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 [1er Janvier - Londres Moldu] English Coffee [Libre]
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MessageSujet: [1er Janvier - Londres Moldu] English Coffee [Libre]   [1er Janvier - Londres Moldu] English Coffee [Libre] EmptyMar 19 Jan - 3:38:16

Il n'y avait pas de neige en ce premier matin de Janvier. Pas de pluie non plus et le ciel était clair pour encore quelques heures. Comme toujours lorsque le soleil affaiblit brûlait en hiver, le froid était intense, recouvrant de brume les respirations des vivants comme des morts.

La ville dormait toujours, inconsciente des destinées de chacun. La nouvelle année ne voulait rien dire pour l'Absolu qui les entourait et, tant que les hommes ne se seraient pas réveillés, le temps relatif était suspendu. Pendant quelques minutes encore, Siriel pouvait avoir quinze et seize ans en même temps. Il était infini. Il était immortel. Il était irréel et ne souhaitait qu'une chose. Pouvoir le rester. Rien qu'une seconde. Rien qu'un moment. Pour l'éternité.
"Bon anniversaire !"

Il fallait toujours qu'une bonne intention le replonge en enfer.

La matinée était passée ainsi. Il avait fallu bien se présenter, remercier ceux qui fêtaient votre présence dans une réalité que vous vouliez fuir plus que tout. Apprécier des cadeaux qui ne pouvaient effacer votre peine. Parce qu'ils n'était pas responsables. Juste ignorants, inconscients de l'angoisse et de la douleur que ces quelques mots pouvaient éveiller en lui. Comment un anniversaire pouvait être bon s'il n'était pas partagé avec sa sœur ? Pourquoi continuer à vivre sans Sarah ? Comment être joyeux dans ses conditions ? Mais il ne disait rien. N'exprimant ni joie ni haine, ni même la colère sourde qui le prenait parfois face à l'incompréhension de ceux qui se disaient ses proches. Et quand son père lui proposa une sortie à Londres, il accepta. Tout plutôt que de continuer cette mascarade.

Le voyage en voiture se passa dans le silence le plus humain, seulement troublé par le vacarme de la machine et la respiration des deux hommes. L'un comme l'autre savouraient la proximité et l'absence de besoin de meubler. Ils se comprenaient sans rien dire, se reposant simplement sur le langage corporel de l'autre pour communiquer. Sans un mot, ils se garèrent dans Londres puis prirent chacun leur sacoche et leur route, sachant qu'ils devaient se retrouver au coucher du soleil devant le véhicule. Siriel marcha longtemps, sans but, ne s'arrêtant que lorsque la beauté d'un moment capturait son esprit. Puis, quelques instants plus tard, il s'arrêta, fatigué par cet exercice peu habituel. Un café était ouvert, vide, donnant sur une rue normalement passante. Il prit une chaise, en terrasse, commanda une tasse du breuvage noir et amer qu'il adorait et sortit de son sac une feuille de papier, un fusain.

Aussitôt, le monde devint noir et blanc. Ombres et lumières, mouvements et volumes. Ses yeux cessèrent d'interpréter pour juste voir. Son esprit se tu. Sarah, pâle et transparente dans la fine fleur de ses vingt ans était assise à coté de lui. Le monde n'existait plus. Il était transporté ailleurs, sur la vapeur de sa commande, dans un univers où la mort n'était qu'un trait gommé, où l'amour avait l'amertume d'une graine torréfiée, où la tristesse faisait les océans. Et, tandis que son imagination lui peignait un rêve, sa main, elle, capturait avec la précision d'une pellicule photo les délires que son cerveau fiévreux lui faisait voir. Une volute sur un mur emportait un saumon vers un ciel de pavés. Sur le sol, un sable noir tombait dans le néant. Et ce n'était que le début.
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MessageSujet: Re: [1er Janvier - Londres Moldu] English Coffee [Libre]   [1er Janvier - Londres Moldu] English Coffee [Libre] EmptyLun 25 Jan - 21:10:43

Le rire aigu des enfants babillait à travers les volutes éthérées de poussière du terrain de jeu improvisé. Attirés par l’étendue d’espace libre au-delà de l’exigüité des ruelles de la ville, ils s’assemblaient en meutes braillardes et nerveuses pour regarder l’éclat miroitant du soleil fade sur le métal de la cité et pour disputer leurs perpétuelles parties de balle au pied. Hors de l’enceinte de la capitale du Royaume-Uni, leurs ainés pouvaient avoir le visage hagard, tendu mais ici, entre les remparts de la ville, sans soucis pour les dangers de la rue et de l’acier, les enfants s’ébattaient avec toute l’exubérance spontanée de leur innocence juvénile.

Accoudée au petit balcon d’une spacieuse chambre d’hôte qui surplombait le terrain vague de sable ocre, Pénombre respirait calmement l’air froid de l’extérieur en contemplant distraitement leurs jeux ingénus en contre bas. Enveloppée dans une chaude cape de voyage prune, sa tenue murmurait encore avec poésie, la tiédeur tendre d’une nuit passée dans un éphémère ailleurs perdu, qui s’achevait à peine, soufflé par la clarté hivernale d’un matin nouveau. Sous le coton doublé de son par-dessus, un pâle fourreau, court et satiné, recouvrait à peine son corps de délicieuses teintes perles qui sublimaient la blancheur diaphane de sa peau. Prise dans la tempête de la veille à la Nouvelle-Orléans et fatiguée par son voyage à l’étranger, la Ténébreuse n’avait trouvé la force de transplaner jusque son Manoir et avait donc été contrainte de louer une chambre moldue à la hâte dans le premier établissement acceptable venu, à mi-chemin seulement de chez elle. L’endroit lui était connu depuis l’enfance, calme et sans heurts et son implantation dans le monde sans magie la tiendrait hors de vue d’une très grande majorité de ses connaissances. Du moins, le pensait-elle… Au rez-de-chaussée, un café y avait ouvert ses portes voilà déjà cinq ans, attirant Pénombre hors de sa tanière, à peine couverte de sa cape de voyage. La pièce principale était vide et la propriétaire, une ancienne receleuse d’objets volés ayant eu affaire avec la famille Craft la salua poliment en lui servant un thé fort. D’un geste du menton, la vieille dame lui désigna un jeune homme dehors, comme si son instinct usé avait, une fois encore, su déceler la magie sans la voir.


Cette silhouette, mince et élancée, ne lui était pas inconnue mais sept années passées dans l’enceinte de Poudlard avaient considérablement allongé son trombinoscope personnel et la Ténébreuse mit un certain temps à poser un nom sur la présence qu’elle soutenait de la sienne. Se glissant silencieusement derrière lui, l’ancienne Capitaine de Quidditch déposa sa tasse de thé sur une table en amont avant de couler la longueur blafarde de ses deux mains sur son épaisse écharpe, de chaque côté de son cou en contrôlant fermement le sursaut de surprise du garçon. Elle perdit ensuite ses doigts froids dans sa chevelure claire en poussant doucement sa tête sur le côté, projetant rapidement sa curiosité par-dessus son épaule. La plénitude sanguine de ses lèvres se déposa finalement comme un flocon de neige sur sa joue avant qu’elle ne se détache de lui, le regard intense.


« Tu n’as pas changé, Silver. Toujours aussi séduisant. »


Elle capta gracieusement des doigts le métal arqué d’une chaise avant de l’attirer face au garçon, récupérant sa tasse de thé d’un geste souple tandis qu’un sourire étrange s’étirait sur ses lèvres :

« Hélas, le monde te dit aussi autiste et fou que dépressif, le savais-tu ? Mais j'ignorais que tu comptais également la lâcheté dans cette personnalité complètement perturbée, qu'est la tienne. »

Sa moue se fit désapprobatrice, son regard plus corrosif, virulent.

« Alors comme ça, tu es en vie et en bonne santé. Pourrait-on savoir de quel droit tu nous prives alors de ta présence à Poudlard ? »

Quelle mesquine petite entrée en matière, n'est-il pas ?
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MessageSujet: Re: [1er Janvier - Londres Moldu] English Coffee [Libre]   [1er Janvier - Londres Moldu] English Coffee [Libre] EmptyJeu 11 Fév - 1:41:40

Parfois, lorsque l’hiver est froid, l’oxygène semble congelé. Et, malgré les brûlures que l’air glacial laisse au travers de la gorge, l’on respire plus vite, plus fort, comme asphyxiés par la brume. Mais ce n’est pas tout ce qui change. Le corps devient sensible au moindre changement, le goût s’atrophie pour ne rester que chaud ou froid. Les yeux pleurent. Et les sons…voyagent, légers, heureux, destructeurs et inconscients.

Et là justement quelques sons parvinrent à ses oreilles. Voix de femmes, mots sans suite et sans sens, réalité dérangeante dans son besoin de folie. Il secoua la tête, se plongeant à nouveau dans l’onirisme. Tant qu’il rêvait, il était en sécurité. Rien ne pouvait lui arriver. La folie n’était que peu de chose comparée au fardeau de la réalité. Pourquoi faisait-il des efforts finalement ? Pourquoi s’obstiner à faire front et à combattre alors qu’il était bien plus agréable de se laisser aller, oublier la voix (encore, décidément) de la raison et la mort bien trop réelle de sa sœur ?

Perdu dans son rêve gris, Siriel ne revint sur terre qu’au moment où de lourdes mains se posèrent sur son épaule, brusques, présentes mais sans violence. Il y avait une présence derrière lui. Quelque chose d’électrique, se propageant en ondes de chaleur et de vent à travers le dossier de la chaise métallique. Le bras du garçon s’arrêta de bouger, le crayon de noircir la feuille. Il ne voulait pas faire de rature. Mais à part cet arrêt, pas un frisson n’échappa du corps pâle de l’adolescent. Il avait été surprit mais trop passif pour être nerveux, il ne réagissait que peu aux menaces extérieures. Aucun doloris ne pouvait lui infliger plus de douleur que ce qu’il ressentait quotidiennement, du réveil au coucher et parfois même durant la nuit lorsque son inconscient, trompeur, s’amuser à plagier le supplice de Tantale.

Les doigts de neige le lâchèrent ensuite pour se perdre dans ses cheveux. Elle était froide, la fille qui se trouvait derrière lui. Il ne parlait pas de sa peau, a température ambiante comme toute extrémité de mammifère mais de ses gestes. Contrôlés, soignés, envahissants. Froids comme un reptile, souple comme un félin, la sensation lui faisait plutôt l’effet gluant de certaines algues s’enroulant aux chevilles pour mieux vous noyer. Il ferma les yeux, pensant à l’eau se refermant sur eux comme un piège mouvant.

L’étreinte se précisa et la violence réapparu, flirtant délicatement avec l’extrême douceur de certains gestes. Le Poufsouffle sentit comme un ordre et détendit son cou, laissant l’inconnue lui tourner la tête sans offrir la moindre résistance. Il ouvrit les yeux mais ne remarqua que deux pétales carmin, trop sans doutes, qui n’étaient que les lèvres de la demoiselle. Il laissa cette rose lui frôler la joue sans montrer aucune réaction puis suivit des yeux le corps qui passait devant lui.

Il aurait du le deviner. Il n’y avait que la méduse pour mélanger avec autant de naturel séduction et destruction. Comme elle caressait le dossier de la chaise avant d’en chambouler l’existence, elle avait voulu s’imposer à lui avant de le blesser avec ses mots. Car s’il y avait quelqu’un à Poudlard qui était conscient du pouvoir destructeur de la parole et de l’écrit, c’était bien la rédactrice en chef de la Gazette. Enfin, elle était en septième année lorsqu’il entrait en quatrième. Elle était probablement allée l’oublier ailleurs. Siriel la regarda. L’écouta. Laissant passer les mots au travers de lui pour ne pas qu’ils le blessent.

« Tu n’as pas changé, Silver. Toujours aussi séduisant. »

Pas de réponses. Il n’y avait rien à répliquer. Il avait grandit, encore et ses cheveux étaient peut-être un peu moins en bataille maintenant que sa mère les lui coiffait régulièrement mais non. Il n’avait pas changé. Pour quoi faire ? Changer, c’était fatiguant.

« Hélas, le monde te dit aussi autiste et fou que dépressif, le savais-tu ? Mais j'ignorais que tu comptais également la lâcheté dans cette personnalité complètement perturbée, qu'est la tienne. »

Et bien maintenant elle le savait. On n’était probablement pas autiste sans être lâche. Siriel leva les yeux, attachant ses prunelles grises et toujours aussi dépourvues d’émotion sur la jeune femme. Il se fichait bien de ce que disait le monde ou de ce qu’elle pouvait bien penser de lui mais se demandait vaguement où elle voulait en venir. Si c’était juste pour l’insulter, qu’elle le dise tout de suite, il arrêterait d’écouter la laisserait dire. Mais si c’était plus compliqué alors il devait rester concentré pour ne pas rater la question comme ça lui arrivait souvent.

« Alors comme ça, tu es en vie et en bonne santé. Pourrait-on savoir de quel droit tu nous prives alors de ta présence à Poudlard ? »

Oh. C’était donc ça. La curiosité. L’ombre d’un sourire fit étinceler ses prunelles durant une fraction de seconde alors que le reste de son corps restait obstinément immobile.
« Je préfère les moldus. »

Ce n’était pas vrai. Moldu ou sorcier, pour lui, tout homme était aussi mauvais que son voisin mais c’était ce que la jeune fille s’attendait le moins à entendre de sa bouche. Il était en effet bien rare qu’il donne un avis sur quoique ce soit.

La main du garçon, comme mue d’une volonté propre, rangea son dessin et pris une autre feuille de papier sur laquelle elle se mit à dessiner la jeune femme. De son côté, le sourcil droit du garçon s’était levé comme pour interroger Pénombre. Lui demander ce qu’elle fichait là, dans la froideur du premier de l’an, seule, à la terrasse d’un café moldu. Lui demander comment elle savait qu’il n’était pas à Poudlard alors qu’elle aurait du normalement être passée à un autre niveau. Le monde adulte ou au moins celui des étudiants. Lui demander enfin, pourquoi elle semblait si énervée de ne pas l’avoir revu. Ce n’était pas comme s’ils étaient amis d’habitude…
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MessageSujet: Re: [1er Janvier - Londres Moldu] English Coffee [Libre]   [1er Janvier - Londres Moldu] English Coffee [Libre] EmptyJeu 4 Mar - 12:33:01

Siriel Silver. L’ange déchu d’un ailleurs perdu. Soupir divin égaré dans le purgatoire maudit de violence du monde des humains, enveloppe vide et sans âme que l’on avait cruellement abandonnée à la mortalité, condamnée à la flétrissure et à la déchéance sans nul espoir de rédemption, jamais. Il était beau comme l’innocence. Perdu, triste et abimé, son éclatante pureté auratrice lui dessinant les ombres graves des êtres destitués au visage. Mais tellement magnifique. Un jeune homme que le céleste avait effleuré de sa mansuétude, un jeune homme que l’on pouvait aimer au premier regard. Pénombre contempla l’œuvre exsangue de son visage un long moment, la gravure ravissante de ses traits qui mentait pourtant la présence d’une âme dans ses absences absolues d’expression et de vie. La Serpentarde demeurait perplexe et indécise quant à la valeur précise qu’elle pouvait décemment accorder aux uniques paroles du garçon, peu accoutumée à partager sa compagnie aussi austère qu’irrégulière dans sa constance brisée.

« La présence des moldus ? »


Incrédule, la Ténébreuse laissa l’esquisse d’un rictus amusé, moqueur presque cynique dévorer ses lèvres carmines tandis que se soulevait avec narquois, le tracé noir et précis de son sourcil. Son interlocuteur semblait déjà afficher la saillie mentale révélatrice de ces symptômes décadents et dangereux qui s’inscrivaient dans le cadre général d’une profonde altération du contact humain et de la relation avec autrui, avec la réalité. L’association insolite des rares mots prononcés par le brun paraissait en effet témoigner du grave affaiblissement de sa logique, du morcellement maladif de son esprit amputé de raisons et des impitoyables processus de destruction qui devaient certainement nécroser sa pensée vacillante.

« Mais l’école toute entière fourmille de cette satanée vermine répugnante, je ne vois guère l’intérêt d’aller chercher ailleurs ce qui te grouille déjà juste sous le nez. Surtout en sacrifiant un précieux accès à l’éducation et à la connaissance tel celui offert par une scolarité décente à Poudlard, quoique que péniblement perturbée par l’invasion des impurs, je te l’accorde sans conteste.

Si ce n’était les paroles d’un individu aussi abstrait que toi, je n’en croirais pas le moindre mot. »


Se mutina-t-elle avec ferveur. Et pour cause, l’incandescente curiosité de Pénombre Craft, son insatiable soif de compréhensions, de connaissances et de pouvoirs n’auraient pu la tenir trop longtemps éloigné d’un endroit comme Poudlard. La fierté et la gloire chancelante de son pur lignage, son ambition dévorante et ses tendances naturelles à la domination n’auraient supporté ce terrible outrage de gaspillage sans dégâts irréversibles de frustration et de folie. Et s’il était vrai que trois années auparavant, elle avait elle-même déserté la célèbre Citadelle pour se consacrer à l’ardue maitrise d’autres savoirs bien plus obscurs et meurtriers que ceux que l’on distillait au cours du cursus sorcier habituel, l’Anglaise s’y était toutefois réinscrite dans les dernières années de sa formation de base, après deux ans d’une absence souveraine qui confinait à la mort.

Il y avait donc probablement davantage de raisons et de causes à l’exil volontaire de Siriel qu’une simple petite préférence pour la compagnie soporifique d’inférieurs bestiaux tels que l’étaient à ses yeux, les sans magie. Sans omettre que le Poufsouffle possédait exactement ce genre de personnalités torturées et autarciques ne semblant guère accorder la moindre priorité à ce genre de considérations sottement humaines, superficielles et vaines. Quel genre de secret pouvait-il donc bien protéger par le labyrinthe tourmenté, supplicié de ses pensées insondables ? Quelle douleur braiseuse étouffait-il sous le silence du gris triste de ses iris impénétrables ? Que ne pouvait-elle le tirer de force de cet univers intérieur, confiné et malsain qui satisfaisait ses propres exigences, pour lui en arracher les réponses tant convoitées ? Que ne pouvait-elle s’insinuer dans le repli complexe de son esprit pour y sectionner impitoyablement les entraves invisibles qu’il s’imposait et le libérer enfin de ses lourdes chaines pathologiques une bonne fois pour toutes ?

« Jai grandi ici, tu sais. Lorsque j’étais encore enfant, j’échappais souvent aux griffes de la surveillance maternelle pour venir m’égarer dans les bas fonds de la ville. J’en connais chaque recoin, chaque pierre, chaque ombre comme si j’avais moi-même façonné ces dédales à ma volonté. »

Quittant ces questionnements personnels pour aborder d’autres sujets qui, l’espérait-elle, l’inciteraient à rompre partiellement son autisme légendaire, l’ancienne Capitaine de Quidditch laissa la limpidité froide de ses iris de jade se perdre un instant dans le vague de réminiscences lointaines.

« Et je connais également chacune des âmes noires qui l’y habitent. »


Une provocation, un aveu, un repentit ? Le ton employé par l’Anglaise ne savait trancher la désinvolture avec laquelle les mots furent lâchés et l’ambigüité confessée de la conversation s’orienta plus nettement.

« Le monde Sorcier n’a rien à envier à l’univers des sans magie lorsqu’il est question de racisme et de persécuter la différence. Mais du moins nous évite-t-il la barbarie et l’inhumanité des méthodes primitives et grossières de ces brutes sanguinaires. »


Inconsciemment, imperceptiblement, le corps félin de la Vipère sembla se tendre sous la soie liquoreuse de son vêtement, comme si l’évocation verbale d’un passé oublié, enfoui et renié rappelait à la chair, des souvenirs qu’elle ne savait oublier.

« Tu vois cette impasse là-bas derrière ? »

Interrogea la Serpentarde en se détournant d’un tiers d’angle vers l’arrière. La pâleur diaphane de sa main désigna la gorge étroite d’un rétrécissement insalubre, plus à l’ouest de leur position, obscur malgré la lumière éclatante de la matinée, irradiant à l’œil nu le danger et la menace.

« C’est là bas que j’ai acculé et torturé mon premier moldu. J’avais 9 ans et lui en avait 13. Mon père ne m’a jamais pardonné de l’avoir laissé en vie et il a dû le tuer lui-même. »

Etrange la façon avec laquelle, il lui fut aisé de formuler ce genre de confidences en présence d’un être au charisme aussi spectral, immatériel et inoffensif que celui de Siriel Silver. Elle gageait avec certitudes que même s’il parlait ou la dénonçait, rapportait en détails chacune de ses paroles, nulle raison n’accorderait spontanément sa faveur de confiance à un autiste de son espèce, trop instable et léthargique pour capter le monde d’une subjectivité sur laquelle l’on pouvait décemment s’ancrer et accuser.
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MessageSujet: Re: [1er Janvier - Londres Moldu] English Coffee [Libre]   [1er Janvier - Londres Moldu] English Coffee [Libre] EmptyVen 7 Mai - 23:13:49

Trait, ombre, vide. La main du Poufsouffle se déplaçait tranquillement tandis que son interlocutrice reprenait sa litanie enflammée. Curieux de voir comment, en dessin, la lumière était représentée par le vide tandis que les ombres créaient l'objet. Cela prouvait bien que la lumière était la force la plus malfaisante qui puisse exister. C'était pour ça que les hôpitaux étaient blanc. Pour avaler les âmes.

A demi plongé dans ses pensées habituelles, l'adolescent n'écoutait que d'une oreille les révélations de son aînée. Un mouvement et le sourcil parfait de la jeune femme fut figé sur la feuille, imprimant à jamais sa stupéfaction. Une retouche distraite pour ombrer l'espace en dessous et c'est tout un œil qui se profile tandis que les mots s'écrasent sur le bouclier de l'indifférence. Parce que bon. C'est pas qu'il s'en moquait de Poudlard mais si en fait. Protéger le reste de sa famille lui paraissait bien plus important. Quand aux vermines dont parlait la jeune fille, il en faisait partie et ne souhaitait pas spécialement que cela se sache. Il avait déjà réussi à se faire classer comme "né de moldu par forfait" en ne se rendant pas à la convocation alors il ne fallait pas pousser non plus. Surtout que le savoir et la connaissance ne l'intéressaient pas plus que ça. Il en faisait le minimum, préférant de loin la présence rassurante des roses et de la nature à toute la théorie du monde. Et la nature, il en avait ici aussi. Ah, tiens, elle avait changé de sujet. Tant mieux. Personne dans cette réalité ne connaissait ses raisons et il n'avait pas l'intention que cela change. Au diable la nourriture du diable. Au monde de la destruction, la dissimulation. Ainsi, en continuant à vivre, il préservait l'illusion qui lui était chère. Le souvenir de sa sœur. Once de bonté perdue dans un océan d'amertume. La méduse pouvait sillonner les eaux qu'elle voulait. Elle ne trouverait jamais la perle cachée par l'huitre. Hum. Il s'emmêlait dans les algues de ses propres métaphores. De quoi parlait-elle déjà ?

"…nir m’égarer dans les bas fonds de la ville. J’en connais chaque recoin, chaque pierre, cha.."

Le garçon leva les yeux et attacha son regard de pluie au prunelles de jade le temps de remettre les mots dans leur contexte et se rendre compte qu'ils n'étaient réellement pas intéressant. Il les écoutait cependant, sans juger, sans répondre, confident invisible qu'il devenait souvent lorsqu'il rencontrait une autre âme en peine. Il avait l'habitude. La seule chose qu'on lui demandait était d'être là et parfois ponctuer d'un "mm" distrait. Il pouvait le faire. Après tout, méduse ou pas, elle était. Réelle, présente et il ne la détruirait pas. Les méduses comme tous les autres avaient ce que l'on pourrait appeler le droit d'exister si l'expression même n'était pas un exemple de plus de la stupidité du langage des hommes. Il n'y avait pas de droit. Il y avait l'existence, la mort et la destruction. Point. Chercher plus était déjà commencer à détruire les choses. Enfin. Même lui avait besoin des mots pour exprimer ses pensées. C'était ce qu'il y avait de pire avec les mots. Un humain ne pouvait pas s'en passer. Il pouvait refuser de les utiliser face aux autres, mais en son fort intérieur, les mots étaient toujours là, minant, définissant, détruisant et construisant l'être. Finalement, un humain ce n'était qu'un mot. C'est-à-dire un rien. Pas étonnant alors qu'ils détruisent tant pour se sentir exister. Pour un peu, Siriel aurait pu les plaindre. Le peu n'étant pas là, l'adolescent s'en fichait.

« Tu vois cette impasse là-bas derrière ? »

Pénombre avait posé une question que le Poufsouffle n'avait pas entendue. Toutefois, la méduse étendant l'un de ses tentacule, le garçon laissa ses yeux errer dans la direction de la main, jusqu'à une ruelle glauque à souhait. L'odeur de misère et d'urine qui s'en échappait lui arrivait presque aux narines et il était certain que les pierres avaient connu leur part de douleur et de cauchemars.

« C’est là bas que j’ai acculé et torturé mon premier moldu. J’avais 9 ans et lui en avait 13. Mon père ne m’a jamais pardonné de l’avoir laissé en vie et il a dû le tuer lui-même. »

Le garçon laissa échapper un soupir. Et voila. Pauvres pierres. Victimes innocentes de la folie des hommes. Qu'un enfant se fasse torturer par une fillette, passait encore. La mort - il l'avait apprit de la plus douloureuse de façon - fauche qui elle veut, le plus ironiquement possible et il ne lui était pas difficile d'imaginer deux petits d'humains s'entretuer sans raison. Pas plus qu'il ne doutait de la véracité des dires de Pénombre. Elle était destruction. Ce n'était donc pas étonnant qu'elle l'exprime. Et qu'il s'agisse de métaphore, divagation ou réalité, ce n'était pas à lui d'en juger. Il était mur, pas psy. Elle pouvait dire ce qu'elle voulait avec lui. Il ne l'écoutait pas vraiment.


"Hmm"

Elle s'était tue, c'était donc qu'il fallait qu'il réagisse puis qu'il trouve un moyen de relancer le débat. Compliqué. Plusieurs choses l'intriguaient dans l'histoire. Que le ministère alors débarrassé du Seigneur Noir n'ai pas enquêté sur le meurtre d'un gamin. Qu'une enfant de 9 ans soit plus puissante qu'un gamin de 13 qui devait faire deux fois sa taille si l'on prenait en compte le sexe et la différence d'âge. Qu'elle lui raconte tout ça alors qu'elle ne savait rien de ses origines lui semblait presque normal face à ces deux énigmes. Il rajouta du carbone dans le dessin des iris. Les yeux de son modèle étaient peut-être clairs mais l'âme derrière semblait d'encre bleue. Comme des milliards de larmes qui se seraient accumulées, déshydratées, et n'auraient laissé que ce qu'elles voulaient jeter.

"Père ?"

Toute son attention était à présent portée sur le dessin qui avait fini d'être esquissé et commençait à prendre la forme finale. Sans arrêt, il retouchait les traits, assombrissait un vide, reprenait une courbe, pour que l'essence de la méduse soit prise dans les filets de la feuille. Chaque parole de la jeune femme lui donnait une clef supplémentaire pour tenter de comprendre celle qui lui faisait face. Et chaque parcelle de compréhension était un point en plus, une profondeur supplémentaire dans le dessin. Car on ne peut représenter ce que l'on ne comprend pas. Tout au plus peut-on le copier mais un dessin sans âme, aussi beau soit-il, n'est rien d'autre qu'une photo. Pour le dessinateur qu'il était en train d'être, l'oreille, le fantôme, savoir qui était le père de son modèle était bien plus intéressant que tous les petits moldus assassinés du monde.
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