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 La vie en kit, livraison à domicile [Terminé]
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  • James Kirkby
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    James Kirkby
MessageSujet: Re: La vie en kit, livraison à domicile [Terminé]   La vie en kit, livraison à domicile [Terminé] - Page 2 EmptyDim 4 Avr - 10:23:15

La douleur avait fini par céder, mais, étrangement, James songeait qu'il aurait mieux valu continuer à en baver qu'affronter la présence d'Isaac. Peut-être aurait-il dû rester encore dans la rue, en tâchant de faire fi de son genou brisé ? Au moins, il n'aurait pas eu à répondre à des questions. Le gamin caressait ses cheveux, et devait s'étonner de ne pas retrouver leur douceur habituelle. Il murmurait des mots gentils, et n'obtenait en réponse que de vagues monosyllabes, plus grognés que parlés... Pour satisfaire sa curiosité, il aurait fallu parler haut et clair, sourire, donner le change. Oh, la soirée a été affreusement ennuyeuse... à mourir, vraiment... quel plaisir de rentrer enfin chez soi... Quoi, ça ? Oh, ce n'est rien, juste un ennemi du Seigneur des Ténèbres qui m'a saigné dessus. C'est les risques du métier, que veux-tu...

Il était terriblement déstabilisant, au sortir d'une mission accomplie pour le compte de Lord Voldemort, de se retrouver sur le même canapé qu'un adolescent né-moldu, d'accepter ses gestes affectueux, et de se soucier assez de lui pour ne pas oser parler. Un Mangemort cohérent l'aurait torturé, tué, ou, du moins, fichu à la porte avec pertes et fracas. Mais James sentait bien, depuis quelque temps, qu'il ne tournait plus très rond – plus très rond pour un sbire du Lord. La présence d'Isaac l'avait métamorphosé, et les conversations avec le Serpentard lui ouvraient tout un champ de réflexions inédit. Et si les nés-moldus étaient des sorciers comme les autres, après tout ? Le gamin lui avait fait de belles démonstrations, baguette en main, de son talent pour la métamorphose... Et il avait des arguments auxquels James ne savait que répondre ; il baissait alors les yeux, à la recherche d'une objection, mais l'évidence cheminait peu à peu dans son esprit.


*Tu crois vraiment être un autre homme ? Mais regarde-toi, pauvre type... Si tu avais vraiment changé, tu n'en serais pas là avec ta patte folle. Tu aurais refusé de combattre ces gens. Mais tu es toujours le même lâche, la présence d'Isaac n'y fera rien...*

James sentit qu'on le privait de sa bouteille, mais il n'esquissa pas le moindre geste pour la conserver. Il aurait voulu, à force d'immobilité et de silence, se fondre dans le décor, perdre jusqu'à la conscience de sa propre existence. Mais Isaac en avait décidé autrement. Le visage dur, la voix sèche, il exigeait des réponses, et James ne savait comment éviter de les lui donner. Complètement perdu, le jeune homme se mit à regarder partout – partout, sauf vers Isaac – et souffla :

-C'est mieux que tu ne saches pas... Si je te dis, tu sauras... tu sauras que je suis un salaud, acheva-t-il d'une voix étranglée, sans pouvoir se résoudre à parler davantage.

Avec une telle entrée en matière, cependant, Isaac risquait de vouloir savoir plus exactement où il était tombé, et James, la tête dans ses mains, les yeux fixés sur le parquet, essayait de rassembler ses esprits. Finalement, il poursuivit sans y être invité, d'une voix faible :


-Tu sais dans quel genre de famille j'ai grandi, Isaac... Depuis tout petit, j'ai entendu chanter la gloire de... tu sais qui... Et moi, abruti de gamin, j'ai... cru à toutes ces sornettes...

D'un coup, une sorte de fureur fit bouillonner son sang, et il se redressa brutalement, releva sa manche gauche, et tendit devant Isaac un avant-bras qui frémissait de rage.

-Tu sais ce que c'est, ça ? Interrogea-t-ild'une voix soudain puissante. C'est le signe de ce que je suis... un lâche, un salaud...

Oubliant momentanément son genou brisé, il se leva, tandis qu'une extraordinaire colère se répandait en lui ; il en voulait à la terre entière, à commencer par lui-même, tant la certitude d'être un déchet s'était imposée à lui. Dans un ultime mouvement de courage, il se tourna vers Isaac et reprit, avec des accents suppliants dans sa voix qui tremblait toujours :

-Ne dis rien, je t'en prie. Je sais ce que tu pourrais dire, crois-moi... Si tu veux que je parte, je vais partir, mais épargne-moi tes reproches, je t'en conjure.

Il avait deviné, pensait-il, tout ce que l'adolescent pourrait lui jeter à la face, et cela lui avait fait assez mal pour espérer ne pas essuyer ces reproches de la bouche d'Isaac. Il ne supporterait pas d'entendre cette voix lui rappeler qu'il avait trahi sa confiance, qu'il le dégoûtait, et que les quelques soins prodigués à un né-moldu en détresse ne rachetaient aucun de ses forfaits... Il savait tout cela, et ne pouvait que prier pour qu'Isaac accepte de ravaler les paroles qu'il devait brûler de lui lancer. Sa jambe blessée s'était mise à trembler, et James claudiqua jusqu'au mur pour s'y appuyer ; d'une façon absurde, il se rendit soudain compte que la paroi n'arborait plus ce blanc qu'Isaac avait comparé à celui d'un hôpital, mais un vert très tendre qui s'harmonisait parfaitement avec le parquet sombre. En y regardant mieux, toute la décoration du salon avait été refaite, avec un soin particulier dans le choix des couleurs. Crucifié par cette découverte, James se tourna vers le mur, une terrible envie de pleurer lui nouant la gorge.
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  • Isaac Deniel
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MessageSujet: Re: La vie en kit, livraison à domicile [Terminé]   La vie en kit, livraison à domicile [Terminé] - Page 2 EmptyDim 18 Avr - 16:23:21

Imaginer une simple dispute familiale était ridicule. Avec la meilleure volonté du monde Isaac était incapable de relativiser la gravité de ce qu’on lui taisait. Il ne savait pas où les mots de James le mèneraient, mais sa silhouette brisée, son regard agité, fuyant, lui promettaient quelque chose de terrible. La vérité méritait le silence. Il vivrait peut être mieux sans. Et si les non-dits les rongeaient, l’heure serait aux adieux. Entre la douleur et la destruction, il fallait choisir. Connaissait-il les activités de James ? Non. Le jeune homme ne lui avait pas une seule fois parlé de ses relations. Il avait découvert, au détour de quelques conversations, des membres de sa famille, rien de plus. Il semblait seul, en retrait, peu disposé à nouer de grandes amitiés. Isaac ne s’en était pas inquiété puisqu’il aimait, avouons le, cette idée d’exclusivité. L’étudiant restait pour lui, il n’était jamais question d’un autre garçon en manque d’affection. C’était une existence taciturne, vide et lisse, un petit monde fermé où l’histoire se déroulait en huis clos. Dehors, il ne voyait qu’un néant abyssal. Ce qui dépassait le seuil de cet appartement n’avait aucune importance. Mais il se forçait à l’insouciance. Son hôte n’était pas l’être de passage, insipide à souhait, rencontré puis oublié. Une profondeur toute autre vibrait en lui. Il la devinait pesante et sombre, intimement liée à une personnalité renfermée. Quelle tragédie avant-il à cacher ? Les questions évoluaient lentement derrière le regard voilé de l’adolescent. Sa colère, dernier sursaut de vie, l’avait plongé dans une torpeur figée. La suite ne serait pas drôle. Il attendait le dernier coup sur ses plaies mal couturées, une pression de tison sur la chair a vif qui avait cessé de saigner. Le doute de bon ton ne frappait même pas les affirmations du jeune homme. L’ambiance dramatique de la scène absorbait les dernières pensées positives. Il songeait à tous les secrets dissimulés, à la famille conservatrice, à l’apathie de James. Un salaud disait-il ? Il le croyait.

Et le récapitulatif logique rassemblait ses idées. Les yeux toujours baissés, James revenait à ses origines, à ses monstres qui vénéraient le nom du Lord Noir. Alors, à cet instant précis, il sut ce qu’il ne voulait absolument pas entendre. Son corps gagnait une rigidité cadavérique. Le sang quittait ses veines. Il ne restait plus qu’un courant d’air glacé. Ce cauchemar ne s’arrêterait jamais. Il avait froid. Le scénario ne lui plaisait plus, mais la certitude d’être dans une mauvaise pièce ne suffisait pas à annuler les faits. Le rideau de pourpre ne tomberait pas devant ses pieds, il n’y avait aucune page à déchirer, pas de bande à emmêler. Parce qu’il était héros de ce destin, il subirait. Pire, sa prise de risques était à considérer. Personne ne l’avait obligé à venir ici, la possibilité que James ne soit pas un partisan à la cause des nés-moldus avait été sciemment ignorée. Qui pouvait-il maudire ? Il sursauta lorsque le jeune homme, mû d’une énergie agressive, se redressa. Ses prunelles n’exprimaient plus qu’une passivité étrange, le signe d’une agonie acceptée. Et pourtant, rien ne pouvait le préparer à l’horrible vision de la marque. Il était dommage que certaines images ne puissent tuer. Il préférait encore affronter la laideur insoutenable de Méduse que le tatouage sinistre imprimé sur le bras de son compagnon. Le poing au cœur était brutal. Il lui semblait que tous ses organes venaient de s’effondrer. Une terreur parfaite tirait son visage. Il recula jusqu’à heurter la table. La bouteille se renversa, ses yeux s’asséchaient à force de rester ouverts. Ne rien dire ? Mais comment pouvait-il parler ? Les lèvres tremblantes d’impuissance, il suivit son déplacement d’un regard à moitié aveugle, brouillé, sourd à ses supplications. Le choc, l’assurance d’avoir été trompé de la façon la plus ignoble qui soit, sali au plus profond de lui, dominait toutes ses pensées. Une fourmilière grouillait dans sa tête. Et il fallait réagir, trouver une solution, là, tout de suite, répondre à un meurtrier qui, sans vous connaître, aurait pu vous tuer d’un coup d’avada, donner la réplique au camarade de jeux de vos tortionnaires, au disciple de celui qui avait promis au monde l’éradication des vôtres…


- Alors continue…
, dit-il d’une voix très faible, ça ne me dit toujours pas pourquoi tu es dans cet état…

Il s’étonnait lui-même d’avoir encore assez de ressources pour réclamer la suite. L’immobilité perçante de son regard oscillait entre celle d’un cocaïnomane au bord de la crise et l’expression troublée d’un psychopathe né. Il semblait victime d’une cécité de l’âme, comme si la réalité face à lui se distordait et s’éloignait peu à peu des perceptions communes. Les mots devaient continuer de le labourer pour l’aider à remettre en place un semblant d’idée. Quelle attitude adopter ? Les révélations choc ne provoquaient pas les passions rapides qui se jouaient au cinéma. Figé au milieu de la pièce, il observait James sans vraiment le voir, peu touché par la douleur manifeste qui l’affectait.
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  • James Kirkby
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MessageSujet: Re: La vie en kit, livraison à domicile [Terminé]   La vie en kit, livraison à domicile [Terminé] - Page 2 EmptyMer 7 Juil - 20:11:56

Le front appuyé contre le mur, son genou blessé tremblant violemment sous lui, James fermait les yeux avec force, comme si cela avait pu lui permettre de quitter cette pièce. Il sentait le regard d'Isaac posé sur lui, le devinait plein d'amertume, de déception, de haine peut-être – et de dégoût, certainement – et n'osait se retourner de peur de le croiser. Dans son esprit, les mots allaient, venaient, s'entrechoquaient, sans se poser plus d'une seconde ; toutes les explications lui semblaient vaines, chacune d'entre elles venait mettre en lumière sa somptueuse lâcheté. Dire qu'il s'était senti honoré le jour où il était entré en esclavage ! Cette Marque l'écoeurait désormais au point qu'il aurait été capable de se couper lui-même le bras, pour ne plus la voir. Mais se mutiler ne l'aurait certainement pas sauvé de la servitude où il s'était lui-même enfermé, et il fallait envisager autre chose – adopter le comportement d'un brave, enfin.

Le courage. Voilà ce qui manquait au garçon, voilà ce qui l'empêchait de secouer ses chaînes. Ah, bien sûr, s'il avait eu au moins la moitié du cran d'Isaac... Mais il avait toujours courbé l'échine, recherché sa propre sécurité, sans se soucier des autres, et tout naturellement, il s'était mis au service du mage noir le plus puissant ; comment être plus en sûreté qu'en vendant son âme au diable ? Mais d'âme, il n'avait plus guère, puisque sa vie se résumait à une crainte constante pour lui-même. Depuis la sinistre entrevue avec Lord Voldemort, cependant, il se rendait compte qu'en se faisant le suppôt de ce mage, il ne se sauvait même pas lui-même ; l'égoïsme qui l'avait guidé jusque-là avait commencé à se faire plus discret, et le jeune homme s'était avisé qu'il se trouvait, en réalité, dans le même sac que tous les autres.

Isaac réclamait des explications, d'une voix faible, mais étonnament calme. James se demanda fugitivement comment il faisait pour continuer à vouloir lui parler ; une larme osa couler de ses yeux sur sa joue sale, et le Mangemort l'essuya, l'écrasa plutôt, d'un coup de poing. Il n'avait pas le droit de pleurer. Les salauds ne pleurent pas – et il était un salaud, malgré ses efforts pour se persuader qu'il était une victime. La gorge terriblement sèche, il dut s'y reprendre à plusieurs fois pour raconter, d'une voix si lointaine qu'elle aurait pu être celle d'un étranger :


-Eh bien... heu... je... j'étais chez mes parents... et puis... on nous a appelés... Quelqu'un avait brisé le tabou... on s'est battus... juste battus, pas de morts...

Si imprécis que fût son récit, il faisait remonter des souvenirs insoutenables,qui lui donnaient la nausée... le visage d'Ophelia, son incompréhension, le meuble en feu sur elle, le craquement sinistre du genou, la confusion totale... le rire dément de Bellatrix lorsqu'ils avaient été certains de la victoire... les regrets, formulés il ne savait plus par qui, de ne pas avoir fait de prisonnier pour l'interroger avec une minutie de bourreau chinois... Tout au long de la bataille, James n'avait cessé de se demander ce qu'il faisait là. Devant les autres, il avait tâché de faire bonne figure, de se battre normalement – la peur, toujours, la crainte d'être dénoncé comme tire-au-flanc- mais chaque seconde passée sous cette cagoule l'avait davantage dégoûté de lui-même.

Et soudain, alors qu'il croyait avoir vaincu son envie de pleurer, il éclata en sanglots. Incapable de se contrôler, il essaya de dire quelque chose, mais seuls quelques mots franchirent ses lèvres :


-Salaud... pardon... crever...

En se tenant au mur – le vert tendre accentua encore ses sanglots irrépressibles d'homme dont les nerfs lâchent – en se tenant à ce mur décoré par l'adolescent, il s'avança vers la chambre, avec l'espoir de s'y isoler. Se jeter sur le lit, pleurer à son aise sur son ignominie, et peut-être en finir. Il n'osa même pas jeter un regard en direction d'Isaac, comme si le simple fait de le regarder pouvait souiller ce garçon de valeur – un gamin avec un caractère comme James aurait aimé en avoir... à peine quinze ans et déjà le courage d'un homme accompli. Par contraste, James ressentait encore plus douloureusement sa propre lâcheté, sa propre insignifiance, et il n'avait qu'une hâte, disparaître de la vue d'Isaac. Et puis, pourquoi pas, disparaître complètement.


[Toutes mes excuses pour le retard et la piètre qualité]
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  • Isaac Deniel
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    Isaac Deniel
MessageSujet: Re: La vie en kit, livraison à domicile [Terminé]   La vie en kit, livraison à domicile [Terminé] - Page 2 EmptySam 24 Juil - 21:55:47

Ce qui est fou, c’est cette réaction instantanée. Le passage d’un état à l’autre. L’impression de ne plus être, d’un coup. Tout devient flou. Le corps se crispe, se glace, le cœur s’arrête, tout se contracte et prend l’indifférente roideur du marbre. Il s’en allait. Loin, très loin, vers une fixité éternelle. Le mal était cérébral. Quand une vague de chaleur alimentait à nouveau ses veines charriées, la tête se vidait. La bouche hébétée, le regard immobile, il entrevoyait un cerveau blanc, deux hémisphères pressés comme des éponges, proches au point de se fondre l’un dans l’autre. Quelque chose se mourrait en lui. Il semblait qu’il abandonnait sa réflexion sur une voie rapide. Elle s’écrasait, encore et encore, s’accrochait au macadam brûlant pendant que le rythme ne cessait de s’accélérer. Il n’y arrivait plus. La détresse grandissait en lui, obstruait tous les pores de sa peau. L’air ne se renouvelait plus, le sang manquait d’oxygène. Il aurait fallu trouver une explication pour respirer et libérer une âme à l’agonie, enlisée dans les tréfonds bourbeux de ses pensées parasites. Mais il n’y avait rien à comprendre. Aucune raison n’était la bonne, tout concourait à prouver que la dernière personne en qui il avait posé sa confiance le trahissait ouvertement depuis le début. Planté droit au cœur, sur le mur vert amande, il n’avait plus qu’une seule certitude : ça ne devait pas être. Cette scène était absurde. Elle ne devait pas exister. Or, il la vivait dans toute son intensité. Il fallait mourir pour que ça ne soit plus, afin que tout s’annule. C’était à vomir. Les images éclataient une à une devant ses prunelles stupéfiées, des entrevues avec Carrow, des heures tendres près le James, des mots, quelques engagements muets, un soupire, une nuée de coups, la chair déchirée. Elles étaient anormalement claires et formaient une logique qui lui échappait. Dans un autre monde tout cela avait peut-être un sens. Une nausée métallique nouait sa gorge. Il s’attendait à cracher du sang, mais ce n’était qu’une sensation, le fantasme d’une décomposition intérieure. Rien n’irriguait sa gorge asséchée.

Il avait tenu bon le temps de poser une ultime question. Sa crispation se fermait sur lui comme un étau à présent. Les paroles hachées de James resserraient l’emprise de son esprit dégénéré sur son corps. C’était infernal, il se serait ouvert le crâne s’il le pouvait. Plus les éléments s’assemblaient, moins il comprenait. Le jeune homme disait qu’on lui avait donné l’ordre de se battre pour une histoire de tabou brisé. Mais qui avait-il combattu ? Des sorciers sans défense, provocateurs ou imprudents ? Ou de vrais résistants, un groupe comme l’Ordre du Phénix, assez puissant pour inquiéter les plans de leur nouveau dictateur ? Alors pourquoi l’aidait-il encore ? Que représentait-il ? Un pauvre sang-de-bourbe isolé qui devait se porter garant de sa bonne conscience. En réalité, il offrait le double jeu parfait à un esprit faible. Si James ne suivait plus aveuglément le discours de son Maître depuis leur première rencontre il n’avait jamais été question de briser son pacte. Il prenait le risque de le recueillir pour se conforter dans l’idée qu’il n’était pas un monstre. Il lui avait menti plus de quatre mois, sans trouble profond, comme s’il s’agissait de la chose la plus naturelle au monde. Malgré toutes les blessures qu’il avait pansées et dont il connaissait l’origine, il avait infligé le même châtiment à ses hypothétiques sauveurs. Sans l’incident du réveillon, le secret serait demeuré, ils auraient passé une belle fin de soirée, ses mains se seraient posées sur lui, il aurait eu l’impression de l’aimer. Et si le mensonge se justifiait par le simple plaisir de briser un interdit en ouvrant son lit à une race impure ? Il voulait s’arracher la peau. Ses ongles se plantèrent rageusement dans ses joues puis ses bras. Rien n’allait en lui. A quoi bon tout faire pour survivre, lutter contre un régime inique s’il devait subir ça ? Un enchaînement d’humiliations et de désillusions. Finalement, il n’était pas assez égoïste.

Il ne pleurait pas. Cette douleur dépassait les larmes, elle n’appelait que la violence. Les sanglots vinrent de James et une colère brutale monta en lui. Il était comme un gamin, conscient de ses bêtises mais incapable de les assumer. En dernier recours, le sale gosse pris sur le fait pleurait. Quand les mensonges ne suffisaient plus, il invoquait la pitié. Isaac prenait toute la mesure de son dégoût. Comment avait-il pu lui réserver des pensées affectueuses quelques heures plus tôt ? Il ne les méritait pas. C’est à peine s’il pouvait le mépriser. Si l’un d’entre eux devait pleurer, ce n’était certainement pas James. Un salaud ne se console pas, il s’abat dans la boue où il se traîne. Il n’existait pas de mots pour apaiser la douleur d’un traitre qui s’était joué de lui depuis le début en sachant très bien vers quelle impasse il le menait. Fondre en larmes était bien trop facile. L’adolescent était toujours aussi seul, à Poudlard, au fond des cachots, dans l’appartement de son lamentable sauveur. Il fallait affronter une souffrance ingérable en subissant le chagrin indécent de son bourreau. Il vivait une déception de plus. Celui qui titubait jusqu’à la chambre n’était qu’un ersatz d’homme. S’il avait su garder contenance, prendre sur lui, trouver les bons mots, fait son possible pour soulager un peu son mal, il aurait peut-être accepté de s’aveugler plus longtemps, au moins jusqu’à la fin de son séjour ici. Mais James ne se préoccupait que de sa douleur… superficielle et méritée.


- Tu n’es pas un salaud
, dit-il d’une voix éteinte qui couvrait à peine ses sanglots et qui, de sorte, forçait l’apaisement, encore moins un monstre… Je ne sais pas ce qui définit ce que je vois… Mais s’il existe une sous-race d’hommes tu peux oublier ta Noble lignée parce que cette race, tu l’incarne parfaitement.

A cet instant, il sut quel genre de folie se déversait en lui. C’était la plus noire, celle qui ne se contrôlait pas, qui rendait les attaques jouissives. Il ne retenait rien au nom de la délicatesse, parce qu’il ne voyait plus d’issue. Son seul plaisir serait de savoir que toutes ses répliques étaient susceptibles de le percer en profondeur. Il s’exprima d’une voix crispée. Ses poings crispés faisaient trembler ses bras. Il l’aurait frappé s’il était à sa portée. Cette pulsion le délogea du mur. Il se rapprocha de quelques pas.

- Je rêve ou tu me fuis ? Oui, tu ne veux rien entendre, tu sais déjà tout, et tant qu’on en parle pas, tu peux toujours pleurer comme une victime, te dire que c’est la faute de tes parents, pas la tienne. Tu parles de crever, mais tu ne le feras jamais, tu préfères survivre au dépend des autres parce que ta vie ne vaut rien, tout ce qui t’anime c’est la peur. Tu dis qu’on t’a appelé… Appeler n’est pas ordonner… Donc tu avais le choix mais après tout, que je sois là ne change rien, puisqu’un chien n’a besoin que d’être sifflé pour accourir.


Ce n’était pas la première fois qu’il profitait de sa cruauté verbale, mais il n’y mettait jamais mis d’émotion, parce qu’il accordait peu d’importance à ses fréquentations et n’y voyait qu’un moyen de provocation. Mais il n’attendait même pas de réactions. Il avait déjà trop espéré, il ne lui restait que la triste satisfaction de briser celui qui l’avait trompé.

- Je ne vois rien d’autre. J’ai du mal à comprendre pourquoi tu m’as embarqué là-dedans en te forçant à un mensonge aussi déplorable. Mais tu avais l’air de bien le vivre… Comme si j’étais là pour racheter tes fautes ou te distraire. Tu n’as aucune fierté. Sèche bien tes larmes avant de retrouver ton maître surtout. Tu n’es même pas capable de me regarder en face. Je te déteste.


Mais sa voix avait fini par se briser et des larmes amères coulaient sur un visage résolument fermé. Ce qu’il avait expulsé ne suffisait pas, ne changeait rien à l’angoisse qui raidissait tous ses membres. Il n’avait rien à faire ici. Même s’il sortait, il ne serait bien nulle part. Si tout ce qu’il disait était vrai James n’aurait même pas le cran de le tuer. Il disparaîtrait dans cette fichue chambre comme le gamin irresponsable qu’il était. Au moins, dans le salon et la cuisine il y avait de quoi faire pour sombrer dans un sommeil immédiat où les rêves n’auraient plus jamais leur place.


Dernière édition par Isaac Deniel le Ven 30 Juil - 22:18:32, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: La vie en kit, livraison à domicile [Terminé]   La vie en kit, livraison à domicile [Terminé] - Page 2 EmptyDim 25 Juil - 20:47:28

L'essaim de frelons se rapprochait lentement, dans un bruissement croissant de milliers d'ailes, pour finalement entourer entièrement la tête de James. Le jeune homme avait la vue obscurcie par les insectes, et il lui semblait que sa tête allait exploser tant le bruit des frelons le rendait fou. Par intermittence, ils occupaient tout son champ de vision – fondu au noir – puis le mur vert amande reparaissait, seulement éclaboussé de quelques taches noires, insectes frémissant avant de rejoindre l'essaim. À bout de patience, le garçon leva la main pour chasser les bestioles, mais elles bourdonnèrent de plus belle en tournant furieusement autour de lui. L'épuisement, la douleur, et les dizaines de pensées inachevées qui se succédaient dans son esprit le désorientaient totalement. À travers cet étrange essaim de frelons – curieux, en plein hiver, dans un appartement londonien, non ? - à travers la nuée noire d'insectes, il entendait la voix d'Isaac, étrangement claire, en saisissait, malgré son état d'égarement, chaque inflexion, chaque mot choisi pour le blesser. Le contraste entre cette lucidité partielle et le flou général était saisissant, et James ne pouvait s'empêcher de se demander pourquoi tout n'avait pas définitivement sombré dans la confusion, comme lui-même. Pourquoi fallait-il que la voix d'Isaac soit si claire, si intelligible, et que chaque mot résonne aussi nettement dans la conscience du Mangemort ? Il aurait tant voulu que ces reproches – amplement mérités, ce qui n'arrangeait rien – se perdent dans l'espèce d'incohérence fondamentale qui entourait chaque chose dans cet appartement, tandis que l'essaim de frelons grossissait à vue d'oeil...

Une fois encore, le jeune homme tâcha, d'un geste las de la main, de disperser l'essaim qui dansait devant ses yeux, en vain ; découragé, il se laissa tomber le long du mur, comme un clochard ivre s'effondre contre la première baraque venue. Isaac continuait de parler, et James se demanda, l'espace d'un instant, pourquoi il était encore là à lui adresser des reproches. À sa place, il serait probablement parti, quitte à se geler toute la nuit dans la rue, pour ne pas respirer le même air que... qu'un traître patenté, d'un sous-homme comme disait l'adolescent. Les sanglots du jeune homme s'étaient rapidement taris, laissant place à un tremblement incontrôlé de tous ses membres ; quoi que semble en penser le garçon, il pleurait avant tout parce que ses nerfs le lâchaient, sous l'effet conjugué de la douleur, de l'épuisement physique et moral et du dégoût. Lentement, il leva sa baguette magique, murmurant deux formules d'attraction ; une fiole de potion anti-douleur traversa d'abord le salon, puis la bouteille de whisky. S'abrutir, boire, ne plus avoir mal, et surtout ne plus penser à rien... James avala la potion, puis une bonne lampée de whisky au goulot, commentant comme pour lui-même les propos d'Isaac :


-Aucune fierté... ouais... Tu préfèrerais sans doute que je te dise que je suis fier de ce que je suis devenu... Ouais, là, je serais un homme, un vrai... Un homme, ça assume, pas vrai ? Ça assume... répéta-t-il d'une voix éteinte, sans attendre de réponse.

Le whisky et la potion avaient, l'espace d'un instant, dispersé l'essaim de frelons, mais les insectes revenaient à l'attaque, plus bruyants et grouillants que jamais. James porta à nouveau la bouteille de whisky à sa bouche, descendit une jolie quantité d'alcool, sans parvenir à dompter complètement ses tremblements ; les frelons s'éloignèrent à nouveau, se fixèrent dans un coin de l'appartement, et le Mangemort fouilla ses poches pour y prendre un paquet de cigarettes. D'une main incertaine, il en alluma une, aspira une profonde bouffée, surpris lui-même du bien-être que lui procurait le simple fait de fumer. Dans le silence, à peine troublé par le bourdonnement des frelons, là-bas, James commençait à se sentir mieux. Sans la voix glacée de l'adolescent résonnant à ses oreilles, il lui semblait reprendre peu à peu le contrôle de lui-même. Les tremblements de ses membres se calmaient à mesure que la potion endormait la douleur, et que l'alcool endormait sa conscience. Sans prendre garde à ce qu'il faisait, il écrasa la cigarette sur la plinthe de bois clair, jeta le mégot à quelques centimètres de lui, et lâcha à mi-voix :


-Déteste-moi, tu as raison... Je ne t'ai pas attendu, d'ailleurs...

Sa voix se cassa tandis qu'il repensait, sans raison, à Florian Fortarôme. Le vieux glacier lui avait parlé avec une bonté inhabituelle, et ses paroles revenaient régulièrement à l'esprit du jeune homme. “Qui se souviendrait que tu as été bon ?” Il l'avait été, pourtant, avant de commettre l'erreur ultime, avant de laisser la médiocrité prendre possession de lui, avant que la peur gouverne sa vie et lui fasse abdiquer toute conscience. Avant, bien avant de savoir qu'il existait quelque part un garçon nommé Isaac qui le détestait. L'alcool aidant, il se laissa glisser dans un demi-sommeil, plié en deux entre sol et mur, en espérant confusément se réveiller et s'apercevoir qu'il avait rêvé tout ça.
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  • Isaac Deniel
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MessageSujet: Re: La vie en kit, livraison à domicile [Terminé]   La vie en kit, livraison à domicile [Terminé] - Page 2 EmptyVen 30 Juil - 22:16:29

Ses membres se raidirent, puis se détachèrent du corps. Ils n’avaient plus de réalité sensitive. La peau se morcelait en parcelle vides, serrées, brûlantes ou glacées, surtout au bout des doigts recroquevillés. La pesanteur lui écrasait les pieds… L’impression qu’à tout instant sa tête allait partir en arrière et ne jamais se redresser. Mais le délire macabre ne l’emportait pas dans un dernier éclat de rire, absurde, insensé, sur la pente de ses larmes enténébrées. Un laisser-aller signerait sa fin. Il ne lui restait plus qu’une logique brisée à laquelle il ne pouvait renoncer. James était l’ennemi. Ce qu’il avait fait ne tolérait aucun pardon. Il se représentait tout ce qu’il détestait le plus au monde. Qu’aurait-il fait devant un mangemort à terre ? Il avait souvent rêvé de cet instant. Ces derniers temps ses fantasmes s’accomplissaient dans le sang. Terré en salle de retenue il s’était découvert une imagination plus cruelle que ses bourreaux. Les supplices étaient si longs qu’ils l’occupaient des journées entières et distrayait les heures où on lui rappelait douloureusement son rôle de victime. Une idée s’était forgée dans son esprit, chauffée à blanc, refroidie sous le coup des sévices, il pouvait les tuer, le meurtre n’était pas terrifiant, c’était une libération, un soulagement. L’acte devenait simple, sans enjeux. Il perdait son statut de crime parce qu’il ne ferait que supprimer ses démons intérieurs. Le sang versé n’appartiendrait à personne, ces corps n’abritaient pas des êtres humains. Il lui semblait que la fine pellicule de peau ne recouvrait rien d’autre qu’un gouffre noir. Tout le monde se porterait mieux sans eux. Les yeux posés sur James il se demandait qu’elles horreurs croupissaient au fond de ses souvenirs. Le serviteur d’un seigneur maléfique pouvait-il faire carrière sans abandonner des cadavres anonymes derrière lui ? Avait-il torturé des innocents avec le plaisir sadique de Carrow ? Combien de nés-moldus figuraient-ils sur son tableau de chasse ? Pourquoi l’avait-on épargné ? Certains étaient tombés sans avoir eu le temps de comprendre ce qui leur arrivait. Il avait approché un mangemort de si près que sa survie l’égarait. Pour une raison qu’il n’expliquait plus, il était en sécurité ici et ses pensées homicides flottaient sur un océan lointain, trop confus pour être rejoint. La reconnaissance ne retenait pas son crime. Malgré l’expression de sa haine, la réalité était encore difficile à accepter.

Il n’était pas obligé d’attendre la réponse du jeune homme. Il pouvait le laisser à sa misère, partir seul sous la neige, rejoindre le domicile de ses parents et crier qu’il ne voulait plus jamais retourner à Poudlard. Le monde des sorciers le dégoûtait finalement. La magie ne lui avait rien apporté. Il aurait vécu heureux en filant le quotidien d’un banal étudiant londonien. Mais il était trop tard pour reculer. L’ampleur de la tâche faisait trembler ses genoux, il était incapable d’avancer. Retrouver la vie à laquelle on l’avait arraché ne serait jamais qu’un mensonge. Il n’en voulait pas. Il était piégé dans l’appartement de la seule personne qui aurait peut-être pu compter. James avait fini par se calmer, et revenait à son désaveu initial. Il noyait ses mots dans l’alcool, comme si cette scène méritait d’être oubliée afin que rien ne pèse sur sa conscience le lendemain. De toute façon, il ne comprenait rien, à croire qu’il le faisait exprès, ou qu’il désespérait de ne pas ressembler au bras droit impitoyable de son maître. S’il avait assumé son emploi Isaac se serait retrouvé à la place du méprisé, il n’aurait pas eu à se poser la question de lui pardonner, il aurait suffi d’un coup de baguette pour mettre fin à cette comédie. Mais le jeune homme ne se défendait pas. Il ne tenait même plus debout et continuait à boire en versant dans le pathos d’un « Tu ne pourras jamais me haïr autant que je ne me hais déjà ». ô tristesse, l’esprit damné de Shakespeare hantait les lieux.


- Qui te parle d’assumer ?
dit-il avec mépris. Tu as déjà vu un criminel ponctuer son curriculum vitae par un « j’assume » ? Ils s’en foutent c’est différent. D’ailleurs, si tu avais correspondu à ce profil, je serais mort depuis longtemps.

La dernière phrase claqua dans le silence. Elle ne l’émouvait pas, ressemblait presque à un reproche. James ne correspondait à rien de ce qu’il prétendait être. Il n’y avait rien à tirer de lui. Ce n’était qu’un enfant perdu, un adulte soumis à des volontés trop étouffantes. Avait-il seulement déjà su ce qu’il était vraiment ? En l’observant, avili sur le plancher, Isaac se souvint de la dernière réflexion profonde qui les avait liés la veille. Ils partageaient le même sang. Cette pensée, loin de le rendre compatissant, lui donna la force d’avancer et d’entrer sans un mot dans la chambre aveugle. Les draps étaient froids, l’odeur de leur propriétaire semblait plus obsédante que jamais. D’un geste absent il jeta quelques affaires dans sa valise, puis il ouvrit la fenêtre, se pencha, s’éleva sur la pointe des pieds, vacilla et recula. C’était stupide. Il ferma tout. La proximité avec la mort raviva ses larmes. Il renifla sans pleurer vraiment, un doigt entre les lèvres, la tête posée sur la tranche du matelas. Sur le sol, l’air se rafraîchissait. Il attendit une dizaine de minutes pour se redresser, prendre le bout d’une couverture et la traîner jusqu’au James. Pourquoi faisait-il ça ? Il n’en savait rien. Le bout de la couverture tomba mollement devant son hôte. Il s’accroupit en essaya de capter son regard, si tant est qu’il lui restât un peu de conscience.

- Un Homme ne se laisse guider par personne et sait que l’indépendance d’esprit a plus de valeur que la vie. Tous les autres ne sont que des pantins.


Les yeux toujours humides il prit la bouteille de whisky et but tout ce qu’il pouvait avaler d’un coup avant d’en mesurer les effets et le goût. Mais cet alcool pur était si fort que la tête lui tourna presque aussitôt. Sans un mot, il se redressa doucement et regagna la chambre en marchant sur la couverture qu’il venait d’apporter. Il la repoussa négligemment du pied pour fermer la porte avant de s’effondrer à plat ventre sur le matelas.

[Fini. Lendemain en interprétation libre. o/]
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MessageSujet: Re: La vie en kit, livraison à domicile [Terminé]   La vie en kit, livraison à domicile [Terminé] - Page 2 EmptyMer 18 Aoû - 12:30:42

Le goût âcre du whisky lui donnait la nausée – ou était-ce autre chose ? James l'ignorait, et son état d'alcoolisation avancée ne lui permettait pas d'analyser. C'était d'ailleurs ce qu'il avait cherché, en buvant comme un trou. Oublier, se laisser enfin tomber dans ce gouffre qu'il devinait devant lui. L'ivresse aidant, ne subsistait que la sensation de malaise physique. Le reste existait toujours, mais comme enfoui, comme flouté par un écran de fumée. Demain... mais demain viendrait-il ? Le jeune homme se sentait pris dans un piège trop puissant pour lui, et l'impression d'être arrivé en bout de course s'imposait. Que pourrait-il faire désormais ? Il n'était plus question de continuer à vivre comme si de rien n'était ; mais secouer le joug exigeait un courage qu'il ne pensait pas posséder. Finalement, rester du côté des assassins pouvait être la solution la plus confortable, à condition de se blinder et d'apprendre à ignorer le regard des Isaac. À bien y réfléchir, qu'avait-il à faire de l'opinion d'un gamin ? Sans même penser en termes de sang – James n'avait pas ce fanatisme-là – que valait l'avis d'un gosse, d'un môme rencontré par hasard et revenu ici par un hasard plus grand encore ?

Et pourtant. Le dégoût d'Isaac était peut-être ce qui faisait le plus souffrir James cette nuit-là. Plus que sa propre haine, plus que le souvenir d'Ophelia, plus que son genou brisé... rien ne le brûlait plus vivement que ce regard dur, que ces paroles d'autant plus dures à entendre qu'il les savait méritées. Les yeux mi-clos à travers son ivresse, il perçut encore quelques mots, en s'efforçant de ne pas les comprendre. Il aurait dû se moquer d'Isaac comme de sa première robe de sorcier, et pourtant...

L'adolescent laissa tomber, avec ses reproches, une couverture que James reçut sur les pieds. Cette attention le bouleversa. Les yeux humides, il parvint à se retenir le temps qu'Isaac disparaisse dans la chambre, puis, à nouveau, il éclata en sanglots. Il avait pleuré davantage ce soir-là que durant les dix années précédentes, et il découvrait soudain la vertu libératrice d'une bonne crise de larmes. Un peu honteux, malgré tout, de cette faiblesse, il s'imagina qu'il devait s'en punir, et ne trouva d'autre moyen que d'appuyer sur son genou brisé. La douleur le dégrisa instantanément, et il s'estima indigne, même, de pleurer. À grand-peine, il se leva pour aller prendre une nouvelle fiole de potion anti-douleur dans le placard de la cuisine ; arrivé là, il lui sembla soudain indispensable de se pendre ; mais il tenait à peine debout, et ce projet avorta dans la minute, après qu'il eut échoué à monter sur une chaise. Il s'affala sur la table, la couverture apportée par Isaac drapée sur ses épaules, et passa la majeure partie de la nuit à boire, alternant alcool et potion, à fumer, et à tâcher de réfléchir. De quelque côté qu'il retourne le problème, il en venait toujours à la même conclusion ; il volait l'air qu'il respirait (d'ailleurs, inconsciemment, il s'était mis à respirer à toutes petites goulées), et son existence même était une erreur. À partir de là, son raisonnement s'enlisait. Que faire ? Entre le dégoût qu'il s'inspirait et la lâcheté qui lui liait les poings, il faudrait choisir...

Le mélange entre alcool fort et potion finit par avoir raison de lui, et il s'endormit sur la table, le visage entre les bras, entre les cadavres de bouteilles et les mégots. La douleur l'éveilla aux petites heures ; il quitta l'appartement, à grand-peine, sans cape, avec le prétexte d'aller acheter le petit déjeuner, mais sans un sou en poche. Dehors, l'air glacial de l'aube lui fouetta le visage, et il déambula un moment, sa canne claquant sur le macadam, sans trop savoir où il allait. Lorsqu'il reprit le chemin de son logis, il avait, croyait-il, trouvé les mots pour convaincre Isaac de son intention de renier son passé. Ne restait qu'à trouver le courage de lui parler, s'il était encore là.
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