Depuis une dizaine de jours, il y avait eu un certain bouleversement dans la vie trépidante d'Andrzej. Il avait déménagé ! Jusqu'ici, le soviétique avait résidé dans les dortoirs à l'intérieur même de l'université, ce qui avait été la solution la plus simple pour le nouveau venu qu'il était. Ce n'était pas très grand mais cela avait suffit à ses besoins. Après tout, le sorcier était toujours en vadrouille et ne restait jamais longtemps dans ses quartiers, sauf bien sûr dans le cas où il avait ramené une fille avec lui... Néanmoins, en règle générale, il préférait éviter. Cela empêchait ainsi que les jeunes femmes ne fassent le pied de grue devant chez lui et se mettent plein d'idées dans la tête... Andrzej avait beau être clair, il y en avait encore beaucoup qui ne comprenaient pas qu'il ne voulait pas de relation exclusive. Pourquoi rester enchaîné à une seule femme ? C'était de la folie, tout simplement ! Toutefois, lorsqu'il était sûr que la fille était bien sur la même longueur d'onde que lui, il arrivait qu'il ramène de temps en temps de la compagnie avec lui. Cependant, l'expérience lui avait montré que c'était beaucoup plus pratique d'aller vite fait dans une chambre en ville, ou chez la demoiselle, pour assouvir leurs désirs impatients.

En effet, il ne fallait pas oublier que c'était une université et donc elle était protégée des arrivées intempestives, surtout avec la menace qui pesait en ce moment sur l'Angleterre avec le Lord Machin. On ne pouvait pas rentrer directement dans sa piaule. Il fallait transplaner à l'entrée et ensuite traverser tout le campus avant de pouvoir atteindre le bon bâtiment. Et bien sûr, il y avait les étages à grimper ensuite... Ce n'était donc pas l'idéal pour Andrzej qui passait la plupart de ses soirées à traîner en ville. Ce n'était pas toujours facile d'arriver à bon port quand on était trop pressé d'aller plus loin avec la jolie sorcière qui vous accompagnait ou quand on avait trop bu, et même si le russe tenait bien son alcool cela arrivait parfois.

Toujours était-il que le brun avait profité des appartements résidentiels situés à quelques kilomètres d'ici. Plus vastes et plus luxueux, ils offraient ainsi davantage de liberté. Bien que chers, ils étaient prisés et Andrzej avait aussitôt sauté sur l'occasion quand l'un d'entre eux s'était libéré. Le seul inconvénient, si du moins on pouvait le juger comme tel, était que c'était vraiment grand, bien loin du studio qu'il occupait à l'Uma. C'était ce qui l'avait poussé, entre autres, à envisager une colocation. Seulement voilà, cela faisait déjà au moins une semaine qu'il avait fait la demande et toujours rien ! Quoique c'était un peu sa faute...

D'un pas lent, Andrzej se dirigeait donc vers le panneau d'affichage de l'université. Cela ne servait à rien de laisser son annonce comme elle était et il s'apprêtait à en mettre une autre, rédigée en anglais celle-ci. Et oui, comme un idiot – ou un éternel optimiste – le russe avait laissé une annonce dans sa propre langue, espérant qu'un de ses compatriotes se signale. Jusqu'ici, il n'avait croisé aucun soviétique à l'Uma mais il fallait bien reconnaître que les lieux étaient gigantesques et le nombre d'étudiants très important. On ne pouvait certainement pas connaître tout le monde. Il n'en restait pas moins que toutes les nationalités venaient étudier ici et le brun avait rencontré bon nombre d'étrangers. Des allemandes, des françaises, des suédoises et bien d'autres encore. Alors pourquoi ne pas espérer pour quelqu'un de sa patrie ?

En effet, il s'avérait que la Russie manquait beaucoup à Andrzej. Cela s'était d'ailleurs accentué récemment, à la rentrée justement. Après y avoir passé tout l'été, cela avait été dur pour le jeune homme de retourner dans ce pays pluvieux friand de gelée immonde et de mélanges culinaires infects. Aussi, il avait espéré guérir un peu sa nostalgie en ayant un compatriote en tant que colocataire. Evidement, le slave avait des amis ici mais, ne partageant pas la même culture ou les mêmes références, ce n'était pas pareil. Si encore Youri s'était laissé convaincre et serait venu avec lui... Encore une absence qui attristait l'étudiant. Il était ici dans un pays étranger – celui de sa mère certes, mais Andrzej n'y avait mis les pieds qu'une seule fois étant enfant – et sans son meilleur ami. Autant dire que cette situation le pesait parfois, même s'il n'en laissait rien paraître.

Soupirant, le jeune Miaskovski arriva devant le tableau et chercha son annonce des yeux. Il ne lui restait plus qu'à la traduire s'il voulait une quelconque réponse. Ce n'était pas dramatique mais il était un peu déçu qu'il soit apparemment le seul soviétique de l'université. A moins bien sûr qu'ils n'aient déjà un logement ailleurs... Andrzej était alors en train de penser que la moindre des choses aurait été de mettre un petit mot dessus pour indiquer qu'il n'était pas le seul quand un étudiant lui adressa la parole. Se tournant, il se trouva alors face à un jeune homme assez typé portant un carton dans ses bras. Certainement un petit nouveau qui venait emménager et demandait des renseignements. Cependant, son petit discours lui redonna immédiatement le sourire.

- Hey, tu as pu lire l'annonce ! s'exclama-t-il avant d'enchaîner dans sa langue natale. Tu es russe toi aussi ?

Sa bonne humeur retrouvée, le slave s'écarta un peu du tableau pour en laisser un libre accès et questionna son possible compatriote et peut-être futur colocataire.

- C'est moi qui l'ai mise, ça t'intéresses ? C'est pas très loin d'ici, juste quelques kilomètres à peine. Au fait, je suis Andrzej se présenta-t-il en tendant la main.

Trop tard, il se rendit compte que son interlocuteur allait avoir un peu de mal à lui serrer la main avec son carton qui l'encombrait.

Andrzej avait perdu tout espoir de voir un compatriote se manifester et voilà que juste au moment où il allait abandonner et se résigner à partager son nouvel appartement avec un anglais pur souche – quoique ce n'était pas forcément un mal, mais à choisir... - un autre russe se pointe ! Ou du moins c'était ce qu'il croyait... En effet, comment aurait-il pu savoir qu'un non-soviétique arrive à déchiffrer la petite annonce écrite en cyrillique qu'il avait accroché à ce tableau ? Aussi, un sourire ravi aux lèvres, le brun avait tendu sa main à l'autre étudiant qui vu son air un peu perdu était de toute évidence un première année. Bizarrement, cela ne faisait pas si longtemps non plus pour lui mais ça lui paraissait bien loin à présent. Il avait peut-être eu d'ailleurs le même air quand il avait débarqué ici il y avait déjà un an. Andrzej était alors le petit nouveau qui avait quitté son pays et qui démarrait une nouvelle vie dans un pays étranger. Même s'il avait de la famille ici en Angleterre, le jeune Miaskovski ne les connaissait pas et n'avait même pas pris la peine de prendre contact, au grand dam de sa mère du reste. Mais à quoi bon ?

Hormis ça, le jeune homme en face de lui semblait d'origine modeste – si l'on en jugeait ses vêtements et le misérable carton qu'il maniait avec précaution – et avait un physique avenant. Non pas que le russe avait pour habitude de jauger les corps masculins mais, en toute impartialité, il reconnaissait qu'il avait l'air bien fait de sa personne et plaisait à coup sûr aux filles. Certainement une future concurrence pour séduire les très nombreuses étudiantes sexy qui peuplaient l'université. Néanmoins, Andrzej ne redoutait en aucune façon l'arrivée d'un éventuel rival – autrement il aurait dû se débarrasser de Manu ^^ – au contraire, cela pourrait pimenter un peu plus les choses. L'inconnu lui répondit alors et enleva tout espoir qu'il nourrissait encore.

Roumain... ? Cela faisait du bien d'entendre à nouveau parler sa langue mais, effectivement, on était un peu loin d'un coloc' russe... Il n'y aurait donc pas un peu de sa Russie avec lui... L'étudiant fut par conséquent un peu déçu mais finalement pas tant que ça et ce n'était pas si surprenant. Il restait tout de même la camaraderie et la mentalité typique des gens de leurs pays. Le soviétique était quand même persuadé qu'il pouvait y avoir une bonne entente entre eux. Etant tous les deux des déracinés, cela ne pouvait que les rapprocher.

- Ah... la Roumanie... Je ne connais pas très bien mais j'ai quand même eu l'occasion d'y aller... Tu parles vraiment bien le russe en tout cas. Pour ce qui est de l'anglais, tu fera vite des progrès, tu verras.

Andrzej avait en effet voyagé un peu partout en Europe de l'Est avec Youri lors de leur année sabbatique et avait donc visité un peu la Roumanie. Bien sûr, ils étaient surtout restés dans le coin des bars branchés mais ils s'étaient aussi aventurés dans des lieux peu recommandables pour y découvrir les différentes magies qui y étaient pratiquées. Là-bas, le brun y avait appris quelques maléfices tout à fait intéressants. Certes, cela était considéré comme de la très noire magie ici en Angleterre, surtout avec les événements qui se déroulaient en ce moment, mais le jeune sorcier estimait que tout apprentissage était bon à savoir. Il ne comptait pas forcément se servir de ces dangereux sortilèges, mais cela pouvait toujours être une option si la situation le demandait.

- Je m'appelle Nikolaï. Oui ton annonce m'intéresse beaucoup... Mais je n'ai pas beaucoup de moyens. Seulement une bourse d'études.

Cela confirmait ainsi sa première opinion à savoir que le nouvel étudiant avait peu de revenus. Toutefois cela ne gênait en rien le Sang Pur. Il venait d'une famille fortunée et ne manquait absolument de rien, aussi ce n'était pas l'argent qui le motivait. Il pouvait très bien se payer son appartement tout seul, ce n'était d'ailleurs pas pour cette raison qu'il cherchait un colocataire. C'était tout simplement pour la compagnie et le prix l'importait peu. Néanmoins, Andrzej respectait la fierté du mâle qui lui faisait face et ne l'insulterait pas à l'hébergeant gratis. Si par malheur lui-même se retrouverait un jour sans une mornille – chose impensable mais on ne savait jamais ce que pouvait bien réserver l'avenir - il n'apprécierait pas qu'on lui fasse la charité. Aussi, bien que diminué, il lui proposa un prix qu'il estimait tout à fait correct.

- Ne t'en fais pas, le loyer n'est pas très cher, 20 gallions par mois, mentit-il. Normalement, ta bourse devrait aider à tout payer.

Au pire, il pourra encore baisser le prix. Ce n'était pas comme s'il y tenait après tout. Toutefois, bien qu'Andrzej n'avait aucune idée du montant accordé aux bourses, cela lui paraissait une offre tout à fait raisonnable. Son colocataire potentiel avait pendant ce temps reprit en main son carton, ce qui ne devait pas être très confortable. D'ailleurs, être debout en plein milieu du hall avec les va-et-viens incessants des étudiants et encombré de ce chargement apparemment fragile d'après l'attitude du roumain n'était pas des plus pratiques pour maintenir une telle conversation. L'oeil du russe fut alors attiré par une petite altercation devant le panneau d'affichage, deux filles qui se disputaient une annonce. L'une essayant de l'arracher des doigts de l'autre. L'offre devait vraiment être alléchante... Peut-être même plus que la sienne... Cela serait dommage que Nikolaï refuse finalement, il avait l'air sympa et ses origines étaient quand même proches des siennes.

- Sinon, ça peut être négociable... compromit le brun. Au fait, moi aussi, je suis en Elite Magique. En deuxième année. On aura pas mal de cours en commun.

[HJ : désolée pour le retard ]


Nikolaï alternait entre le russe et l’anglais, n’étant sans doute à l’aise dans aucune de ces langues. C’était en effet bien plus dur pour lui, même s’il avait appris plus ou moins par l’intermédiaire de livres. Cela donnait des bases évidemment et cela suffisait amplement pour se faire comprendre, mais pour parler couramment une langue, il fallait bien plus que ça. Le roumain se débrouillait pourtant bien et Andrzej était persuadé que d’ici quelques mois il n’aurait plus aucun problème de ce côté-là. Il ne resterait plus que son accent d’Europe de l’Est que les filles adoraient tant ! Lui-même avait eu de la chance, autrement il aurait été plutôt perdu ici et l’efficacité des sortilèges de traduction n’était pas suffisante pour lui permettre de continuer ses études en Angleterre s’il n’avait pas su le langage. Andrzej était russe avant tout, il y était né et y avait vécu pratiquement toute sa vie. Néanmoins, sa mère était anglaise – et avait encore beaucoup de famille dans ce pays, famille qu’il avait encore à rencontrer d’ailleurs – et avait particulièrement tenu à ce que ses enfants maîtrisent parfaitement sa langue. Le jeune Miaskovski n’y avait donc pas échappé et, comme il était souvent de coutume chez les gens de l’Est, avait des facilités et avait vite appris. De ce fait, il était désormais trilingue, son passage à Durmstrang l’ayant conduit à maîtriser également l’allemand.

- J’y suis pas resté longtemps mais c’est vrai que c’est un beau pays. J’y suis allé avec un copain et on a surtout fait la partie magique. On y a trouvé des sorciers qui utilisaient une magie qu’on ne connaissait pas. En fait, je trouve que chaque culture a sa propre magie et c’est super intéressant de connaître d’autres pratiques.

Bien sûr, Andrzej n’allait pas préciser que c’était la magie noire qui avait le plus retenue son attention. Beaucoup identifiaient encore cet intérêt avec la mort et la destruction. Or, le slave n’avait pas le désir particulier d’occire tous ceux qui le gênaient. La magie noire pour lui était fascinante et offrait bien plus de possibilités que la magie dite traditionnelle, et évidemment était beaucoup plus puissante.

Attendant la réponse qu’il espérait favorable du jeune roumain sur sa proposition de loyer, l’attention d’Andrzej fut à nouveau attirée par la scène qui se déroulait juste à côté d’eux. Le différent ne semblait pas être réglé, loin de là ! Le volume sonore des filles s’élevait de plus en plus et la bataille pour l’annonce devenait plus acharnée. Légèrement amusé, le soviétique les regardait avec un petit sourire en coin. Il n’était pas un fervent adepte des crêpages de chignons et à vrai dire, comme tout bon mâle hétérosexuel, il préfèrerait les voir faire plutôt autre chose entre elles... Cependant, c’était amusant de voir d’aussi jolies sorcières aussi bien apprêtées oublier complètement la magie au profit de se donner des coups d’ongles parfaitement manucurés. Quoique finalement cela avait du bon qu’elles s’en tiennent à des techniques moldues. Le brun n’avait aucune envie de se retrouver la cible d’un sort mal lancé et, s’il en jugeait le soin avec lequel il tenait son carton, Nikolaï non plus. Il serait d’ailleurs peut-être temps qu’ils quittent les lieux avant qu’elles se rappellent leurs baguettes et que les choses ne se gâtent...

Pour l’instant, son vis-à-vis semblait perdu dans ses pensées. Peut-être que son offre était trop élevée finalement ? C’était le problème quand on ne manquait pas d’argent, on n’en connaissait plus vraiment la valeur. Une petite somme pour lui pouvait représenter pour le roumain une somme colossale ! Évidemment, ce n’était pas un miséreux, autrement il n’aurait jamais pu venir étudier ici, mais ses moyens semblaient quelques peu limités.

- Ce n'est pas aussi cher qu'on le dit en Angleterre. C'est d'accord. Il me restera assez pour la nourriture. C'est même parfait

Et bien, tout s’arrangeait finalement. Il ne serait plus seul dans son appart’ !

- Super ! s’exclama Andrzej avec une petite tape amicale.

Le russe était enjoué, la solitude avait parfois du bon mais cela lui pesait quand il s’y retrouvait confronté un long moment. Cela ne lui arrivait pas fréquemment vu qu’il était très souvent en compagnie mais il évitait de trop ramener les filles chez lui. Ainsi, elles ne risquaient pas de s’y installer ! De ce fait, il était parfois un peu désoeuvré. Même si ce n’était pas un compatriote comme il avait espéré au prime abord, il ne perdait pas au change. De toute manière, leurs pays de naissance étaient proches et cela les rapprochait évidemment. Ils n’avaient pas la même vision des choses que les résidents des îles britanniques possédaient. Par ailleurs, il avait un bon feeling avec Nikolaï et il avait l’intime conviction qu’ils s’entendraient bien, aussi la nationalité avait finalement moins d’importance qu’il avait pensé.

- Les filles d'Angleterre sont toutes pomponnées. Dommage, celles-ci vont abîmer bêtement leur maquillage. Est-ce la fameuse liberté de l'Angleterre qui les rend si provocantes?

Suivant le regard du roumain, le brun vit qu’il parlait des sorcières dont la colère déformait à présent leurs jolis traits. Cela n’allait pas tarder à dégénérer, et tout ça pour une simple annonce Décidément, les femmes resteront toujours un mystère. On avait beau penser les connaître, on était tout de même surpris à chaque fois par une réaction inattendue.

- C’est vrai qu’ici les mœurs sont beaucoup plus libérées. Tu verras très vite sur le campus comme les filles sont sexy... On peut dire qu’elles ont l’art et la manière de retenir les regards...

Au grand plaisir des yeux gourmands du russe... La plupart du temps, ces jeunes femmes ne s’encombraient même pas des robes sorcières traditionnelles qui cachaient leurs formes, préférant revêtir des tenues courtes et moulantes. Et Andrzej serait vraiment le dernier des imbéciles s'il s'en plaignait ! Pendant ce temps, le roumain était revenu sur le sujet de la location et demandait plus de renseignements.

- Des règles ? Non, pas vraiment, je suis pas compliqué... Ah si, faudra alterner pour les courses et tout ça mais à part ça... En général, je ramène pas trop souvent de filles à la maison, sinon après c’est le bazar, mais si tu y tiens, tu pourras faire venir ta copine. Ça ne me dérange pas.

A ses risques et périls de toute façon... Andrzej ne pouvait jamais résister à un joli minois et draguer était aussi naturel pour lui que de respirer... S’il ne tenait pas à ce que le soviétique ne la lui vole, il ferait mieux de s’abstenir de la lui mettre sous les yeux.

- Tu voudrais peut-être visiter l’appart’ pour être sûr ou t'y installer de suite ? Tu as du temps maintenant pour y aller ?