Deryn était sous le choc. Elle ne bougeait pas, plantée devant le désastre, d'abord sans savoir quoi faire. Il n'était pas difficile de se mettre à sa place : elle avait pensé passer un nouvel an joyeux et apaisé, une pause revigorante dans leur lutte contre les Mangemorts, et voilà que ses camarades de l'Ordre débarquaient au Castel couverts de sang, pour certains dans un état clairement critique, et il n'y avait personne d'autre pour gérer la situation. Un cauchemar pour l'étudiante si discrète et sensible. L'ancienne Serdaigle avait l'esprit remarquablement vif, mais n'avait jamais vraiment été dans son élément ailleurs que dans la théorie. Mais aujourd'hui, elle devrait se mettre à la pratique : elle n'avait pas le choix. Elle seule pouvait prendre les choses en mains, Dumbledore n'était pas là, Lupin et Kingsley faisaient partie des blessés... Par bonheur, la galloise garda un calme parfait malgré l'angoisse qui devait l'envahir, et ne resta pas longtemps prostrée. Elle distribua les ordres, claire et précise, efficace. Une preuve de plus du potentiel de la jeune femme.

Faith déposa Ophelia dès que ce fut possible, le plus délicatement qu'elle le pouvait -les brûlures de la grecque semblaient sérieuses. Elle l'avait maintenue le plus solidement possible lors du voyage en cheminée, mais ce n'était pas ce mode de transport qui améliorerait l'état de l'auror. En fait, elle semblait sur le point de perdre connaissance, et l'Anglaise continua de la soutenir jusqu'à ce que Deryn donne ses instructions. Elle s'exécuta aussitôt, puisqu'elle était la seule encore en parfait état -Seigneur, quelle injustice. Elle laissa donc Ophelia aux premiers bras qui pourraient la recueillir et s'élança dans le Castle à la suite de Niallàn, baguette en main. Elle ne mit pas longtemps à rassembler ce dont sa camarade de cours avait besoin à l'aide de deux ou trois Accios, et elle rejoignit rapidement la future médicomage, qui avait choisi Mole pour patient numéro un. Logique. Elle déposa d'abord les bassines d'eau qu'elle avait fait transporté par magie, puis les linges qu'elle avait entassé sur son avant-bras.

-Quelqu'un peut me dire ce qui s'est passé ?

Bien sûr. Faith n'hésita pas un instant à répondre -elle préférait mille fois avouer clairement son crime plutôt que d'entendre la voix des autres l'accuser. Elle ne baissa pas les yeux et ses cordes vocales ne tremblotèrent pas. Non. Elle fixa sa camarade, les bras croisés sur sa poitrine, prête à recevoir le regard horrifié.

-J'ai brisé le tabou.

Elle faillit compléter son aveu d'un bref résumé, mais les autres s'en chargeraient bien. Et puis, pas besoin d'explications pour voir de quoi souffrait Ophelia, quant à Mole, l'étudiante n'avait pas la moindre idée de ce qui s'était passé entre lui et la mangemort. Ce qu'elle voulait maintenant, c'était quitter la pièce si Deryn n'avait plus besoin de son aide.

Quand elle avait éclaté de rire en entendant sa soeur se plaindre des effets de l'alcool, elle n'aurait jamais imaginé ça. Jamais Niallàn n'aurait pu croire qu'en un claquement de doigt, les trois Cadell se retrouverait en Écosse, dans le castel de leur professeur de magie noire. Jamais elle n'aurait imaginé que la scène aurait été ainsi. Comment étaient-elles venues déjà ? Transplanage, sans doute. Elle ne se rappelait plus, pas même de l'appel qui les avait attirés ici, tous les trois, et encore moins de ce qu'ils avaient dit à Emmanuel pour le laisser tout seul un soir de Nouvel An. Quand elle avait dit à sa soeur qu'elle souhaitait que la nouvelle année démarre mieux que celle en cours, elle n'aurait jamais cru que celle-ci pouvait être encore pire. C'était horrible, et elle était perdue. Elle sentait la panique de Deryn, incapable de se concentrer sur autre chose que sa soeur, sa grande soeur qu'elle devait protéger et elle en oubliait presque les quelques corps sous leurs yeux. Il fallait surveiller Deryn. Il fallait la protéger, l'aider, la soutenir. Puisque l'aînée allait devoir gérer une situation de crise comme jamais elles n'en avaient connu, Niallàn devrait être là, attendre qu'elle craque, lui apporter son aide comme elle le pourrait. Doucement, elle rendit son sourire à sa soeur et balaya la pièce des lieux, se rapprochant de la rouquine pendant que celle-ci distribuait les tâches, meublait le silence trop lourd – et assez relatif – qui planait dans la pièce. Obéissant aux ordres, elle entraîna Faith dans les couloirs du château, se passant de mots inutiles pendant qu'elles s'orientaient tant bien que mal, pressées et désorienter. Elle abandonna Faith et Crystal à leur tâche et fila dans la bibliothèque, empilant les livres sur un bras, les faisant glisser des étagères de l'autre main. Finalement, il lui fallut un peu plus d'une dizaine de minutes pour tout rassembler et faire voler un chaudron plein de bouquins et de fioles dans la pièce principale, ponctuant la révélation de Faith d'un bruit sourd quand le fond du chaudron toucha le sol.

Oh.

Prendre la situation en main, aider Deryn, aider Faith. Pas la peine qu'elle se retrouve au centre de l'attention coupable et mal à l'aise quand il y avait tant de blessés.

« Il fallait que ça arrive. »

Un soupire, et elle sortit les bouquins du chaudron d'un coup de baguette, les organisant en trois piles distinctes en un éclair. La médicomagie, donc les bouquins qui traitaient des soins divers et variés, les potions, ingrédients et onguents, et une autre pile inutile mais rassurante, sur diverses guerres et révolutions qui avaient marqué l'Histoire de l'Ecosse et de la Grande-Bretagne. Ça ne servait à rien dans la situation actuelle, mais elle s'était sentie obligée de les prendre, comme si les choisir rendait la situation moins anormale. Elle laissa à un des elfes de maison qui l'avait suivie le soin de répartir les fioles par terre, à côté du chaudron qu'elle avait rapporté et laissa échapper un vague grognement mal à l'aise, n'ayant rien à faire tant que les deux autre petites créatures mises à contribution n'avaient pas rapporté le reste du nécessaire à potion. Une moue nerveuse pour souligner le fait qu'elle ne savait pas quoi faire et la rouquine haussa les épaules. Elle était la plus jeune, Crystal n'étant pas revenue avec Faith, et ça compliquait bien les choses. Elle laissa une nouvelle seconde s'écouler, le temps d'évaluer de nouveau la situation et ses possibilités, et s'avança vers Faith, posant une main sur son épaule, tentant d'être aussi rassurante que possible, sans être vraiment convaincue.

« Ceux qui ont le temps de critiquer ont le temps d'aider... »

Elle grimaça, ridicule et maladroite, priant pour que ça ne soit qu'un rêve. Juste une illusion bizarre due à un enchantement quelconque. Et tout allait se dissiper. Ou pas. Et dans ce cas, il fallait qu'elle parle. Ça n'était pas son rôle, c'était inutile, c'était déplacé et assez maladroit, mais elle en avait besoin. Et que ceux qui n'étaient pas contents aillent au Diable.

« De toute façon, c'est pas le moment de s'occuper de ça. Tu dois être fatiguée, tu devrais aller retrouver Crystal, sortir d'ici, t'éloigner un peu des blessés. Ça te fera du bien. En plus on est déjà à l'étroit. Et puis leurs blessures sont visibles, Der' va gérer hein Deryn ? Alors on s'en fiche de ce que t'as dit ou pas Faith. »

Elle rajouta bien un 'Toute façon ils vont tous crever', un peu submergée par sa haine à l'encontre de ceux qui avaient mis le groupe dans cette état mais se retint, perdue. Elle était inutile, elle devait dire autre chose. Elle devait prendre une partie du fardeau pour soulager Deryn, et cesser de penser.

« J'ai ramené pas mal de bouquins, ceux qui ont besoin de renseignements pour les soins et les potions, vous pouvez piocher dedans, tant que vous les laissez à portée pour que je fasse les onguents. Je m'occupe d'Ophélia, au moins pour les brûlures, on a pas besoin d'un optimal en potions pour savoir préparer un bon onguent. Pour ceux qui ont rien à faire, vous pouvez lire, j'ai trouvé des trucs bizarres. Il y a plein d'elfes aussi, les Ecossais... »

Sont des barbares. Mauvais plan.

« Sont prévis... prévoyants. Je m'occupe d'Ophelia donc. »

Se concentrer sur sa tâche, oublier le reste. Elle demanda à un elfe de déblayer un coin par terre, d'y étendre une couverture et y déposa la Grecque avec son aide, sans trop savoir par où s'y prendre. Nettoyer, déblayer. Et enlever le bout de bois qui s'était planté dans son dos. D'un geste rapide, elle dégagea le visage de la jeune femme, écartant les mèches que le sang collait sur sa peau, essuyant ses joues avec la manche de sa robe de soirée. Elle devait regarder Deryn, faire pareil. Et mettre ses mains dans l'eau. Abrutis de mangemorts.

{HJ = C'est un peu brouillon mais vu la situation, ça me semble réaliste, si ça va pas je changerai. }

Elle n’était plus tout à fait consciente.

Son esprit était encore bien éveillé à l’urgence du moment mais pour une dizaine de minutes, elle ne possédait plus son corps. La brune ne sentait strictement rien. Ni les mains ou le corps de Faith contre la peau calcinée de son dos, ni la cacophonie du chaos autour de leur petit groupe paniqué. Elle ne voyait que les visages flous de ses confrères et consoeurs, certains tordus de douleur, d’autres tendus d’inquiétude. La seule chose dont elle était absolument convaincue dans son atonie, c’était que ce qui s’était produit ce soir aurait un impact majeur sur la vie de tout le monde qui avait été présent. Qu’il s’agisse des gens de l’Ordre plus ou moins blessés, de ceux qui allaient tenter de les remettre sur pied ou même les Mangemorts. Et cette seule pensée lui brisa ce qui restait de son cœur; elle ne voulait pas voir les gens souffrir, elle ne voulait pas être un boulet pour ses camarades. Et, d’une autre façon, elle voulait plus que n’importe quoi d’autre que James se torture l’âme de remords.

Ce fut possiblement la dernière pensée logique qui traversa l’esprit de la Grecque.

Alors que l’on déposa son corps pratiquement inerte sur une couverture étendue au sol, son corps fut assailli d’un brusque vague de douleur aigue. C’est la seule chose qui importait ; réduire, éliminer cette sensation violente qui lui donnait des nausées. Ses doigts se crispèrent fermement contre eux-mêmes, ses ongles se creusant dans ses paumes, puis elle se roula lentement sur son côté. Une longue plainte s’échappa d’entre ses lèvres, se transformant subitement en cri lorsqu’elle senti les mains de la jeune Cadell enlever le morceau de bois qui s’était logé entre ses omoplates. La plaie saigna abondamment ; elle était profonde, irrégulière, vilaine. Juste le sang contre sa peau brûlée la faisait trembler d’inconfort. Elle gémissait constamment, sans savoir pourquoi. C’était presque apaisant. Sentir ses bronches trembler.

« A…Arrête… Je t’en prie. J’ai mal, arrête… », se lamenta-t-elle, ses yeux bleus larmoyants et gonflés de larmes levés vers Niallan.

[Hj: Pardon pour la longueur. Et puis, Blod', j'espère que je ne t'ai pas trop pnjiser, si c'est le cas avise moi ]

D'une façon général, Thadeus n'avait pas l'habitude de passer des réveillons géniaux. Il se contenter de siroter une petite coupette de champagne une fois les douze coups de minuit sonnés, bien confortablement calé dans un fauteuil, au coin du feu.
Pour une fois, cette nouvelle année s'annonçait plus agitée, pour autant, il aurait réellement préféré qu'elle ne le soit pas de cette façon. Un elfe avait accouru pour lui signaler que des membres de l'Ordre s'étaient invités par la cheminée, et qu'ils semblaient dans un sale état. Il avait donné l'alerte aux autres membres, qui n'avaient pas tarder à affluer.

Il avait laisser les secours s'organiser pour monter dans la serre, où il savait trouver plusieurs échantillons de plantes qui soulageraient les douleurs, désinfecteraient les plaies, et aideraient les blessures à guérir. Aussi n'arriva-t-il que plus tard dans la salle où les soeurs Cadell s'étaient déjà mise au travail. Il eut un bref regard admiratif pour les deux jeunes femmes, ce n'était assurément pas facile pour elles de se retrouver au milieu de tout ça, à devoir prendre des initiatives qui pourraient causer la mort de leurs patients.

Il approcha d'un pas décidé vers Deryn d'abord, et lui lança un regard encourageant. Puis il s'intéressa aux blessures d'Edward. Il était salement amoché, mais semblait inconscient. Thadeus farfouilla dans sa besace et en sortit plusieurs feuilles très épaisses d'un rouge sombre, il prit un bol et pressa les feuilles entre ses mains puissantes, en extrayant un jus noir, peu appétissant. Il tendit le bol à Deryn.

"Faites-lui avaler ça, c'est un revigorant, ça devrait nous donner un peu plus de temps..."

Puis sans un mot de plus, il se dirigea vers la cadette, qui s'occupait d'Ophelia. La Grecque était également mal en point, mais consciente. Si ses blessures étaient douloureuses et purulentes, elles s'avéraient moins fatales que celles d'Edward. De sa besace, Thadeus sortit plusieurs petites feuilles vertes, de forme ovale. Il les tendit à Niàllan.

"Faîtes-lui mâcher trois feuilles, ça devrait la calmer. Et prenez-en une pour vous..."

Et il en tendit une autre à Deryn.

"...Et vous aussi, ça devrait vous aider à vous apaiser et à vous concentrer."

Il avait vue des patients dans des états bien meilleurs que ceux-là y rester quand même parce que les médecins avaient paniqués. Et même s'il faisait confiance aux soeurs Cadell, il préférait ne pas prendre le risque d'un geste malencontreux.


[HRP: Me voilà enfin. J'ai pris le parti de filer un coup de main aux soeurs Cadell, par contre je sais pas trop trop de quoi souffre qui, donc si on pouvais me mettre un peu au jus, ça serait cool, merci. Et puis si jamais y'a quelque chose à modifier hésitez pas à me le signaler.]