[désolé pour le retard et pour la piètre qualité du post... enfin, disons que c'est une transition]

L'heure n'était manifestement pas à la plaisanterie. Tim ne s'était de toute façon pas attendu à s'en payer une bonne tranche pendant sa visite dans le directeur du département de la justice, mais un simple « bonjour » ne lui aurait pas paru totalement incongru. Certes, ils n'étaient pas amis, mais aux dernières nouvelles, ça ne l'obligeait pas à se montrer aussi distant. Limite pète-sec, quand il s'y mettait, le Lawrence. Haussant les épaules, il décida qu'il allait bien falloir faire avec – plus par obligation que par bonne volonté – et respecta la consigne en prenant sur une des chaises qui faisaient face au brun. Il lui arrivait plus souvent de se retrouver de l'autre côté du bureau, celui où il y avait un beau fauteuil, le côté duquel on jugeait. Quand il recevait un accusé pour recueillir sa déposition, Tim était en position de force. Il était beaucoup plus rare qu'il se trouve du côté de celui à qui on pose des questions, celui qu'on accuse, celui à qui on a des reproches à faire. Ce jour-là, c'était le cas.

Le policier posa ses yeux sombres sur son interlocuteur. Celui-ci avait beau faire tous les efforts du monde pour le cacher, sa fatigue sautait aux yeux. Son visage marqué de profondes cernes, une grande lassitude dans son regard, ses gestes lents et bizarrement assurés prouvaient que Lawrence manquait de sommeil depuis plusieurs jours. Ce n'était guère étonnant étant donné l'agitation qui avait régné en maître dans les bureaux du ministère depuis la mort de Dumbledore. Un meurtre était toujours une affaire importante, mais quand il avait lieu en plein coeur de Poudlard, et que par dessus le marché sa victime était le plus grand sorcier du moment, dans un contexte de guerre ouverte contre les mages noirs, il y avait de quoi faire faire quelques nuits blanche à bien des directeurs de département. A fortiori si celui-ci continuait à s'occuper d'affaires aussi triviales qu'un léger dysfonctionnement dans la police magique.

Apparemment, c'était de ça qu'il s'agissait. D'accord, il avait fait une connerie. Une petite. Et puis il ne l'avait pas faite tout seul. Et puis c'était pas bien grave. Comme d'habitude, les oubliators et Comités des inventions d’excuses à l’usage des Moldus étaient intervenus à la vitesse de la lumière et avait réparé cette petite boulette. Ce brave Dudek avait été suspendu quinze jours, c'était le tarif, autant pour ne pas avoir respecté la procédure que pour ne pas savoir viser. C'était de sa faute aussi, s'il était incapable de stupéfixer correctement un adversaire ! Et puis que faisait ce couple à Pré-au-Lard au milieu de la nuit ? Et depuis quand il y a des Moldus à Pré-au-Lard ? Tout cela était relativement stupide. Mais toujours était-il qu'il n'avait pas respecté les consignes – qui les respectait ? - et qu'il s'était fait choper, voilà tout. Et maintenant, il était face au directeur de la justice magique, comme un gamin pris en flagrant délit, et il ne pouvait rien faire d'autre que d'avouer.

« Je ne nie pas... Mais Dudek est quand même pas très doué. »

Voilà qui n'était pas très charitable par rapport à son collègue. Mais Tim n'aimait pas qu'on lui reproche des choses. D'autant plus qu'en l'occurrence, un blâme, c'était cher payé. Avoir sur sa fiche identitaire une remarque négative du grand manitou n'était pas une super idée pour quelqu'un qui comptait bien, un jour, faire autre chose de sa carrière que gratter des papiers et arrêter des petites frappes. Et avec tout le chambardement qui se préparait, fêter la promotion de Lawrence par une prise de bec avec lui n'était pas forcément ce qu'il y avait de mieux à faire. Il se contenta donc de grommeler à l'énoncé de sa sanction, sans ajouter de contestation.

Quand l'ancien avocat eut fini, Tim fit mine de se lever pour partir.

« C'est tout, je peux partir ? C'est l'heure de ma pause café. »

Brillant ça, Tim. Vraiment très pertinent.

[à ce niveau là, c'est plus un retard, c'est un crime contre l'humanité... en plus, encore une fois, c'est pas brillant]

Tandis que Lawrence déployait tous les efforts du monde pour prendre sur lui et ne pas s'énerver face à la nonchalance de Tim, celui-ci fut pris d'une soudaine, inattendue et pour le moins inexplicable passion pour une mouche qui avait choisi de se poser sur le mur derrière le brun. Toujours aussi étrange de constater à quel point ces bestioles ont le chic pour atterrir au moment le plus impromptu qui soit, et par dessus le marché attirer irrésistiblement l'attention des individus présents dans la pièce. Tim n'était déjà pas à la base un modèle en matière de concentration et d'écoute, il était d'autant plus sujet à ce genre de perturbation apte à lui faire royalement quitter une conversation.

Quant il reporta son attention sur Lawrence, celui-ci ne semblait pas décidé à lâcher l'affaire et à le laisser vaquer tranquillement à ses occupations caféïnomanes. Il lui répliqua froidement que l'heure de la pause n'était pas encore venue et qu'il comptait encore sur sa présence quelques temps. Et quoi ? Il avait encore quelque chose à ajouter ? Ça ne lui suffisait pas de l'avoir engueulé comme un gamin et de lui avoir accordé sa petite punition ? Tim n'aimait déjà pas subir des remontrances, mais il détestait encore plus avoir à subir l'acharnement de ses supérieurs. Et il lui semblait que c'était tout à fait ce qui était en train de se passer. Non, le temps passé sur la faute n'était pas cours, il avait avoué, il s'était fait punir, et ça suffisait. Tim parvint toutefois à ne pas verbaliser cette pensée, préférant rester silencieux face au ton définitif affiché par le directeur.

Il ne pût cependant s'empêcher de marquer son mécontentement, même sans prononcer un mot. Il se renfrogna encore un peu plus et s'enfonça dans le dossier de sa chaise, bras croisés sur la poitrine et air sinistre sur le visage. Plus cette conversation durait, et plus il était sûr d'une chose : autant il pouvait avoir de l'affection pour Lacey, autant son frère cadet l'insupportait au plus haut point. Mais c'était un supérieur hiérarchique...

Lawrence réussit tout de même à marquer un point décisif pour ramener définitivement l'attention du policier à lui. Il faut dire qu'il avait choisi la facilité en tapant en plein dans un sujet qu'il savait sensible. En effet, si le brun avait pu être nerveux ces derniers jours, Tim n'avait pas été en reste, tant il avait été inquiet à propos de son ami, et énervé par la Gazette du Sorcier qui n'en disait rien. Il était donc extrêmement prévisible qu'il réagisse à la moindre allusion à la situation de son ami. Toutefois, Lawrence ne lui annonça rien de bien important. Oui, il savait que l'auror avait disparu le 20 juin, en mission. Il ne savait ni pourquoi ni comment, mais le brun avait réussi à attiser sa curiosité. Sans se départir de son air renfrogné, Tim répondit à Lawrence sur un ton aussi mesuré que possible, sans afficher son intérêt pour ne pas lui donner la satisfaction d'avoir atteint ce qu'il recherchait.

« Et ? Si vous avez des infos, parlez, par Merlin... »

Pour ce qui était de la neutralité du ton, c'était raté. Mais au diable la négociation, si cette espèce de fonctionnaire endimanché savait quelque chose, qu'il le fasse savoir ! Et son petit sarcasme sur le café que Tim attendait tant n'arrangea nullement l'agacement de ce dernier.

« Disons que Lacey a toute mon attention, en attendant la pause café... »