Attablée à la merveilleuse nouvelle terrasse de Fortarôme, Prudence soupira d'aise. Le temps était splendide, et les rayons du soleil doraient la peau des sorciers en vadrouille. Fermant les yeux un instant, elle laissa la douce chaleur irradier sur son corps. C'était un bonheur. Car en plus de la météo radieuse, elle n'était pas n'importe où. Elle était dans la nouvelle boutique de Florian Fortarôme. LE Florian Fortarôme. L'homme le plus réputé de Grande-Bretagne dans le domaine de la glace et des sorbets maison. Quel drame cela avait été lorsque Prue avait appris sa disparition ! Fortarôme était au Londres sorcier ce que Bertillon était au Paris moldu : une adresse d'exception irremplaçable. La Poufsouffle avait été catastrophée de devoir dire adieu au paradis sur terre. Bien sûr, elle s'était inquiétée pour le propriétaire mais... s'il fallait être tout à fait franche, c'était surtout son palais qui avait pleuré la perte d'un génie des saveurs.
Alors quand elle avait appris la réouverture de la boutique, elle n'avait pas perdu une seconde et avait obtenu de ses grands-parents l'autorisation de se rendre au Chemin de Traverse pour s'assurer par elle-même que la Gazette n'avait pas propagé un mensonge de plus. Quel soulagement cela avait été ! Dans une parodie d'aura sainte, le soleil avait eu la judicieuse idée de faire glisser l'un de ses rayons vers l'enseigne flambant neuve du glacier. Elle ne rêvait pas. Il était bel et bien là.
Avec un sourire jusqu'aux oreilles, la cinquième année était entrée et avait commandé une double passion - mangue car, après tout, elle n'allait pas bouder son plaisir. L'effervescence qui régnait dans la boutique ravissait la jeune fille. Si l'annonce de la réception en l'honneur de Harry Potter avait indiqué au monde sorcier qu'ils entraient dans une nouvelle ère, c'était ce jour qui marquerait le tournant pour Prue. Le retour du glacier lui faisait à présent réaliser que les sombres forces avaient été battues.
A présent sur un petit nuage, la Bronze et Or avait dégotté l'une des dernières places en terrasse pour savourer son met divin tout en profitant de ses derniers jours de vacances. Bientôt, la rentrée serait là,et elle retrouverait tous ses camarades. Y compris, espérait-elle, tous ceux qui avaient choisi de ne pas revenir à Poudlard l'an passé en raison du contexte politique. Cet après-midi était vraiment le bienvenu, sur tous les plans. Il permettait aussi à la jeune fille de se préparer psychologiquement à la séparation d'avec sa famille. Bien sûr, elle entrait en sixième année, n'était plus une enfant, et avait déjà vécu cinq rentrées mais... à chaque fois, le sentiment d'abandon se faisait ressentir. Quitter la maison chaleureuse de ses grands-parents ne lui était jamais facile, quand bien même elle savait qu'elle retrouverait des amis au château. Le lien qu'elle avait avec Papi et Mamie Hamilton était bien trop fort pour que l'habitude amène l'indifférence.
Aussi, passer cet après-midi sans eux, au milieu de tous ces sorciers inconnus, et sans doutes plusieurs élèves de Poudlard qu'elle ne reconnaissait pas, c'était une bonne idée pour se réhabituer à leur absence et à son autonomie.
Prudence en était là, perdue dans ses pensées, léchant distraitement sa glace - mais n'en perdant pour autant pas une seule once de plaisir - quand un marmot atterrit à plat ventre sur sa table, manquant de la barbouiller de sa glace, et de lui faire plonger le nez dans sa boule passion (enfin, l'une des deux). Surprise, la jeune fille poussa un petit cri, mais en vint bien rapidement à un sourire. Ce petit bonhomme, elle l'avait déjà croisé plus d'une fois en salle commune, même si elle n'avait jamais pris le temps de discuter avec lui. Prue estima, au vu de ses manières diablement galantes et amusantes, que cela était une erreur à réparer immédiatement.
- Enchantée, fier Chevalier au cornet fugueur ! Tu es le bienvenu à ma table, je t'en prie, installe toi. Tu ne t'es pas fait mal au moins ?
Joignant le geste à la parole, la Bronze et Or tira la chaise à côté d'elle avec sa main libre.
- Je m'appelle Prudence. Prudence Hamilton. Mais tu peux m'appeler Prue si tu préfères. Mon petit doigt me dit que nous appartenons à la même maison, mon cher ami, poursuivit-elle avec un clin d'oeil.
Elle jaugea la montagne de glace que le jeune garçon portait et un sourire plus large encore étira son visage avenant.
- Et tout porte à croire que nous sommes faits pour nous entendre, acheva-t-elle en levant son cornet dans une parodie de toast.