Le tant attendu premier cours de magie sans baguette arrivait enfin.

L'examen d'entrée avait fait forte impression à Page. La rouquine avait beau avoir un peu baroudé, elle n'en restait pas moins une élève de quatorze ans qui était loin d'avoir tout vu, surtout au vu du milieu dans lequel elle avait grandi. Alors oui, le test d'entrée dans cette matière avait déjà fait monter un peu la pression, et les rumeurs qui n'avaient pas manqué de courir à la suite des épreuves des autres et de l'étrange manière de noter qu'avait l'enseignante n'avaient fait qu'épaissir le mystère qui tournait autour de ce cours. En plus, il semblait que cette discipline optionnelle serait réservée à un petit nombre d'élus. Raison de plus pour en être : ça puait le mystère à plein nez, et la Gryffondor voulait y être immergée. Non parce qu'il ne fallait pas rater ça quoi. Enfin, même si elle ne voulait pas vraiment l'avouer, l'irlandaise plaçait beaucoup d'espoir en ce cours : elle venait vraiment pour apprendre.

C'était donc motivée que la jeune préfète s'était rendue au quatrième étage. Un coup d'oeil à droite, un coup d'oeil à gauche... Pas grand monde dans les parages. Page haussa les épaules. Si elle était la première, eh bien tant mieux.
Elle se glissa à l'intérieur de la salle sombre, réprimant son envie de lancer un tout petit lumos de rien du tout pour voir où s'installer. A la place, elle patienta un instant sur le seuil de la porte, pour laisser ses yeux s'habituer à la pénombre, et lorsqu'elle y vit suffisamment pour discerner les chaises, la rouquine s'y installa sans trop de bruit.
Brr, ça faisait froid dans le dos tout ça quand même. Les autres volontaires ne tardèrent pas à arriver et tous échangèrent quelques murmures perplexes, avant que les flammes ne s'élèvent brusquement, faisant sursauter la rouquine qui plissa les yeux pour se protéger du brusque changement de luminosité. Dans le même temps, la porte claqua et Miss Shodako fit son entrée en matière. Waw. Il fallait reconnaître à la prof un sacré sens de la mise en scène : hormis dans la grande salle lors des repas, l'enseignante avait été quasiment invisible pour les élèves, entretenant le voile de mystère qui l'entourait, et pour une première prise de parole, elle y avait mis les formes. Pour le coup, le sourire dont elle ponctua sa première phrase ne rassura pas totalement la rouquine. Plaisantait-elle vraiment ? Ou était-ce le sourire carnassier du loup devant sa proie ? Page n'était pas très à l'aise. Elle ne savait pas trop quoi penser de cette prof.
Prenant une profonde inspiration, elle se raisonna et se redressa sur sa chaise pour bien écouter lorsque le cours débuta réellement. Allons, elle était là pour leur apprendre, non ?

Comme Ombrage ou les Carrow ? susurra une petite voix dans sa tête. Comme Rogue ? Page chassa ces ombres et essaya de se concentrer sur la question posée. Sauf que dans la foulée, Miss Shodako fit une petite allusion aux murs, sans que Page comprit réellement pourquoi. Néanmoins, cela suffit à la déconcentrer une fois de plus, et l'irlandaise jeta des petits regards suspicieux autour d'elle, réprimant une furieuse envie d'attraper sa baguette au fond de sa poche pour se prémunir contre tout danger. Non. Bloody hell, c'était un cours de magie SANS baguette. Mais qu'il était difficile de réfréner les réflexes acquis à la dure !

Après un instant de réflexion pour se mettre à nouveau dans le cours, la quatrième année leva la main et attendit que la parole lui soit donnée.

- Pour ma part, je crois bien que les seules fois où j'ai pu utiliser la magie sans baguette, c'était justement avant que j'en ai une, de baguette. Et du coup, c'était pas du tout de manière consciente. Donc j'ai pas vraiment d'exemple. Parce que depuis, ben j'ai justement appris à m'en servir, et elle me parait... indispensable pour faire de la magie. La rouquine s'interrompit un instant avant de poursuivre plus bas. C'est justement pour ça que j'suis là...

Clarisse fut ravie d'apprendre que l'enseignante distribuerait des fiches récapitulatives sur son cours, mais ne se dispensa pas pour autant de prendre des notes. Elle arrivait mieux à retenir une leçon si elle grattait pendant l'heure et relisait ensuite sa propre écriture. L'inconvénient de cette technique, c'est qu'on pouvait parfois écrire des informations erronées pour peu que l'on comprenne de travers certaines explications. Le support fourni par Miss Shodako serait donc plus que bienvenu, d'autant qu'elle ne leur avait conseillé aucun ouvrage de référence, et pour cause, les livres traitant du sujet se faisaient rares, parfois flous et souvent truffés de théories farfelues. C'est donc un peu plus sereine que la jeune fille aborda la suite des évènements. Elle écouta avec attention les commentaires faits sur leurs réponses respectives et fut grandement soulagée de voir qu'elle avait bien compris l'exercice qui lui avait été demandé de faire. Elle soupira discrètement et lâcha sa pauvre plume qui n'avait pas mérité un aussi mauvais traitement que celui qu'elle venait de lui infliger dans un élan de nervosité.

Le professeur leur posa ensuite une question tout à fait intéressante: d'où venait la magie? La rousse sourit intérieurement. Ce genre de débat lui plaisait toujours. Trouver l'origine, la cause et les conséquences d'un phénomène était tout simplement passionnant. En l'occurrence, la question avait déjà été abordée lors d'un cours plus qu'ardu d'astronomie. Ce jour-là, la Serdaigle avait dû s'accrocher ferme pour suivre les raisonnements de ses camarades et de Sinistra, mais ça en valait largement le coup. Pour une fois elle avait eu l'impression de participer à une vraie conversation d'adulte et d'échanger des propos plein de sens. Elle avait essayé d'emmagasiner un maximum de connaissances, mais certaines notions lui avaient tout de même échappé. Il lui fallut quelques minutes pour rassembler ses idées et formuler clairement une réponse dans sa tête. D'autres élèves ayant été plus rapides avaient déjà levé la main et Clarisse les écouta, à l'affût d'une information complémentaire, de quelque chose auquel elle n'aurai pas songé.

Page fit une première réponse assez courte, mais tout de même juste, tandis qu'Angelina Fowl se lança dans un drôle de discours reléguant les cracmols à l'état d'êtres inférieurs et limite pestiférés. Un peu comme on aurait traité un lépreux. Clarisse tiqua. Ce genre de comportement snobinard agaçait beaucoup l'Écossaise et son sang bouillonnait malgré elle d'entendre pareils propos. Il fallait qu'elle dise quelque chose, elle ne pouvait pas laisser passer ça, c'était trop... injuste! Et puis l'occasion était trop belle de remettre en place cette agaçante Poufsouffle. Néanmoins elle tâcha de se tempérer un peu. D'abord elle allait répondre à la question posée et ensuite elle s'occuperait d'Angelina. Déterminée, elle leva une main tremblant d'indignation.

«En fait, on ne sait pas d'où vient la magie parce qu'elle a toujours existé. Selon certaines théories, on remonterait jusqu'à la création de l'univers, au moment du Big-Bang. Avant, il n'y avait qu'un amas d'énergie chaude très dense et concentrée qu'on assimilerait à la magie justement. Puis il y aurait eu une sorte d'explosion qui aurait dispersé cette énergie et formé l'univers jusqu'à ce qu'on connait aujourd'hui. Si on raisonne comme ça, la magie se trouverait en toute chose, en proportions variées, ce qui expliquerait la différence entre les sorciers qui peuvent l'exploiter et les moldus qui en sont incapables. »

Elle s'interrompit un instant pour reprendre son souffle et un drôle de sourire passa furtivement sur son visage avant qu'elle ne reprenne d'un voix un peu plus froide.

«J'aimerais ajouter quelque chose. Je ne vois pas quelle honte il y a à être cracmol ou à avoir un cracmol dans sa famille. Ce sont des êtres humains avant tout, comme chacun d'entre nous. Ce n'est pas parce qu'ils ne peuvent pas pratiquer la magie qu'ils sont une tare ou une erreur de la nature. D'ailleurs ils ont tout de même pas mal de magie en eux puisqu'ils peuvent voir les créatures magiques, les sorts, les détraqueurs et tout ce qu'on peut voir nous, mais que les moldus peuvent au mieux percevoir. »

Et toc!
Sale Sang pure raciste à l'esprit étriqué.

[hj]Le corus de Sinistra[/hj]

[hj] Désolée du double post, mais je ne pouvais pas me laisser insulter comme ça! Et il me semblait plus juste que vous ayez la réaction de Clarisse avant le prochain tour puisque normalement tout ça se passe en même temps [/hj]

Dès qu'elle vit Angelina lever la main pour reprendre la parole, Clarisse sentit que ça n'allait pas lui plaire. Effectivement, la pimbêche continua son petit laïus sur les cracmols. Pauvre sotte! N'était-elle donc jamais sortie de l'écrin dans lequel elle était née? Si c'était le cas, c'était en réalité bien triste et l'Écossaise avait pitié de cette fille fraîchement débarquée. Difficile à croire d'ailleurs qu'elle soit de parenté avec Malicia. Les deux jeunes filles n'avaient en commun que leur nom. Angelina suintait la préciosité et la suffisance tandis que Malicia incarnait la rêveuse tranquille, une fille sans chichi qu'on appréciait pour sa discrétion et son efficacité. Vraiment rien à voir. Mais là n'était pas la question. Puisque « Père » avait parlé alors ainsi soit-il! La rousse soupira d'agacement, quoi que le terme soit trop faible pour exprimer son ressentiment. De toute évidence, Monsieur Fowl était un sang pur conservateur et sa petite fifille chérie avait été élevée dans des draps en soie avec une petite cuiller en or dans la bouche. Qu'elle ait été influencée par ses parents, l'aiglonne pouvait parfaitement le concevoir, mais à quinze ans, après tout ce qui s'était passé il n'était plus imaginable de mettre ces propos sur le compte de l'influence qu'avait son père. Si la blonde avait un cerveau, mais par Merlin qu'elle s'en serve et qu'elle pense par elle-même!

Clarisse n'en pouvait déjà plus d'entendre cette Poufsouffle reprocher aux cracmols d'être un poids pour la société sorcière. Ça la mettait en colère. Elle comprenait mieux lorsqu'elle voyait des gens comme Angelina pourquoi le frère de Guérin s'était suicidé. Elle en avait presque la nausée rien que d'imaginer ce qu'il avait du endurer. Pourtant, la peste n'avait pas encore terminé. Tandis que Clarisse allait lui répondre quelque chose, elle lui coupa l'herbe sous le pied en prenant son plus bel air innocent. Ah tiens, voilà que maintenant elle allait jouer la gentille copine. Ne manquait plus que ça! Ça ne rata pas. La cinquième année s'attaqua directement à elle en la prenant à moitié pour une demeurée ou une pauvre gamine traumatisée dans le genre de Ciel Appleby tandis qu'elle se posait en adulte responsable et compréhensive qui la consolerait et lui ferait oublier les vilains méchants. C'était assez bien imaginé, mais dommage, ça ne prenait pas. Il en fallait plus que cette air angélique pour impressionner la bleue et bronze. Elle aussi aurait très bien pu faire la même chose. Seulement elle, elle était honnête.

Ce n'était pas l'envie qui lui manquait de répondre à cette prétentieuse, oh non, elle avait même un milliard d'idées quant à ce qu'elle lui aurait balancé au visage. Il y avait des répliques simples mais efficaces, seulement Clarisse tremblait de rage. Elle savait pertinemment que si elle répondait tout de suite elle ne parviendrait pas à se maîtriser. Le cours de magie sans baguette était bien trop important à ses yeux pour laisser une garce le lui gâcher, aussi pourrie soit-elle. Ce n'était vraiment pas le moment de faire un coup d'éclat. Elle risquait d'une part de se faire exclure et puis ça donnerait raison à la jaune moisie. Ayant l'habitude d'afficher un visage neutre, il lui fut assez facile de contrôler ses expressions, mais pas les tremblements de ses mains qu'elle cacha sous la table, ni la soudaine pâleur de son visage. Les autres se laisseraient abuser s'ils le voulaient, Clarisse s'en fichait pas mal, mais elle espérait quand même que l'enseignante voie clair dans ce petit jeu. Les dents serrées, la rousse attendit que cette dernière ne reprenne la parole et tâcha de garder la tête haute, comme si tout ça ne l'atteignait pas.

La tâche était extrêmement ardue, surtout lorsque vous sentez le sang cogner fort dans vos veines au niveau de vos tempes, dans vos avant-bras et partout dans votre corps et plus encore lorsque l'insupportable Angelina savourait ce qu'elle pensait être une victoire juste sous votre nez. A cet instant précis, la sorcière regretta de ne pas maîtriser la magie sans baguette. Si ça avait été le cas, elle aurait volontiers fait exploser tout ce qui se trouvait à moins de deux mètres de son ennemie. Elle n'avait en réalité qu'une seule chose en tête: lui tordre le cou. Et tandis que l'envie de meurtre lui montait à la gorge, elle eut l'impression que la température chutait de deux ou trois degrés et que l'air tremblait autour d'elle. Ce n'était probablement qu'un effet de son imagination ou une nouvelle illusion destinée à les déstabiliser. Mais une chose était certaine, le regard polaire qu'elle jeta à la Poufsouffle était lui bien réel, promesse d'une vengeance prochaine. Le dicton disait «la vengeance est un plat que se mange froid ». Clarisse le préférait glacé. Assurément Angélina regretterait bientôt de s'en être prise à la mauvaise personne.

Cette fois, les regards étaient plus soulagés que perdu et le sourire de la jeune femme se fit un rien plus sincère. Ils commençaient à comprendre ce qu’elle disait à défaut d’anticiper où elle voulait en venir. Comme toujours cependant, seules quelques réponses fusèrent, toutes intéressantes à leur manière même si beaucoup s’écartaient cette fois du chemin demandé. La plus fournie fut celle de Clarisse, évoquant le Big Bang comme sa théorie de la naissance de la magie (parce que lorsque l’on citait une et une seule théorie, c’était que l’on y adhérait).

Persuadée que la Serdaigle allait s’arrêter là et curieuse de voir qui d’autre allait prendre la parole, Iyla laissa planer un silence d’une demi-seconde durant laquelle Clarisse enfourcha un cheval de bataille et répondit directement à Angélina au sujet des cracmols. L’enseignante laissa échapper une rapide grimace. Elle qui avait fait exprès de ne pas rebondir là-dessus pour ne surtout pas réveiller de souvenirs ou imposer ses idées politiques aux élèves. Le débat était certes très intéressants mais ce n’était ni le lieu, ni le moment de partir sur des considérations aussi compliquées. Néanmoins, il était contre ses principes de réprimer ses élèves lorsqu’ils s’exprimaient. Elle voulait établir un climat de confiance et de pseudo égalité pour les inciter à s’ouvrir à elle. Un claquement des torches ponctua son agacement tandis qu’Angélina répliqua à son tour pour venir s’échouer sur le silence de son adversaire. Le professeur leva les mains pour récupérer l’attention. Il n’était pas question de se perdre dans des digressions abscondes.

« Vous posez là une question intéressante mais il ne faut surtout pas imaginer les carcmols comme des êtres dénués de magie. Le titre de cracmol s’étend sur tout un panel de niveau et il n’existerait pas des méthodes et des diplômes de magie pour ces gens s’ils étaient simplement dénués de tous pouvoir. Tout comme il existe des moldus avec une certaine dose de magie. En réalité, nos deux peuples sont si mêlés et si proche qu’il est souvent bien difficile de faire la différence avec certitude. Au mieux pouvons nous différencier les gens d’un côté ou de l’autre d’un certain de niveau de magie perceptible. Mais ce que vous dites Angélina n’est pas forcément faux, la magie peut s’interpréter comme un sens. Seulement, comme l’a souligné Clarisse, il ne s’agit pas d’un tout ou rien, certains cracmols sont même tout à fait capable de magie mais subissent simplement un blocage psychologique. »

Iyla sourit. Ce n’était pas si mal à son sens, elle avait au moins réussi à retomber dans le plan du cours même si personne n’avait fait le lien dont elle avait besoin pour continuer.

« En effet, les émotions jouent beaucoup dans l’usage de la magie et de la puissance étudiée. L’exemple le plus évident est celui de vos premières manifestations de magie à chacun. Si vous y repensez au calme, vous verrez qu’elles ont toujours eu lieu lors d’un fort stress émotionnel et que la puissance alors utilisée est beaucoup plus forte que ce que vous avez pu produire par la suite, de sang froid. De même et a contrario, une forte instabilité émotionnelle peut très bien vous couper toute magie tout comme le trac donne des trous de mémoire par exemple. Les émotions sont un catalyseur extrêmement puissant. C’est pour cela qu’il est primordial pour tout utilisateur de magie sans baguette de savoir à la fois contrôler ses émotions et se perdre en elles pour une plus grande efficacité. Pendant ce cours, il arrivera que vous perdiez vos moyens. Ce sera momentané et il n’y aura là rien de honteux, cela fait partie du processus d’apprentissage. »

C’était presque le point le plus important de toute l’année. Expliquer aux jeunes que la magie sans baguette ne fonctionnerait pas toujours pour eux et qu’il n’y avait pas à mettre ses compétences en doute. Parce que la magie marchait toujours moins bien quand on cessait d’y croire. Enfin ça c’était sa version des choses. Elle aimait bien mettre un peu de magie dans la magie.

« Nous avons donc trois théories sur l’origine de la magie. Celle de Page est la théorie dit animiste qui donne à tout être existant une once de pouvoir à laquelle ils ont ou pas accès. La magie est donc intimement liée au vivant et à sa structure. Cela rejoint la théorie du Clarisse ou théorie scientifique, assimilant la magie à une énergie qui serait présente dès la création de l’univers mais pas totalement puisque la présence d’énergie venue du Big-Bang n’explique en rien la présence de ladite énergie en l’être humain. La reproduction aux dernières nouvelles étant indépendante de la création de l’univers. Enfin, la théorie d’Angélina dite théorie élémentaire qui voudrait considérer la magie comme le cinquième élément. Cette fois encore, cette théorie répond à plusieurs des questions mais pas à toutes. »

Un peu essoufflée par ses discours, Iyla se remplit un verre d’eau, prit une gorgée et reprit la parole.

« Vous n’avez pas besoin de retenir toutes ces théories. Sachez simplement qu’au jour d’aujourd’hui, il n’y a pas de réponse satisfaisante à cette question. Je ne saurais d’ailleurs que trop vous recommander d’y réfléchir de temps en temps. Tout devoir sur la question vous rapportera des points, que ce soit demain ou dans trois mois. La recherche de l’origine de notre pouvoir est quelque chose de primordial de même que la constante remise en question de ce que nous tenons pour acquit. Ici, je ne veux pas que vous preniez toutes mes paroles pour argent comptant. J’attends de votre part un esprit critique. N’hésitez donc surtout pas à me contredire si vous argumentez votre réponse. »

Elle sourit à nouveau.

« Attardons nous donc un petit peu sur la question de la magie. Je vais vous demander de défendre une théorie à laquelle vous ne croyez pas. Angélina, tu vas devoir défendre la théorie animiste disant que tout être vivant possède de la magie à un degré particulier, tu te mettras en groupe avec Christopher et Ethel. Page, ce sera la théorie du Big-Bang, avec Fabula et Clarisse et Lucy vous soutiendrez la théorie élémentaire. Les autres, je vous fais confiance pour rejoindre un groupe qui ne vous correspond pas. Essayez s’il vous plait de rester dans le sujet cette fois et n’attendez pas que je vous donne la parole. Je compte sur vous pour laisser tout le monde parler et vous conduire en adultes responsables. »

[HJ : ceci est la première partie du TP qui sera notée sur 15 points, contrairement aux autres cours, vous pouvez réagir plusieurs fois avant ma prochaine intervention. Comme il s’agit d’un TP, je vous laisse un peu plus de temps pour argumenter entre vous (sauf évidemment si personne ne répond auquel cas je relancerais). Je mettrais ensuite tout au clair et vous donnerait la partie pratique du TP également sur 15 points. En espérant que cela vous convienne. Ma boite à MP reste ouverte en cas de besoin.]

Spoiler:

Angélina se frotta les yeux quelques secondes.

Ce cours était fatiguant. Elle commençait à avoir du mal à suivre le cours., et elle se sentait un peu perdue. Doucement, la professeur et les élèves ébranlaient des convictions qu'elle n'avait – même songé – à remettre en cause. Un blocage psychologique, les cracmols ? Ils étaient simplement handicapés. Ce n'était pas une psychologue qui allait bien pouvoir les aider... mais bon. Ce n'était pas le moment de se battre, et le public n'était sûrement pas prêt pour cette vérité. Quoique, et si c'était vrai ? Elle ne sentait pas vraiment capable de trancher sur la question... il faudrait peut-être y réfléchir plus avant, même si cela paraissait un peu vain. La réalité ne changerait pas même si elle se creusait la tête pendant cent ans ! Enfin... comment savoir ?
Sur sa droite, la dénommée Page lui souffla une question, auquel Angélina répondit par un sourire. Elle ne relancerait pas le débat, mais ne renoncerait pas à ce que pensait son Père. Il ne pouvait qu'avoir raison : il était si intelligent ! Bon, évidemment, le fait que les cracmols portent malheur lui paraissait peut-être un peu excessif. Après tout, les moldus ne portaient pas malheur et l'on n'était plus au Moyen-Age.
Elle se pencha vers la gryffondor. Son regard était rempli de conviction et d'innocence puérile – ce n'était pas un drame si ces pauvres cracmols étaient nés comme ça, mais c'était la vérité. Être dépendant à ce point ne lui plairait certainement pas ! Rapidement, elle lui répondit dans un murmure, sa petite bouche tordue de perplexité.

- "Ben... oui. Les pauvres, ils n'ont pas le choix mais cela doit être dur à vivre pour leur famille. Regarde, le concierge, Rusard... je pense que c'est à cause de ça qu'il est si renfrogné. Il doit être amer... Mais... je ne pense pas qu'ils puissent porter malheur. Sinon, sa présence aurait déjà fait imploser l'école au moment de la Bataille !"

Elle manqua de pouffer gentiment, inconsciente du jugement de la Rouge et Or à son encontre et toute retournée à son commencement de migraine. Elle fit tourner sa plume entre ses doigts en écoutant déclarer la professeure qu'elles allaient travailler en trinôme pour un TP. Alors, un, la théorie du Big-Bang, deux, théorie animiste (bizarre), et théorie élémentaire.
Alors si la jeune fille comprenait bien, « tout être vivant possède la magie à un niveau particulier ». Elle l'inscrivit en gros sur sa feuille, pour faire un petit signe d'adieu à sa voisine de table qui déménageait. Fallait-elle qu'elle se déplace près d'Ethel ? Elle paraissait toute serrée dans son coin, mais la question serait certainement réglée lorsque les autres élèves déménageraient de leur place. Elle mit donc toutes ses affaires en tas dans son sac, puis rejoignit la gryffondor à la place qui se libérait justement.

Bon, c'est le moment de se mettre au travail.
Consciencieusement, l'adolescente remit son parchemin et sa plume sur la table, puis écrit en dessous du titre principal, « Ethel, Angélina et Christopher », ce qui donnait cela :

TP : Théorie animiste
Ethel, Angélina et Christopher

- "Salut... bon, voilà, on travaille ensemble. Je propose que chacun avance ses arguments, on les note tous, et après... euh... on voit ce qu'on présente tous ensemble. Pour commencer et vous donner un exemple, je dirais, euh... on note trois niveaux de magie différents rien que chez les humains : Sorciers, cracmols, moldus. Tous les sorciers mêmes ont des potentiels différents... Il suffit de regarder... euh... les différentes notes des élèves, à effort équivalent. Vous avez d'autres exemples ?"

La cadette des Fowl se mit à regarder amicalement les deux autres visages qui la fixaient, en essayant d'oublier sa migraine naissante. Ils allaient avoir une note excellente, elle en était intimement persuadée. Même si elle ne connaissait absolument ses camarades, ils n'étaient pas là pour rien : ils formaient tous en quelque sorte une élite, ce qui la confortait dans son assurance naturelle.

Clarisse eut tout le mal du monde à se concentrer sur les paroles de son professeur. Cette dernière tenta à peine d'apaiser les cœurs et préféra ignorer l'insulte d'Angelina. La rousse n'en eut que plus de difficulté à se contenir. D'un autre côté, si l'enseignante ne voulait pas que son cours se termine en bain de sang, peut être valait-il mieux, effectivement, passer à autre chose. La jeune fille le comprenait et pourtant, elle ne put s'empêcher de ressentir ça comme une injustice. Personne d'autre qu'elle ne voyait donc clair dans le jeu de la Poufsouffle? Cette fille était un poison et la sixième année se chargerait d'enlever les peaux d'orange des yeux de ses camarades si ceux-ci n'étaient pas assez intelligents pour le faire seuls. M'enfin pour le moment, au lieu de monter un plan machiavélique (ce qui du reste ne ressemblait pas à Clarisse) pour se venger, il était question de ne pas perdre une miette du cours. D'ailleurs elle ne devait pas accorder tant d'importance à la pimbêche. Cette dernière aurait été bien trop contente de voir qu'elle lui gâchait la vie. Inspirant profondément, Clarisse tâcha donc de se concentrer sur les paroles de Miss Shodako. Ce fut pour apprendre quelques minutes plus tard après un commentaire général sur chaque réponse donnée, qu'elle allait devoir défendre la théorie de Fowl avec Lucy Duncan.

Comme si leur accrochage public ne suffisait pas, le professeur avait décidé qu'elle défendrait la théorie de cette sale peste. C'était plus ou moins comme rajouter de l'huile sur le feu. La théorie élémentaire était sûrement très intéressante, mais le fait qu'elle avait été proposée par la jaune et noir lui ôtait toute crédibilité aux yeux de la Serdaigle. C'était idiot bien sûr et elle en avait bien conscience, mais c'était plus fort qu'elle. Encore trop énervée, elle avait besoin de dénigrer tout ce qui venait de cette fille, au moins en pensées, pour se sentir... mieux? Pas sûr que ça soit très efficace. Elle continua tout de même de maugréer intérieurement jusqu'à être sortie de ce cercle vicieux par l'arrivée de Lucy à côté d'elle.

« Surtout ne me parle pas de cette... fille. » Grinça-t-elle, et il était clair que dans sa tête elle avait remplacé le mot « fille » par « pouf » ou d'autres termes tous aussi glorieux.

Elle fit néanmoins l'effort de sortir un parchemin vierge, d'y inscrire leurs deux noms ainsi que l'intitulé du sujet: « La magie comme cinquième élément. ». Et puis ensuite... tout restait à faire. Lucy et elle devraient élaborer la théorie avec les arguments pour et ceux contre. Dans son malheur, Clarisse était plutôt contente d'être tombée en binôme avec la capitaine de l'équipe de Serdaigle. La blonde était intelligente et avait du répondant. A elles deux, elle parviendraient certainement à un résultat satisfaisant malgré l'évidente mauvaise volonté de l'Ecossaise.

« Bien puisqu'il faut commencer... allons-y. Si la magie est effectivement le sixième élément, je suppose que ce serait comme un sorte de courant tellurique qui parcourrerait la terre, plus fort à certains endroits qu'à d'autres. Il ne serait pas présent partout en quantité égale, comme l'eau ou bien présent partout mais avec un dosage différent. Ça expliquerait la forte concentration de magie à Stonehenge par exemple.»

Elle nota soigneusement son idée sur le parchemin, puis assaillie d'un doute, elle se tourna légèrement gênée vers Lucy.

« Euh, tu sais ce qu'est un courant tellurique? Tu crois qu'on devrait expliquer ce que c'est sur le compte rendu? »

Si c'était le cas (et il y avait de grandes chances pour qu'effectivement elles doivent montrer qu'elles maîtrisaient le vocabulaire utilisé), ça devenait tout de suite un peu plus compliqué. Parce que si dans sa tête elle voyait parfaitement de quoi elle parlait, mettre des mots juste là-dessus était plus difficile. Les scientifiques eux-mêmes ne savaient pas exactement comme les qualifier et se disputaient plusieurs théories aussi vraisemblables et pour l'instant invérifiables, les unes que les autres. Décidant de passer outre ce petit détail pour le moment, la rousse poussa sa réflexion un peu plus loin. S'il y avait une sorte de cinquième élément, il devait être « palpable » en quelque sorte, comme l'eau, le feu, la terre ou l'air, qui même si on ne le voyait pas était fait de milliards de milliards de molécules et d'atomes. Elle continua sa réflexion à haute voix, consciente qu'elle était censée partager ses idées avec son binôme, bien qu'elle n'en ait pas l'habitude.

« Il faudrait donc que la magie soit en réalité un ou des éléments chimiques, comme la molécule d'eau est composée de deux atomes d'hydrogène et d'un atome d'oxygène. L'air est un mélange de gaz, le feu le résultat d'une réaction chimique et la terre... eh bien un très grand ensemble de composés. Le problème c'est que personne jusqu'à aujourd'hui n'a réussi à isoler l'atome, la molécule ou à identifier quoi que ce soit qui puisse être qualifié de « magique », qui soit l'essence même de la magie et qu'on retrouve dans chaque chose magique aussi bien une plante qu'un être humain, qu'un objet ensorcelé. En fait il faudrait pouvoir étudier de quoi est fait le rayon lumineux qui sort de la baguette pour en savoir plus. »

Elle fit une pause, perplexe.

« Je suis quasiment certaine que des tas de sorciers se sont déjà penchés sur la question sans trouver de réponse probante. Sinon on n'aurait pas ce genre de discussion. Ce qui veut dire que soit on n'est pour le moment pas assez avancés technologiquement pour déceler ces particules, soit elles n'existent pas et la magie serait en fait la combinaison d'éléments déjà connus qui ensembles formeraient ce nouvel élément, soit enfin cette théorie n'est pas la bonne. »

Et cette dernière solution était celle qui plaisait le plus à Clarisse, même si elle ne l'aurait jamais avoué. M'enfin, elle n'était pas là pour donner son avis et tentait tant bien que mal de regarder le problème avec un œil neutre. Elle se contenta donc de griffonner ses dernières remarques sur le parchemin. Il y avait encore beaucoup à réfléchir, mais il était inutile de se précipiter. Pauser calmement les divers éléments aidait à y voir plus clair. D'ailleurs Lucy ne s'était pas encore beaucoup exprimée sur le sujet, réfléchissant sans doute aux causes et aux conséquences de tout ça avant de proposer sa vision de la théorie élémentaire.

« Et toi, tu en penses quoi? » L'encouragea Clarisse.