[Désolée de cette attente. Je pense que ça valait le coup.^^]


Rien ne laissait présager qu'en cette nuit, une rencontre allait se faire. La Belle s'apprêtait à s'endormir profondément dans des draps souillés dont l'odeur ne lui revenait pas. Une violente querelle avec sa mère l'avait temporairement bannie de l'antre familiale. Elle avait été jetée dans la ruelle sombre et froide qui bordait leur maison, laissée seule à ses affaires, à cause d'une simple et stupide querelle mère VS fille. Elle s'était rendue dans le village le plus proche, cherchant en dernier recours un accueil ou un peu de chaleur au coin d'un feu. Après avoir toqué à plusieurs portes, où elle se fit suspecter, dévisager et enfin rejeter à chaque fois, elle parvint finalement à une porte en bois, munie d'un petit fenestron tout en haut. Mescaline put déceler une présence de lumière jaunâtre. Elle frappa à nouveau par trois petits mouvements vifs, et attendit que quelqu'un daigne lui ouvrir. Un cliquetis se fit entendre, la poignée tourna et une faible lumière éclaira un peu le visage glacé de la Belle. Elle avait tout juste prit le temps de prendre un bonnet et une lourde cape en quittant son domicile, et seuls ces vêtements l'avaient empêchée de se congeler complètement. En plein mois d'octobre... Fou comme le temps se gâtait, de plus en plus chaque jour. Un vieillard pointa alors le bout de son nez, entrebâillant légèrement la porte. On aurait dit qu'il était peu rassuré. Quelqu'un venant frapper chez lui aux alentours de onze heures n'était sûrement pas habituel pour l'homme. Une voix - appartenant sûrement à une personne encore plus fripée que celle qui se trouvait en face d'elle - retentit de derrière lui :

- Qui c'est, Georges ?

Mescaline esquissa un petit sourire, trop discret pour être remarqué par l'homme. Celui-ci resta muet.

*Tiens, tiens, tiens... Des Français, en plus !*

Elle posa une main de chaque côté, sur le mur encadrant la porte. Elle approcha légèrement sa tête et parla en un murmure, assez fort pour couvrir le bruit du vent qui lui sifflait aux oreilles :

- Je cherche un endroit où dormir, Monsieur.

Elle attendit un instant et après autorisation, elle pénétra dans la maison surchauffée, ce qui n'était pas désagréable lorsqu'on venait de l'extérieur. La vieille dame lui proposa un petit encas au cas où elle aurait faim. Mescaline accepta donc le morceau de pain frais et but une longue gorgée de tisane à la menthe - qu'elle trouva étrangement amère, mais elle n'osa rien dire. Elle alla dans une pièce sombre où un petit lit était prêt à la recevoir. Elle s'assit, ôta sa cape et son bonnet, conservant uniquement sa longue robe rougeâtre sur la peau.

Nous revoici au point de départ. Elle était à deux doigts de tomber dans un sommeil paradoxal, si bon après ces heures perdues. Elle ne cessait de penser, de réfléchir. Les températures chutaient, les tempêtes s'accumulaient, et ce fut tout juste si il ne s'était pas encore mit à neiger en ce mois d'automne. Ce dérèglement de la météo n'était pas dû à l'hiver qui approchait. Mescaline ne pouvait que suspecter les Détraqueurs... La Belle se retourna dans son lit. Lorsque le fameux prisonnier Sirius Black s'était évadé d'Azkaban, ces créatures n'avaient cessé de traîner partout où ils pouvaient. Qui sait... Peut-être une nouvelle évasion qui avait eut lieu, mais la jeune femme en doutait, elle aurait été l'une des premières à le savoir. Une telle tranquillité la plongea enfin dans les bras de Morphée.

A peine cinq minutes plus tard - lui sembla-t-il, du moins - elle tira ses draps d'un blanc cassé, se rendant compte qu'elle dégoulinait de sueur. La chaleur était devenue oppressante et l'avait pratiquement étouffée. Il devait s'être écoulé plus de cinq petites minutes entre le début et la fin de sa nuit. Elle posa brutalement une main nerveuse sur sa table de chevet, mais rien de ce qu'elle avait l'habitude d'y trouver ne se fit sentir. Elle se redressa et se leva hors de son lit. Lorsqu'elle prit enfin conscience de l'ampleur de la pièce, elle réalisa qu'elle n'était pas dans la petite chambre minable qui était sienne. Elle posa un nouveau regard sur la petite table d'angle. Le morceau de pain s'était un peu rassis, mais la faim lui martelait l'estomac. Après avoir arraché un morceau de mie de la croûte, elle enfila à la va-vite sa cape et son bonnet, décidée à ne pas rester dans cette chaleur une minute de plus. En passant, Mescaline observa l'horloge qui indiquait presque minuit. Elle quitta discrètement le lieu, après s'être occupée de ses habitants. Elle ne devait pas tuer, elle se contenta donc d'un sortilège d'Amnésie. Puis, sur la pointe des pieds, elle s'engouffra à nouveau dans le froid mordant de la ruelle. Une folle envie de sortir, de se dégourdir les jambes à nouveau alors qu'elle avait un lit et que sa pièce était chauffée. Retourner là où elle était arrivée tirait d'une certaine inconscience de sa part. En bref, la Belle ne savait délibérément pas ce qu'elle faisait, comme si elle était habitée par une toute autre personne, aux buts tout aussi différents des siens. Elle marchait et c'est à cet instant qu'elle remarqua qu'elle était pieds nus. Elle grimaça. Une douleur se fit sentir sous son pied mais elle ne chercha pas à savoir ce qui en était la cause. Elle continua de marcher.

*Arrête-toi !* disait son être, mais son corps n'obéissait plus.

Elle craignit un instant d'avoir été victime d'un sortilège d'Imperium. Possible... Car, contrairement à ce qu'elle pensait, le village dans lequel elle se trouvait n'était pas moldu, elle avait reconnu Pré-Au-Lard, ses boutiques, son ambiance. Elle soupira et arriva enfin à hauteur d'un petit croisement de rues, son pied se crispant à chaque pas. Lorsqu'elle dévia, elle déboucha sur une sorte de place. Elle put voir un paysage pour le moins plaisant. Malgré les bons moments qu'elle avait vécu à Poudlard - elle s'y été formée - elle ne devait plus le considérer sous cette forme. Elle devait voir cette silhouette géante de château comme cible et ennemi. La jeune femme s'avança lentement jusqu'à se trouver au centre de la place, le regard rivé sur le château. Il était impressionnant de voir comment ses contours étaient dessinés dans le ciel clair. Sans la lune pleine, il aurait été impossible d'accéder à une si belle vue. Un bruissement la surprenant, elle se retourna vivement, baguette levée. Une silhouette était adossée contre un mur de maison, sans bouger. Homme ou créature, il n'avait pas intérêt à faire le moindre pas de travers, ou bien Mescaline l'expédiait au fin fond des abysses...

La Belle était comme figée, sa baguette toujours rivée sur la silhouette sombre. Qui était-ce ? Qui pouvait bien rester là, adossé contre un mur à scruter les cieux ? N'avait-il rien d'autre à faire ? Elle resta immobile, essayant de détecter les mouvements de l'inconnu qui s'avançait furtivement vers elle. La tête continuait à lui tourner, elle n'arrivait pas à reprendre ses esprits. Mais qu'est-ce qui avait bien pu provoquer cette réaction chez elle... ? La chaleur étouffante de sa chambre d'une nuit n'y était pas pour grand chose. Elle se tritura les méninges pour se souvenir. L'hospitalité de ces vieilles personnes, qui n'avaient pas l'air d'avoir de mauvaises intentions, avait légèrement adouci les idées que Mescaline avait derrière la tête. La petit encas alimentaire, et... la boisson. Mescaline écarquilla ses yeux bleus, comme prise de panique. Elle aurait voulu cracher mais le liquide ingurgité était certainement déjà dans son estomac. Elle était persuadée qu'un élément y avait été ajouté, un ingrédient malsain. Rien à voir avec l'Imperium. De plus, la Belle avait le sommeil léger, elle s'en serait certainement rendue compte. Malgré tout, une potion pouvait faire bien plus de dégâts, et Mescaline fut prise d'une soudaine panique intérieure, alors que son visage affichait un simple étonnement.

Elle cligna des yeux et se redressa tandis que l'autre personne présente sur cette place se trouvait à peine à deux mètres d'elle. Après qu'elle eut ôté sa capuche, la Belle put en déduire que c'était une femme. Elle ne s'en rendait pas spécialement compte, mais étant pieds nus, l'autre avait dû penser quelque chose d'assez désobligeant à son propos. Mescaline passa sa main libre sur son visage et se massa les tempes quelques fractions de secondes. Ces vieillards allaient le regretter...

"M'attaquer ?"

La femme se mit à rire d'un rire jaune. Lorsqu'elle eut finit, la Belle se décida à parler, sans savoir exactement ce qu'elle allait dire.

- On est jamais trop prudent... dit-elle de sa voix glaciale.

Elle n'était pas rassurée par son interlocutrice. Celle-ci avait des cheveux noirs, courts, et un regard inquiétant. Qu'elle ose faire le moindre mouvement de trop... Elle ignora le regard enflammé que lui lança la femme et répondit ensuite à ses questions d'un ton détaché :

- Premièrement. Qui que tu sois, mon nom ne te regarde en aucun cas. Je suis ici pour des raisons personnelles et, même si j'étais somnambule, n'aurais-je pas le droit de me balader au clair de lune ?

Elle fit un pas sur le côté, sans baisser sa baguette. Elle se mit à tourner lentement autour de la femme. Elle ne cherchait pas l'affrontement, elle n'était pas spécialement en état. Mais si l'autre la provoquait, ou tentait de la pousser à bout, la Belle ne comptait pas se laisser faire. Elle n'arrivait pas à mettre de nom sur cette personne, bien que le visage lui fusse étrangement familier. Elle la détailla sous toutes les coutures avant de lui demander calmement :

- Quel est ton nom, à toi ? Dis le moi, je te dirai peut-être le mien. Il me semble te connaître.

Elle s'arrêta à nouveau devant elle et leva son regard vers le ciel étoilé. Elle esquissa un petit rictus, sa vue s'étant un peu améliorée. Elle replongea ses yeux dans ceux de la femme. Sans éprouver la moindre crainte quand au comportement de l'autre, elle se détourna d'elle et alla s'asseoir sur le rebord de la fontaine qui ornait gracieusement la place. La pierre était glacée, mais le confort dont avait bénéficié Mescaline durant cette nuit n'était pas si important. Elle fit tournoyer sa baguette entre ses doigts, alors qu'un silence de plomb s'était abattu sur elles.

"Ce n’est pas très sûr de se balader ici, en ces temps, le sais-tu ?"

La Belle resta de marbre et ignora totalement la question, toujours plongée dans ses pensées. Non, elle ne comptait en aucun cas attaquer cette jeune femme. Elle la connaissait vaguement, et elle pensa qu'il s'agissait là d'une Mangemort. Mais, question de respect, elle n'allait pas lui poser ouvertement la question. C'était quelque chose qui ne se faisait décemment pas. Voilà pourquoi elle avait choisi la parole, et non la force. Mescaline n'était pas du genre violente, au contraire. Elle préférait encore largement calmer une bagarre que la provoquer. En revanche, il y avait d'autres activités qu'elle adorait qui, elles, révélaient sa vraie nature. Dissection. Taxidermie. Chirurgie. Tout pour lui plaire...

La femme dégaina sa baguette et commença à la lancer dans les airs, comme si elle voulait jouer. La Belle cessa aussitôt de faire tournoyer la sienne, avec un regard glacial, et s'adossa comme elle put sur un pilier de pierre qui constituait la fontaine, sans pour autant quitter la femme des yeux. Peut-être était-elle parmi les siens. Et si c'était le cas, comment allait-elle devoir réagir face à cela ? Mescaline n'en savait rien. Ce n'était pas dans ses habitudes de se retrouver confrontée à une personne ayant des intentions aussi mauvaises que les siennes, mais qui, tout de même, appartenait à son camp.