Jason Lister avait entendu parler du Laughing Inferi en grand bien. Par ailleurs, la simple idée d'un casino/club/bar dans l'Allée des Embrumes l'emballait. Non pas qu'il était un joueur compulsif, presque en réalité, mais il pouvait déjà imaginer que c'était le genre d'endroit qui lui convenait parfaitement. Rien que l'emplacement promettait déjà une clientèle plus intéressante que sur le Chemin de Traverse et donc des rencontres possiblement plus sympathiques. Le nom présageait lui un humour qu'il partageait et enfin qui n'aimait pas boire, jouer de l'argent et draguer parce que c'est ce qu'il comprenait par club. Bref, un endroit des plus agréables où il avait plus que hâte de poser les pieds. C'est ainsi qu'en début de soirée il se retrouva en face du fameux Laughing Inferi, la devanture était des plus sobres mais mettre des couleurs pétantes dans l'Allée des Embrumes aurait révélé un manque de finesse et de goût. Le blond hésita un instant, puis toqua à la porte noire.

La porte s'ouvrit dans un glissement presque soyeux. Le blond entra lentement se méfiant de ce qui pouvait arriver. La première chose que Jason remarqua était un magnifique miroir mural, les boiseries entourant la glace étaient élégantes et le poussa à s'approcher dudit miroir. Il était évident que les boiseries et non un possible narcissisme le poussaient à voir ce plus près le reflet qu'il renvoyait. Il fallait que la glace du miroir se marie parfaitement avec les boiseries, s'pas ? C'est donc d'un pas presque guilleret qu'il alla vers le grand miroir en face de lui. Étonnamment il ne vit pas son propre reflet mais ce qu'il vit lui tira un sourire carnassier. C'est vrai que la scène qui lui été renvoyée était quelque peu sanglante mais elle était aussi très reposante et ce à bien des égards. Et puis était-ce de sa faute si il adorait voir le sang couler ? Tiens ? Un trône ? Voilà maintenant qu'il se voyait au-dessus de la chaîne alimentaire. Cela ne lui ressemblait pas vraiment, à quoi servait-il d'être sur un trône si les autres, au pied du trône, étaient des imbéciles moutonneux heureux ? Il ne savait pas vraiment ce que devait montrer ce miroir mais il devait être cassé. Il passa une langue pensive sur le coin gauche de sa lèvre inférieure. Cela dit, Alix rendait très bien dans le miroir dans cette tenue... Détournant finalement le regard, il vit une porte qui, il en était sûr, n'était pas là auparavant. Curieux, il s'en approcha, cette dernière s'ouvrit sans un bruit et sans qu'il ne l'ait poussée.

Le décors derrière la porte mystérieuse était des plus délicieux. Les murs sombres alliaient à de précieuses boiseries et au marbre blanc du sol offrait un paysage plutôt représentatif de... Il n'aurait su le définir convenablement mais les crânes, humains ou non, avec le cuir vernis ajoutaient un touche macabre qui de toute évidence aurait fait fuir les personnes qui auraient réussi le test de l'entrée. De toute évidence, le miroir qu'il avait cru cassé était un test. Jetant un dernier regard à l'entrée qu'il allait quitter pour entrer dans le bar il reconnut des rosiers pourpres connus sous le nom de "Magie noire", les fleurs étaient utilisées quelques fois dans des potions légales selon certains pays comme l'Allemagne et la Russie. Un fin sourire se dessina sur le bas de son visage et il passa la porte sans hésiter plus longtemps. Il avait hâte de découvrir cet endroit. De plus, Aïlin Bower et lui-même s'étaient donnés rendez-vous ici. Jetant un coup d'oeil à sa montre il se rendit compte qu'il avait une dizaine de minutes d'avance. Il aurait adoré visiter les différentes parties du Laughing Inferi et plus particulièrement le casino mais il n'avait pas assez de temps pour ça. Aussi se dirigea-t-il tranquillement vers le bar et s'y installa.

Une fois installée, il se permit de dévisager les gens déjà présents. Il pouvait reconnaître ici et là quelques têtes. Au moins, la place était occupée par des gens plutôt sympathiques. Le bar était très chic et il se dégageait la même impression des gens l'entourant. Certaines personnes de mauvais goût auraient pu parler de snobisme mais il ne fallait surtout pas confondre en réalité. Comme il était dans la salle principale, d'après ce qu'il avait cru comprendre en écoutant les autres parler, il jeta un coup d'oeil à la scène. Hum il était vrai que les vélanes étaient un plaisir pour les yeux mais quel malheur que les vélanes mâles n'existent pas. C'est sur ce triste constat que son regard se détacha de la scène pour rencontrer le regard d'un homme blond plus que sexy. Ce dernier se fit interpeler et ainsi Jason put apprendre qu'il s'appelait Jack Foster. Il en ferait bien son dîner mais pour l'instant il n'était pas là pour ça et pour ne pas se faire remarquer du gérant, oui écouter les autres pouvait amener beaucoup d'informations intéressantes, qu'il avait observer un petit moment il se plongea dans la carte des cocktails. Certains semblaient plus qu'étranges d'ailleurs, en voyant les composants le blond sentait une légère sueur glacée couler le long de son échine. Est-ce-que les gens se rendaient compte des ingrédients qu'ils ingurgitaient ? Soupirant il décida de commander quelque chose de plus... commun.

- Un Whisky-pur-feu, votre plus vieux, je vous prie. Fit-il avec un sourire de glace poli.

Il avait tenu à préciser parce qu'il comptait en avoir pour son argent. Pas questions de boire quelque chose de fade !! Il posa la somme pour la boisson commandée, ne levant même pas un sourcil fasse au prix demandé puis il approcha d'une main lente le verre de ses lèvres. Il ne prit qu'une petite gorgée et grand bien lui prit car ce Whisky-pur-feu était plus que fort, il se demandait combien d'années ce dernier pouvait avoir. Si il n'avait pas été prudent, il aurait pu se ridiculiser devant tout ce monde. Plissant un oeil, il regarda sa montre et se dit qu'Aïlin devrait bientôt arriver. Écoutant le voisin qui parlait fort, il apprit qu'il y avait des pièces plus intimes, ils pourraient donc soit choisir une table un peu à l'écart, soit prendre l'une de ces pièces pour parler affaires. Bien qu'un sort d'intimité en restant au bar pouvait aussi être une possibilité.

Quelle élégance fut la première pensée du blond. Un sourire amusé apparut sur son visage. Peu importe le nombre de rumeurs ridicules ou véridiques qui circulaient sur le Lord Bower, ce dernier avait toujours le chic pour apparaître de façon avantageuse. Ce qui le mettait automatiquement en position de force lors d'une discussion. Cela faisait tellement longtemps qu'il n'avait pas vu Aïlin... Non pas qu'il ait oublié les traits du visage lui faisant face mais quelque part, il s'était demandé si quelque chose de fondamental les aurait changé l'un ou l'autre. Il semblerait que non, heureusement d'une certaine façon. Il serra bien volontiers la main de son vis-à-vis le même sourire avenant plaqué sur le visage.

Bien sûr le blond en tant que Lord avait dû apprendre à reconnaître les plus grands crus et pour tout avouer il aimait ça. Cependant concernant les alcools forts, bien qu'il les appréciait lors de diverses circonstances, il en buvait beaucoup sauf un. L'exception concernée donc le whisky-pur-feu mais le seul avantage à cet alcool était qu'il était plus que fort. Pour preuve, il avait failli se mettre à tousser après avoir bu un peu de son verre. Adressant un sourire amusé à l'autre Lord il leva son verre d'une main et répondit à la question obligeamment posée.

- Ma foi, vous feriez fortune et fureur en remplaçant ce whisky par ces chères productions irlandaises... Fit-il amusé.

Enfin, il avait beau dire cela, il était évident que l'autre homme à ces côtés avaient déjà connaissance des bons filons pour s'en sortir. D'ailleurs, ils devaient parler affaire, ne serait-ce que pour mettre à profit leurs connaissances et ressources personnelles. Jason reposa le verre et se remit à observer autour d'eux les gens présents tandis que le barman servait son ami. Ami qui était bien le seul à porter encore un veston dans les gens que le blond connaissait mais ce n'était pas non plus comme si ça ne lui allait pas. On aurait pu dire qu'Aïlin s'était construit son propre personnage mais quelque part il se doutait que l'autre était simplement lui-même. Après tout pourquoi se faire tant de soucis pour les autres quand il suffisait de se rendre indispensable ou de les rendre dépendants ?

- Mes excuses pour le lieu pittoresque mais j'y ai trouvé un relent de fleurs du mal assez poétique allons-nous dire. Dit-il en souriant.

Malgré la destination de ce lieu, on ne pouvait rêver mieux comme archétype pour une affaire ni blanche, ni noire. Juste grise. Et puis même si ils devaient parler affaires, bientôt Talyn Lawford arriverait et aussitôt commencerait un côté plus... amusant. Enfin travailler avec Aïlin était toujours plaisant et même souvent amusant car bien qu'ils soient semblables, ils avaient un mode de raisonnement assez différent et le mélange des résultats obtenus chacun de leur côté donnait souvent quelque chose d’avantageux. Il n'y avait donc vraiment pas à se plaindre.

D'un geste pseudo lassé, il lança un charme d'intimité avec sa baguette. Au moins, le geste ne semblerait pas étrange et n'attirerait pas réellement l'attention d'une personne quelque peu indiscrète. Un peu comme lui un peu plus tôt alors qu'il attendait Aïlin. Amenant de nouveau le verre à ses lèvres, il prit un énième gorgée et reposa son verre pour commencer la discussion.

- Alors ? Que puis-je faire pour toi ? Il semblerait que certaines de mes possessions puissent t'être utiles... Il marqua une légère pause et reprit d'un ton aussi normal qu'habituel lorsqu'il parlait affaire. Évidemment si je peux me rendre utile de quelque manière que ce soit, tu sais bien que c'est toujours un plaisir. Finit-il par ajouter l'air de rien.

À vrai dire, il avait hâte d'entendre la proposition d'Aïlin. Vu la valeur de ce qu'il proposait qu'est-ce-que ce dernier allait lui offrir ? Enfin il était certain qu'il y aurait un arrangement des plus intéressants, après tout il n'y avait que peu d'alchimistes et donc peu de personnes pouvaient profiter de leur talent. Il attendit tranquillement la réaction de l'autre Lord et en profita pour avaler de nouver un peu d'alcool. Diable qu'il était fort pour un alcool trouver dans un club tout de même !

Un écossais ne jurait que par le whisky d'Écosse et un irlandais, pas le whisky d'Irlande, les choses allaient de soit. Or, le whisky-pur-feu était une espèce d'ovni venu dont ne savait où, qui n'avait de whisky que le nom, tant le goût s'éloignait de ce que devait être une véritable boisson de ce nom. Un alcool typiquement sorcier, qui avait cette originalité que les autres whisky, plus classiques dans leur conception, ne possédaient pas.
Aïlin n'était pas particulièrement féru de cette boisson, gardant un goût peut-être trop classique quant à ce que devait être un apéritif. Néanmoins, il ne crachait pas dessus de temps à autres, dès lors qu'il s'agissait d'une bonne bouteille. Et qu'il se contentait d'être modéré sur le nombre de verres ingérés, car le Whisky-pur-feu était, pour ainsi dire, plutôt une boisson d'homme. Une lueur d'amusement passa dans ses yeux lorsque Lister grimaça à la première gorgée qu'il but, alors que lui-même prenait le verre que le serveur lui tendait.

« Oh... ! On peut se permettre d'en douter, compte tenu du nombre de sorciers férus d'excentricités en tout genre. »

Si Aïlin n'avait pas observé la carte des boissons, celle-ci ne le contredisait cependant pas. Les sorciers avaient cela de différent avec les moldus. Leur goût se portait vers des bonbons au suçacide capables de trouer une langue et leur palais assoiffé aimaient accueillir les alcools les plus forts, capable de faire cracher littéralement des flammes à celui qui se risquait à y goûter. Soumettez un moldu à un tel traitement, et vous pourriez constater le nombre de jours qu'il passerait au service des soins intensifs. La plupart ne connaissaient même plus la présence enchanteresse de la petite fée verte accompagnant la dégustation d'absinthe véritable.

« J'étais moi-même curieux de découvrir ce nouveau cabaret dont on parle temps, à vrai dire... » répliqua Aïlin, par souci de se montrer aimable avec son interlocuteur. « C'est exactement à l'image de ce que j'avais imaginé. »

Son ton était demeuré neutre, sans laisser transparaître la pointe de cynisme qui planait derrière ses paroles. Sans l'ombre d'une hésitation, Aïlin préférait et de loin l'ambiance smart et feutrée de l'Augustinian's, en tant que lieu de rendez-vous. L'atmosphère y était plus paisible, plus proche de son caractère secret et distant, qu'un cabaret où des vélanes paradaient et chantaient pour exciter les imaginations.
Mais qu'importait le lieu, c'était la personne qui l'intéressait, et Jason était effectivement le sorcier dont il avait besoin. Un ancien camarade de classe avec qui il avait finit par s'entendre au bout de quelques années à se côtoyer lors des cours, et avec qui il était nécessaire, le temps de Poudlard passé, de renforcer, voir de confirmer les liens. Jason faisait parti de la haute société sorcière, tout comme lui, et il avait un pied dans un commerce qui ne pouvait qu'intéresser le jeune chercheur.

Les politesses passées, Sir Lister alla droit au but, pour le plus grand plaisir d'Aïlin. Celui-ci détestait se perdre en palabres inutiles, sauf lorsqu'il s'agissait d'égarer son interlocuteur ou de se mettre en position de force. Ce soir, il avait plus à demander qu'à proposer, si ce n'était en proposant les travaux de sa sœur, en faisant en sorte qu'ils apparaissent comme d'une inestimable valeur marchande. Ce qui était le cas, d'ailleurs. Le marché des bijoux enchantés était particulièrement porteur, et une association entre les deux jeunes sorciers ne serait que trop profitables à tous deux. Aïlin but une gorgée d'alcool pour se donner contenance tandis qu'il réfléchissait à ses mots.

« En vérité, je pense que nous pourrions tous deux nous être utiles, bien que mon utilité personnelle ne demeure qu'indirecte. Je n'ai malheureusement pas encore découvert la pierre philosophale... »
L'ombre d'un sourire passa sur son visage, puis il continua, plus direct :
« En tant qu'orfèvre, je ne doute pas que tu aies des contacts qui pourraient me fournir une pierre dont j'ai besoin. Il ne s'agit rien de moins que du diamant bleu. Une petite quantité me suffirait. Tu n'es pas sans savoir que cette pierre a un fort potentiel maléfique, qui s'active grâce à certains procédés de magie noire. C'est cette caractéristique qui m'intéresse, et c'est pourquoi j'en appelle à toi. Bien évidemment, je recherche une pierre brute, afin d'être certain qu'elle n'ait pas perdu de son potentiel. »

Aïlin ne parla évidemment pas de prix, ni ne continua sur la proposition qu'il avait à faire au Lord Lister. Il était évident que, eut égard à ce qu'il demandait, il était bien prêt à y mettre le prix. Ce prix, d'ailleurs, ne serait pas entièrement à ses frais, puisque le diamant bleu serait un outil visant à tester la puissance de l'élixir de shungite au final de ses recherches pour le compte de McGregor. Il était évident que si Aïlin consentait à y mettre un peu de sa poche, c'était pour le plaisir d'obtenir une telle rareté et d'en garder un échantillon pour de prochaines expériences. Ou, si jamais il ne pouvait s'en procurer assez pour en garder de côté, avoir l'assurance de savoir où chercher dans un futur plus ou moins proche.
Quant à la proposition, elle serait mise sur le tapis une fois son heure venue. Ils avaient assez de temps devant eux pour se concentrer sur une seule chose à la fois. D'ailleurs, Aïlin ne doutait pas que Jason saurait inciter l'ancien Serdaigle à parler lorsqu'il jugerait le moment opportun, ou lorsque la curiosité aurait pris le pas sur la patience.

« Penses-tu connaître quelqu'un capable de satisfaire ma demande ? Je suis prêt, bien sûr, à attendre le temps qu'il faudra pour obtenir le meilleur échantillon possible. »

Jason admira un instant Aïlin boire le Whisky-pur-feu mais comment pouvait-il arriver à cet exploit ? Cet alcool était beaucoup trop fort. Enfin, heureusement qu'il n'avait demandé qu'un verre et pas toute la bouteille. Le bijoutier avala une nouvelle gorgée sans grimacer cette fois. Bien sûr ce qu'il avait dans son verre était un alcool que nombre de sorciers commandaient mais ça n'empêchait pas qu'il y avait d'autres alcools plus intéressants et bien meilleurs. Comme l'hydromel vieillit dans un fût de chêne ou du vin d'elfes ou de la véritable absinthe. Il était d'ailleurs sûr d'en avoir quelque part dans un coffre juste à côté d'un peu d'opium. Ne pas oublier de modifier la cachette, juste au cas où. Après tout c'était à lui, pas question que quelqu'un lui vole ou pire qu'un Auror jette un coup d’œil. Enfin, a priori il était à l'abri de ce genre de visites que continuaient de recevoir certains anciens Serpentards.

Retournant à la conversation, il adressa un sourire amusé à Aïlin. Il était vrai que les sorciers en général étaient assez excentriques. Lui-même adorait les sucettes au sang et même si il avait jusqu'à présent réussi à le cacher, il suffisait de fouiller un minimum ses poches pour être sûr d'en trouver au moins une. Après, bien sûr, il y avait des excentricités plus dangereuses que d'autres. Mais chaque monde avait ses excentricités, il ne lui serait jamais venu à l'idée de sauter de x mètres de haut depuis une falaise et sans rien pour ralentir la chute. Les moldus pouvaient vraiment être étranges. Jason serait capable de le faire, surtout si on le poursuivait en lui lançant des sortilèges de mort mais sinon qu'on ne compte pas sur lui pour risquer inutilement sa vie. Il avait déjà un emploi du temps très chargé, voyez-vous ?

Un sourire sarcastique étira ses lèvres lorsque son interlocuteur se laissa aller à la fausse amabilité coutumière des sangs-purs. Le fait que le Lord Bower n'appréciait que très moyennement cette place ne l'étonnait pas réellement. En réalité si il n'y avait pas eu le casino et toutes les informations possibles à piquer juste en tendant l'oreille... À croire qu'ils étaient les seuls à connaître des charmes d'intimités et de bulle du silence. Enfin tant qu'il y avait matière à s'amuser et à se faire quelques contacts possiblement utiles - Qui parlait de chantage ? - ce lieu convenait au blond. Cela dit, si Aïlin avait dit ce qu'il pensait réellement, cela n'aurait pas embêté le bijoutier-joailler un seul instant. Enfin, le jour où un sang-pur dirait ce qu'il pense à tout va n'était pas arrivé et n'arriverait sans doute jamais.

Plissant les yeux, il tourna la tête vers le brun et attendit. Il écouta patiemment ce dernier tout en réfléchissant aux diverses options qui se présentaient à lui. Jason dut retenir un sourire railleur à la mention de la pierre philosophale. Non vraiment ce n'était pas quelque chose qui l'intéressait. Il avait déjà de l'argent et il préférait les bijoux à l'or, couleur trop tapageuse à son goût. Raison pour laquelle il portait plus souvent des bijoux en argent pur, non ce n'était pas contre les loups-garous, qu'en or. Mais surtout le blond n'était pas intéressé par l'immortalité. De plus, la pierre philosophale ne permettait en réalité que de prolonger la vie. La prolonger et cela pas indéfiniment. Pour preuve : son créateur Nicolas Flamel et sa femme étaient morts après qu'ils aient arrêté de se sustenter de l'élixir de vie. Le Serpentard, à une époque, avait demandé à son père Lord Lister ce qu'était l'immortalité. La réponse et l'explication étaient gravés dans sa mémoire. Bien sûr, lui-même avait modifié l'explication mais la réponse était la même. L'immortalité signifiait la non-vie car la vie et la mort se définissaient, se caractérisaient l'une l'autre. Et puis de toute manière, être immortel avec le type de gens qui régissaient la société ? Jason doutait sérieusement d'une évolution soudaine de la mentalité et de l'intelligence des masses composant la société...

Il se remit donc à écouter Aïlin sagement. Tiens ? Il était rare que les gens se rappellent qu'il faisait aussi dans l'orfèvrerie. Tout de même, le Lord à ses côtés souhaitaient quelque chose de difficile à trouver, bien qu'il puisse le trouver plutôt facilement au vu de son métier. Il était toujours amusé de constater que selon la couleur du diamant, et bien que la formule chimique reste la même, les propriétés magiques changeaient du tout au tout. Et si lui-même préférait les saphirs aux diamants bleus, il était évident que dans un rituel, il ne fallait pas confondre les deux. Il devait bien avoir quelques diamants bleus cachés quelque part pour des rituels de magie noire mais des diamants bruts ? Là il en était moins certain. Le joailler aimait ce qui brillait et donc les diamants polis même si il ne niait pas qu'un diamant brut pouvait se révéler plus qu'intéressant. Il nota donc les caractéristiques de la demande et sourit tranquillement.

- J'imagine que tu sais à quel point il est dur de trouver un diamant bleu... Conséquent allons-nous dire. J'imagine que même plusieurs petits diamants bleus pourraient se révéler utiles, combien de grammes ou combien de gemmes te faudrait-il ? Pour avoir une idée bien entendu... Fit-il professionnellement.

Il aurait sans doute était plus amical si la diligence d'Aïlin ne lui avait pas mis la puce à l'oreille. Ce dernier se montrait très coulant vis-à-vis du prix. Trop même pour qu'il soit le seul acheteur. Oh bien sûr, Aïlin ne le vendrait jamais aux Aurors mais il préférait rester méfiant tant qu'il n'avait pas connaissance du nom de l'autre personne derrière cet achat. Enfin sa connaissance du brun, lui faisait dire qu'il n'y aurait pas de problèmes avec la vente et la livraison. Tout serait dans la discrétion, comme d'habitude. Il afficha cependant un sourire discret à la dernière phrase de l'ancien Serdaigle.

- Douterais-tu de l'étendu de mes contacts ? Le meilleur échantillon possible hein ? Tu auras ce que tu voudras, n'ai aucune inquiétude à ce sujet... Dit-il en s'amusant.

Maintenant, il attendait de connaître la quantité demandé pour savoir ce qu'il pourrait demander par la suite. Tant de possibilités déjà possibles, il avait presque envie de commencer à rire doucement pour ne pas alerter les gens autour d'eux. Enfin avec le sort lancé plus tôt, ce n'était pas non plus comme si ils risquaient de se faire remarquer par une telle action.

Aïlin sirota son verre alors qu'il attendait la réponse de Jason. Trouver un diamant bleu n'était pas à la portée de tout le monde, tant le bijou était rare, et même un joaillier n'en avait pas un entre les mains tous les jours. Les gisements étaient rares, si rares que la plupart des diamants arrivants sur le marché étaient le résultat d'un cambriolage plus que de l'extraction d'un nouveau minerai. Ces diamants là étaient souvent invendables, car le vol venait vite à se savoir, et l'acheteur – souvent un amateur – reconnaissait vite l'origine de la pierre qu'il achetait. Il arrivait aussi que des pierres d'une haute valeur disparaissent mystérieusement et qu'on ne les retrouve qu'à la mort de tel ou tel éminent sorcier, qui avait fomenté son vol en échange d'un gros paquet de gallions. Cette méthode avait l'avantage de coûter moins cher que l'achat d'un nouveau diamant, et il ne dérangeait nullement Aïlin que celui qu'il obtiendrait ait une telle origine. Il ne comptait nullement se pavaner avec.
Pire encore, au terme de ses expériences, le diamant bleu avait de grandes chances d'être détruit par le traitement qu'il lui réserverait. Cette pierre avait beau être résistante, s'il s'emparait de toute l’énergie de la pierre, celle-ci viendrait certainement à se ternir, voir à fondre littéralement lors de sa conversion en essence, plus sûre à manipuler et à faire ingérer aux cobayes qu'un diamant qui peut vous plonger dans le coma à son seul toucher. Un bien triste destin pour une telle préciosité, mais c'était au nom de la science. Si jamais Aïlin choisissait de conserver le diamant et de se contenter seulement d'éveiller le maléfice sommeillant en la pierre, l'objet serait de toute façon invendable, car inutilisable si ce n'était d'une façon plus que criminelle. Aïlin avait encore assez de morale pour ne pas commettre un tel acte. Inutile d'ajouter qu'une pierre maudite risquait de lui causer des ennuis si jamais le Ministère décidait d'engager un contrôle de routine quant à ses activités au manoir. Sa réputation était encore trop fragile pour qu'il puisse se le permettre.

Bien évidemment, Lister feignit la réticence, soulignant d'à quel point il serait difficile de trouver un objet aussi rare que celui que demandait Bower. C'était certainement un façon de mettre le prix de la commission sur le tapis, aussi Aïlin balaya d'un geste de la main ses explications.

« Je mettrai le prix qu'il faudra, quoi que le plus avantageux sera le mieux, car j'entends bien te rembourser le temps que tu auras investi dans la commission, cela va de soit. Je n'aurais pas besoin de tes services si ce que je demandais était aussi simple à trouver qu'une plume de Jobarbille. »

Tout était dit. Aïlin consentait à passer par Jason dans le but d'avoir un prix plus intéressant par son biais, et profiterait de cette différence de prix pour le rémunérer sur le temps investi à cette recherche. Tout le monde en sortirait gagnant. Il avait répondu un peu sèchement, sur le ton de l'évidence, histoire de briser la méfiance qu'il avait senti transparaître chez Lister, autant dans son regard que dans le ton qu'il avait employé pour lui répondre. Il ignorait d'où lui venait cet excès soudain de prudence, ce simili refus, mais Aïlin était intraitable en affaire, et il ne comptait pas se laisser mener par la discussion. Confrère, ami ou connaissance, cela n'avait plus guère d'importance dès lors que le sujet était d'ordre professionnel. S'il avait retenu quelque chose de son père et de son caractère inflexible, c'était bien cela.
Aïlin était tout prêt à rétorquer à son ancien camarade qu'il préférait traiter immédiatement du sujet suivant et ne plus revenir à ces diamants s'il ne se sentait pas capable de lui en trouver, mais l'ex Serpentard fut assez avisé pour lui couper l'herbe sous le pied. Un léger sourire adoucit le regard d'Aïlin à la remarque piquée d'orgueil du lord Lister. Il prit cependant la peine de préciser sa pensée, afin d'être tout à fait clair quant à ce qu'il entendait.

« Nullement, Milord. Je tiens seulement à ce que tu saches que je reste ouvert sur le délai de livraison, ce dans le but de faire la meilleure affaire possible. Tu sais bien que chaque pierre est différente, et est sélectionnée en fonction de l'usage qu'elle doit remplir… Il me paraît plus judicieux d'avoir un délai d'attente plutôt que d'obtenir le premier diamant venu. Je ne peux pas me permettre de me montrer léger sur la sélection du produit. »

L'éclat bleu de ses yeux s'illumina alors qu'il laissait son regard s'attarder sur son interlocuteur, avant de consentir à boire une nouvelle gorgée de whisky. Merlin, qu'il aurait mieux fait de sélectionner lui-même son breuvage. S'il était trop irlandais pour être indisposé par le degré d'alcool du whisky-pur-feu, il préférait cependant un alcool plus raffiné lorsqu'il parlait affaires, moins susceptible de lui arracher l'estomac à cause d'un verre de trop. Mais, Aïlin était un irlandais, comme nous le disions, et s'il était capable de supporter le Poìtin, il ne risquait pas de se laisser impressionner par un innocent whisky.
Il revint à la discussion, posant son verre d'un geste lent sur le rond de table.

« Cinq carats de pierre brute me serait amplement suffisant. Cela serait peut-être même trop, si sa pureté est irréprochable. Comme je le disais, ce n'est pas vraiment son poids qui compte, c'est son potentiel magique. »

Bower se tut un instant, avec dans le regard l'ombre caractéristique qui signifiait qu'il réfléchissait à une autre opportunité. Les sourcils froncés, il joua machinalement avec le rebord de son verre, le faisant tourner entre ses doigts, avant de reporter enfin son attention sur Jason.

« Je sais qu'il existe quelques pierres déjà ensorcelées sur le marché, et qui ont une valeur amoindrie du fait du danger qu'elles représentent. Je peux également m'en contenter, cela m'épargnerait d'ailleurs du travail... Mais le diamant bleu activé n'est pas ce qu'il y a de plus licite, il faut des droits de possession, et je comprendrais que tu ne veuilles pas prendre le risque. D'ailleurs, je m'en voudrais de te causer du tort. »
Un sourire quelque peu taquin passa sur le visage d'Aïlin.
« Restons simples. Donne-moi ton prix et ce que tu peux me proposer. Je verrai s'il est le mien, et si les conditions me satisfont. »