Enfin, elle était de retour. Lynn ne pouvait décrire la joie qu'elle ressentait d'être enfin revenue à Poudlard. Elle avait eu très peur sur le quai 9 3/4 de croiser Torin mais celui-ci n'avait pas pris la peine d'accompagner Aïlin, ou du moins ne l'avait-elle pas vue, ce qui était sûrement mieux ainsi. Elle avait fait un discret signe de main à son plus jeune frère et était monté à bord. Elle avait croisé de nombreuses têtes inconnues et quelques unes familières qui, sur le coup de la surprise, ne semblèrent pas la reconnaitre. Elle leur sourit et passa son chemin. Le temps des retrouvailles et des explications viendrait bien assez tôt. Et puis ce n'était que des connaissances, ceux qu'elle voulait vraiment revoir n'avaient pas été sur son chemin et elle s'était résignée à attendre.

Tant de choses avaient changé ! Elle n'arrivait pas à croire qu'un peu plus d'un an s'était écoulé depuis la dernière fois qu'elle avait mis les pieds dans ce train. L'idée de retrouver le chateau, la salle commune des gryffondor, son dortoir, la grande salle, ses amis, tout ca lui donnait le vertige !

Reprendre une vie normale de collegienne lui semblait incroyable après avoir passé une année entière comme nounou et femme au foyer.

Elle n'avait pas été maltraitée, plutôt ignorée la plupart du temps, même si elle avait dû subir plusieurs fois les assauts de légilimens de Torin. Mais heureusement pour elle et sa petite soeur, qu'elle avait ainsi pu arracher aux griffes de son frère, elle avait appris à maîtriser l'occlumencie et avait ainsi été capable de dissimuler ses projets au Mangemort. Léan était maintenant en sécurité dans une famille moldue où elle ne découvrirait la vérité qu'à l'âge de 11 ans pour son entrée à Poudlard. Quant à Lynn, elle s'était fait émancipée. Elle avait eu la chance de pouvoir faire cela avant que le ministère ne tombe aux mains du Seigneur des ténèbres. Malgré la répulsion qu'elle avait de toucher à l'argent sale de son père, elle avait utilisé une partie de son héritage pour s'offrir un appartement à Londres et une connaissance bienveillante l'avait aidé à entourer son domicile de protections dans l'hypothèse où Torin viendrait lui réclamer des comptes.

Elle était maintenant indépendante. Elle se sentait grandie, plus mûre. L'apprentissage de l'occlumencie l'avait obligée à analyser en profondeur ses forces et ses faiblesses, elle avait dû faire table rase du passé. C'était de l'histoire ancienne. Elle était libre et cela l'avait profondément changé.
La première chose qu'on remarquait, c'était son sourire. Un vrai sourire, sincère, éclatant. Elle riait plus souvent, se liait aux autres avec facilité. Sa beauté n'y était probablement pas étrangère mais il y avait plus. Son regard lui aussi, auparavant voilé par son terrible secret, était à présent pétillant et plein de vie. Elle respirait le bonheur. Il était parfois même difficile de retrouver l'ancienne Lynn devant tant de charisme et d'aisance.

Elle se sentait bien comme rarement auparavant.

La seule chose qui lui manquait aujourd'hui était la seule chose qu'elle avait eu autrefois. Son frère. Aïlin lui manquait. Elle esperait que l'explication qu'elle lui avait donné lui apporterait satisfaction, qu'avec le temps il lui pardonnerait. Elle esperait aussi qu'il réfléchirait à sa proposition de quitter le manoir. Mais Aïlin commençait sa vie de jeune adulte...il suivait sa voie, sans elle... Le Darkshop lui apportait beaucoup et il se contentait d'ignorer les activités de Torin et d'oublier Ultan qui avait lui aussi quitté la demeure familiale depuis longtemps. Peut-être finirait-il Mangemort lui aussi, sous la pression... Cette pensée la hantait mais elle ne pouvait plus rien pour lui. Elle se contenterait d'être présente et de garder sa porte ouverte pour lui s'il en avait besoin... mais elle ignorait s'il en franchirait jamais le pas..

Le train s'arrêta finalement en lisière de forêt et ils montèrent à bord des calèches. Lynn caressa le museau d'un Sombral avant d'aller s'installer et remarqua qu'on la regardait bizarrement. Elle sourit mais ne prit pas la peine d'expliquer le pourquoi du comment à ces quelques élèves ignorants.

L'arrivée au chateau fut un moment particulièrement émouvant pour Lynn qui resta bouche bée plusieurs seconde. Comment avait-elle pu oublier un tel paysage, un tel décor ? Et plus important, comment avait-elle fait pour survivre sans ça pendant si longtemps ?

Ravie, le sourire aux lèvres, Lynn rejoignit sa table dans la cohue générale. Elle tenta bien d'apperçevoir quelques têtes familières à sa table ou à d'autres mais dans l'effervesence du moment elle ne trouva personne.

Malgré sa joie d'être de retour, la jolie gryffondor était inquiète quant au déroulement de l'année. Rogue était le nouveau directeur. Lynn avait appris la disparition de Dumbledore avec beaucoup de tristesse... elle ignorait si tout ce qu'on disait à ce sujet était vrai, mais sa perte était terrible pour le monde sorcier et pour Poudlard... peut-être plus encore pour tous les nés-moldus qui ne connaitraient pas la joie d'une première rentrée dans l'école de Magie. A y regarder de plus près, Lynn réalisa à quel point les rangs des premières années étaient parsemés. Les nouvelles lois en vigueur étaient affreuses. Par chance, Lynn savait qu'elle ne risquerait rien même si sa mère avait été moldue. Son père était un sang-pur, un mangemort reconnu et Torin ne pourrait mettre sa filiation en doute sans attirer l'attention sur la sienne ou sur celle d'Aïlin et Lynn savait que ce n'était pas dans ses interêts. Elle pensait même qu'il la laisserait tranquille quelques temps. A la table des professeurs, elle reconnu certains de ses anciens professeurs mais surtout deux visages qu'elle aurait souhaité ne pas revoir. Les Carrows, de vieux amis Mangemort de son père. Elle n'avait dû les croiser qu'une fois ou deux, n'étant encore qu'une enfant, mais leur air malsain l'avait marqué à vie.
Lynn croisa les doigts pour que Torin n'aient donné aucune directive à son sujet...

Le reste de la soirée passa sans qu'elle s'en rende compte et Lynn se retrouva très vite confortablement blottie dans ses couvertures, rêvant au lendemain où elle pourrait enfin revoir ses amis.

Sa première opportunité se présenta à elle dès le lendemain matin à la sortie de la grande salle. Alors qu'elle se levait après avoir copieusement déjeuner, Lynn appercue une chevelure famillière quitter la pièce. Elle était presque certaine que c'était Clarisse. Sa douce et gentille Clarisse ! Lynn sentait son coeur bondir de joie à l'idée de partager de nouveaux moments de complicités avec la rouquine. Elle se demanda un instant si elle devait l'aborder, cela lui ferait sûrement un choc. Qui plus est, elle avait cru comprendre, les silences d'Aïlin n'étaient pas très éloquent, qu'entre les deux serdaigle tout ne s'était pas admirablement passé et elle se sentait mal à l'aise.

Nénamoins, l'excitation prit le dessus et Lynn courut à la suite de son amie:

"Clarisse ! Clarisse !" Appela-t-elle dans l'espoir de la ralentir.

Enfin, elle sembla ralentir et s'arrêta en se tournant vers elle. Lynn arriva en courant et s'arrêta à quelques mètres d'elle.

"Clarisse... je suis tellement contente de te revoir !"

Et avec un sourire éclatant elle se permit une légère accolade, ne voulant pas décontenancer davantage l'aiglonne.

Devant l'air abasourdie de la petite serdaigle, Lynn laissa échapper un rire:

"C'est une longue histoire..."

Ce matin là, lorsque Clarisse émergea d’un sommeil sans rêve, elle grogna vaguement quelque chose avant de jeter sa couverture au pied du lit et de se lever. Dans le dortoir les autres filles somnolaient encore, les traits détendus et le visage souriant comme autant d’enfants qu’elles étaient encore. Un triste sourire étira les lèvres de la cinquième année tandis que son regard glissait malgré elle vers le lit voisin. La chevelure rousse de Nillàn avait disparue, remplacée par une petite tête blonde. Elle détourna les yeux, triste. Elle savait bien que cette année la jeune Cadell ne serait plus là et pourtant c’était étrange de le constater par soi même. La Galloise allait lui manquer, même si les deux jeunes filles n’avaient pas eu le temps de se connaître comme elles l’auraient souhaité. Sa simple présence calme et silencieuse avait quelque chose de rassurant. Et puis elle l’avait toujours vue dans ce lit alors savoir que quelqu’un d’autre l’occupait avait un elle ne savait quoi d’anormal. La nouvelle venue n’était pas à sa place, mais pauvre fille elle ne le saurait jamais. Et peut être qu’à ses yeux d’enfant Clarisse jouerait le même rôle pour elle que Niallàn, et peut être même que Niallàn avait ressenti la même chose lorsque l’Ecossaise était devenue sa voisine de chambre. Amusant.

La rousse se dirigea à pas de loup vers la salle de bain. Se lever tôt pouvait sembler ridiculement idiot sauf pour ceux qui aiment avoir la salle d’eau pour eux tout seul sans entendre les piaillements inintéressants de ses condisciples. En fait, si elle prenait de l’avance comme ça c’était parce que les derniers ragots et le jeu « qui sort avec qui » ne l’intéressait pas tandis qu’il s’avérait être un sport hautement prisé de certaines de ses colocataires. A part Luna, mais bon elle c’était un cas à part. Après une douche rapide à l’eau froide et vivifiante, la désormais cinquième année s’habilla sans hâte, prépara ses affaires pour la journée et descendit dans la salle commune. Elle était contente d’être de retour à Poudlard. La rousse resta quelques minutes dans la salle commune à admirer la vue. Le parc encore endormi lui offrit sa sérénité et la fit sourire. Oui elle était bien contente d’être revenue même si pour cela elle devait dire adieu à sa totale liberté. Le pas léger, elle franchit allègrement la porte de la salle commune et s’aventura dans les couloirs encore déserts. C’était agréable et au fond, les murmures des tableaux sur son passage lui avaient manqué.

Arrivée à la grande salle, elle s’assit tranquillement à un bout de la table des bleus et bronze et n’eut guère à attendre avant que les mets n’apparaissent. Elle se servit un grand verre de jus de carottes et d’orange et commença à se beurrer des toasts pendant que son porridge refroidissait gentiment dans son bol. Oui vous avez bien lu, la jeune fille avait reprit du poil de la bête pendant les vacances et sa silhouette maigrichonne avait été effacée au profit d’une allure un peu plus en chaire quoi que mince, n’exagérons rien. Elle prit tout son temps pour manger parce que s’il y avait bien une chose dont elle avait horreur c’était d’être bousculée à ce moment primordial de la journée, enfin depuis qu’elle avait recommencé à s’alimenter convenablement. Alors qu’elle vaquait à ses occupations, indifférente au reste du monde, la salle se remplit progressivement et le presque silence fut remplacé par un bourdonnement de voix incompréhensibles. Au courrier, Clarisse ne reçut pas le moindre hibou, ce qui ne la surprit pas, contrairement à beaucoup de ses camarades à qui les parents envoyaient tel ou tel objet oublié à la maison dans l’affolement du départ. Toutes les années et à chaque rentrée c’était la même chose. Pourtant ils avaient deux mois pour s’y préparer cette fois alors l’aiglonne avait un peu de mal à les comprendre. Enfin passons.

Elle acheva son repas par un fruit en l’occurrence une pomme puis lorsqu’elle eut avalé le dernier morceau se leva et se dirigea vers la sortie. Ça faisait un bien fou de sentir son estomac plein et elle se demandait encore comment elle avait fait pour se laisser aller à la mort de son père et sombrer vers l’anorexie même si elle s’était reprise à temps, heureusement.

"Clarisse ! Clarisse !"

La rousse s’arrêta net. Cette voix… elle la connaissait sans pour autant se souvenir à qui elle appartenait. D’ailleurs il lui semblait qu’elle la connaissait en légèrement différente. Bizarre. Plusieurs hypothèses s’imposèrent à elle à la vitesse de l’éclair. Premièrement la voix ne s’adressait pas à elle mais à une autre Clarisse. Après tout, elle ne devait pas être la seule sorcière de Grande Bretagne à porter ce joli prénom. Hum… oui sauf qu’elle n’en connaissait pas d’autre. Deuxièmement c’était une mauvaise blague, supposition beaucoup plus réaliste étant donné qu’aucune personne saine d’esprit n’aurait l’idée saugrenue de la héler de la sorte. Bon il y avait bien quelques exceptions comme Pissenlit, June ou encore Nils mais ce n’était ni une voix masculine ni celle de ses deux amies. Elle se retourna d’un coup, cherchant du regard l’émetteur. Le sourcil haussé en signe de perplexité totale, elle scruta quelques secondes les visages qui l’entouraient avant d’être de nouveau surprise par la voix.

"Clarisse... je suis tellement contente de te revoir !"

La voix en question appartenait à une jolie jeune fille brune aux yeux sombres et qui avait un furieux air de ressemblance avec un garçon qu’elle ne connaissait que trop bien. Un garçon qui n’avait pas quitté ses pensées depuis leur première rencontre. Une jeune fille qui semblait respirer la joie de vivre et qui ressemblait de loin en loin à celle qu’elle avait connue un jour et qui avait été son amie.

« Lynn… » souffla-t-elle, sous le choc.

Lynn, un fantôme, quelqu’un qui avait disparu mystérieusement l’année précédente sans qu’elle n’en sache la cause. Probablement un coup de Torin le vil frère aîné. N’empêche que la rousse s’était posé beaucoup de questions à l’époque et s’était fait du souci. Ce n’est pas tous les jours qu’une de vos bonnes amies s’évapore dans la nature sans vous donner de nouvelle ni laisser la moindre trace. Ça ajouté au fait qu’Aïlin l’avait larguée … la pilule lui était restée en travers de la gorge et la jeune fille s’était renfermée sur elle-même et coupée du monde. Aujourd’hui bien entendu c’était fini et elle avait de nouveau des rapports sociaux avec d’autres individus de son âge.
Lynn lui donna une légère accolade à laquelle une Clarisse trop effarée ne répondit pas. Ebahie, elle la regarda avec des yeux ronds et interrogateurs. Personne ne l’avait prise dans ses bras de cette façon depuis bien longtemps alors il y avait de quoi choquer, surtout de la part d’une revenante.

"C'est une longue histoire..."

Visiblement Lynn avait anticipé sa question. Normal. La brune avait beaucoup grandit et changé depuis qu’elles ne s’étaient vues. Elle avait pris quelques centimètres, elle avait forcit un peu elle aussi bien qu’elle restait mince, et puis, elle rayonnait de joie. Ses yeux autrefois tristes et fuyants brillaient d’une lueur de défiance et de bonheur. Elle était bien loin la gamine terrifiée et peu sure d’elle. Le bouton de rose avait éclos et quelle rose, quelle magnifique fleur ! Lynn était très belle, il n’y avait pas d’autre mot. Et Clarisse était vraiment heureuse de ce revirement, au moins tout autan que de la revoir. Elle lui sourit.

« Moi aussi je suis contente de te revoir… tu.. tu ne peux pas savoir… »

Elle attrapa l’une des mains de son amie et la serra dans les siennes, lui témoignant ainsi sa joie. C’était déjà beaucoup pour elle qui n’avait pas tellement de contact avec ses condisciples et encore moins de contacts physiques. Néanmoins, il ne fallait pas croire que Lynn s’en tirerait à si bon compte. Ce serait sans compter la curiosité de la rousse ainsi que sa ténacité et une petite dose de rancune. Elle tira son amie un peu à l’écart histoire de ne pas rester en plein milieu du grand hall et de se donner en spectacle.
Elle prit un air un peu plus sérieux et un regard légèrement accusateur quoi qu’elle n’arrivait pas à cacher tout à fait son bonheur.

« Mais ne crois pas que tu vas t’en tirer à si bon compte. Je me suis inquiétée pour toi moi, je me suis demandée pourquoi t’étais plus là comme ça, où t’étais et ce qui pouvait bien t’arriver… t’aurais pu essayer de donner des nouvelles … »

Elle s’interrompit pour remettre de l’ordre dans ses idées. Elle n’avait toujours pas lâché la main de Lynn bien qu’elle ne la serrait pas fort.

« Je suppose que ça ne devait pas être terrible… mais si tu es là… c’est que ça va mieux pas vrai ? J’espère bien que tu vas tout me raconter. En tous cas tu as l’air heureuse. Ça fait plaisir à voir.. »

Lynn ne fut pas surprise de voir Clarisse sous le choc. Pendant un instant, alors qu'elle soufflait son prénom, incrédule, elle cru même qu'elle allait défaillir. Mais la rouquine se reprit et lui sourit. Elle aussi était contente de la revoir. Elle attrapa une main de la jolie gryffondor et la serra avec émotion. Elles s'observèrent quelques secondes en silence et Lynn eut tout le loisir de voir enfin ce qu'elle avait manqué, toute à sa joie de retrouver une amie chère. Clarisse, tout comme elle, avait grandit mais il lui semblait tout de même que sa minceur était un peu inquiétante bien qu'elle n'ait pas l'air malade... lasse peut-être, ou fatigué...
Elle tacherait d'en savoir davantage plus tard.

Pendant ces longs mois le souvenir de ses amis avait souvent été d'un grand réconfort à la jeune lionne et elle avait souvent regretté de ne pas pouvoir leur donner de nouvelles. Elle se souvenait parfaitement de l'adorable Clarisse au visage joyeux et souriant et le changement était tout de même radicale. Lynn songea que ses propres changements devraient en décontenancer plus d'un et préféra ne pas aborder la question tout de suite.

Déjà, la curieuse Serdaigle la grondait gentiemment en lui disant qu'elle s'était inquiétée de son absence et lui demandait quelques explications, l'attirant au calme pour qu'elles puissent discuter tranquillement.

Surprise, Lynn se confondit en excuses:

"Je suis vraiment désolée... j'avais esperé qu'Aïlin te donnerait quelques nouvelles... même si je sais qu'entre vous deux... je suis désolée pour ça aussi..."

Elle ne comprenait pas ce qui avait bien pu se passer mais Aïlin n'en parlait pas et elle ne savait pas comment aborder le sujet. Leur vieille complicité en avait pris un coup et elle était presque sûre qu'il ne voudrait pas en parler.

"Aïlin..."

*ne m'aime plus* fut-elle tentée de dire, mais cela lui faisait trop mal au coeur pour franchir ses lèvres et elle esperait encore secrètement que cela ne soit pas définitif. Peut-être que maintenant qu'elle lui avait tout expliqué, avec un peu de temps, il accepterait de lui pardonner.

"Aïlin n'a pas accepté ma décision de rester au Manoir... il m'en veut encore beaucoup... mais après ce qui s'était passé..."

Elle faisait bien sûr allusion à la mort de son père, tué par Aïlin en personne. Elle ignorait jusqu'à quel point Clarisse était au courant de l'histoire et préférait la préserver un peu si cela lui était possible. Lynn comprenait qu'Aïlin avait eu d'autres préoccupations que de prévenir ses amis de son triste sort. Sûrement en avait-il également honte...

"Toujours est-il que nous ne nous parlons plus beaucoup..." Acheva-t-elle avec regret sur un ton d'excuse.

Lynn se rendit compte que ses propos étaient décousu et secoua la tête:

"Excuse-moi je ne suis pas très claire ! Je vais reprendre depuis le début !"

Elle replaça une mèche de ses longs cheveux derrière son oreille et demanda:

"Tu sais que j'ai une petite soeur ? Elle s'appelle Léan, elle a deux ans et demi ! Ma mère est morte en accouchant et mon père... quelques mois plus tard, il ne restait donc plus que Torin a la maison pour s'occuper d'elle... tu comprends... je ne voulais pas la laisser toute seule..."

Elle avait tenu à trouver une solution. Elle avait décidé de la protéger comme Aïlin l'avait protégé elle. Bien que leur relation ne soit plus celle qu'elle chérissait tant, elle voulait que sa petite soeur ait une chance elle aussi de sortir du cercle infernal des Bower.

"Tu sais de quoi mon frère est capable... je pouvais pas me résigner à la laisser ! Alors... j'ai mis Poudlard entre parenthèse... Une année c'est long... j'ai cru que je ne reviendrai jamais ! J'ai souvent eu envie de vous écrire mais tout ce que je faisais était surveillé et de toute façon je n'aurais pas eu tant de bonnes nouvelles à annoncer que ça !" Dit-elle avec un petit rire. "J'ai passé mes journées à m'occuper de la petite et du manoir...heureusement Aïlin m'a donné quelques cours pour que je reste à niveau."

Elle hésita un court instant avant d'ajouter:

"Mais j'ai finalement trouvé un moyen de protéger Léan et j'ai pu quitter le manoir. J'ai un petit appartement à Londres et... me voilà !"

Elle avait grossièrement résumé mais si Clarisse voulait en savoir plus, Lynn répondrait à toutes ses questions. Elle n'avait plus rien à cacher, du moins pas à son amie. Mieux valait peut-être éviter de dire cela devant les Carrow où autres personnes qui n'étaient pas de confiance et qui risqueraient d'avertir Torin. Elle se savait en sécurité mais il ne valait mieux pas forcer sa chance. Cependant le couloir était désert et elle ne risquait rien avec l'aiglonne.

"En tout cas tu ne peux pas imaginer comme tu m'as manqué ! Je suis tellement heureuse de te revoir ! Et toi ? Comment s'est passé l'année dernère ? Et comment vont les autres ?"

Elle pensait à leur groupe d'amis, William en particulier. Pendant un instant, affolée, elle se souvint que les deux parents du rouquin étaient moldus et elle se demanda s'il avait ne serait-ce que pu revenir à Poudlard cette année ou s'il était en fuite comme beaucoup d'autres...

"Et Will... ? Est-ce qu'il...?"

Elle laissa sa phrase en suspens, ne sachant pas quoi demander et compta sur Clarisse pour l'éclairer un peu.

"Je suis vraiment désolée... j'avais espéré qu'Aïlin te donnerait quelques nouvelles... même si je sais qu'entre vous deux... je suis désolée pour ça aussi..."

Ah oui Lynn avait du manquer quelques épisodes. D’abord la fois ou le beau brun l’avait rayée de sa vie, les mois de désespoir, la vie en noir et gris foncé et puis le serment, enfin ça elle n’avait pas le droit d’en parler, leur rapprochement suite au décès de Guérin et leur correspondance pendant les vacances. Oh ils n’avaient pas échangé beaucoup de lettres mais elle avait été très contente de pouvoir lui écrire, partager autre chose que la douleur et le chagrin avec un proche. Ils étaient en quelque sorte devenus amis à distance bien que depuis la rentrée ils n’avaient pas encore eu l’occasion de se croiser et de discuter ensemble.
Elle sourit à son amie. La peine que lui avait causée le garçon n’était pas oubliée, ça elle ne le serait jamais mais elle s’était beaucoup estompée et avait quasiment disparue.

« Ne sois pas désolée Lynn, tu n’y es pour rien… et puis… nous sommes devenus camarades voire même peut être amis… »

Bien sûr elle passa sous silence les quelques étapes désagréables qui séparaient le moment rupture du moment amitié. Elle n’avait pas tellement envie d’évoquer tout ça avec Lynn même si elle était une de ses meilleures amies. Et puis la brune devait être assez grande pour lire entre les lignes et deviner que tout ça ne s’était pas fait du jour au lendemain mais avait pris beaucoup de temps. Plusieurs mois pour être exact. Enfin tout ça appartenait au passé même si les sentiments de Clarisse envers le jeune Bower étaient restés inchangés. On ne pouvait pas tout avoir, le compter parmi ses amis était déjà une victoire et elle s’en contenterait. Pour le moment. Un jour peut être, elle lui dirait que tout ce qu’elle savait n’avait pas d’importance, que ce qu’il avait fait ne changeait rien pour elle. Un jour peut être mais pas maintenant. Leur relation était encore trop récente et fragile.

"Aïlin n'a pas accepté ma décision de rester au Manoir... il m'en veut encore beaucoup... mais après ce qui s'était passé…
Toujours est-il que nous ne nous parlons plus beaucoup..."

Clarisse comprenait. Le plus jeune garçon Bower avait toujours voulu protéger sa cadette des agissements de leur père et de leurs frères. Alors pour lui ça avait du être un choc assez rude de voir qu’elle semblait ne pas se rendre compte de ses efforts pour la maintenir loin de toute cette violence et restait au manoir. Il avait dû se sentir trahi en quelque sorte, comme si tout ce qu’il avait fait pour elle n’avait servi à rien. Elle imaginait assez bien la réaction d’Aïlin, seul dans sa chambre. Les os de ses mains avaient du sentir passer sa colère et sa détresse contre les murs solides de la pièce. Il avait dû se sentir très mal et personne n’avait été là pour l’épauler. Personne non plus n’avait été là pour soutenir Lynn dans son choix, l’aider au moins moralement et personne n’avait été là pour consoler Clarisse. C’était idiot les trois adolescents avaient été proches les uns des autres, ils avaient tous les trois souffert (à des degrés différents certes) et au moment ou ils auraient eu besoin de la présence des autres, aucun d’eux n’avait pensé à faire le premier pas. Ce que la vie pouvait être bizarre des fois.

« Je comprends que ça te fasse de la peine mais tu devrais lui laisser un peu de temps… la vie n’est facile pour personne… »

Et elle était même particulièrement compliquée pour les Bower petits ou grands. Enfin surtout pour les plus jeunes d’après ce que la rousse avait pu constater, mais elle ne connaissait pas non plus Torin et Ultan alors il lui était difficile de les juger.
Lynn se lança ensuite dans le récit compacté de ses aventures, expliquant qu’elle avait une petite sœur Léan. Il sembla à la bleue et bronze qu’elle avait déjà entendu parler de la petite dernière mais elle n’interrompit pas son amie, écoutant attentivement ce qu’elle lui racontait. Devin et Bronach étant morts, il ne restait que Torin pour s’occuper de la petite et la lumière se fit dans l’esprit du moineau. Comment n’avait-elle pas fait le rapprochement plus tôt entre les évènements ? Il lui semblait à présent stupide de ne pas avoir songé une seule seconde que Lynn se soit dévouée pour sa petite sœur. La pauvre, elle avait été confrontée à un choix horrible : sa famille ou ses études. Et elle n’avait pas hésité, elle s’était en quelque sorte sacrifiée. L’année avait du lui paraître bien longue au manoir avec Torin et loin de tous ses amis, de ceux qui l’avaient soutenue et aimée.

"Mais j'ai finalement trouvé un moyen de protéger Léan et j'ai pu quitter le manoir. J'ai un petit appartement à Londres et... me voilà !"

« Tu mérites bien ta place à Gryffondor Lynn. C’était très courageux de ta part de quitter Poudlard et de t’occuper de ta sœur. Je comprends mieux pourquoi on a pas eu de tes nouvelles. En tous cas, je suis heureuse que ça se soit bien terminé et que tu sois de retour à Poudlard. »

Elle lui sourit.
Elle était contente oui. Elles avaient du temps à rattraper, des tas de choses à se raconter parce qu’en un an, beaucoup, beaucoup, beaucoup de choses avaient changé. Clarisse se doutait que son amie serait surprise devant l’état des lieux. Elle avait quitté un groupe d’amis unis et heureux et elle retrouvait … mieux valait ne pas y penser. Et puis même sans parler de ça, leurs deux personnalités avaient chacune évoluée dans un sens différent, peut être qu’elles ne se plairaient plus ensemble, qu’elles ne s’entendraient plus aussi bien qu’avant, au temps ou semblait encore simple aux yeux de l’Ecossaise. Elle redoutait que la rouge et or ne la questionne sur ces sujets là, qu’elle ne lui demande ce qu’elle était devenue, ce qui s’était passé pendant toute cette année. Elle n’avait pas envie de lui mentir au nom de leur amitié et des bons moments passés ensembles mais d’un autre côté, dire la vérité risquait de tout fiche en l’air. Elle n’était pas pressée et préférait savourer le moment présent.

"En tout cas tu ne peux pas imaginer comme tu m'as manqué ! Je suis tellement heureuse de te revoir ! Et toi ? Comment s'est passé l'année dernère ? Et comment vont les autres ?
Et Will... ? Est-ce qu'il...?"

Malheureusement, Lynn ne semblait pas de cet avis. Clarisse se renfrogna un peu. Elle aurait préféré attendre avant de parler de tout ça. Dommage. Ce qui s’était passé était simple et risquait d’étonner la lionne. L’aiglonne se sentait soudain embarrassée et gênée. Il faudrait y aller doucement pour tout lui raconter. Le groupe d’amis unis n’était pas resté soudé bien longtemps, Clarisse n’était plus en contact avec aucun d’eux. Et eux-mêmes s’étaient peu à peu séparés, ils avaient tous pris des chemins différents, voilà tout. C’était triste au fond mais c’était là des choses qui arrivaient. Elle se racla la gorge.

« Hum… et bien… en fait, tu sais déjà avant que tu ne partes, on était pas tous toujours d’accord et .. hum… ça fait bien longtemps que je ne leur ai pas parlé. On s’est tous éloignés les uns des autres. C’est comme ça… »

Elle fit une petite pause. Lynn lui avait aussi demandé des nouvelles de William. Le garçon dont elle avait été amoureuse et qui s’était plus ou moins fait cassé la figure par Aïlin sans oublier un petit accrochage avec Ultan. Les deux lions avaient été très porches ils étaient même vaguement sortis ensemble si elle se souvenait bien. Pas étonnant que la jeune fille demande après lui. Par contre la réponse risquait de lui déplaire. La rousse se tordit les mains nerveusement. Pourquoi fallait-il que ce soit à elle de faire l’état des lieux ? C’était injuste ça. Ah oui… parce qu’il fallait bien que quelqu’un le fasse et qu’elle s’était trouvée au mauvais endroit au mauvais moment ou au bon endroit au bon moment, au choix…

« Et bien comme je viens de te le dire, ça fait très longtemps que nous ne sommes plus proches du tout … mais… il a été déchu de son grade de préfet cette année parce qu’il est fils de moldus… et … ça ce n’est pas le plus grave. Avec le nouveau régime…et parce qu’il est connu pour avoir fait partie des Brigades Rousses quand il y avait Ombrage, j’ai peur qu’il … enfin … tu vois que ça se passe pas très bien pour lui avec les profs… mais à part ça… je ne pourrais pas te renseigner… désolée… »

Elle s’interrompit de nouveau. Pas facile de résumer tout ça. Et puis il restait encore un point auquel elle n’avait pas répondu. Et elle ? Eh bien elle… elle… elle. C’était compliqué. Et pas bien plus gai. De nouveau elle se racla la gorge et tenta un sourire pas très convaincant qui ne tromperait probablement pas Lynn.

« Et bien… moi… c’est compliqué.. je ne suis pas certaine que tu aies envie d’entendre toute l’histoire… en plus elle est longue et .. pas vraiment intéressante .. en fait. »

Et voilà qu’elle s’emmêlait dans les explications, comme lorsqu’elle ne savait pas comment dire ce quelle n’avait pas très envie de dire mais qu’elle voulait dire quand même. Pas facile à comprendre pour quelqu’un d’extérieur mais pour Clarisse c’était limpide.

Lynn était bien consciente qu'elle ignorait beaucoup de choses sur ce qui avait pu se passer durant son absence, encore plus sur ce qui était arrivé entre Clarisse et son frère. Elle ne pouvait blamer personne pour cela. Elle s'était volontairement isolée, même si c'était pour de nobles raisons, et elle devait à présent rattraper le temps qu'elle avait perdu.

La jolie gryffondor fut donc rassurée que son amie ne lui en tienne pas rigueur et heureuse d'apprendre que les relations des deux aiglons s'étaient améliorées.

"Tant mieux, je suis contente pour vous... ça s'arrangera, j'en suis persuadée !"

Clarisse pensait qu'il fallait un peu de temps à Aïlin et la lionne était daccord, elle acquiesça, songeant qu'attendre était à présent sa seule alternative. Les choses ne pouvaient plus empirer, seulement s'améliorer...

C'était un exercice particulièrement difficile pour Lynn que de résumer les évènements en quelques phrases mais elle tenta pourtant de le faire. Ses motivations, ses espoirs et ses peurs étaient beaucoup plus complexe que cela et au coeur même de sa décision. Ce n'était pas vraiment ce qu'elle avait fait qui était interessant, c'était pourquoi. Elle n'avait eu ni plus ni moins que le rôle de boniche mais elle l'avait vaillamment supporté et en était ressortie plus forte. Sa soeur hors de danger, elle de retour dans sa seule et unique "maison", elle pouvait enfin respirer. Enfin le papillon était sortit de son cocon, et malgré l'ambiance tragique qui régnait sur Poudlard, Lynn était radieuse et avait foi en l'avenir.

Clarisse avait l'air admirative et la lionne rougit légèrement. Ca n'était pas aussi brave que l'aiglonne avait l'air de le croire. Ca n'avait pas été simple non plus, mais le principal aujourd'hui, était qu'elle y était parvenue.

"Merci.. sourit Lynn en lui pressant légèrement la main pour lui montrer sa reconnaissance. Je voulais vraiment donner des nouvelles, mais Torin me surveillait constamment et je ne voulais pas qu'il lise mon courrier... ca n'a pas été simple de nous sortir de là, Léan et moi. Mais être ici et la savoir en sécurité sont les plus belles récompenses qui soient !"

Trop curieuse pour attendre, elle s'empressa de demander des nouvelles à Clarisse qui eut l'air embarassée.

Lynn acquiesça tandis qu'elle lui expliquait que leur petit groupe n'existait plus. C'était la vie, elle ne pouvait rien y changer, elle haussa les épaules en souriant :

"Ce n'est pas grave, ce sont des choses qui arrivent... Toi au moins tu es toujours là !" Ajouta-t-elle, les yeux pétillants.

Malgré elle elle ne put s'empêcher de demander des nouvelles de William, qui, comme on pouvait s'y attendre pour un né-moldu, rencontrait de nombreuses difficultés...

Elle grimaça :

"Le pauvre... J'irai lui parler dès que je le verrai... j'aimerais pouvoir l'aider mais je doute être d'une grande efficacité..."

Clarisse eut l'air encore plus gênée lorsqu'il lui fallu parler d'elle et une barre d'inquiétude vint plisser le front de rouge et or. La Clarisse de son souvenir n'était ni du genre à faire des cachoteries ni du genre à s'inquiéter de ce qu'elle devait dire ou non à ses amis. Peut-être était-il arrivé quelque chose de grave... Elle trouvait effectivement que le regard de la serdaigle était voilé. Bien qu'elle avait l'air sincèrement heureuse de la revoir, quelque chose semblait ternir ces retrouvailles.

La jeune fille s'embrouilla dans ses explications et Lynn comprit que quelque chose n'allait pas. L'année n'avait pas dû être facile.

"Je suis désolée si je t'ai mise mal à l'aise avec mes questions, ce n'était pas mon intention. Nous avons encore une heure avant le début des cours si tu souhaites me raconter ça calmement. Sinon, ca peut attendre, rassure-toi !"

Clarisse ne répondit pas tout de suite et Lynn ajouta:

"Je ne veux pas te forcer... l'année dernière n'a été facile pour personne j'en ai bien peur... mais malgré mon absence, crois bien que je reste ton amie et que tu peux te confier à moi... peu importe le sujet et même si ca concerne Aïlin. Mais il ne doit pas y avoir que mon frère pour te mettre dans un tel état..."

Elle posa une main douce sur l'épaule de la rouquine et lui sourit avec tendresse:

"Et si on allait marcher un peu ? Il fait doux... et si tu veux pas qu'on discute de choses sérieuses, on pourra marcher en silence ou se remémorer les bons souvenirs..."

Essayant de redonner le sourire à la bleu et bronze mal à l'aise, Lynn lui fit un clin d'oeil et lui fit signe de la suivre à l'exterieur.

"Le pauvre... J'irai lui parler dès que je le verrai... j'aimerais pouvoir l'aider mais je doute être d'une grande efficacité..."

Clarisse soupira, légèrement triste pour le préfet déchu. La vie se comportait mal pour lui et ce qui lui arrivait était vraiment injuste. Pourtant, quelque chose lui soufflait à l’oreille que ça ne faisait que commencer, malheureusement. Le garçon allait avoir besoin d’amis solides sur qui compter et elle ne voyait pas grand monde dans son entourage pour jouer ce rôle. Peut être que Lynn pourrait… oh peut être pas se métamorphoser en pilier de soutien mais au moins lui apporter un peu de réconfort. La façon dont ça s’était terminé entre eux était plus que dommage mais c’était le passé. La jeune fille trouvait qu’ils allaient si bien ensembles à l’époque alors peut être qu’ils pourraient bien s’entendre aujourd’hui. Cependant ça ne serait pas facile. William risquait de mal le prendre, surtout venant d’une demi sang pur, surtout en ces temps troublés où l’origine de chaque sorcier revêtait tant d’importance. La belle brune risquait d’être étonnée…

« Je suis certaine au contraire qu’il sera content que tu sois là… mais il risque de t’envoyer promener.. du moins au début… il risque de croire que tu t’intéresses à lui par pitié…»

Lynn délaissa le sujet de son ancien petit ami et demanda des nouvelles de Clarisse. Autre sujet épineux et même beaucoup plus délicat puisqu’il touchait directement la jeune fille cette fois. D’un côté dissimuler la vérité était totalement aberrant parce que tôt ou tard Lynn apprendrait ce qui c’était passé, c’était même déjà étonnant qu’elle ne sache pas. Par expérience, notre moineau savait qu’il valait mieux prendre les devants dans ces cas-là, avant qu’un tiers ne s’en mêle et ne raconte l’histoire à sa façon, parfois complètement à côté de la plaque. Seulement parler de ce qui s’était passé en mai/juin puis pendant les vacances ravivait la peine de la jeune fille, ce qui n’était pas spécialement agréable. Elle se demandait juste si elle pouvait tout révéler à son amie. La lionne en avait vu bien d’autres et il semblait ridicule aux yeux de Clarisse de lui faire état de ses petits problèmes personnels.

"Je suis désolée si je t'ai mise mal à l'aise avec mes questions, ce n'était pas mon intention. Nous avons encore une heure avant le début des cours si tu souhaites me raconter ça calmement. Sinon, ca peut attendre, rassure-toi !
Je ne veux pas te forcer... l'année dernière n'a été facile pour personne j'en ai bien peur... mais malgré mon absence, crois bien que je reste ton amie et que tu peux te confier à moi... peu importe le sujet et même si ca concerne Aïlin. Mais il ne doit pas y avoir que mon frère pour te mettre dans un tel état..."

L’Ecossaise un peu nerveuse releva la tête et croisa le regard de Lynn. Elle fut rassurée par ses paroles, parce qu’après un an de séparation et un an riche en évènements, elle n’était plus certaine que leur amitié soit conservée. Elle avait eu peur que quelque chose entre elles soit cassé, peur de ne pas retrouver cette complicité d’avant. Elle força tout de même un sourire.

« Tu ne pouvais pas savoir. On voit que tu n’as pas lu la gazette du sorcier l’année dernière. Il serait grossier de ma part de ne pas t’expliquer ce qui s’est passé même si ce n’est pas facile pour moi. Et ne t’inquiète pas, ça n’a rien à voir avec Aïlin…il est même le seul à qui j’en ai parlé… »

Et oui, le cadet des fils Bower était dans la confidence. Et heureusement d’un côté parce pouvoir se confier à lui avait été une véritable délivrance pour l’aiglonne. Ça lui avait fait un bien fou et lui avait donné la force nécessaire pour faire bonne figure le lendemain, le jour de l’enterrement. Son amitié lui était précieuse et elle espérait bien que le retour de Lynn n’y changerait rien, même si elle ne voyait pas bien pourquoi le retour de sa sœur devrait bouleverser ses relations avec Aïlin. Cette dernière lui proposa d’ailleurs de sortir de leur petit coin pour aller marcher un peu dans le par cet pouvoir discuter plus tranquillement si l’envie leur en prenait. Il était vrai que le gros des élèves commençait à sortir de la grande salle après le petit déjeuné et se dispersait dans tous les couloirs, passant forcément à proximité des deux jeunes filles ce qui était dérangeant pour les confidences qu’elles avaient à se faire. Et puis sincèrement, même si elles avaient trouvé un pseudo couloir désert, tout le monde savait bien que Poudlard avait des yeux et des oreilles et que la majorité des conversations ne restaient pas secrètes longtemps dans l’enceinte du château. Comme la fois où sa discussion avec Nils Sullivan avait fait la une des potins l’année précédente et que l’infâme auteur avait presque publié les bans. D’ailleurs cet épisode lui était vaguement resté en travers de la gorge. Et c’était aussi pour cette raison que Clarisse n’osait pas trop aller voir William elle-même. En tant qu’amie du nouveau préfet en chef, elle était assez mal placée pour lui remonter le moral…

Enfin bref.

Clarisse avait suivit Lynn au dehors. Elles marchaient à présent sur l’un des sentiers qui parcouraient le parc, s’éloignant un peu plus à chaque pas du château et de ses indiscrets occupants. Le vent soufflait doucement, ébouriffant au passage les longs cheveux roux de la Serdaigle, les faisant flotter avec grâce sur sa nuque et parfois chatouiller sa peau blanche. Il faisait frais comme il faisait tout le temps en Ecosse. La jeune fille y était habituée, elle aimait ce climat et cette température trop fraîche pour se promener sans manches mais trop chaude pour enfiler un pull et qui vous donnait la chaire de poule lorsque la brise vous touchait. L’aigle marcha quelques temps en silence, savourant le souffle d’air frais qui caressait son visage. Son souffle était régulier, elle était redevenue maîtresse d’elle-même : elle pouvait parler.

« J’imagine que tu te demandes où est passée l’ancienne Clarisse, celle qui était timide mais une fois en compagnie de ses amis osait parler de tout et n’importe quoi sans se préoccuper des conséquences, comme la fois où on a fait le procès de ce pauvre Mathias. Je crois que cette Clarisse là a été remplacée par une autre. C’est une assez longue histoire qui a commencé lorsqu’Aïlin et moi avons cessé de nous fréquenter. J’ai réalisé après quelques temps que celles que je côtoyais tous les jours n’étaient pas vraiment des amies, juste des commères qui ne se préoccupaient que de leur rouge à lèvre et de leur prochain rendez-vous chez le coiffeur. Je les ai abandonnées. Je suis restée un peu dans ma bulle. Mais ce n’était pas désagréable tu sais. Je crois que ça m’a fait du bien, j’ai appris à mieux me connaître en quelque sorte. »

Elle s’interrompit quelques secondes pour reprendre son souffle et sourit à Lynn pour la rassurer. Elle ne tenait pas à enfoncer Aïlin ni à lui laisser entendre ce qu’elle avait vraiment ressentit alors.

« Et puis au printemps, j’ai fais de nouvelles connaissances. Deux filles de Poufsouffle que je te présenterai si tu veux, June Galdwin et Pissenlit Grattopoil. Moi qui détestais les jaunes et noirs, j’ai du revoir mon jugement. Elles sont très différentes l’une de l’autre mais vraiment gentille. Je suis certaine que tu les aimerais. Et puis un gryffondor aussi, Nils Sullivan, le.. le nouveau préfet. C’est aussi à ce moment là que j’ai commencé à revoir Aïlin. »

Son ton avait été enjoué, et pour cause elle venait de résumer les évènements heureux de l’année précédente et qui comme vous pouvez le constater se sont tous déroulés à la fin de l’année scolaire. C’était triste à dire mais c’était comme ça. Elle fit une petite pause dans son récit. Ce qu’elle avait à dire ensuite était nettement moins gai. Elle fit encore quelques pas et s’arrêta, son regard bleu pâle perdu dans l’horizon.

« Début mai, ma grand-mère a eu un grave accident. J’ai compris que jusque là on avait eu de la chance et j’avais raison. Guérin, mon … père a été retrouvé égorgé au ministère à la fin du mois. Il y a eu un article dans la gazette, c’est pour ça, je pensais que tu savais. »

Elle fit une petite pause de quelques secondes. Son visage n’exprimait rien et son regard était toujours dans le vague, un peu comme si elle voyait au-delà des nuages. En vérité, elle revoyait l’enterrement, le défilé de gens aussi importants qu’inconnus à ses yeux, les beaux discours et les larmes forcées de tous ces gens qui se fichaient pas mal du mort mais étaient obligés d’être présents de par leur position sociale. Et puis, les pleurs bien réels de sa mère, de ses grands-parents, d’Ed’, des jumelles et de Lilian et même de Carlisle qui tentait pourtant de faire bonne figure. Tout ça avait été horrible et ce n’était qu’un début. Parce que l’été qui avait suivi avait été un enfer pour elle.

« Les vacances d’été n’ont pas été terribles. Océane, enfin… ma mère est complètement dévastée. Elle a laissé tomber son travail du jour au lendemain et elle s’est cloîtrée au cottage. Elle n’a quasiment pas bougé de a chambre pendant les deux mois. Mon frère n’a pas vraiment mieux réagi, mes grands-parents ne savaient pas quoi faire et mine de rien il fallait bien qu’ils travaillent pour faire bouillir la marmite. Quant à mon oncle il habite en Irlande alors ce n’était pas simple. »

Par « pas simple », elle voulait dire qu’elle avait du prendre un peu les commandes dans cette famille. Travailler et gagner de l’argent non, mais s’occuper de la maison et du potager ou encore répondre aux hiboux par exemple pour soulager Will qui avait repris du service dans une libraire puisque les deux bons salaires qui entretenaient la maison s’étaient envolés du jour au lendemain. Et puis ce qui l’avait minée moralement c’était l’état de sa mère et le regard empli de chagrin que posait sur elle son cadet. Ça, ça avait été vraiment terrible

Alors qu'elles se dirigeaient vers la grande porte, Clarisse excusa Lynn, soulignant qu'elle ne pouvait pas savoir si elle n'avait pas lu la gazette.

Effectivement, Lynn n'avait pas ou très peu lu la gazette pendant tout le temps où elle avait été absente...
Mais qu'avait-il pu arriver d'aussi important pour être signalé dans le seul journal serieux du monde sorcier ?

A la fois curieuse et inquiète, Lynn respecta toutefois le silence de sa vieille amie tandis qu'elles marchaient.

Clarisse finit par se mettre à parler et Lynn l'écouta attentivement.

Oui, il était vrai qu'elle s'était demandé où était passé l'ancienne Clarisse. Non pas que la nouvelle ne lui déplaise, elle ne se permettrait jamais un tel jugement sur une de ses amies, mais elle s'inquiétait et se demandait ce qui avait bien pu arriver...

Elle sourit à l'évocation du procès de Mathias, cela lui paraissait si lointain !

Alors c'était ça... Clarisse s'était isolée du reste du monde suite à sa rupture avec Aïlin...

Lynn ouvrit la bouche pour dire quelque chose mais l'aiglonne poursuivit sur une note plus joyeuse en expliquant qu'elle avait rencontré d'autres personnes, s'était finalement faite d'auters amis et avait renoué avec son frère.

Elle sembla soudain plus grave et s'arrêta, fixant l'horizon avant de lui annoncer la terrible nouvelle de l'assassinat de son père.

Lynn la dévisagea, horrifiée et posa sa main sur sa bouche.

"Ho Clarisse...."

Si la mort de son propre père avait été plus qu'un soulagement, malgré les terribles conséquences qu'elle avait eu, elle comprenait à quel point cela devait avoir été affreux pour la si douce et gentille bleu et bronze. Un assassinat terrible... sûrement la marque d'un mangemort...

Lynn n'osa pas demander ce que faisait le père de sa camarade. Elle se contenta de l'écouter raconter le rude été qu'elle avait donc subi...

Emue aux larmes, Lynn ne sût pas immédiatement comment réagir, perdue face à la detresse de cette jeune fille si adorable qui ne méritait absolument pas ça...

"Je... par Merlin, je suis vraiment désolée...je l'ignorais... c'est horrible..."

Et dire qu'elle avait ignoré tout ça ! Qu'elle n'avait pas été là... et dire qu'elle ennuyait la serdaigle avec ses petites histoires familliales. Tout avait toujours été compliqué chez les Bowers... ce qui ne voulait pas dire que d'autres drames ne se déroulaient pas dans d'autres familles, comme les McBrian...
Clarisse avait l'air détaché de ces évènements mais Lynn comprit enfin l'origine du voile dans ses yeux...

"Personne ne devrait avoir à vivre ça..."

Elle lui prit la main et la serra quelques instants très fort pour lui faire comprendre qu'elle partageait sa douleur :

"Je suis désolée qu'une telle chose vous soit arrivée... je sais que c'est dur... que c'est injuste... et qu'il va falloir du temps... mais vous allez vous en sortir... ca va aller... toi, ta mère, ton frère, tout le monde... tout ira mieux..."

Elle plongea ses yeux dans les siens et finit par dire:

"La guerre ne durera pas éternellement... et celui qui a fait ça paira... j'en suis sûre... ils finissent toujours par payer..."


Lynn était boulversée mais parlait avec determination et conviction. Oui... il avait fallu des années mais Devin avait payé... il avait fallu des années mais elle s'était reconstruite... et Torin et Ultan n'étaient qu'en sursis... elle en était convaincue... et elle voulait partager cette certitude avec son amie. A défaut de pouvoir alléger sa peine, elle pouvait au moins la partager.

" Ca n'a pas dû être facile... Ca ne doit.. pas être facile. Pardonne-moi de ne pas avoir été là... je fais une bien piètre amie... mais je vais me rattraper ! Je suis là maintenant et si tu as besoin de moi je serai à tes côtés..."

Elle voulu lui demander si l'état de sa mère s'améliorait mais préféra ne pas insister. Clarisse lui en avait déjà beaucoup dit et cela devait avoir été pénible pour elle.

"Je suis soulagée de s'avoir qu'Aïlin était tout de même là pour toi... que tu as pu en parler à quelqu'un..."

Lorsque Clarisse acheva ses explications et le résumé des évènements passés, les yeux toujours perdus dans le vague, Lynn sembla bouleversée. La lionne se répandit en phrases contenant au moins deux voire trois « je suis désolée, c’est vraiment horrible ». En effet c’était vraiment terrible, Guérin s’était fait saigner comme un cochon, elle avait entendu dire qu’il y avait du sang partout, que ça formait une grande marre rougeâtre autour de son corps inerte. Ça ne devait pas être joli à voir. Plutôt macabre comme tableau, pas le genre qu’elle accrocherait dans sa chambre. Il s’était battu avec son agresseur, le bureau en pièces détachées en attestait ainsi que quelques os cassés mais semblait-il l’ancien Serdaigle n’avait pas souffert lors de … l’acte. D’après les experts, son agresseur lui avait lancé un sort anti-douleur juste avant de lui trancher la jugulaire. Une précieuse attention. C’était étrange quand même qu’un sanguinaire de la sorte souhaite épargner à sa victime la souffrance physique d’une mort atroce. Surtout pour quelqu’un qui disait supprimer Guérin parce que c’était un né moldu. Ce « léger » détail dérangeait beaucoup la bleue et bronze. Comment elle savait tout ça ?! Facile. Le rapport avait été remis à sa mère, sauf qu’Océane ne voulait rien savoir, alors l’aînée McBien avait récupéré le compte rendu de la police. Police qui soit dit en passant n’avait pas à l’époque trouvé le moindre indice. Aujourd’hui, avec la nouvelle politique du ministère, inutile d’en parler.

Clarisse se tourna vers Lynn, un sourire étrange accroché aux lèvres mais le regard encore loin de Poudlard et de son parc, de Lynn et du mois de septembre.

« Je doute de connaître un jour l’identité de celui qui a fait ça. Ce qu’il a fait est horrible, il a même écrit une phrase avec son sang, quelque chose comme « les sang-de-bourbes doivent périr » pourtant, il lui a lancé un sort anti-douleur… »

L’incompréhension était lisible dans le ton employé. La jeune fille n’avait jamais fait part de ses soupçons à qui que ce soit et Lynn n’était peut être pas la bonne personne mais maintenant qu’elle était lancée, difficile de l’arrêter.

« Si un jour je trouve le coupable, je crois qu’il va vraiment passer un mauvais moment, et peut être même le dernier de sa vie mais une chose est certaine, je saurais pourquoi. »

Cette fois la haine était carrément palpable et dans ses yeux brillait une lueur sombre et inquiétante laissant peu de doute sur ses intentions. Clarisse avait toujours eu une morale toute relative. Tant qu’on ne s’en prenait pas à ses proches, elle se fichait bien de ce qui se passait au dehors, mais à partir du moment où elle était touchée, les règles du jeu changeaient et si quelqu’un se permettait d’enfreindre les lois du ministère, alors elle ne voyait pas pourquoi elle se gênerait. Enfin ça c’était au cas où l’occasion se présente mais elle n’allait pas passer sa vie à chercher qui était coupable. Son père n’aurait jamais voulu qu’elle gâche le temps qui lui était accordé sur Terre pour le venger, elle le savait parfaitement. Et même si elle n’hésiterait pas le moment venu, elle comptait bien agir selon les volontés du mort.
Elle secoua la tête, comme pour chasser de ses pensées le scénario qui s’y jouait. Elle se voyait à l’occasion plus âgée et tenant en joue le meurtrier. Un sourire sadique aux lèvres, elle le torturait pendant des jours jusqu’à ce qu’il avoue pourquoi puis jusqu’à ce qu’il meure à son tour… oui elle y avait pensé, il fallait bien l’avouer. Mais elle avait réfléchi depuis et elle préférait qu’il reste en vie en définitive, pour pouvoir le livrer à la justice. Enfin ça c’était au cas ou justice il y aurait. Oui elle était un peu méchante, mais il n’avait qu’à pas s’en prendre à Guérin. S’il y a d’autres amateurs, au moins ils sont prévenus !

La flamme sombre avait quitté ses prunelles et elle sentait à présent sa main entre celles de Lynn et qui la serraient très fort, comme pour lui montrer qu’elle était là. Elle ne l’avait pas remarquée tout de suite, perdue dans les méandres de ses pensées. L’Ecossaise sourit tristement à son amie.

« Tu dois sûrement trouver ça bizarre mais je suis pas triste parce qu’il est mort. Il sera toujours avec moi, dans mon cœur et mes souvenirs. Oh bien sûr ce n’est pas pareil et j’ai eu beaucoup de peine lorsque j’ai appris la nouvelle, mais si nous sommes tristes c’est parce que nous sommes égoïstes, à cause de tous les moments qu’on ne vivra plus ensemble, à cause d’une présence physique qui fait défaut, à cause de toutes les décisions qu’il ne prendra pas et que moi ou ma mère devra prendre à sa place. Ça peu paraître difficile à comprendre, c’est très bizarre, même pour moi parce que j’ai envie de pleurer quand je pense à lui, parce que je regrette d’être comme je suis et d’avoir partagé si peu de choses avec lui, d’avoir appris si peu de lui et que maintenant il est trop tard. Mais d’un autre côté, mes larmes sèchent et sont remplacées par un sourire parce que maintenant je sais qu’il sera toujours avec moi. »

Lynn devrait sûrement avoir du mal à comprendre tout ça. Pour Clarisse, dans sa tête c’était très clair mais quand elle essayait de mettre des mots là-dessus, c’était une toute autre histoire, comme vous pouvez le constater.

« Tu penses peut être que je n’ai pas de cœur, mais au contraire, je l’aimais beaucoup et .. à notre façon, nous étions très proches. Mais l’insupportable pour moi, c’est de voir ma mère et mon frère dans cet état. Tu sais sur certains points, je n’ai pas tellement changé et je ne supporte pas de les voir pleurer à longueur de journées. Il n’aurait pas voulu ça … et.. moi je me retrouve au milieu de ça et… je ne sais juste pas quoi faire. Tu es la première à qui je le dis, et je suis vraiment désolée de te raconter ma vie comme ça et de t’imposer mes histoires. C’est juste que… tu vois.. je .. enfin j’ai toujours été distante avec tout le monde et ma famille aussi et aujourd’hui, j’ai l’impression d’être une étrangère parce que même si moi aussi je suis triste, personne ne m’a vue pleurer… »

Ah! Personne ne vous avait promis que la famille McBrien/ Echeberry était une famille simple à comprendre. Enfin si on exceptait Clarisse, c’était presque faisable, mais manque de pot pour vous, la petite rousse était bien là. Dommage, vous allez devoir abandonner ou bien trouver une bonne réserve de courage.
La cinquième année saisit la main de sa camarade comme le faisaient les petits qui se mettaient en rang par deux à la maternelle et l’entraîna un peu plus loin. Peut être que Lynn aurait une solution à lui proposer. Bien sûr, aller voir Océane, la prendre dans ses bras et la laisser pleurer sur son épaule aurait été tout désigné, sauf que ça, notre moineau en était incapable. De même pour Lilian. Pas facile la vie.
La jeune fille se mit à trottiner doucement, heureuse de ne plus être seule. Heureuse d’être de retour à Poudlard et de ne plus entendre les gémissements étouffés de sa mère, entre deux sanglots. Bon l’ambiance n’était pas top-top mais c’était déjà mieux que rien. D’ailleurs il y avait même une touche positive. Sayannel. Positive parce que bien sûr la bleue ignorait que c’était lui l’assassin. Que la vie est cruelle pas vrai ?! Elle s’arrêta après quelques foulées accélérées. L’œil rieur et plus du tout sombre, elle sourit à pleines dents à la jolie brune.

« Ouf ! Excuse-moi, mais qu’est-ce que ça fait du bien ! »

Elle rit.
Lynn devait la trouver de plus en plus étrange. Mais bon, la rousse avait toujours eu un grain alors il ne fallait pas s’attendre à ce que ça s’arrange avec le temps.

« Il y a tout de même un point positif. Je ne sais pas si tu es déjà allée à la bibliothèque depuis la rentrée mais Pince n’est plus la vieille chouette qui veille avec acharnement et nez crochu sur les grimoires poussiéreux. Le nouveau est blond, la quarantaine. Il faudra que tu me dises comment tu le trouves… »

L’Ecossaise lui lança un clin d’œil pétillant de malice. Elle avait même de la peine à retenir son sourire ravi…

…lunatique… pour pas changer…mais sinon vous ne l’aimeriez pas !

Lynn savait par experience que la pitié n'est pas quelque chose dont on a besoin lorsque l'on est malheureux. De la compassion, de la compréhension, oui et bien sûr de l'écoute et de la présence. Voilà ce qu'elle souhaitait offrir à sa camarade. Elle ne se souvenait que trop bien des regards qu'on lui avait parfois jeté et elle se promit de ne pas faire subir la même chose à Clarisse. Cette dernière avait un comportement étrange, il était vrai. Lynn n'avait jamais eu à subir le deuil d'une personne aimé. Sa mère n'avait été qu'une ombre dans sa vie et son père un démon qu'elle avait été soulagé de voir disparaître. La chose la plus proche qu'elle pouvait assimiler à un deuil était la perte affective de son frère, lien qu'elle esperait se reconstruire avec le temps... Mais ce n'était rien comparé à l'idée de le perdre réellement et définitivement.

Cette idée l'horrifiait et en même temps elle comprenait que Clarisse veuille aller de l'avant. Le désir de vengeance, Lynn en avait fait l'experience, et n'avait finalement pas pu aller jusqu'au bout. Mais elle sentait que Clarisse serait différente... Elle-même, aujourd'hui, savait que si elle devait revivre ce moment fatidique où il avait été à sa merci, elle n'hésiterait plus, ne serait-ce que pour éviter à Aïlin d'avoir ce geste terrible... l'incompréhension devait également être terrible, le comportement du meurtier du père de la serdaigle avait fait preuve d'une certaine humanité, d'une sensibilité dont on aurait pu le croire dépourvu par sa nature même de Mangemort.. Cela impliquait sûrement autrechose que les deux jeunes filles n'étaient pas encore en mesure de réaliser.

"C'est à n'y rien comprendre..." Acquiesça-t-elle dans un murmure.

Clarisse ne se disait pas triste et se rassurait en sentant la présence de son père à ses côtés. Lynn approuvait sa façon de voir les choses même si elle avait du mal à l'appréhender pour n'avoir jamais vécu de situation identique. La jeune fille lui expliquait à quel point les réactions habituelles face à la mort étaient égoiste... En effet, la mort n'est une épreuve que pour ceux qui restent. Ce n'est pas mourir qui est dur, c'est vivre... Oui Lynn en savait quelque chose..

L'aiglonne lui avoua être la première personne à qui elle en parlait et Lynn se dit que son amie avait dû être bien seule:
"Je comprends..." Dit-elle pour la rassurer.

A défaut de tout comprendre, elle acceptait les réactions de son amie et voulait être là pour elle comme elle en avait besoin.

"Tu ne m'ennuis pas, et je suis contente que tu ais tout de même pu te confier... tu sais, on a pas besoin de te voir pleurer pour savoir que tu es triste... et puis, c'est difficile de pleurer devant les autres.. moi j'ai tellement pleurer que je m'en sens incapable aujourd'hui.. "

Clarisse l'attira sur le chemin et Lynn la suivit:

"Chacun réagit différement... il n'y a pas de solution miracle.. il faudra du temps."

La jeune fille partie en courant et s'arrêta un peu plus loin en souriant pleinement à la Gryffondor, ce qui lui réchauffa le coeur. Lynn savait qu'elle s'en sortirait.

Clarisse s'excusa, arguant que cela lui avait fait du bien et se mit à rire mais Lynn lui fit comprendre que ce n'était rien ! Visiblement l'aiglonne semblait avoir retrouvé un peu d'entrain et était décidée à changer de sujet.

Et alors qu'elle continuaient à marcher, Clarisse lui annonçait l'arrivée d'un bibliothécaire plutôt charmant, accompagnant sa remarque d'un clin d'oeil.

Lynn éclata à son tour de rire:

"J'ai l'impression que beaucoup de choses ont changé ! Je vais avoir besoin d'un guide dans ce nouveau Poudlard ! Tu voudras bien te charger de cette délicate mission ?" Demanda-t-elle avec un regard innocent et un adorable sourire. "Je compte sur vous, Miss McBrian !"

Et alors qu'elles continuaient d'avancer sur le sentier menant au lac, Lynn continua sur sa lancée :

"On va faire des tonnes de choses ! Après tout j'ai une année de bêtises et de bavardages à rattraper alors je ne vais pas m'en priver ! Et si tu as des comptes à régler, tu peux compter sur moi !" Ajouta-t-elle, complice.

Puis, prise d'une impulsion soudaine elle serra la bleu et bronze contre elle et déposa un baiser amicale sur sa joue:

"Ma petite Clarisse, tu ne peux pas savoir combien je suis heureuse de t'avoir retrouvée ! Toi et moi, on va passer une année mémorable, je te le promets !"

Oui, Lynn aussi avait bien changé...

"J'ai l'impression que beaucoup de choses ont changé ! Je vais avoir besoin d'un guide dans ce nouveau Poudlard ! Tu voudras bien te charger de cette délicate mission ? Je compte sur vous, Miss McBrien !"

Oh oui, beaucoup, beaucoup, beaucoup de choses avaient changé. Tellement qu’il fallait plus de dix doigts pour les compter. Lynn la regardait, faussement innocente. Clarisse ne l’avait jamais vue aussi franchement heureuse et sincèrement joueuse. Amusant. Au contraire la rousse s’était assombrie et ses yeux étaient presque toujours teintés d’un voile d’amertume qui lui donnait une vision bien plus terre à terre des choses. On appelait ça devenir adulte dans le langage courant, et dieu savait que ce n’était pas la chose la plus gaie et agréable. Enfin il fallait bien s’en accommoder et puisque de toute façon grandir était inévitable, que ça arrive aujourd’hui ou demain changeait bien peu de choses au final. Elle sourit néanmoins à son amie et hocha la tête en signe d’assentiment.

« Mais ce sera une joie Miss Bower. Mais je dois dire que je découvre en même temps que toi, les changements ont eu lieu entre l’année dernière et cette année… » Avoua-t-elle.

Mais bon, rien ne les empêchait de découvrir les spécificités de cette nouvelle année ensemble. Ça n’en serait que plus drôle, elle n’en doutait pas. Mais quelque chose lui soufflait qu’arpenter les couloirs ensemble en quête des trésors cachés de Poudlard n’était pas l’idée du siècle sous le nouveau régime. Avec les deux nouveaux enseignants, les « Carrows », ça allait sûrement filer droit. D’un côté, ce n’était pas plus mal, un peu de discipline n’avait jamais tué personne mais restait à voir jusqu’où le vice serait poussé. Parce qu’il fallait bien reconnaître que c’était là que le bas blessait, là que les limites étaient franchies, notamment avec les nés moldus. Ils risquaient de payer cher leurs origines, alors qu’ils n’y étaient pour rien. Pas de chance au tirage, voilà tout. Enfin ça ne la concernait plus cette histoire de sang de bourbe puisque le seul élément de sa famille issu de non-sorciers avait déjà été rayé de la carte. Seule restait la tristesse…

"On va faire des tonnes de choses ! Après tout j'ai une année de bêtises et de bavardages à rattraper alors je ne vais pas m'en priver ! Et si tu as des comptes à régler, tu peux compter sur moi !"

Clarisse grimaça.

« Hum… pour les bêtises, je crois qu’il faudra repasser… à mon avis la surveillance va être renforcée… mais… pour les bavardages, on peut sûrement s’arranger. »

Elle lui fit un clin d’œil.
Mais avec tout ça, elles s’éloignaient du sujet principal ou plus exactement de ce dont Clarisse voulait parler avec elle à savoir Sayannel. Oui elle devait quand même lui dire de qui il s’agissait avant qu’elle ne le rencontre et s’en fasse une idée… disons quelque peu erronée. Après tout, même si elle ne le montrait pas, savoir que les personnes qu’elle aimait s’appréciait entre elles était important. Et même sans parler de s’apprécier ne pas se détester était déjà un bon début.

"Ma petite Clarisse, tu ne peux pas savoir combien je suis heureuse de t'avoir retrouvée ! Toi et moi, on va passer une année mémorable, je te le promets !"

« Oui je n’en doute pas… »

Elle se tut un instant.

« Le nouveau bibliothécaire dont je te parlais… eh bien en fait, si je l’ai évoqué c’est parce que… c’est quelqu’un d’important pour moi. Le cousin de ma mère. Il est un peu bizarre et il peut faire un peu peur mais il est vraiment gentil. »

Elle ne précisa pas naturellement qu’il était mangemort. Lynn n’avait pas besoin de cette information. Elle avait été suffisamment traumatisée par des gens de cette espèce. Elle ne savait pas trop quoi ajouter. Elle n’avait jamais été très bavarde et elle en avait déjà beaucoup dit aujourd’hui. Mais elle n’était pas contre le fait d’écouter Lynn lui raconter sa nouvelle vie, son installation à Londres, les moldus chez qui était Léan, ce qui la rendait heureuse aujourd’hui enfin tout ça quoi.

« Alors, c’est comment la vie de la nouvelle Lynn Bower ? » Interrogea-t-elle, curieuse.

"Et bien j'ai hâte de le rencontrer ! Je suis sûre que si c'est quelqu'un que tu apprécies, c'est quelqu'un de bien, et nous nous entendrons à merveille !"

Clarisse ne dit rien mais grimaça intérieurement. Elle doutait fortement que Lynn "s'entende à merveille" avec un mangemort. Enfin tant qu'elle ignorait sa véritable nature, il y avait des chances, vu l'enthousiasme dont elle débordait, pour que Sayannel et elle aient des rapports normaux. Restait à espérer que la brune ne lui en voudrait pas trop de lui avait caché le pot aux roses le jour où elle le découvrirait. Même si sa frêle silhouette cachait un caractère de feu, la rousse n'aimait pas spécialement se disputer avec les gens et encore moins avec ses amis. Or nul doute qu'une explication un peu musclée aurait lieu entre les deux élèves, à moins que Lynn ne choisisse de l'ignorer quelques temps, exprimant à travers son regard toute la tristesse et la déception que lui inspirait l'Ecossaise, ce qui serait encore pire. Enfin, inutile de s'inquiéter à l'avance, elle n'avait qu'à réfléchir aux conséquences au lieu de lui parler du géant blond comme si de rien n'était. Il serait assez tôt d'aviser le moment venu.
Elle se contenta donc de passer à autre chose et de se concentrer sur les paroles de la rouge et or

"C'est... enivrant ! Je me sens tellement légère ! Tellement libre ! Je n'ai plus aucune contrainte et je n'ai plus peur ! C'est incroyable ! J'ai encore du mal à réaliser.. je culpabilise un peu de me sentir si bien alors qu'il arrive tant de choses horribles autour de nous... mais... pour une fois, j'ai envie d'être un peu égoïste... juste un tout petit peu, tu vois ? J'ai hâte de te montrer mon appartement, il n'est pas très grand mais très chaleureux, j'ai tout décoré moi-même et j'en suis très fière ! Il faudra que tu viennes passer quelques jours !"

La Serdaigle écoutait son amie, presque choquée même si elle n'en montrait rien de la voir si joyeuse. Pour sa défense, voir Lynn Bower dans un tel état d'excitation et d'euphorie était tout sauf courant jusqu'à ... eh bien en fait jusqu'à son retour cette année. Mais ne vous y trompez pas, la bonne humeur lui allait plutôt bien au teint et Clarisse était heureuse de la voir enfin libérée. Oui c'était ça, elle était libre. Le joug de son père tyrannique avait cessé puis elle avait trouvé on ne sait où la force de se soustraire à Torin, et Merlin seul savait ce que ça avait dû lui coûter. Il fallait une grande force de caractère et une bonne dose de courage pour s'émanciper ainsi à quinze ans seulement. Clarisse finit par sourire. L'enthousiasme de sa camarade devait être communicatif.

"Ca me ferait très plaisir de venir. Tu sais, je crois que tu n'as pas à t'en vouloir de ressentir de la joie et d'être heureuse, même en cette période plutôt troublée. D'accord il y a plein de gens qui meurent c'est horrible et très triste et on espère tous que ça s'arrêtera très vite mais il ne faut pas céder à la panique et si tu arrives à ressentir de la joie, à sourire le matin en te levant c'est tant mieux. La vie est courte, autant en profiter au maximum, et puis entre nous, je crois que tu as bien mérité d'être heureuse..."

Elle s'était battue pour tout ça, alors si quelqu'un méritait d'être heureuse, c'était bien Lynn. Clarisse pensa avec horreur que Torin et Ultan ne l'entendaient sans doute pas de cette oreille. Et si jamais ils la retrouvaient? Et si jamais ils lui faisaient du mal et allaient jusqu'à... la tuer pour lui faire payer ce qu'ils considéraient comme un affront? A sa place, la rousse aurait été morte de peur que l'un de ses aîné complètement cinglé ne vienne lui régler son compte définitivement. Lynn quant à elle ne semblait pas y penser et faisait par de ses projets d'avenir à la bleue et bronze. Un chat ou une chouette, oui très bien mais ce n'étaient pas eux qui allaient la protéger. Clarisse lui aurait plutôt recommandé un Hypogriffe ou en tout cas une bestiole un peu plus offensive. Elle s'abstint de tout commentaire et garda ses pensées pour elle, s'efforçant de sourire à la lionne.

"Et dire qu'on est en cinquième année... tu sais déjà ce que tu veux faire après..?Tu es inquiète pour les BUSES ?"

De nouveau l'aiglonne fut presque choquée des paroles de Lynn. A ses yeux l'avenir était tellement incertain qu'elle n'osait pas penser plus loin que la cinquième année. Pour le moment, les Ténèbres avaient un adversaire: l'Ordre du Phoenix et le monde n'avait pas encore totalement basculé. Il restait une lueur d'espoir. Tant que Harry Potter n'était pas mort, on pouvait encore se dire que bientôt tout ça ne serait plus qu'un mauvais rêve. Mais viendrait un jour où la confrontation deviendrait inévitable et alors tout dépendrait du camp vainqueur. Si Potter détruisait le Lord noir, leur scolarité s'en trouverait presque inchangée et les perspectives d'avenir ouvertes alors que si l'inverse se passait... Peut être que Sayannel interviendrait en sa faveur et qu'elle pourrait continuer à vivre...

"Je ne sais pas trop, on verra bien le moment venu. Pour les BUSES, je crois que ce n'est pas le plus important dans la vie..." répondit-elle énigmatique.

"D'ailleurs si u veux avoir une chance de passer tes BUSES, il faudrait te dépêcher d'aller en cours Miss Bower" ajouta-elle amusée en prenant le bras de son amie direction le château.