Mais pourquoi avait-il accepté ce pari débile ? Pourquoi ? Dieu du ciel ! Etre joueur et téméraire ne faisait pas bon ménage c’était certain. Le pauvre Charles-Henry en faisait les frais en cet instant, essayant tant bien que mal de dissimuler son malaise à la classe. Par chance, les élèves étaient bien trop occupés à rédiger leur devoir d'arithmancie pour se préoccuper des envies pressantes du jeune Gryffondor, qui lui avait un mal fous à se concentrer. Seul le professeur semblait étonnée de le voir se tortiller sur sa chaise. Mais revenons un peu en arrière…

Cap de boire deux pichets de jus d’orange maintenant et de n’aller aux toilettes qu’après le contrôle d'arithmancie ? avait lancé Peter, son camarade de Gryffondor, les joues encore recouverte de confiture de fraise suite au « Cap de te tartiner la gueule ? » que lui avait suggéré Charles-Henry quelques minutes avant.
Cap ! Evidemment, avait immédiatement répondu le garçon avec une pointe de déception dans la voix, jugeant ce défi bien trop simple à son goût.
Puis il avait attrapé un premier pichet et l’avait descendu cul sec. Le deuxième fut plus dur à avaler mais il y parvint tout de même.
A toute à l’heure et bonne chance pour l‘examen, avait alors dit son ami en lui faisant un clin d’œil avant de tourner les talons.
Charles-Henry avait haussé les épaules et s’était dirigé vers la salle de cours d’un air serein, ignorant que les heures qui allaient suivre allait être des plus éprouvantes.

Un coup d’œil à sa montre l’informa qu’il lui restait encore 30 minutes avant la délivrance. Il fallait donc qu’il parvienne à se retenir, par tous les moyens. Surtout que son camarade de jeu était dans la salle et qu’il allait forcément se rendre compte de son absence s’il sortait de la pièce. Il avait un honneur à sauver, merde ! Abandonnant définitivement ses réflexions sur le sujet du devoir, Charles-Henry serra ses cuisses et essaya de penser à autre chose. Malheureusement, tout le ramenait à son envie : il ne pensait qu’à des fontaines, des rivières, le son de la pluie…
Serrant les dents, il retint son souffle le plus possible et se tortilla encore davantage.

Chaque homme ayant ses limites, il fut forcé d’abandonner en comprenant que la fin des haricots était imminente. Il n’avait plus vraiment le choix. Soit il sortait, soit il se pissait dessus. Il opta pour la première solution et sortit de la classe en se dandinant bizarrement, sous les éclats de rires des élèves qui avaient levé la tête.

Une fois dans le couloir, il, partit vers la gauche avant de se souvenir qu’à cet étage les toilettes étaient de l’autre côté. Inspirant et expirant de façon maladroite, il se traîna à toute vitesse comme un bossu vers le paradis du soulagement. N’ayant pas les neurones branchés, il ne fit pas attention au petit garçon blond qui se dressa sur son chemin au moment où il ouvrit brusquement la porte.

Le choc avait été rude et sa vessie n’en pouvait plus. Tandis que le Poufsouffle tombait au sol, Charles-Henry se pissa partiellement dessus.

Meeeerde ! Pesta-t-il en enjambant à la hâte le petit garçon, laissant tomber quelques gouttes de pisse sur lui sans le faire exprès.

Trop pressé d’en finir pour de bon, il ne remarqua pas immédiatement que de l’eau s’échappait des murs. Il le comprit après être ressorti de la cabine et avoir tiré la chasse d’eau.

Il était donc trempé, d’eau et de pisse. Et le petit blond aussi à bien y réfléchir. Un bon point en commun.

Charles-Henry resta un bref instant sans ouvrir la bouche, plutôt étonné de la scène qui se déroulait sous ses yeux. Le petit Poufsouffle s’était mis torse nu et il semblait prendre sa douche. La situation aurait pu paraître surréaliste si le Gryffondor ne savait pas que le petit blond avait une bonne raison d’agir ainsi. Si seulement il avait été capable de se retenir quelques secondes de plus…

Je suis vraiment désolé, je me sens trop bête…déclara Charles-Henry, terriblement gêné. Je m’appelle Charles-Henry. Je suis en 3ème année à Gryffondor même si je ne suis arrivé que cette année à Poudlard. Et rassures toi, je ne suis pas comme ça tous les jours ! En général, j’arrive à viser le trou de la cuvette.

Imitant le Poufsouffle, il s’approcha du jet d’eau et se glissa dessous, sans prendre la peine de retirer un seul de ses vêtements. Au point il en était, il n’avait plus rien à perdre. Sans compter qu’il aurait l’air moins con trempé entièrement que si les gens voyaient l’auréole révélatrice sur son pantalon. Puis il pourrait toujours prétendre être sorti sous la pluie, du moins si le temps était maussade.

Le petit Poufsouffle lui demanda alors pourquoi il avait eu une envie aussi pressante.

J’ai bu deux litres de jus de citrouilles au petit-déjeuner. Je pensais pouvoir me retenir jusqu’à la fin du cours, vu que ’avais un devoir sur table d’arithmancie, mais tu peux constater que je n’ai pas réussi.

Il préféra ne pas évoquer le pari débile qu’il avait fait avec son pote, de peur de s’enfoncer davantage. Déjà que sa réputation n’était pas glorieuse, autant ne pas aggraver les choses.

Et toi qu’est-ce que tu faisais par terre ? Tu avais pas cours ?

Charles-Henry s’écarta du jet d’eau et baissa la tête pour observer l’état actuel des dégâts. Ses vêtements étaient trempés et son visage ruisselant. S’il avait eu envie de pleurer, nul n’aurait pu sans douter. Il remarqua alors que l’eau s’était dangereusement répandue. S’ils ne faisaient pas quelque chose maintenant, l’administration pourrait les accuser d’avoir inondé les toilettes.

Reparo, dit-il en visant la fuite de la pointe de sa baguette, elle aussi trempée vu qu’elle était restée dans sa poche.

Il y eu une petite détonation mais l’eau continua de couler. Le brun observa sa baguette, se demandant si elle pouvait perdre une partie de ses pouvoirs en ayant baigné dans l’eau. Dans un mouvement rageur et sans prendre le temps d‘en savoir plus, il se débarrassa de son pull et le jeta au sol. Puis il enleva sa chemise et s’approcha de l’origine de la fuite.

Je vais essayer de bloquer l’eau en mettant ma chemise dans l’orifice. Pas sur que ça fonctionne. Tu as une meilleure idée ?

[HJ : Je te laisse décider de la réussite ou non]

Donc, il s'appelait Charles-Henry. Un nom du genre aristocratique, qui ne collait en fait pas vraiment au personnage, à première vue. Quelle idée avaient eu ses parents en lui donnant ce nom-là ? Le concept échappait vraiment à Roman, qui cependant n'en fit pas part. Il décida pour lui-même d'appeler le Gryffondor Charles, c'était bien plus simple. Ainsi, il était arrivé à Poudlard cette année, et était entré directement en 3ème Année. Le petit Poufsouffle ne posa pas de question, même s'il ne comprenait pas pourquoi son camarade avait eu ce privilège. Etait-ce parce qu'il était plus âgé ? Peut-être... mais où était-il avant ? Si jamais il prenait un peu plus confiance, le Jaune et Noir lui demanderait, au Rouge et Or.

Charles rassura Roman sur ses aptitudes masculines à viser correctement la cuvette en temps normal. Donc, c'était un accident. Ensuite, le blondinet regarda le Gryffondor se glisser à son tour sous cette douche improvisée. En fait, c'était presque providentiel, cette fuite. Mais il faudrait bien trouver un moyen de la réparer. Le robinet gisait plus loin, il existait peut-être un sort spécial pour le remettre à sa place. Du genre Robineto Reparo. Mais vu son échec lors de sa première tentative, Roman préférait ne pas tenter le diable. Il n'aurait plus manquer que le lavabo lui-même explose.

Tout en profitant du jet, le Rouge et Or répondit. Charles avait bu deux litres de jus de citrouille au petit déjeuner ! Le Poufsouffle ouvrit de grands yeux. Quelle idée de se remplir ainsi la vessie, en sachant pertinemment qu'il faudrait à un moment songer à aller l'évacuer, surtout avec un devoir sur table ? Et en effet, il constata que C-H n'avait pas réussi. Ou avait pu le constater, puisqu'à présent, la tache sur le devant du pantalon était noyée. La totalité des vêtements du 3ème Année était trempée. Tiens, ils avaient l'air fin, tous les deux. Jusque là, Roman n'avait rien dit, laissant Charles s'expliquer. Jusqu'à ce qu'une question ne lui soit posée directement.

"Euh... J'étais par terre parce que tu m'es rentré dedans." répondit-il, dans un premier temps, en désignant le Lion.

Et comme les gabarits n'était pas les mêmes, l'explication était logique. Pas qu'il était petit et maigre, mais Roman n'était quand même qu'un gamin de onze ans.

"Et non, j'avais pas cours. Alors j'ai voulu visiter un peu. Et puis j'ai eu envie d'aller aux toilettes, ça arrive, et je suis là."

C'était clair et concis. Pas besoin d'évoquer l'accrochage avec le vieux du tableau. Le Gryffondor, ensuite, et après s'être écarté du jet, sortit sa baguette magique. On aurait dit qu'il sortait du lac, ses cheveux, ses vêtements, tout lui collait à la peau. Et avec le poids de l'eau, il devait en plus être bien lourd. Une détonation répondit à la formule du Rouge et Or, qui avait utilisé la même que le Poufsouffle. Ce fut tout, échec cuisant pour lui aussi. Ce n'était définitivement pas le bon sort à utiliser.

Roman voulut dire quelque chose, mais il fut coupé par un soudain accès d'humeur de Charles, qui arracha presque son pull, avant de le jeter -dans l'eau, faut-il le préciser- puis d'enlever lui aussi sa chemise. L'image pour quelqu'un qui entrerait à ce moment dans les toilettes aurait été particulière. Deux garçons torse nu piétinant dans la flotte, un jet incessant s'échappant d'un lavabo sans robinet.

"Qu'est-ce que tu..." commença le blondinet, avant de comprendre.

La chemise allait servir de bouchon ! C-H le lui expliqua, avant de demander s'il avait une meilleure idée...

"Euh..."

Ca, c'était une réponse négative. Aussi son camarade fourra-t-il le vêtement dans le petit trou. L'effet fut immédiat : l'eau n'était plus projetée !

"Cool, t'as réussi !" lança Roman, souriant.

Se baissant, il retira ses chaussures, qu'il vida de leur eau, puis ses chaussettes, qu'il essora comme il put. Il déposa le tout près de la porte, où l'eau n'était pas encore arrivée, et revint avec le robinet.

"Faudrait trouver un moyen de remettre ça."

A peine eut-il terminé sa phrase que la chemise en boule lui passa au-dessus de la tête, poussée par la pression de l'eau. Il poussa un cri effrayé et bascula en arrière, alors qu'il prenait sa seconde douche en peu de temps. Roulant sur le côté, il s'écarta du jet.

"Mince ! Qu'est-ce qu'on peut faire ?"

Ca, c'était vraiment pas de bol. Mais non, il ne pleurerait pas, il était fort. Même s'il commençait sérieusement à craindre une punition sévère.

"C'est pas ma faute, hein ? J'y suis pour rien !" s'exclama-t-il, en venait se coller contre son camarade, passant ses bras autour de lui.