. Elle avait dépassé le stade des pleurs, elle en crevait d’envie mais elle ne craquerait pas, sa fierté ne le lui permettrait pas. Il ne lui restait plus qu’à attendre ce que dirait le garçon, après tout s’il lui retirait son amitié, elle était déjà suffisamment blindée pour supporter la douleur. Depuis sa rupture avec Seamus, elle se sentait différente, pas forcément plus mûre mais différente ça c’est certain : sa discussion avec Kael le lui avait confirmé et cette discussion le faisait également, elle grandissait.