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 Deryn Cadell [Legilimens] [Validée]
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MessageSujet: Deryn Cadell [Legilimens] [Validée]   Deryn Cadell [Legilimens] [Validée] EmptyMar 7 Juil - 17:56:18

Prénom et Nom: Deryn Cadell
Age de votre personnage : 20 ans
Maison/Formation/ Profession : Medicomage veut se spécialiser en Psychomagie
Que don voulez vous acquérir ? Legilimens
Motivation : Contrairement au monde moldu, l’étude de l’esprit et plus précisément dans un but thérapeutique est encore peu développée de nos jours ce qui est à mon sens une faute grave. Beaucoup trop de patients sans espoirs attendent une mort trop précoce dans les étages de Ste Mangouste. Des patients que les moldus auraient pu soigner. Alors imaginez tout ce que l’on pourrait faire avec l’appui de la magie en plus !
La Légilimencie est une matière éducative par elle-même. Sa propre étude nous permet de nous familiariser avec l’esprit humain, de voir nos propres limites. Elle est pleine de dangers certes et profondément enracinée dans la magie noire mais il y a des gens dont les souffrances sont telles qu’elle devient la seule solution. Je me propose donc d’apprendre cette matière pour plusieurs raisons.

1./ Travailler et approfondir ma connaissance de moi-même, connaître mes limites, apprendre à contrôler mon esprit, à en faire une arme autant qu’un outil afin de pouvoir me surpasser dans ma propre évolution psychique.

2./ Apprendre, connaître et enseigner l’esprit humain dans le cadre de recherches en Psychomagie pour ouvrir, à terme, cette spécialité au sein du monde sorcier. Comparer et étudier les différentes méthodes moldues, combiner hypnose et légilimencie et – qui sait – soigner certains héros tombés, victimes d’une magie aussi noire que les racines de ce pouvoir (HJ : elle pense aux Londubats principalement). La Légilimencie permettrait donc un recueil de données et d’informations plus sures et plus correctes puisque les patients ne peuvent pas toujours parler.

3./ Soigner – bien évidemment – les patients les plus traumatisés en comparant le discours latent et les souvenirs réels. Passer au-delà du barrage des mots, jusque dans l’inconscient du patient pour pouvoir utiliser les informations glanées au cours de la thérapie.

Ainsi, la magie noire pourra servir à guérir, à soigner et à faire évoluer le peuple sorcier, ce qui est, en soi, une victoire contre le Seigneur des Ténèbres et tous ceux qui pensent que l’obscurité sert à blesser ou à faire souffrir.


Topics en parlant : J'ai créé Deryn dans l'optique d'en faire une légilimens. Tous les topics avec elle parlent de l'étude de l'esprit et de l'être humain même si le mot "legilimencie" est rarement pensé directement et encore moins prononcés. Depuis que j'ai commencé le rituel j'en ai parlé un peu plus clairement ici, ici, ou encore ici



Nombres de mots : 10429


Dernière édition par Deryn Cadell le Mar 18 Aoû - 6:07:37, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: Deryn Cadell [Legilimens] [Validée]   Deryn Cadell [Legilimens] [Validée] EmptyDim 12 Juil - 0:28:39

Chapitre 1
La Forteresse


    Le vent claquait sur le caillou tant espéré d’Ulysse. Telle Pénélope, Deryn gardait les yeux fixés sur la mer bleue, tellement plus colorée que les eaux grises de son pays natal. Le froid et les embruns se mêlant à la brise ne semblaient pas la gêner. Pas plus que le rapide ballet des mouettes au loin et le passage de barques de pêche sortant avec la marée. Elle était perdue dans un monde où le mouvement des hommes et des animaux ne voulait plus rien dire. Quelque part dans un repli caché de ses pensées. Une expression mélancolique sur le visage et un peu de nostalgie dans les profondeurs brunes de ses iris.

    Pourtant, la jeune fille n’avait pas le mal du pays, au contraire. Ici, sur cette île, elle avait trouvé la paix qu’elle cherchait. Le lieu parfait pour se livrer à de sombres expériences sous le soleil blanc de Grèce. Une main paisible se leva doucement, remettant une mèche de longs cheveux de feu derrière une oreille fermée au vacarme des vagues. Les pages du grimoire continuèrent à défiler jusqu’à ce que la toute première, claquante comme ses voisines ne révèle le nom de l’ouvrage et attire l’attention de sa propriétaire. La transe était rompue et Deryn n’avait toujours pas réussi à faire ce qu’on lui demandait. Trouver la forteresse de son esprit. Facile à dire.

    L’océan, toujours en mouvement, attira l’attention de l’apprentie Legilimens tandis qu’elle réfléchissait. Llewelyn ap Goffraidh, son mentor, avait été adamantin. Il était inutile de se lancer en Légilimencie sans avoir ne serait-ce que des bases de son pire ennemi, l’Occlumencie. A moins bien évidement de souhaiter devenir fou mais pour cela, il y avait d’autres méthodes avait-il continué sans se rendre compte de la gêne que sa boutade éveillait chez son apprentie.

    Les pensées floues de l’ancienne Serdaigle s’éloignèrent rapidement de ce souvenir déplaisant et plus encore de ce vieux gallois retraité qu’elle avait rencontré à Athènes pour revenir sur le chemin parcouru pour en arriver là. Elle avait passé ses ASPICs quelques mois plus tôt, bien décidée à prendre le temps nécessaire pour trouver sa vocation. Elle avait eu envie d’un bol d’air frais, loin de sa famille et de ses amis dont elle était pourtant très proche. Besoin de quitter le nid pour se trouver elle-même en quelque sorte. De France en Allemagne puis en descendant dans les pays limitrophes. L’Italie ne lui avait pas plu du tout aussi s’était-elle tournée vers la patrie de la culture, de la mythologie et des dieux sorciers. La Grèce. Elle l’avait trouvé, cet îlot de paix. Et elle avait trouvé qui elle voulait vraiment devenir. Seuls lui manquaient la force et le savoir. Le second pouvait s’acquérir avec le temps. Pour le premier, elle avait encore des doutes. Si la partie la plus blanche de l’apprentissage se révélait trop compliquée, comment, elle qui n’avait jamais été douée en magie noire, pourrait-elle atteindre ses objectifs ? Elle avait pourtant la motivation qu’il fallait et une intelligence qui pouvait être suffisante. Elle en était sûre, Llelo l’avait testée avant d’accepter de lui transmettre son savoir et avait tout de même accepté de « perdre son temps » pour une compatriote bornée. Il lui avait alors donné un livre sur l’Occlumencie et deux semaines pour en assimiler les bases.

    Les deux semaines se terminaient le lendemain et la jeune fille n’avait encore aucune idée de comment modeler son esprit et en faire un château. Elle avait beau imaginer Poudlard dans tous les sens, rien n’y faisait.

    Lentement, l’idée se fit dans son esprit qu’elle s’y prenait mal. D’une main fébrile, elle arracha le grimoire au vent, lui enlevant sans le moindre remord son jouet préféré. Pour se venger, Eole décida de s’en prendre à ses cheveux jusqu’à ce que, impitoyable, la jeune fille se les attache en un chignon serré. Il alla donc folâtrer avec les mouettes, plantant là sa tortionnaire penchée sur les pages de son livre.

    Ce n’est que quelques heures plus tard qu’elle releva la tête, un étrange sourire aux lèvres. Ses pensées tourbillonnaient derrière son visage pourtant impassible. Elle n’avait pas encore trouvé son havre personnel mais ses recherches avaient fait un bond de géant lorsqu’elle avait compris que la « Forteresse » n’était qu’une image, une métaphore destinée à concrétiser un processus totalement abstrait. Elle comprenait maintenant la marche à suivre et si elle avait également une logique concrète, elle n’était pas forcément la même. Elle devait trouver sa propre sécurité. Se plongeant dans le bruit des vagues, à la fois cyclique et permanent, elle ferma à nouveau les yeux et se laissa emporter.

    Sa première image fut celle de Livious. Remuant, bruyant mais pourtant si rassurant dans sa folie. Petit Pierrot n’était pas encore devenu grand mais avait déjà le noir témoignage de sa maturité affiché sur l’œil. Les origines de ce tatouage étaient encore mal connues mais depuis, elle ne pouvait voir une étoile sans penser à son ami. Derrière son masque de sérénité, elle sourit en l’imaginant faire les quatre cents coups à l’université. Oui, c’était juste, Livie faisait partie de son quotidien rassurant et elle avait besoin de lui pour se sentir chez elle. Mais ce n’était pas encore ça. Elle aimait trop l’imbécile pour pouvoir s’abriter derrière lui. Il fallait trouver autre chose.

    Par association d’idée, il y eut son frère puis leur maison au Pays. L’odeur des fleurs du jardin que leur mère cultivait elle-même envahit ses esprits, se mêlant à celle iodée de l’onde autour d’elle. Le parlé rustre de son pays aux cris disgracieux des goélands et même la lumière perçant à travers ses paupières sembla tout d’un coup plus grise. Derrière les parfums de désert se mêlaient celle de la terre mouillée et un petit cottage au toit de paille se dressa comme un mur entre le monde et elle. Plusieurs minutes passèrent dans ce monde onirique où se mêlaient souvenirs et fantasmes. La voix de sa sœur, la plume préférée de son père, les bons petits plats de maman, toutes ces choses qu’elle gardait au fond de son cœur sans jamais en parler rejaillirent soudain. Elle se sentit en sécurité, réconfortée par l’impression familière. Persuadée de tenir le bon bout, elle se concentra plus encore, laissa le noir envahir le soleil et l’orage éclater dans son cerveau. Elle attaqua l’image de toutes ses peurs, laissa la foule piétiner les roses, la grêle creuser la pierre, persuadée que « la maison » ne pouvait que résister. Il y eut une vague. Et puis une autre. Et l’écume de la méditerranée qui lui lécha les pieds dans sa course pour attraper la lune. La maison chancela, vacilla sur ses bases puis s’écroula sur le joli paysage laissant une Deryn blême ouvrir les yeux sur un coucher de soleil.

    La beauté du paysage lui rappela celui de sa maison détruite et elle détourna le regard, le cœur serré. Ses mains tremblaient sous la puissance de sa propre imagination et, comme une enfant après un cauchemar particulièrement effrayant, elle remonta ses genoux contre sa poitrine et se roula en boule sur la pierre en attendant que son esprit se calme.
    L’air, jusqu’ici brûlant se rafraîchit peu à peu tandis que les ténèbres tombaient sur l’île. Lassé de ses mouettes, Eole avait réussi, à force de cajolerie et aidé par la gravité, à détacher quelques mèches rousses dont il se servait à présent pour fouetter le visage de la jeune femme.

    Immuable, le temps passa et le crépuscule laissa la place aux étoiles. Au fur et à mesure, Deryn réussit à se détendre et, la fatigue aidant, repartit dans une transe plus ou moins consciente. D’innombrables images passèrent derrière ses paupières closes. Certaines trop rapides pour être seulement attrapées, d’autres en souvenirs plus ou moins gais. Petit à petit, Deryn comprit que, pour elle, le seul moyen d’être protégée était d’être insaisissable. Sa première intuition (Livious) semblait donc être un bonne piste mais comment, elle qui aimait tant la stabilité et l’ordre, pouvait-elle invoquer quelque chose de rassurant et d’agité en même temps ? Elle ouvrit les yeux sur l’onde maintenant d’encre qui se perdait dans le ciel. Elle avait beau réfléchir, elle ne voyait pas ce que cela pouvait bien être. Jusqu’à ce que la solution lui saute aux yeux.

    Elle était venue sur ce bout de rocher pour être en sécurité. Et chaque fois que l’apprentissage devenait difficile, c’était là quelle retrouvait la sérénité. L’océan – pas celui qu’elle avait sous les yeux mais le sauvage qu’elle connaissait si bien, avec ses marées, ses vagues puissantes et sa grisaille, reflet du ciel et des pierres affleurant sous l’herbe tendre. La grêle, l’orage, la foule, personne ne pouvait vaincre les eaux. La preuve, le déluge seul avait réussit à assainir la terre. Ou du moins c’était ce que l’on enseignait chez les moldus. Dans la nuit, la galloise sourit, heureuse d’avoir réussit l’exercice fixé dans le temps impartit mais consciente que la suite serait, ô combien, plus difficile encore.


Dernière édition par Deryn Cadell le Mer 5 Aoû - 1:17:53, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Deryn Cadell [Legilimens] [Validée]   Deryn Cadell [Legilimens] [Validée] EmptyLun 13 Juil - 17:02:52

Chapitre 2
Llewelyn ap Goffraidh


    Un ancien sentier à chèvres. C’était la seule façon de se rendre jusqu’à l’ancien monastère qui servait de refuge au vieux gallois. Il fallait de la patience, du courage et un bon litre d’eau pour affronter la terrible ascension. Pour le retraité, c’était également une façon de mériter sa présence et ses conseils. L’âge l’avait rendu bien conscient de sa propre valeur tout en écartant les hésitations et la fausse modestie de la jeunesse. Il ne se prenait pas pour n’importe qui et si cela ne plaisait pas au visiteur, celui-ci était invité à rentrer chez lui. Certes, il était souvent livré à la seule compagnie de son étable mais cela ne le dérangeait pas outre mesure. Les moldus du coin étaient plutôt du genre à le considérer comme une excentricité locale (un peu comme le rocher en forme d’escargot géant qu’il « vénéraient » quelques kilomètres au sud) et les sorciers, victimes d’une société où l’on tient pour impoli de s’intéresser à son prochain, ignoraient pour la plupart son existence.

    Il n’y avait que deux personnes pour s’intéresser à lui ces temps-ci. Un braconnier corse émigré qui avait probablement descendu plus d’un mouchard dans le maquis avant que sa tête ne devienne trop célèbre pour son propre confort et une compatriote rousse qui avait su jouer de son charme et de la langue exquise de son pays natal pour obtenir des cours. Elle n’était pas très douée, et, chauvinisme mis à part, clairement mauvaise. Mais elle travaillait dur et le surprenait de temps en temps et c’était plus que suffisant pour rompre la monotonie de ces derniers jours. Enfin, il était temps qu’il arrête de se servir de prétextes idiots pour profiter de sa présence. Il lui avait donc donné un objectif réel mais avec une deadline ridicule pour qu’elle comprenne l’inutilité de ses efforts.

    Alors pourquoi entendait-il chanter sur le long sentier ? Il reconnaissait bien la voix ainsi que le pas léger de sa visiteuse mais il s’était attendu à la voir triste, piteuse voire résignée. Ou triste. Voire même à ce qu’elle ne vienne pas du tout. Mais pas à entendre chanter l’hymne du Pays avec une telle ferveur. Oh, puisse la vieille langue perdurer.

    « Tu vas arrêter de faire peur à mes chèvres oui ! »

    Il s’était dressé, bougon et toisait la jeune fille de toute la froideur de ses yeux verts. Ce genre de mimique marchait bien au début. Il la voyait pâlir, souvent faire un pas en arrière comme face à un géant et bégayer des incohérences. Malheureusement l’oiseau avait oublié d’être écervelée et avait finit par comprendre que cette agressivité n’était que façade d’un vieil homme. Ce n’était plus qu’une question de semaine avant qu’elle ne lui fasse la bise. Non, il arrêterait ses leçons avant d’en arriver là. Hors de question de se faire manipuler par une péronnelle rousse. Il avait sa fierté tout de même.

    Deryn lui sourit, rayonnante et lui offrit un paquet d’olives fraîches qu’il s’empressa de servir avec un peu de fromage du matin. Le rituel du partage était accomplit, et le cour commença. La jeune fille lui fit état de ses réflexions et de ses difficultés tandis que Lelo, oubliant son rôle d’ermite, distribuait généreusement conseils et reproches. Tout en discutant, il ne quittait pas son élève des yeux, cherchant dans son esprit des failles, des mensonges et des inexactitudes. Un légilimens aussi doué que lui n’avait en effet pas besoin de sort pour repérer la vérité du mensonge. Il y avait des signes qui ne trompaient pas et s’il n’en était pas (encore) arrivé au niveau du Directeur de Poudlard, il savait quand même se débrouiller pour éviter les problèmes. La galloise ne lui mentait pas mais elle cachait définitivement quelque chose.

    Le récit prit fin et Llewelyn une olive. Le regard brun de son élève semblait l’interroger. Elle aussi s’était rendue compte de quelque chose. Elle était moins bête qu’elle n’aimait à le faire croire, ça c’était sûr. Grommelant dans sa barbe quelque chose à propos du caractère vicieux des jeunes sujets et plus particulièrement ceux de la nouvelle génération, il se leva et alla d’un pas assuré prendre sa baguette. Il se retourna alors avec une vivacité étonnante et lança un Legilimens sonore sur la jeune fille.

    Une multitude de souvenirs se présentèrent alors d’eux-même. Il sentit sa peur et sa surprise, la douleur de l’examen et sa volonté de s’en sortir, calme au milieu de la tempête, radeau perdu mais solide au milieu de l’océan. Il rompit le sort et regarda sévèrement sa disciple, lui intimant sèchement de faire plus d’effort que cela. Deryn baissa la tête, ferma les yeux et déglutit. Lorsqu’elle les releva, elle avait la légère ombre au fond des yeux qu’avait tout occlumens débutant lorsqu’il fermait son esprit. Une fois encore, il lança le sort, indifférent à la souffrance qu’il provoquait (après tout elle l’avait demandé)

    Il effleura l’océan qui servait de barrière mentale et en sentit toute la faiblesse. Deryn ne saurait jamais fermer son esprit, c’était certain, mais elle arrivait à garder le contrôle de ses sentiments, de ses sensations et de ses pensées même sous l’emprise d’un ennemi. Le radeau tenait bon et c’était de là qu’elle pourrait frapper. Il n’était pas question de recouvrir l’océan de glace pour le moment. Cela irait.

    Il transforma son esprit en un fil d’Ariane. Un fil d’acier coupant, solide mais suffisamment flexible pour pénétrer dans tous les recoins de l’esprit de sa proie. C’était son arme personnelle. Comme pour la forteresse, ils avaient chacun la leur et, s’il ne se l’avouait pas, Llelo était curieux de voir ce que serait celui de sa compatriote. Comme en réponse à cette pensée, une idée fit son apparition pour disparaître aussitôt sous le contrôle sévère de sa propriétaire. Aha. C’était donc là qu’elle se cachait. Le fil se transforma en lasso pour attraper l’idée et la tirer au grand jour. L’idée résistait, le fil se tendait de plus en plus. Plus fin, plus loin… tendu jusqu’à se rompre. Ce qu’il fit lorsque, sous le coup de la surprise, le légilimens perdit le contrôle.

    Elle partait. D’ici un mois à peine, rentrant par la longue route jusqu’à leur île natale. Elle l’allait l’abandonner, lui, à sa solitude après l’avoir ennuyé pendant de nombreuses semaines. Voila ce qu’elle voulait lui cacher. Il n’aurait jamais l’occasion de former ce jeune esprit. Il fronça les sourcils face aux émotions diverses que cette nouvelle faisait naître en lui. Qu’elle parte. Bon débarras. Et il pourrait retourner à ses méditations bien aimées. Il n’avait besoin de personne au monde et d’ailleurs un peu de tranquillité serait bienvenue.

    Cela ne l’empêcha pas de réprimander vertement la jeune fille pour ses cachotteries et surtout sa présomption. On ne cachait rien à son Maître. Cela faisait partie du Pacte Ténébreux. Il reprit également le grimoire d’occlumencie, maintenant obsolète et lui jeta l’autre à la figure avant de lui ordonner de lui foutre la paix jusqu’au lendemain.

    La mer était calme et caressait les rochers en bas de la falaise, indifférente aux états d’âme de ceux qui la regardaient. Elle faisait la belle sous le soleil de fin d’été, coupant l’ocre de la terre de son bleu éclatant. Loin au dessus des flots, le monastère peint de chaux blanche se dressait contre elle. Si haut qu’elle pouvait s’élever, elle ne le toucherait jamais. Mais elle avait laissé son empreinte, farouche et sauvage, dans le bleu des volets de bois et les traces de sel porté par le vent. Un peu comme l’odeur de propre et l’ordre des lieux portaient l’empreinte de la jeune fille. Il n’y aurait plus personne pour lui apporter des olives et ranger sa maison. Plus personne pour quêter son savoir, plein d’admiration et d’espoir. Il devait faire avec. La rejeter complètement ou continuer à l’aider et garder avec elle un contact aléatoire. Pourquoi pas finalement. Le monde n’était pas forcément si mauvais qu’elle le disait et y avoir une ancre n’était pas forcément un mal.

    Aussi, lorsque vint le moment des adieux, il lui avait préparé une lettre de recommandation pour un ancien élève, malheureusement pas gallois mais qui était assez sûr pour la timide jeune fille. Le parchemin de plusieurs dizaines de centimètres de long détaillait les progrès, les forces et les faiblesses de son élève avec un style clinique qui ressemblait bien peu aux divagations mesquines habituelles. Comme quoi, ils avaient chacun leur masque. Il lui confia également un grimoire de légilimencie cette fois, soucieux d’avoir tout de même son mot à dire dans la suite de son éducation et un certain nombre de jurons bien sentis et de fausse joie à l’idée d’être tranquille. Et la mer, cruelle, enleva la rouquine à l’ermite qui pu de nouveau savourer la solitude, le silence et la douce mélancolie qui faisait le fond de son caractère. Une nouvelle pierre était posée en haut du sentier à chèvre. Dessus était écrit « Gwlad heb iaeth, gwald heb galon »*.


*Un pays sans langue est un pays sans cœur


Dernière édition par Deryn Cadell le Mer 5 Aoû - 1:18:52, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: Deryn Cadell [Legilimens] [Validée]   Deryn Cadell [Legilimens] [Validée] EmptyMer 15 Juil - 3:19:30

Chapitre 3
Somewhere over the rainbow


    Les gouttes ruisselaient derrière un rayon de soleil. Pas d’arc en ciel cependant, Londres n’était pas assez riche pour se payer un peu de rêve. Tout ici était gris et terne, si triste après un semestre passé au pays des contrastes. Les pierres semblaient plus poreuses que la normale et l’eau… l’eau était partout. Moche, sale, collante. L’eau de la peur. L’eau de Niallàn. Rien à voir avec les beautés sauvages et arides de la Grèce. Le retour à la maison était brutal. La séparation avec Odysseus plus douloureuse que prévue et l’Angleterre bien trop étrange pour qu’elle s’y sente vraiment à l’aise.

    Depuis sa chambre de l’UMA, Deryn rêvassait plus qu’elle ne travaillait. L’été était passé à une vitesse alarmante et dans le tourbillon de la rentrée, elle n’avait pas eu le temps de se poser. Elle avait des impressions de Dorothée et rêvait du Kansas, de brique jaune et de courage en bouteille. Mais tout cela n’allait pas lui rendre Ulysse, Llewelyn et son caillou au milieu de la méditerranée. Mélancoliquement, elle laissa la marée emporter ses pensées et se força à entrer en transe, vivant selon le bruit des vagues amères propulsées à chaque battement de cœur. Noyée la nostalgie, morts les regrets. Elle avait choisit sa voie, elle s’y tiendrait, et le manque de temps n’était qu’une excuse de fainéants pour ne pas travailler. Si elle avait le loisir de se plaindre, elle pouvait bien étudier.

    Sa main partit d’elle-même prendre l’épais ouvrage que lui avait confié le vieil ermite. Ce faisant elle fit tomber la lettre de recommandation qu’elle n’avait pas pris la peine d’envoyer. Elle le ferait plus tard, quand elle aurait le temps, si elle y pensait. Le grimoire sentait la colle, le cuir et l’encre rance. La poussière et la sécurité. On pouvait presque entendre le craquement du feu dans le bruissement des pages. La main de la jeune femme caressa doucement le parchemin jauni, aussi tendre que s’il s’était s’agit d’un amant. Ses yeux bruns se mirent à briller comme autant d’étoiles et un étrange sourire s’épanoui sur son visage. Elle n’avait pas encore lu le premier mot mais elle aimait ce livre de toute son âme. Il était l’incarnation du savoir. Avec le poids des ans, la douleur de la fatigue, l’aigreur des obstacles et le goût doucereux de la connaissance.

    La nuit passa sans vraiment se faire remarquer tandis que les bougies fondues étaient remplacées d’une main machinale. La première page était passée depuis longtemps et la tasse de thé froide mais rien de tout cela ne décourageait la jeune fille. La sonnerie agressive du réveil la fit à peine lever la tête. Elle était trop plongée dans ses pensées pour que le monde réel puisse réellement l’en sortir. Et on était mercredi. Pas cours.

    Plusieurs semaines passèrent ainsi. Pendant plus d’un mois, l’ancienne Serdaigle était devenue pour ainsi dire invisible. Elle allait en cours, participait, faisait ses devoirs, rangeait sa chambre et se préparait le nombre de repas prescrits mais tout son temps libre était pris par le passionnant ouvrage. Elle l’avait terminé et recommencé plusieurs fois, imprimant chaque mot dans sa tête. Comme s’il s’agissait d’un roman. Elle avait ses passages préférés, ceux qui faisaient peur et qu’elle s’obligeait à relire, tremblante, les citations qu’elle connaissait par cœur et s’empêchaient de répéter en cours. Certains pourraient penser qu’elle se servait de ce prétexte pour ne pas s’investir dans la vie de l’université et éviter les rencontres. Ils avaient tort. Deryn n’avait pas besoin de prétextes pour éviter les gens. Surtout ceux de l’UMA qu’elle avait retrouvés encore plus idiots et immatures que dans ses souvenirs les plus sombres.

    Son Occlumencie avait également continué à se renforcer doucement, au fil des transes et c’est pendant les vacances de Samain qu’elle se décida enfin à franchir le pas. Elle avait prévenu le clan Cadell et Livious de ses projets et s’était enfermée dans sa chambre, bien décidée à en sortir armée, dans le sens presque pas propre du terme. Elle se doutait toutefois que cette étape ne serait pas des plus faciles à franchir. Faisant taire ses doutes, elle ferma les yeux et laissa la mer maintenant familière la protéger des intrusions. Seulement au lieu d’attaquer ses propres défenses de souvenirs, elle s’enfonça plus encore dans l’océan, plongeant ses yeux dans les dessins de l’écume. Des dizaines d’illusions apparurent pour se faire aussitôt par le courant. Images, esquisses de pensées mais pas encore ce qu’elle cherchait. Il lui fallait une arme. Mais surtout pas influencer la transe par ses desideratas.

    Il arrivait parfois à la rouquine de se réveiller sans savoir quel était le jour, l’heure ou même le mois. Les transes prenaient beaucoup de sa force, l’obligeant a s’affronter elle-même sans relâche, poussant son endurance toujours plus loin. Chaque échec était douloureux, la rapprochant du point de rupture et pourtant, elle n’avait pas commencé l’attaque de son propre esprit. Elle en était encore à se chercher.

    Vers le milieu de la semaine, elle s’arrêta. Peut-être était-ce cela le soucis. Peut-être était-elle tout simplement trop jeune, pas assez mature pour trouver son arme. Après tout, à dix-neuf ans on était à peine sortit de l’adolescence. Comment pouvait-on espérer se connaître ? Oui, peut-être avait-elle simplement besoin de temps…ou d’un mentor. Mais elle se refusait à contacter Logan Farewell sur un échec. Llelo l’avait prévenu que le quinquagénaire était plus doux mais plus exigeant que lui et qu’il demanderait la volonté la plus absolue. Pas d’erreurs donc. Elle y arriverait.

    Elle résolu toutefois de faire une pause dans ses transes avant de devenir complètement folle et/ou de se surmener totalement. Aussi, histoire de faire une pause, se lança-t-elle dans un devoir de sortilèges. Elle reprit ses livres, retrouvant avec un plaisir non feint la terre ferme de ses études. Merlin ce que tout cela paraissait facile par rapport à ces histoires idiotes de transformation métaphorique ! Elle n’était pas une visuelle et surtout ne comptait que rarement sur son imagination pour progresser. Elle suivait les instructions, c’était bien moins dangereux. Et les rares transformations qu’elle faisait étaient toujours longuement réfléchies.

    Avec un léger sourire, elle prit sa plume pour commencer à écrire. Son nom d’abord, en haut à droite, puis sa formation et son année en dessous… il faudrait qu’elle pense à la retailler, elle n’était pas assez pointue et faisait des pâtés. Une plume. Qui pouvait crever un œil au besoin. Avec une extrémité de métal, aiguisée comme un bistouri, légère comme… ben une plume justement, volant à travers les méandres labyrinthique des esprits. Mais cela pourrait-il combattre les vagues ? L’eau l’alourdirait forcément. Dommage…elle était si sure d’avoir trouvé. Avec le pouvoir des mots derrière, comme autant de munitions. Mais non. Il fallait donc oublier l’idée et reprendre le travail. Retourner de l’autre côté de l’arc en ciel, affronter les armées de singe volant, se perdre dans des chansons plus ou moins intellectuelles pour retrouver l’image et se l’approprier. La solution était sûrement dans la question. Elle devait l’être.

    Les pages du livre étaient presque usées à force d’avoir servit. Le regard toujours plus pénétrant de l’apprentie scrutait le moindre indice, cherchait dans la forme des lettres LE truc manquant. Le doute, comme la grisaille d’Angleterre ne la quittait pas, distillant son poison dans ses veines. De plus, maintenant qu’elle avait eu l’idée, la plume revenait sans cesse dans ses transes, polluant ses recherches. Elle avait parfois vraiment envie d’envoyer de tout envoyer balader mais la curiosité la ramenait toujours à ouvrir le satané grimoire.

    Finalement, les cours reprirent sur un nouvel échec et c’est un demi cadavre, blanc et cerné qui sortit de la chambre pour reprendre le chemin des amphis. Elle avait l’esprit visiblement ailleurs et si peu de gens s’en aperçurent (après tout elle ne connaissait alors personne), ses notes baissèrent sensiblement. Elle n’arrivait à rien, sa concentration équivalait celle d’un membre du BDE un jour de gage (c’était dire) et sa mémoire ressemblait plus à un gruyère qu’à l’étagère bien rangée qu’elle était d’habitude. C’est d’ailleurs ce fait précis qui l’obligea à se reprendre. Sortir la tête de l’eau (au sens presque propre) et replonger dans la réalité. La foule. Les gens. Les cours. Les devoirs. La vie. Et un hibou envoyé à un certain Mr Walsh lui demandant quelle sorte d’ustensile pouvait à la fois être assez souple pour se faufiler partout, assez puissant pour écarter les obstacles et adaptable pour survivre à l’eau, au feu, ou à la terre.

    Puisque chercher seul était trop dur, elle allait mettre sa fierté de côté. Après tout, elle voulait ce pouvoir pour aider les gens. Pas pour prouver quoique ce soit à qui que ce soit. Et si Logan la trouvait trop faible, elle se débrouillerait. Il y avait bien un Gallois sur ce continent qui connaissait l’art de faire des métaphores pas trop pourries.


Dernière édition par Deryn Cadell le Mar 18 Aoû - 5:31:09, édité 3 fois
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MessageSujet: Re: Deryn Cadell [Legilimens] [Validée]   Deryn Cadell [Legilimens] [Validée] EmptyMer 5 Aoû - 0:30:12

Chapitre 4
Dans les nuages


    Il n'y avait pas eu de transes ces derniers mois. Pas de lecture, pas d'exercices, pas de travail, rien. Et cela faisait comme un trou dans la routine bien huilée de l'étudiante. Ce n'était pas tant qu'elle ne savait pas comment occuper son temps libre (il y avait toujours un devoir à faire, un livre à lire, ou, mieux encore, une lettre à écrire à sa sœur) mais plutôt que ce temps ne semblait pas vraiment libre.

    Plusieurs fois, Deryn voulu en parler à Logan mais n'en eut pas le courage. A chaque fois qu'elle se lançait, ouvrant la bouche sur l'une des tirades soigneusement préparées, les mots restaient coincées dans sa gorge et l'impression d'être percée à jour, presque mise à nue devant le Maître la faisaient battre en retraite dans l'océan de son esprit. Elle ne comptait plus les essais qu'elle avait faits durant l'année, ni les armes qu'elle avait essayées. L'idée de la plume la taraudait, zébrant d'incertitude les lances les plus solides, les arcs les plus souples et même les lasers les plus coupants. Chaque essai était balayé par un vent fort venu d'elle ne savait où, soulevant les vagues et retournant presque son esprit contre elle. Maintes et maintes fois elle cru devenir folle au point de se noyer dans son propre esprit. Parfois même, seul le regard de son mentor la ramenait dans la réalité. Il savait panser ses plaies, trouver les mots pour colmater son esprit affaiblit jusqu'à ce que la raison reprenne ses droits.

    Les vacances d'hiver arrivèrent et le désoeuvrement se fit presque insupportable. Rien de ce que faisait Deryn ne lui paraissait acceptable. Elle se sentait tourner en rond, en esprit autant qu’en actes. Certes, elle continuait à étudier ses cours, faire ses devoirs avec sa rigueur habituelle et peu de choses transparaissaient derrière son masque habituel mais une légère irritation et une susceptibilité pas forcément si discrète que ça montraient bien son état d’esprit. Londres était plus laid que jamais. Elle avait besoin de changement.

    C’est ainsi que, sans raison apparente et pour la première fois depuis son retour de Grèce, Deryn rentra chez elle. La douceur de sa mère, l’intelligence vive de son père, la maison au milieu des fleurs et surtout la présence de sa sœur lui firent un bien fou. Elle se rendit compte de la place qu’avait prit cette discipline dans son esprit. Elle était devenue obsédée par la légilimencie, au point d’en oublier le plus essentiel. Aucune matière ne valait la peine que l’on déprime pour elle. Et le premier devoir d’un médecin, qu’il soit magique ou non, était de rester en assez bonne santé pour continuer à servir les patients. Elle avait bien faillit tomber dans un des pièges de la légilimencie. Se perdre en elle-même.

    Au début, Deryn ne parla pas de ce qui la tracassait. Les autres le sentaient bien pourtant. Niallàn surtout, qui lui offrait le réconfort de sa présence sans dire un seul mot. Petit à petit, comme elle se détendait et oubliait un peu la discipline qu’elle s’imposait depuis plusieurs mois, la jeune fille s’ouvrit à sa sœur jusqu’à lui raconter tout. Comment l’idée lui était venue, ses difficultés mais aussi ce qu’elle avait découvert sur elle. Elle lui parla un peu d’Ulysse, beaucoup de Logan et de l’ermite aux chèvres. Elles philosophèrent ensemble sur tout et n’importe quoi, comme toujours, se retrouvèrent en somme. Cadfael les avait rapidement rejointes et les trois enfants, fidèles à eux-mêmes, passaient le plus clair de leur temps tous les trois sous le regard attendrit du couple parental.

    Noël et le nouvel an passèrent. Il fallu rentrer. A l'UMA, les autres étudiants s'interpellaient en cette période de fête, parlant des cadeaux qu'ils avaient reçus, des kilos qu'ils allaient devoir perdre, de la tante Margaret et de ses quatre chiens. Harry Potter n'avait pas le monopole de la famille insupportable et tous avaient parmi les leurs une ou deux personnalités décalées. Curieusement, la foule joyeuse de ses condisciples lui paraissait plus supportable que d'habitude. Elle se sentait moins oppressée qu'avant par leurs manières désordonnées, prête à partager avec eux autre chose que du travail. Son frère la laissa d'ailleurs bien vite pour retrouver ses amis et elle partit à la recherche d'un visage familier.

    Quelques jours plus tard, les cours reprirent. La jeune fille était bien reposée de ses vacances, plus solide aussi mais Logan continuait à la maintenir au repos. Il ne lui donnait pas de raison, ne lui interdisait même plus franchement d'essayer mais continuait à lui parler par métaphore de banalité tout juste bonnes à un mauvais livre de gare moldu. Des trucs sur la forme de son cœur et comment son esprit devrait devenir fort au fil des jours si elle acceptait d'affronter ses peurs et que le courage était aussi de pouvoir demander de l'aide au besoin. Bla bla bla. La rouquine n'était pas courageuse (ou du moins ne se considérait pas comme telle), elle avait un cœur d'une forme tout à fait conventionnelle et elle n'aimait pas les gens. Il était donc hors de question qu'elle perde son temps à leur demander une aide qu'ils lui feraient payer au centuple.

    Le temps était au froid. Février s'annonçait pluvieux et un mélange de neige fondue et solide avait englué la capitale depuis le lever hypothétique du soleil. Malgré la fatigue et la déprime ambiante, Deryn souriait. L'absence impromptue du Professeur Vawdrey (probablement retenu à l'hôpital par l'une des nombreuses "épidémies" qui frappaient chaque hiver) lui laissait un après-midi de libre, et elle avait finalement décidé d'utiliser ce temps pour reprendre ses études. Elle avait suffisamment traîné.

    Dans sa petite chambre d'étudiante, elle prépara des bougies parfumées, un réveil matin moldu pour ne pas se perdre totalement en elle-même, commanda un dîner consistant pour le soir et relut les passages clefs du grimoire. Entrer en transe fut aussi facile que de compter jusqu'à dix. L'ombre la saisit, le sol tangua et elle se retrouva sur le radeau de son esprit, luttant tout de même un peu pour garder son équilibre; La houle tranquille la berçait et la nuit étoilée autour d'elle donnait des reflets phosphorescents à l'écume des vagues. Ici, le danger lui-même était rassurant et la peur familière calmait ses angoisses. Dans le silence absolu de son esprit, derrière les pensées qui se fracassaient comme autant de vagues sur ses barrières, elle entendit soudain comme une voix. La chanson d'Ariel, la sirène.

    Une vague plus haute que les autres, un souvenir sans doute, apparut soudain et la submergea en douceur. La voix d'Ulysse surpassa alors celle de la sirène. Il lui racontait comment les mythe se modifiaient, comment, de la femme-oiseau de la mythologie, ces étranges créatures avaient rejoint les abîmes pour devenir poissons, toujours aussi dangereuses mais plus humaines. La fascination pour ce peuple étrange avait surpassé la peur. La jeune fille sourit. Elle se souvenait comment elle avait faillit lui révéler ses origines ce jour-là, de l'envie qu'elle avait eu de lui apprendre que les deux formes existaient sous d'autres noms. Que les femmes oiseaux au charme irrésistibles et à la colère sans pareille se nommaient vélanes, tandis que le chant des sirènes restait cacophonique pour qui l'écoutait à l'air libre. Mais elle n'en avait pas eu le courage. Elle s'était contentée de plaisanter sur son propre nom. Deryn. La femme-oiseau.

    Une mouette cria au dessus d'elle, première projection vivante de son esprit, elle mise à part et plongea, bec en avant pour percer les vagues. Il n'y avait pourtant pas de proies dans la mer de ses pensées, pas de poissons ni même de détritus. Et pourtant, l'oiseau perçait l'onde à la recherche d'un détail, d'un reflet, d'une chimère à attraper. C'est alors que la lumière se fit. Le soleil se leva à l'horizon, perçant les ténèbres, faisant pâlir les étoiles et éclairant petit à petit le lieu imaginaire. Elle était un oiseau, elle pouvait donc prendre cette forme. Si ce n'était pas vraiment une arme, certains volatiles (les rapaces en particulier) étaient dangereux. Leurs yeux pouvaient repérer une proie à des mètres à la ronde tandis qu'ils tournaient paresseusement dans les cieux et lorsqu'ils se laissaient tomber, toutes serres devant, les plus rapides des proies avaient peu de chance d'y réchapper. Ils étaient une arme. Naturelle c'est tout. Et elle était un aigle pêcheur. Capable de combattre la tempête, de traverser les flots, de virer en forêt ou de survoler le labyrinthe. L'arme parfaite, l'arme ultime, son arme.

    Il fallu attendre une semaine avant de revoir Logan. Sept jours durant lesquels la jeune femme se força à ne pas penser à son succès. Sept jours de doutes aussi parce que les meilleures idées paraissent toujours stupides à la lumière du temps. Mais une fois ce temps presque biblique écoulé, elle retrouva son mentor et, plus fière que contrite, lui avoua ce qu'elle avait fait. Ses pensées, ses doutes, tout. De toute façon, elle avait - comme toujours - la curieuse impression qu'il le savait déjà.

    Deryn s'attendait à une remarque, voire une réprimande pour son impatience comme le Professeur Wyrd lui faisaient parfois mais Logan se contenta de sourire. Pis même, de la féliciter. La légilimencie, disait-il, était quelque chose de personnel. Un mentor était plus prudent pour éviter les erreurs mais c'était une matière dangereuse qui méritait que l'on prenne des risques pour elle. Il fallait savoir se mettre tout entier dans la balance si l'on voulait avancer. C'était ce qu'elle avait fait et elle en avait été récompensée. Elle n'avait plus besoin de lui à présent. Seul le rituel et beaucoup d'entraînement pourrait l'aider à devenir une légilimens accomplie. Elle avait réussi.
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MessageSujet: Re: Deryn Cadell [Legilimens] [Validée]   Deryn Cadell [Legilimens] [Validée] EmptyMar 18 Aoû - 5:27:23

Chapitre 5
L'ère du Verseau


    Bon. Et maintenant ? Parce que réussir c'était bien beau mais cela ne faisait pas tout. Certes, elle avait pu transformer son esprit mais il restait encore une épreuve (plus d'une même mais il n'était pas temps de penser à la suite). Celle que le guide désignait comme la plus dangereuse de toute, s'attaquer soi-même. Pour ce faire, Logan lui avait aménagé une petite pièce remplie de coussins, de bougies et d'aromathérapie pour le repos de l'âme. Elle lui sourit pour le remercier, toujours intimidée par sa présence pourtant discrète puis s'assit. Les yeux fermés.

    Les fumées odorantes l'entouraient, lui faisant perdre le sens de l'orientation. Elle se sentait vaguement comme une hippie en plein San Fransisco, enfin ce que l'on racontait sur eux. Qu'elle ne faisait qu'un avec la terre, le cosmos, l'herbe, le vent, la mer, tout ça. En y repensant, elle soupçonnait fortement son mentor de ne pas avoir mit que de l'encens à brûler pour la détendre. Le principal étant que cela avait fonctionné. Une voix interne, presque inaudible finit par lui rappeler pourquoi elle était là. Elle ouvrit les yeux, tout sentiment de nervosité évanoui et plongea sans grande difficulté dans son océan personnel.

    La mer était d'huile, pas le plus petit courant d'air pour scarifier la surface. Le clapotis de l'eau faisait à peine bouger le radeau, dont le mouvement de va et vient ne semblait provenir de nulle part. Elle se concentra davantage encore, aidée par le bruit de vent et les cris de mouette que l'anglais avait mis en font sonore. L'aigle apparu, planant paresseusement au dessus des eaux dormantes. Un moment passa ainsi, sans qu'elle ose troubler la tranquillité du lieu. Avant même de commencer son introspection, sa raison se refusait à l'épreuve. Pourquoi s'attaquer soi-même alors que l'on est si bien quand tout autour est harmonieux ? Lorsque les étoiles, le cosmos et même l'ère du Verseau tendaient vers l'amour universel ?

    C'est alors que les souvenirs revinrent. Son père absent de la maison lorsqu'elle était enfant, sa mère, inquiète mais ne voulant pas le montrer se tordant les mains dans la cuisine. La nervosité à chaque fois que l'on frappait à la porte, les mensonges qu'il fallait faire aux autres, pas dire qu'on connaissait des trucs moldus ou que papa n'avait pas de baguettes… certes, elle n'avait que trois ou quatre ans à l'époque mais cette terreur l'avait gelée au plus profond de son âme. Ainsi que la joie lors de la victoire du Survivant (1 an à peine !) et l'incrédulité lorsque l'on s'aperçu qu'il ne revenait pas. Qu'il ne reviendrait plus. Et bien, il était de retour. Le bal du ministère en était la preuve mais cette fois les Cadells ne se laisseraient pas abattre. Ils allaient combattre eux aussi. A leur manière. Et, tout en priant pour un nouveau miracle, ils défendraient leur père.

    L'aigle cria en elle tandis que remontaient toutes ses pensées importunes et les vagues grossirent petit à petit. Deryn prit alors quelques profondes inspirations pour retrouver son calme. Elle n'apprenait pas la légilimencie pour combattre celui qui était probablement le plus grand sorcier des temps modernes (a égalité avec le Professeur Dumbledore) mais dans l'optique d'une victoire. Pour soigner tous ceux dont la raison avait renoncé. Ces Londubats, ces Lockharts, ces Quirells. Dupes ou résistants, que la suprématie du Seigneur des Ténèbres avaient rendus fous. L'aigle plongea soudain, le bec en avant, les ailes serrées contre son corps, image vivante de la torpille. L'onde se tendit, presque pour le recevoir, puis céda en une multitude d'éclaboussures. Quelque part dans la réalité, une voix de femme hurla.

    Image. Son frère sur une bicyclette rouge, elle sur un tricycle bleu, le soleil, la maison.
    Image. Sa sœur hurlant devant un cousin qui l'éclaboussait.
    Image. Première rencontre avec Livious, le train, onze ans, le début d'une aventure.
    Image. Des sorts partant dans tous les sens dans un château remplis d'ombre. L'attaque de Poudlard.
    Image. Elle, Odysseus, leurs enfants et la douce Grèce à leurs pieds. Nostalgie, rêve, presque un souvenir tant il était familier.
    Image. Sa première calculatrice à pile.
    Image. Niallaàn, tout bébé, dans les bras de Cad. Le jardin devant la maison transformé en rose blanches pour la nouvelle arrivante.

    Le diaporama continua un moment à lui montrer souvenirs, rêves et vœux dans un désordre inquiétant. Les uns se fondaient dans les autres sans raison, la lumière cotoyait les ténèbres mais plus que tout, c'étaient les émotions qui habitaient ces tableaux qui l'envahissaient et refusaient de la laisser en paix. Joie, fierté, bonheur, tendresse, colère, peur, haine, protection, amour, détresse, angoisse, tout remontait en même temps, la laissant totalement vide, meurtrie, sans sa précieuse logique pour la soutenir. Elle ne savait pas si elle pourrait tenir longtemps à ce rythme.

    Son. Rire de maman un soir de Noël
    Son. Pleurs d'un petit dans la salle commune.
    Son. Brouhaha d'une cérémonie de répartitions. Blagues, chants, applaudissement et huées. Les discours, les couverts, et derrière tout ça, le choixpeau et la voix de McGonagall, imperturbable.
    Son. Cad, avant de muer, qui lui expliquait la règle de trois. La voix de la maitresse d'école, les rappelant à l'ordre, en gallois. On n'avait pas le droit d'aller trop vite dans le programme, ce n'était pas correct.
    Son. Sa voix à elle, expliquant la même chose à sa petite sœur qui la corrigeait déjà. Même maîtresse, silencieuse cette fois, presque blasée et Cad dont la respiration faisait leur univers.

    Les sens étaient séparés. Comme les oreilles sont aveugles et le nez n'entend pas. Les mains voient par contre parfois, elles peuvent sentir les vibrations. Le toucher était la seule chose d'absent dans ce pot-pourri infâme. Quoiqu'il était difficile de dire s'il n'y avait pas du tout de toucher, ou si ce dernier ne se faufilait pas dans les quatre autres sens.

    Le goût et l'odeur du Bara-brith. Ceux des fleurs et des essences du magasin. Celui, aigre du clochard en bas de chez Logan. Fade de celle de Rogue. Délicieuse du banquet de Poudlard.

    Le hurlement lointain finit par mourir. Pas que l'horreur était passée mais on avait fini par s'y habituer. Et la voix, elle, ne suivait plus. Des diapositives, de la radio ou des sens, on était passé à de l'abstrait pur. Derrière ses yeux fermés, la jeune fille goûtait aux nombres complexes, sentait les odeurs étranges des sorts, touchait les potions du bout des doigts. Lettres et nombres se baladaient dans un esprit qui n'était plus régit par aucune règle. Beaucoup de choses oubliées remontaient, surtout de sa petite enfance et de l'époque sombre où l'on croyait encore au possible retour du Mage Noir. Le temps s'étirait en vagues multicolores rappelant le drapeau gay. Habillés en sous-marins jaunes, un six et un neuf se baladaient bras dessus dessous en chantant l'hymne des bisounours. On était le 39 Mai, un lit géant servait de portes à une citrouille. Tout allait bien. On pouvait rester ici, caché des traumatismes et des cauchemars jusqu'à la fin des temps. Dehors c'était gris. Violent, sale et laid. Même les plus proches s'éloignaient un jour. Niallàn aurait cas trouver le chemin elle aussi après tout. Cad allait bien finir pas se marier et les quitter. Elle les perdrait tous les deux. Non, elle préfèrait de loin rester là. Loin de ses souvenirs, perdue dans sa propre tête, la seule vraie amie qu'elle avait au monde. Protégée de la violence par la folie.

    Les couleurs devinrent plus ternes, prenant des airs de vieilles photos et de noir et blanc tandis que l'idée faisait son chemin dans son cerveau meurtri. Une once de raison avait détruit le bel équilibre et maintenant, elle avait mal au crâne. Elle se recroquevilla, sentit son corps, ses muscles puis son équilibre qui vacillait. Elle resta un moment comme ça, sur le flanc, repliée en position fœtale et inconsciente du gémissement continu qui sortait de sa bouche. Elle resta comme ça longtemps. Jusqu'à ce que respirer ne devienne plus qu'insupportable.

    Deryn ouvrit les yeux dans une semi-obscurité bienfaisante. Une sorte de thé chaud embaumait dans une tasse à coté d'elle. Jamais elle n'avait eu aussi soif. Elle la vida d'un trait et sentit aussitôt une chaleur bienfaisante détruire les incendies qui lui brûlaient le crâne, l'estomac, les muscles, et tout son corps des orteils à la racine des cheveux. Une forte fatigue s'abattit alors sur elle.

    Deryn ouvrit les yeux dans une obscurité complète. Elle était allongée dans un lit aux draps blancs et frais, une impression de sécurité l'environnant toute entière. Avec gratitude, elle remercia mentalement Logan et s'endormit à nouveau.

    Deryn ouvrit les yeux, il faisait grand jour. Le soleil frappait la vitre comme s'il lui en voulait. Le saluant d'un sourire, elle se leva, s'habilla, remercia son médicomage personnel et rentra chez elle. Deux jours après, les cours recommençaient et la rouquine était de retour sur les bancs de l'Université. Etudier, oui, mais pas au détriment du cursus habituel !
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MessageSujet: Re: Deryn Cadell [Legilimens] [Validée]   Deryn Cadell [Legilimens] [Validée] EmptyMar 18 Aoû - 5:54:06

Chapitre 6
Devoirs


    Après cela, tout fut plus facile. Il fallu d'abord s'entraîner sur des animaux. Ceux-ci n'étaient pas très durs à trouver dans le monde sorcier, surtout lorsqu'on avait l'habitude de vivre à la campagne et Deryn se fit un joie de soigner de petits mammifères en échange d'un voyage dans leurs esprits. Beaucoup n'en réchappaient pas. Certains succombaient à leurs blessures, pour d'autre c'étaient les soins qui causaient le plus de dégâts, la moitié d'entre eux devenaient fous et seuls les plus solides en réchappaient. La dure loi de la nature n'émouvait pas l'apprentie médicomage plus que ça. Elle aimait les bestioles, pouvait passer des heures dans une animalerie à bêtifier devant un rongeur, jouer avec un chaton ou caresser un chiot. Même les animaux réputés comme has been ou dégoûtant lui plaisaient. Et pourtant, elle n'oubliait jamais cette vérité première de la campagne. Mieux vaut eux que nous. Qu'importaient la mort d'un chien ou d'un hibou si cela pouvait sauver un proche ? Qui hésiterait une seule seconde entre la vie d'un être aimé et celui d'un animal, aimé également mais tellement moins important au fond ? Que celui qui se dise oui se repose réellement la question, la survie de l'espèce et de l'individu sont parmi les instincts les plus féroces que la nature ait donnés.

    Et puis, soyons franc, la jeune rouquine adorait ça. L'esprit simple du lapin qui ne vit que de peur et d'inquiétude, cherchant même en dormant la moindre odeur de danger. L'intelligence du rat qui se méfie mais apprend pour triompher du monde par l'intelligence brillant dans ses petits yeux bruns. Et la suprême indifférence du chat qui n'est qu'apparence mais si profonde qu'elle en devient réelle.

    Et le chiot. Images d'herbe tendre, odeurs à tout va, pensées joyeuses et enjouées, du Livious tout craché. Elle l'imaginait sans peine se rouler dans le gazon tout juste tondu pour filer ensuite comme le vent attraper un oiseau dont on sait très bien qu'il se sera envolé juste avant. Aboyer contre le destin, pisser sur le besoin de propriété et voir, sentir, entendre le monde comme aucun humain ne le pourra jamais. Oui, le chien était vraiment son préféré.

    Une fois les mammifères acquis, ce fut Logan qui la rappela à ses devoirs, l'obligeant à délaisser Fido (adorable Setter Irlandais de deux ans) pour reprendre ses travaux. L'été approchait à grands pas et il voulait être sûr de bien avancer avant les examens.

    Le singe était un chimpanzé de la pire espèce. Absolument pas dressé, incapable de rester immobile plus de quelques secondes, l'animal rendit la vie dure à Deryn pendant un bon mois. Ses pensées du reste étaient absolument abjectes, perverses et sans aucun intérêt. Son mentor essaya bien de la taquiner en lui disant que l'esprit humain était ainsi mais elle se refusait à le croire. Fred (c'était le nom de l'animal) était simplement de la mauvaise graine et puis c'était tout.

    Histoire de bien se prouver que l'humanité n'était pas le premier pas vers la décadence, la jeune femme se décida pour un autre test. Après tout, on disait souvent que ce qui différenciait le plus l'homme de l'animal était la parole. Et bien il se trouvait qu'un animal à papote elle en avait un sous la main. Une espèce de sale bête nommée Haddock qu'elle gardait à demeure. Par respect envers les lecteurs, nous ne dirons pas ce qu'elle y vit. D'ailleurs, elle s'empressa également de l'oublier au plus vite. Finalement, lire dans l'esprit d'un Charretier n'était pas vraiment l'idée du siècle.

    Lire dans l'esprit de Logan, ne fut plus qu'une question de temps et d'exercice. Le legilimens avait un esprit correct, bien rangé et assez de technique pour ne lui faire voir que ce qu'il voulait (la rouquine le soupçonnait fortement d'occlumencie à haut niveau - ce qui, pour un professeur dans cette matière, était plutôt logique). Il était moins étrange que le crapaud, plus calme que le chien mais aussi séducteur, plus propre que le singe, plus familier enfin. La seule vraie difficulté étant de trier les informations qui lui parvenaient. Car même dans un esprit rangé, les pensées vont et viennent sans se soucier de celui qui les lit, mêlant souvenirs, rêves, sens, bref, un véritable écheveau qu'elle n'apprendrait à démêler qu'avec le temps.

    Il ne lui restait plus qu'une seule épreuve, du moins le croyait-elle.
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MessageSujet: Re: Deryn Cadell [Legilimens] [Validée]   Deryn Cadell [Legilimens] [Validée] EmptyMar 18 Aoû - 5:54:33

Chapitre 7
Greg


    Il s'appelait Greg. La cinquantaine, le cheveu rare et clair disparaissant sous son crâne et deux terribles yeux bleus qui ne laissaient rien échapper derrière d'étranges lunettes en croissant de lune. Il boitait fort de la jambe droite, arborait un tablier genre bleu de travail sur ses vêtements de ville, parlait vite, mangeait ses mots et possédait un rythme digne des meilleurs conteurs des temps passés. Du reste, c'était là qu'il vivait, dans le pays des songes, depuis qu'un mangemort lui avait rendu visite vingt ans auparavant.

    C'était Logan qui le lui avait présenté. Une nouvelle étape, un défi, sa première excursion dans un esprit humain qui n'était pas celui bien rangé de son professeur. Il l'avait alors laissé conter son histoire avec ses mots simples, emplis de couleurs, de sons et de bruits qui recréaient par on ne savait quelle magie les évènements du passé. C'était plutôt simple pourtant.

    C'était un anglais, né dans un comté quelconque d'une province sans intérêt, fils de sorciers sans prétention. Il avait fait ses études chez lui, n'allant à Poudlard que le temps de passer ses BUSEs et son permis de transplanage puis avait intégré la bijouterie magique de son père en tant qu'apprenti. Les rumeurs de la guerre ne l'avaient même pas effleuré. Il restait dans son atelier, enchantant, fondant, moulant et travaillant dans les gaz et la chaleur.

    Son seul tort avait été d'aimer l'art moldu. Pour un homme comme lui, une pierre était une pierre, unique et belle, avec sa forme intrinsèque à trouver, polir, et rendre. Ils avaient une âme les minéraux. Ils avaient des désirs, des rêves, des affinités et le but du joaillier n'était pas de créer, non, c'était de rendre. Un tel rêveur n'avait évidemment pas pu croire que ses œuvres pouvaient être politiques, un homme masqué de fer c'était chargé de le lui rappeler.

    On sait tous que les serviteurs du Seigneur des Ténèbres ne brillent pas par leur modération. En voulant redonner au tout jeune père de famille le sens des priorités, l'homme en noir l'en priva à tout jamais. La douleur le renvoya en enfance, ce paradis des vieillards où apparaît parfois la véritable innocence. Il perdit en un soir, la raison, sa jambe et ses pierres. Les journaux jugèrent qu'il avait eu de la chance et n'ébruitèrent pas l'incident, Ste Mangouste le jugea doux dingue et le renvoya chez lui. Il y vivait. Mal. Entre sa femme et son fils, sans se rendre compte du temps qui passait.

    On avait informé la famille de ce qui allait se passer, elle n'avait pas dit non mais n'avait pas cherché à rencontrer la jeune fille. Deryn, de son côté, n'avait fait aucun effort pour aller leur parler et cette absence de relation leur plaisait. Greg était assit, droit sur sa chaise, ses mains vides polissant quelque objet imaginaire pour l'encastrer dans un anneau de vent. On lui parla mais il n'entendit pas, probablement que le souffle des flammes de son esprit lui brouillaient l'ouïe.

    La jeune fille le regarda un moment sans bouger, il émanait de cet homme comme une aura qui la forçait à le respecter et elle ne pouvait se résoudre à l'attaquer. Logan la bouscula un peu, lui mettant sa baguette en main et rajoutant une phrase d'un ton bourru. Elle ne l'entendit pas, emmenée malgré elle dans le monde de Greg mais comprit la consigne. Doucement, comme lorsqu'on se refuse à oublier, elle ferma les yeux, retrouvant sans peine l'océan maintenant familier et le radeau autour. Un aigle tournait paresseusement au dessus de sa tête, surveillant l'onde et ses pièges, profitant des moindres courants. Elle inspira profondément recula un peu puis, comme on franchit le seuil d'une maison inconnue, se lança.


    La douleur lui fit ouvrir les yeux, brûlant ses artères. Un feu mur de flamme se leva devant elle au point qu'elle sentait presque roussir la pointe de ses cheveux. La chaleur l'empêchait de respirer, elle haletait et une main invisible lui tordait le cœur, emplissant ses veines d'un acide noir. Elle recula. Un pas, deux pas. Puis les mains de Logan sur ses épaules comme un baume apaisant firent reculer le noir tout en l'empêchant de s'enfuir davantage. Un mur d'eau répondit au feu et tout fut recouvert d'une épaisse fumée blanche. Greg toussa, le feu diminua, se recroquevillant tandis que la marée fondait sur lui avant de disparaître dans une explosion de sel. La vague se retira, ne laissant derrière elle qu'une forme cristalline, abstraite et transparente. Du combat était née une étoile.

    La main de la jeune fille tremblait et elle avait du mal à maintenir le contact visuel. Il lui semblait que son corps ne voulait plus d'elle, comme si son âme avait été aspirée dans celle du joaillier. L'aigle regarda autour de lui et ne vit plus rien. Désolation brûlée, terre stérile où rien ne pousse. Pas de souvenirs, pas de pensées, un nouveau barrage. Agressif par sa passivité. Mais cette fois, la jeune galloise s'était reprise, elle savait comment faire.

    Petit à petit, son propre océan grossit. Des gouttes d'écumes tombèrent ici et là, mouillant le sable, aussitôt effacées. Cela paru durer des heures. Peut-être même était-ce le cas, la temporalité n'est pas bienvenue chez les esprits. Des rigoles se creusèrent dans le sable, l'eau s'installa, le sel se déposant sur ses rives. Le vent se leva alors, remplissant les rigoles de poussière pour mieux les combler mais la jeune fille persévéra et, petit à petit, réussit à passer totalement. Elle arriva jusqu'à un canyon, hésita et sauta dans le vide.

    La chute fut celle d'Alice qui voyait les choses les plus incongrues remonter tandis qu'elle descendait. Des bruits, des odeurs, des couleurs, exactement comme les paroles du conteur l'entourèrent pour l'accompagner dans son voyage. Un petit déjeuner d'enfant, une émeraude cerclée d'azur, une petite sœur déjà grande, un père encore jeune, un bébé garçon, un petit garçon, un jeune homme talentueux et des dizaines d'animaux, serpents, araignées, noirceurs de l'âme. Toute la vie réelle et rêvée de l'homme se déroulait en désordre devant ses yeux, mêlant réalité et onirisme en une cacophonie d'images et de sons. Deryn aurait bien aimé s'arrêter pour en réparer un, redonner des couleurs à un deuxième ou effacer une blessure mais la chute ne lui en laissait pas le temps. L'aigle avait beau battre des ailes, l'aspiration était trop forte et la chute risquait d'être fatale. Il n'y avait déjà plus que du noir, du rouge et du jaune. Le gris s'approchait par-dessous, toujours plus vite, distillant de la peur dans le cœur de la jeune fille. Logan lui avait toujours dit de ne jamais se laisser toucher le fond. Lorsque deux âmes se heurtent, il n'y a que deux issues possibles. Elles peuvent se briser ou se mêler. Dans les deux cas, l'individu n'y survit pas.

    Elle allait s'écraser. Elle devait s'écraser. Rien ne pouvait entraver sa chute elle le savait et une part d'elle acceptait de se perdre dans cet esprit tranquille lorsqu'une montgolfière d'argent attrapa l'aigle dans son panier pour l'emporter vers la terre. L'esprit ne se défendait plus contre l'intru, il l'acceptait. Dans la communion des deux âmes, il y avait eu compréhension. Une part de Greg voulait guérir. Ou tout du moins ne voulait pas détruire sa guérisseuse.

    Les berges de la faille avaient changées, revêtant à présent mille couleurs plus chatoyantes les unes que les autres. Quittant son abri de métal, l'aigle survola les plaines, cherchant les erreurs, les problèmes et les cicatrices. L'esprit du bijoutier était fait de pierre mais ces gemmes représentaient un paysage d'outre Atlantique, pays où l'homme n'était jamais allé. Le canyon était probablement la visite du mangemort car il était fait d'obsidienne, une pierre noire et tranchante aux résonances guerrières. D'autres blessures se profilaient çà et là. Une colère qui ne s'était jamais exprimée, des paroles dures échappées d'un ami fatigué, les échecs qui parsèment une vie aussi, et son amour du beau toujours perdu. Derrière une colline, on pouvait voir comme une statue de l'île de Pâques affreusement mutilée et, derrière cette statue, un passage étroit, comme un terrier de renard. Ennuyé par cette porte terrestre, l'aigle tourna autour et cria. Il avait tellement combattu, il avait tant supporté d'épreuves que l'idée d'échouer alors qu'il venait d'être accepté lui était insupportable.

    Elle cria. Dans le salon du Legilimens, cette exclamation de désespoir, de rage et de révolte raisonna contre les murs et les meubles bons marché. Le bruit atteignit alors ses propres oreilles et ramena l'apprentie sorcière sur terre. Greg n'avait pas bougé.
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MessageSujet: Re: Deryn Cadell [Legilimens] [Validée]   Deryn Cadell [Legilimens] [Validée] EmptyMar 18 Aoû - 5:54:59

Chapitre 8
Farewell


    Il y eut plusieurs séances bien sûr, Logan n'étant pas du genre à laisser sa disciple rester sur un échec. Et entre chaque essai, il y avait les discussions, les exercices et les transes. Puis vint l'été et ses catastrophes. Entre Livious et Lacey blessé, James devenu fou, Dumbledore disparu et le danger qu'avait couru sa sœur, la jeune fille se renferma sur elle-même. L'étude de l'esprit s'effaça devant la nécessitée. Il n'était plus temps d'apprendre mais de soigner et surtout de guérir. Dans son état d'esprit, elle savait de toute façon que le Maître ne le laisserait pas s'aventurer aux frontières de la folie. Et puis elle avait déjà bien assez à faire avec elle-même.

    Ce n'est qu'aux environs du mois d'Octobre que la galloise trouva la force d'écrire à l'anglais. Il ne la reçu pas mal, au contraire, s'inquiétant avec beaucoup de douceurs de ce qu'il lui était arrivé et comment elle se portait. De temps à autre, elle sentait son professeur s'assurer de la véracité de ses dires d'un petit coup de sonde discret. Mais elle n'y prêtait pas attention, habituée à mentir en parole même lorsqu'il la perçait à jour. Peu à peu, la conversation glissa vers Greg. Le visage de Logan se fit alors plus dur, plus lisse, et ce fut au tour de Deryn d'essayer - sans succès est-il utile de le préciser - de sonder son ami. Rien ne transparaissait cependant que trois mots. Il est mort.

    Des larmes se mirent à couler sur les joues de la rouquine. Elle qui n'avait jamais perdu de proches se sentait meurtrie par la disparition de cet inconnu. Les souvenirs qu'il avait, ses pensées si poétiques, sa douce folie et même son parlé qui pourtant lui faisait peur au début, tout cela lui était devenu cher. Et, comme toujours dans ces cas là, elle se reprocha son absence et son égoïsme. Elle avait besoin de penser qu'elle aurait pu changer quelque chose, même si une part d'elle-même savait que ce n'était pas le cas. Son chagrin changea alors d'objet pour se concentrer sur ses proches (pourtant toujours vivants, même l'étoilé) avant de s'ouvrir à nouveau sur l'humanité entière.

    Elle n'avait pu soigner le bijoutier. C'était un travail trop grand pour elle. Mais elle avait maintenant une idée de ce qu'il lui restait à accomplir. L'œuvre qu'elle s'était fixée ne la dépasserait pas toujours. Ses larmes s'étaient calmées, elle était plus tranquille maintenant, plus apaisé. Sans un mot, Logan lui apporta une tasse de thé et reprit sa leçon, distrayant l'esprit meurtri de sa disciple par l'étude. Il n'avait plus grand-chose à lui enseigner, elle apprendrait le reste toute seule. La Légilimencie étant la science de la pensée, elle restait très différente pour chacun et il n'y avait guère besoin d'un guide une fois que l'on avait trouvé le chemin. La folie de Greg était son dernier test. Un esprit plus fort encore qu'un occlumens puisque rien de logique ni d'artificiel ne s'y trouvait. Et si elle n'avait pas réussi à pénétrer les réelles pensées de l'ensorceleur de pierre, elle s'était faite accepter par son inconscient comme corps accepte une greffe. Avec réticence et reconnaissance.

    L'homme lui donna également un double de ses clefs pour venir s'entraîner dans le vieux meublé. Il était ensorcelé pour que l'on n'y détecte pas le genre de magie utilisé et restait discret, à l'écart du monde moldu et sorcier. Il ajouta qu'il n'y vivait pas vraiment mais y travaillait tous les jours et qu'il serait heureux de la voir de temps à autres pour avoir de ses nouvelles. Deryn acquiesça. Elle aimait bien son mentor et, au fil des mois, c'était une vraie amitié qui s'était tissées entre eux.

    Aussi, les adieux n'en furent pas tellement et, bien que légilimens, la jeune fille promit de continuer à s'entraîner à ses côtés.
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MessageSujet: Re: Deryn Cadell [Legilimens] [Validée]   Deryn Cadell [Legilimens] [Validée] EmptyDim 25 Oct - 16:49:59

Wow. Très belle fiche. Un grand oui. Validée donc, félicitations Yeux
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MessageSujet: Re: Deryn Cadell [Legilimens] [Validée]   Deryn Cadell [Legilimens] [Validée] Empty

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