Le brave garçon sourit immédiatement après avoir entendu la délicate remarque de sa future compagne.
Pourquoi pas…
Que de trémolos dans son cœur enhardi par cette soudaine déclaration enflammée !

Tentant le tout pour le tout, il récita une de ses paroles enchanteresses apprises dans Jane Eyre :

« Je veux mettre moi-même la chaine de diamants autour de votre cou et placer le cercle d’or sur votre front ; car sur ce front du moins la nature a posé son cachet de noblesse. Je veux attacher des bracelets sur ces poignets délicats, et charger d’anneaux ces doigts de fée ».

Se reprenant une certaine contenance, une lueur énamourée brillant dans ses yeux, Antony poursuivit la déclaration de Rochester sans s’arrêter un instant :

« Vous êtes belle à mes yeux ; vous avez la beauté que j’aime, vous êtes délicate et aérienne. Je forcerai le monde à vous déclarer belle. Demandez moi quelque chose Jane, euh, Daphnée», reprit le garçon rapidement, «la moindre chose ; je désire être prié ».

Il en avait des sueurs glacées qui coulaient désormais dans son dos transi. Il la regarda, avec tout l’amour qui lui avait été donné de porter pour chaque créature qu’il croisait chaque sainte journée. Il sortit d’un geste rapide la lettre qu’il avait destinée à une autre et raya sous l’air ahurie de la jeune fille, le nom de la serdaigle pour y écrire le sien.

« Tenez, gente dame aux doux yeux ardents… Ceci est pour vous et rend hommage à votre beauté ainsi qu’à votre finesse d’esprit ».

Il s’avança d’un air galant et lui saisit sa main pour la baiser avec passion

« Vous êtes mon soleil qui illumine ma vie, douce daphnée »

Etrangement, son discours enchanteur ne récolta ni sourire appréciateur ni baiser ardent. Ne comprenant pas ou sa hardiesse avait pu le mener, il laissa planer un petit instant de silence avant de saisir sa main blafarde.

« Je suis navré, mon plus grand défaut est certainement celui que vous venez de voir, daphnée. Je crois que nous ferions mieux de reprendre les présentations. Je me suis certainement montré ton… pressant pour une première rencontre, n’est-ce pas ? »

Feignant d’ignorer son soupir agacé, Antony reprit en mimant une révérence élégante :

« Mon nom est Goldstein, Antony Goldstein et je suis ravi d’avoir percuté une aussi jolie dame que vous. Non pas que c’est un plaisir de vous avoir fait tomber, mais le bonheur a été de partager avec vous un brin de conversation. Je viens de constater que vous êtes bien silencieuse… Pour un serpentard, je m’entend. Vous avez d’habitude la langue si bien pendu que je préfère m’abstenir de vous approcher ».

Le jeune homme saisit son roman écorché et le brandit sous le nez de son interlocutrice.

« Voyez ! L’héroïne de ce livre vous correspond un peu, je trouve. Orgueil et préjugé est réellement pour moi une œuvre incontournable ».

Il s’apprêta à passer son bras autour du cou de la jeune fille puis se ravisa, pensant que cela serait certainement un peu trop osé.

« Comme tout bon serdaigle », ajouta-il avec un gloussement partagé par Daphnée, « Je suis peut-être un peu trop attaché aux ouvrages écrits par des moldus ou des sorciers. J’ai toujours trois livres dans une journée. Le matin jusqu’au midi, me voila le nez plongé dans un livre de science fiction, l’après-midi, une œuvre romantique et le soir… Un livre d’horreur. Mais il m’arrive bien sûr, à la place d’un de ces bouquins, d’étudier ‘sérieusement’ ».

Il rigola, seul, quelques secondes et rajouta de nouveau :

« Voici encore un de mes défauts. Le plus souvent on me considère comme un doux dément, semble-t-il, trop plongé dans ses romans».

Le silence qui s’abattit à la suite de ces propos le laissa plus surpris qu’ennuyé. Il n’était certes pas garçon séducteur pour une mornille, mais garçon séduisant, il n’y avait pas de doute. Bien que beaucoup le considère comme sa dernière confession l’avait révélé à Daphné, il n’en demeurait pas moins un fils Goldstein. Il tentait désespérément de se montrer sympathique, et surtout sous son meilleur jour, mais il ne récoltait que mépris. Peu apprécié par tout ceux qu’il croisait, le solitaire endurci qu’il n’était pas s’affermissait de jour en jour dans son cœur tendre.

Antony jeta un rapide coup d’œil aux alentours, vérifiant ainsi que personne ne remarquerait son nouvel échec féminin. Il venait même à douter de sa préférence… Non, sur ce point là il n’y avait aucun doute possible. Il séduisait uniquement les filles… Bien que cela se solde toujours par un échec.

«Je suis vraiment heureux de vous connaître mais je remarque que je parle, parle sans vous laisser une possibilité de vous exprimer. En quelle année êtes-vous ? Vous plaisez-vous ici ? Pourquoi veniez-vous dans ce couloir ? »