« Mais pousse toi ! » s’exclama Blaise.

Un coup d’épaule envoya le poufsouffle interpellé contre le mur, dégageant le passage pour le Vert et Argent. Pourquoi avoir fait des couloirs aussi étroits dans cette école ? Blaise n’appréciait pas tellement de ce faire bousculer de la sorte tandis que tous les élèves se précipitaient vers la grande salle pour déjeuner. Et quand Zabini avait faim… Il était d’une humeur exécrable. Plus encore que d’habitude.

Sortant d’un cours de potion qui c’était plutôt bien passé, il avait pressé le pas pour enfin manger –il s’était réveillé bien trop tard pour le petit déjeuner- et se retrouvait coincé dans une foule d’élèves affamés. Impossible de passer… En septième année et dépassant de beaucoup la plupart des élèves, il lui était facile de les bousculer un peu pour qu’ils dégagent de son passage mais la foule avait vite fait de se refermer.

Il desserra le nœud de sa cravate, ouvrit les premiers boutons de sa chemise et froissa un peu plus la lettre qu’il tenait à sa main. Elle venait de sa mère qui donnait quelques nouvelles et lui parlait de son septième mari. Encore un qui ne ferait pas long feu, certainement. Blaise adorait sa mère mais il avait du mal à comprendre ses habitudes de veuve noire. Trouver un riche parti, se marier, le voir mourir étrangement, hériter et recommencer. Certes, ca avait permis à leur famille de s’enrichir aux profits de tous ces imbéciles qui pensaient être différents des précédents. Dommages collatéraux pour une place sociale élevée pouvait-on dire.

Blaise sortit de ses pensées lorsqu’il reçut un coup dans son dos. Il se retourna, un sourire déjà sadique affiché sur son visage. Le petit griffondor de troisième année leva vers lui les yeux et marmonna une vague excuse, pensant peut-être s’en tirer à si bon compte. Mais non, le serpentard ne comptait pas le lâcher aussi facilement, il était une cible parfaite pour décharger sa colère. Puisqu’il ne pouvait pas faire disparaitre la foule, il allait se distraire en attendant. Il pourrait presque en être reconnaissant au griffon…

« Tu ne peux pas faire attention ? » dit-il d’une voix grinçante. « Stupide griffondor. Ton appartenance à cette maison prouve que tu n’es pas très malin mais à ce point ? »

Blaise attrapa la cravate du jeune garçon, menaçant. Qu’allait-il exiger de lui ?

« Tu sais quoi ? Il va falloir que tu te fasses pardonner et j’ai pour toi une très avantageuse proposition… »

Lécher ses chaussures ? Se déshabiller au milieu de tous ces gens ? Lui dégager le passage ? Pff il en serait incapable. Lui faire crier une insulte sur un professeur ? Excellente idée. Et ne serait ce pas Rogue que l’on voyait un peu plus loin ?!

« Tu connais le nouveau directeur n’est ce pas ? Serais tu prêt à hurler que c’est un imbécile, là dans la foule ?! Oui ? Fais-le ! Il ne saura pas que c’est toi, il y a trop de monde… » Dit-il mais son sourire indiquait clairement qu’il le dénoncerait. « Dépêche toi si tu ne veux qu’on en vienne aux mains… »

Bon sang c’était la journée internationale de la stupidité aujourd’hui ou quoi ? Parce que certes, Lellia concevait humblement que dans une foule aussi dense certains pouvaient réussir à lui marcher sur les pieds mais qu’un espèce de….de Poufsouffle arrive littéralement à lui bondir sur le pied gauche, ça c’était non seulement impardonnable mais surtout inexcusable. Or, fort heureusement pour le blaireau, celui-ci eu suffisamment de jugeote pour prendre ses jambes à son cou et fuir comme il le devait devant la mauvaise humeur de la Gryffondor. Ravalant donc les quelques mots qu’elle avait failli hurler à l’intéressé, elle se ravisa rapidement de dire quoi que ce soit étant donné que non loin d’elle se tenait Mr Cheveux Gras 1997 en personne ! Baissant un peu la tête, elle essaya bien de passer le plus inaperçu possible dans la foule compacte mais c’était peine perdue, du haut de ses 1m75 elle commençait véritablement à dépasser la plupart des autres élèves de manière presque affolante et ses cheveux bruns avaient tendance à ressortir dramatiquement au milieu de toutes les têtes rousses qui avaient poussées ces dernières jours. Elle se surprit l’espace d’un instant à penser que d’ici quelques années elle serait une adulte, une adulte au caractère bien trempé elle le savait mais une adulte qui n’aurait pas à regretter ses années de galère à Poudlard. Bien sûr elle était un peu sortie du droit chemin en cours de route mais l’important c’était qu’elle avait réussi à retrouver un semblant de normalité. Des amis, des activités extra scolaires et même parfois de la bonne humeur. Et oui, autant dire que pour Lellia c’était un véritable exploit. Enfin pour l’instant cette fameuse bonne humeur n’était qu’un lointain souvenir, si les gosses continuaient de lui barrer le chemin avec autant de détermination elle allait finir par péter une durite et par envoyer quelques sorts de son cru.

Voilà où en était la jeune fille dans ses pensées lorsqu’elle entendit des paroles étranges dans la foule….quelqu’un était en train d’insulter un Gryffondor et ce n’était pas vraiment à son gout, elle ne se prenait pas pour une justicière, loin de là même mais elle ne supportait pas le ton adopté, d’autant plus que cette voix lui disait quelque chose... Observant les visages des personnes se trouvant autour d’elle, elle ne mit pas longtemps à localiser le malheureux lionceau, en revanche qui l’avait coincé et le menaçait à présent, elle n’en avait pas la moindre idée. Elle dû s’aventurer un peu plus dans la foule et jouer du coude avec plusieurs petits gabarits avant de se retrouver à portée de voix et surtout de main du cancrelat qui pensait avoir trouvé de quoi se détendre.

Zabini !

Pour une fois Lellia ne s’était vraiment pas trompée en le traitant de cancrelat ! Ce type était dédaigneux et prétentieux à l’extrême, le stéréotype même du Serpentard et le genre de personne que l’ancienne capitaine se faisait un plaisir d’éviter. Profitant du fait qu’il soit trop concentré sur sa victime pour prêter à elle, la brune sortie lentement sa baguette et la pointa dans le dos du serpent, lui enfonçant dans la chair à la fois pour lui faire remarquer sa présence et lui faire comprendre qu’il n’avait pas intérêt à faire de geste brusque.

« Zabini mon chéri, tu devrais vraiment essayer de réfléchir parfois. Crois tu vraiment que menacer un Gryffondor d’une manière aussi ostensible soit une bonne idée ? »

Un sourire radieux aux lèvres, la jeune fille se tenait à présent juste à côté du Serpentard et cachait parfaitement sa baguette sous sa robe de sorcière afin que personne ne puisse comprendre ce qui se passait. D’un mouvement de tête qu’elle adressa au Gryffondor, elle lui montra qu’elle contrôlait parfaitement la situation avant de se concentrer une nouvelle fois sur le bouffon vert et argent.

« Dis le moi si jamais tu tiens véritablement à ce qu’on en vienne aux mains, hein ? Mais pour l’instant j’apprécierais vraiment que tu fasses tes excuses à….à….ce gentil Gryffondor. »

Il était plus qu’évident que la Mégère s’amusait comme une petite folle à présent et apparemment elle n’était pas la seule vu le sourire ravit et reconnaissant que lui lançait le Gryffondor.

Un griffondor à martyriser et tout vous paraissait plus facile. Même la queue pour accéder à la grande salle devenait une partie de plaisir. Plaisir non partagé vu le regard apeuré du jeune garçon avec qui il discutait pourtant si aimablement. Un petit cercle du genre « no man’s land » s’était formé autour d’eux et nul ne semblait vouloir s’interposer. Certains passaient leur chemin, indifférents, d’autres ignoraient la scène de peur de devenir acteur et les derniers regardaient. Une sorte de spectacle pour patienter. On dit merci Zabini !

Et Blaise avait trouvé une excellente idée de bizutage ! Insulter le directeur Rogue alors qu’il n’était pas loin… Ca promettait d’être amusant. Approchez Mesdames et Messieurs, dans un instant le grand massacre du Griffondor va commencer. Lancez les paris ! Qui sera assez fou pour gager que le petit Rouge et Or survivra ? Quelle punition ? Mais pendant que Blaise se concentrait sur sa victime et s’amusait follement, quelque chose vint frôler son dos puis s’enfoncer dans ses côtes. Une voix féminine et familière résonna jusque dans ses oreilles. Son agresseur se déporta à ses cotés et Blaise reconnu Lellia Windfall.

« Windfall, mon ange, nous discutions simplement. Et soi-dit en passant, agresser un griffondor est toujours une excellente idée, ostensiblement ou pas. Ca fait passer le temps, ça distrait… Tu connais mon intérêt pour les nuisibles non ? »

Il lui adressa un sourire charmant, comme s’ils étaient les meilleurs amis du monde. Si on ne les connaissait pas, on pourrait croire qu’elle venait lui prêter main forte. Mais tous ceux qui avaient rencontré la mégère savaient que ce n’était pas son genre… Sa victime avait pris l’air soulagé de celui qui venait d’échapper à une mort certaine. Lellia lui proposa gentiment de faire ses excuses au griffon, ce à quoi Blaise répondit par un éclat de rire. Il repoussa brutalement le jeune homme, se désintéressant désormais de lui. Il avait trouvé un passe-temps bien plus amusant.

« En venir aux mains ? Quelle douce proposition… »Répondit-il en lui en la regardant des pieds à la tête.

Blaise affichait un sourire tranquille, se retourna pour faire face à Lellia, et fit glisser de sa manche se baguette qu’il pointa à son tour d’un mouvement vif vers la demoiselle.

« Un petit duel ici ? Si près du directeur…. Quelle bêtise ! Nous savons tous les deux pour qui il prendra parti n’est-ce-pas ? Et sans parler de ça, penses-tu vraiment être à la hauteur ? Ah les griffons et leurs pulsions de héros ! Cela vous pousse à bien des idioties. »

[font:5a2c=]Il replaça une mèche de cheveux qui avait glissé sur le visage de Lellia mais la gentillesse de ce geste était largement démentie par le cynisme de son regard. Il s’approcha et souffla à son oreille quelques mots.

« Alors, combat à mort ou est-ce que tu me présentes tes plus plates excuses ? »

Un sourire innocent étirait maintenant ses lèvres, comme si ces paroles murmurées n’avaient été que sympathie et amabilité. La queue avançait doucement autour d’eux mais Blaise n’y faisait même plus attention. Il avait trouvé un adversaire bien plus intéressant pour son petit jeu. Il se doutait qu’elle n’allait pas s’excuser, il l’espérait même. Le plaisir de la soumission n’égalait pas celui de l’émulation..