Pour mieux comprendre la psychologie de Précieuse au moment où commence cette histoire, nous allons effectuer un petit retour dans le temps…

A l’instant précis ou William Faith, l’attrapeur des Gryffondor, avait refermé sa main sur la petite balle ailée, la vie de Précieuse McLane avait basculé. Alors que des hurlements de joies se faisaient entendre dans la quasi-totalité du stade, elle s’était hâtée de mettre le pied à terre et de courir vers les vestiaires, abandonnant même son balai sur l’herbe après l’avoir jeté par terre avec rage. Elle s’était ensuite précipitée sous la douche et avait profitée du jet d’eau chaude coulant sur son visage pour se remettre les idées en place et calmer la tristesse qui l’envahissait peu à peu. Ignorant les appels de ses camarades, elle avait enfilement rapidement son uniforme et avait couru le plus vite qu’elle pouvait vers le château afin de pouvoir s’enterrer sous ses couettes et ne plus jamais en sortir.

« Précieuse, réveille toi ! On a cours là ! » avait déclaré Astoria Greengrass, une de ses camarades de chambre, tout en tirant sur la couette de la blonde le lendemain matin.

La jeune préfète avait alors enfouie sa tête sous son oreiller en guise de réponse, afin que cette dernière ne se rende pas compte qu’elle avait pleuré pendant son sommeil.

« Ah au fait, j’ai déposé ton balai au pied de ton lit, tu l’avais visiblement oublié sur le stade. Heureusement que Pénombre l’a récupéré à temps…. »

Trop c’était trop. Rien que d’entendre prononcé le mot « Quidditch » cela la mettait hors d’elle et lui rappelait la claque magistrale qu’elle s’était prise pendant le match. Elle avait été d’une nullité mémorable, c’était affreux. Jamais elle ne pourrait se montrer en public après cet échec. Comprenant qu’elle allait avoir du mal à se débarrasser de sa camarade, Précieuse balança sa couette sur le côté et bondit sur le sol jusqu’à se retrouver debout. Elle se dirigea alors avec détermination vers le pied de son lit et se baissa pour attraper le balai que lui avait offert son père l’été dernier. Elle le contempla un instant avec nostalgie tout en le caressant du bout des doigts comme on dit adieu à objet d’une très grande valeur sentimental. Puis sans plus attendre, elle le laissa tomber sur le plancher et sauta dessus afin de le piétiner de toutes ses forces.

« JE JOURRAIS PLUS JAMAIS AU QUIDDITCH TU M’ENTENDS ?? PLUS JAMAIS !!!! »

Les jours qui suivirent furent des plus étranges pour qui avait l’habitude de fréquenter l’héritière des McLane. Tout d’abord, elle manqua beaucoup de cours, prétextant des mal de cranes ou autres maladies imaginaires. Ensuite, elle prit l’habitude de se coucher plus tôt qu’à l’ordinaire et de passer beaucoup moins de temps qu’avant dans la salle de bain. Certaines rumeurs racontaient même qu’elle avait arrêté de se vernir les ongles. Enfin, la blonde faisait son possible pour éviter de croiser les Gryffondors, et en particulier Page McHenry, alors que pendant les deux années passées elle avait fait exprès de se mettre en travers de son chemin pour l’embêter et la narguer. Cette histoire de carte de Salazar y était bien sur pour quelque chose…

Précieuse parvint donc à éviter son ennemie de toujours jusqu’au moment où elle se retrouva convoquée dans le bureau de Sybille Trelawney pour cette histoire d’article à scandale. Profitant de l’occasion pour se venger de tout ce que la rouquine pouvait lui faire subir en ce moment, elle avait été raconter à l’oreille de la vieille folle une histoire tordue impliquant Page. Et voilà que cette dernière voulait maintenant que les deux filles fassent équipe pour retrouver le coupable ! C’était vraiment la dernière des choses dont Précieuse avait envie en ce moment.

Juste après être sortie du bureau, Précieuse avait filé avant que Page puisse mettre au point un rendez vous pour qu’elle puisse coopérer ensemble. C’était absolument hors de question que la blonde et la rousse fasse équipe, surtout quand il y avait le risque de perdre des points à la clé.

Suite à cette convocation, Précieuse avait continué son petit manège visant à éviter Page le plus possible afin de repousser au maximum le moment où celle-ci allait exiger qu’elle lui donne sa carte de Salazar. Vous pourrez me dire cher lecteur, tout ça pour une simple carte de chocogrenouille ??? Et bien oui, tout ça pour ça ! La symbolique de cette carte était tellement grande qu’elle avait pour Précieuse autant d’importance que la défaite de Napoléon à Waterloo. Ces quelques jours de répit lui avait néanmoins permis d’avancer son enquête de son côté, ce qui était un judicieux gain de temps.

Mais comme chacun sait, on ne peut pas fuir toute sa vie. Il y a bien un jour où l’on fini par se faire rattraper. Et ce jour était enfin arrivé. Précieuse se trouvait seule dans la grande salle. Planquée derrière une grosse pile de bouquins, elle rédigeait son devoir de potion qu’elle devait absolument rendre pour le lendemain. Oubliant pendant quelques instants qu’on pouvait la surprendre, elle baissa un des livres qui la cachait pour lire de plus près les inscriptions de petite taille qui était inscrites. Relevant la tête, elle croisa alors le regard de Page qui venait de faire son apparition dans la grande salle. Et merde ! Précieuse se hâta alors de se lever et de ranger ses livres dans son sac. Ne vérifiant même pas si elle avait oublié quelque chose, elle tourna les talons mais il était sans doute trop tard…

Alors qu’elle tentait de prendre le plus innocemment possible la poudre d’escampette, Précieuse sentit qu’on lui attrapait le coude. Comprenant qu’il était inutile d’insister vu le nombre d’élèves qui les regardaient, elle s’arrêta net, sans se retourner néanmoins. La tête relevée pour gagner le peu de dignité qui lui restait, la préfète des verts écouta sans broncher ce que sa rivale de toujours avait à lui dire. Elle déglutit en entendant la rouquine faire exprès de parler haut et fort. La sale garce !

Quand Page eut enfin fini son petit discours, Précieuse fit l’effort de se retourner. Prenant l’attitude décontractée de la fille qui n’a rien à se reprocher, elle fit un grand sourire à ceux qui la regardaient puis plongea enfin ses yeux dans celui de la rousse.

« Pas la peine de t’exciter McHenry, je n’ai pas oublié. Par contre si tu pouvais enlever ta sale patte de mon bras, ce serait déjà un bon début. » ajouta-t-elle tout en hochant la tête en direction de la main de Page qui était toujours agrippée à son bras.

Elle plongea alors sa main dans la poche de sa veste et récupéra le petit paquet de cartes de chocogrenouilles qui s’était bien agrandit depuis le rassemblent des collectionneurs du mois de janvier. Dénouant du bout des ongles le ruban de velours vert pomme, elle fit défiler ses cartes jusqu’à trouver la fameuse carte de Salazar. La gardant de côté, elle rangea les autres dans sa poche.

« C’est celle là que tu veux hein ? » dit-elle en lui montrant la carte avec un sourire forcé.

Elle amena alors la carte jusqu’à sa bouche et déposa fermement ses lèvres dessus pour y laisser une grosse trace de rouge à lèvres en plein sur le portrait de Salazar. Puis elle attrapa la main de Page et lui mit la carte dans la main sans lui demander son avis.

« Contente ? » ajouta-t-elle tout en continuant à faire comme si cet épisode ne représentait rien pour elle.

« Par contre je préfère te prévenir maintenant que selon les règles officielles, toute carte trop abimée perd sa valeur et ne peut plus être échangée. Quel dommage ! »

Elle fit à nouveau un petit sourire à son public pour leur montrer qu’elle maitrisait (ou paraissait maitriser) la situation. Puis, après avoir inspiré un grand coup, elle alla se rasseoir sur le banc et invita Page à faire de même d’un signe de main.

« Et sinon à part ça, tu avais autre chose à me dire ma chérie ? » dit-elle avec un air moqueur tout en croisant ses jambes avec élégance.

A la demande pour le moins cavalière de Précieuse, Page ne se fit pas prier pour lâcher la blonde. Le contact avec Cudacier la dégoutait, et plus vite elle pouvait le rompre, mieux elle se portait. La mine de la blonde, néanmoins, ne laissait rien présager de bon. C'était louche. Elle était soudainement bien trop décontractée alors que l'instant d'avant elle tentait de prendre la fuite. Page mit son attitude sur l'effort désespéré de la préfète des verts pour ne pas perdre la face devant ses camarades de maison. Elle était loin de se douter que la redoutable Cudacier avait un plan B pour garder la face.

Précieuse mit un temps infini pour attraper son paquet de cartes et sortit délicatement la carte tant convoitée, celle que Page avait gagnée à la loyale. Ménageant son effet, la blondasse eut même le culot de lui demander s'il s'agissait de la bonne carte.

- Oh, ça va, c'est pas qu'je la veux, c'est qu'tu m'la dois et... héééééééé !

Abasourdie par l'outrecuidance de McLane, la lionçonne eut simplement un mouvement de recul lorsque la préfète des verts lui fourra la carte dans la main, comme si elle avait touché une substance absolument écœurante. N'écoutant que d'une oreille les perfidies de la blonde, la deuxième année regardait avec effarement la carte salie, laissant à Précieuse le temps de terminer sa petite tirade. La gosse savait pertinemment que Salazar venait de perdre en une fraction de seconde une bonne partie de sa valeur. et elle fulminait intérieurement. La sale garce ! La mauvaise joueuse ! La fourbe ! Elle aurait dû pourtant se douter que précieuse ne pourrait jamais s'abaisser à la laisser gagner, quand bien même elle avait le bon droit de son côté.

- Furoncle de troll... Tu...

La rousse s'interrompit. Il ne fallait pas laisser la blonde mener la danse.

- J'vais la garder précieusement. Et j'la montrerai à qui l'voudra pour prouver ce que vaut ta parole, sale garce...

McLane était très forte. A chaque confrontation, Page devait ronger son frein pour ne pas lui sauter dessus et rouer de coups son si angélique visage, comme elle l'aurait fait sans préavis dans les rues de l'East end. La petite irlandaise faisait à chaque fois des efforts surhumain. Mais à trop tirer sur la corde, Précieuse finirait par faire les frais de la spontanéité de la Rouge et Or... Serrant les dents, la gamine refusa tout net l'invitation de Précieuse à la rejoindre à la table des verts.

- 'pas envie de poser mes fesses sur votre banc puant l'orgueil. J'préfère rester d'bout. Et oui, y a autre chose...

La gosse prit son inspiration pour en finir au plus vite.

- A propos de cette enquête pour Trelawney... C'est hors de question que je marche dans ta combine de faux coupable. J'vais mener mon enquête dans mon coin, et j'trouverai le vrai coupable. J'te laisse faire tes magouilles sans moi. Compte pas sur moi pour te filer la moindre info...

[HJ : je n'allonge pas plus la tirade de page au cas où tu voudrais réagir ]

« Ce que tu peux être naïve parfois McHenry », déclara Précieuse en étouffant un petit ricanement quand elle entendit Page la menacer de montrer la carte de Salazar à qui voudrait la voir.

« Je t’avais certes promis la carte en cas de défaite de mon équipe mais je n’avais jamais précisé dans quel état j’allait te la donner… Comme si Salazar pouvait un jour être à toi ! Tu te doutes bien qu’on ne rendra jamais les armes aussi facilement… »

Son regard était passé de la simple moquerie au sérieux le plus profond. Jamais elle ne s’abaisserait de la sorte devant sa pire rivale. Il faudrait lui passer sur le corps et la réduire en cendre pour qu’elle reconnaisse la suprématie des Gryffons. Autant donc dire jamais.

« N’ai-je pas tenue parole ? » ajouta-t-elle un demi-sourire malicieux aux lèvres.

Toujours assise sur le banc, Précieuse s’étira tout en tendant les jambes pour prouver à quel point elle était à l’aise. Elle poussa le vice jusqu’à chercher des yeux une quelconque trace de tasse de thé ou de petits biscuits. Malheureusement il n’y avait rien à cette heure ci.

« Ah c’est donc cela qui te préoccupe ? » dit-elle d’un air faussement étonné. « Fais ce que tu veux McHenry, je n’ai jamais eu l’intention de faire cette enquête avec toi. J’ai déjà mes idées de VRAI coupable alors je n’ai pas envie d’être freinée dans ma recherche de preuves par ton insupportable présence. En tout cas je ne doute pas un instant que l’éclatement de la vérité sur cette affaire en surprendra plus d’un… »

Elle avait dit cette dernière phrase d’un ton énigmatique qui pouvait laissé penser qu’elle en savait plus qu’elle ne le prétendait. Si seulement la petite rousse savait l’énorme complot qu’elle avait organisé contre elle !

« Qu’est ce que….dans ta main….mais…qu’est ce que tu fais avec mon encrier dans ta main ??? » s’exclama soudain Précieuse en reconnaissant peu à peu l’objet qui se trouvait dans la main de sa rivale.

« Rend le moi tout de suite, voleuse ! », ajouta-t-elle menaçante en se relevant.

Tout dans les manières de la blonde était insupportable à Page. Elle avait envie de lui cracher à la figure tant Cudacier la dégoûtait. Elle n'avait aucun sens de l'honneur, et tournait toutes ses paroles et actes avec perfidie. Elle méritait sa maison plus que quiconque. Pas pour rien d'ailleurs qu'elle en était la préfète. En binôme avec Deniel, ils formaient le tandem d'intrigants le plus méritant de Poudlard, assurément.

La rousse serra le poing à s'en blanchir les jointures mais ne répondit rien à Cudacier. Il ne valait mieux pas. Mais en serrant la main, la fillette se souvint qu'elle avait ramassé le petit encrier de sa rivale. Tandis que Précieuse déballait d'un ton infiniment supérieur ses avancées dans l'enquête - ce qui passait à des kilomètres au dessus de la deuxième année - Page commença à faire jouer le flacon entre ses doigts, sachant pertinemment que sa meilleure ennemie réagirait à sa vue, même si elle ne savait pas comment.

La réaction fut au delà de ses espérances. Comment aurait-elle pu deviner que Précieuse aurait accordé autant d'importance à un si futile objet ? La blonde semblait tout simplement furieuse, et un sourire naquit sur les lèvres de la gosse.

- Oh, c'est à toi ? J'suis pas sûre hein, j'l'ai trouvé sur la table... Après ton départ, pour sûr mais bon... Rien m'dit qu'c'est à toi...

Si la blonde jouait avec délectation de l'art de la mauvaise foi, Page ne voyait pas pourquoi elle n'aurait pas le droit de s'y adonner aussi un peu. Jamais elle n'atteindrait le niveau de Cudacier, évidemment, mais si cela pouvait au moins la faire un peu enrager, et c'était toujours cela de pris. Reprenant peu ou prou les paroles de sa meilleure ennemie, la Rouge et Or lui demanda, l'air innocent, mais en maintenant Précieuse à distance de sa main libre :

- C'est ça que tu veux ?

Elle en profita pour dévisser d'une main de bouchon du flacon d'encre, le laissant à peine fermé. C'était approximatif, et elle ne savait pas trop ce que donnerait son stratagème, mais si elle s'en fichait de se salir, il n'en allait pas de même pour McLane...

- En fait, j'm'en fous, garde le, j'en ai pas besoin moi... Chui trop gentille, sans moi, tu l'aurais perdu...

Finissant sa phrase, elle lança souplement le flacon à demi ouvert à la blonde. Alea jacta est !

[HJ : je te laisse choisir si ça s'ouvre ou pas, si tu es touchée, ou moi ou les deux ou personne, bref, fais toi plaisir, j'assumerai mes bêtises ]

« Fais pas l’innocente McHenry, tu sais aussi bien que moi que ce flacon m’appartient ! » répondit la blonde avec vivacité tout en pointant l’objet du doigt.

Précieuse tenait tout particulièrement à ce flacon car il était loin d’être ordinaire. L’encre était de très haute qualité (oui oui il existe des degrés de qualité d’encre^^) et elle avait le mérite de durer très longtemps ! Ainsi, quand on possédait un tel flacon, on tenait l’année scolaire entière. Inutile bien sur de préciser le coût exorbitant du gadget que le père McLane avait offert à sa fille dans le but de lui éviter des allers-retours inutiles à Pré-au-Lard pour s’approvisionner.

Alors que la préfète s’apprétait à proférer de nouvelles menaces, la rouquine se décida à lui rendre l’objet qu’elle convoitait.

« Ah bah c’est pas trop tôt, tu… » commença Précieuse tout en tendant les mains pour rattraper l’objet que sa rivale lui lançait avec souplesse.

« Ahhhhhh ! »

La blonde poussa un cri strident quand elle réalisa malheureusement trop tard que le bouchon était mal fermé. Par réflexe elle avait eu la sotte idée de saisir le flacon à pleines mains. Son instinctif mouvement de recul ne lui permit pas d’éviter l’inévitable. La bouche entrouverte et les yeux écarquillés, elle regarda avec horreur le contenu de l’encrier se déverser sur ses mains et atteindre ses chaussures. Sa paume et ses doigts étaient tout noir comme si elle les avait trempés dans du goudron. Quand à sa paire de bottines, elle n’avait plus qu’à la jeter à la poubelle ! Le seul point positif était que ses vêtements avaient par miracle survécu à l’ouragan. Enfin, pour le moment…

Précieuse sortit soudain de sa torpeur en entendant un élève ricaner à quelques mètres d’elle. Elle tourna son visage (qui avait prit une teinte cramoisie) vers le concerné et constata qu’il s’agissait d’un élève de première année à Poufsouffle.

« Toi le gros bigleux, la ferme !! »

Puis elle tourna immédiatement sa tête vers sa rivale et la regarda avec détermination pour la dissuader d’imiter l’imbécile de Poufsouffle.

« Tu viens de commettre la pire erreur de ta vie McHenry… Si tu veux jouer à la guerre et bien jouons ! Tous les coups sont permis dorénavant ! Mais fais bien attention à toi, c’est un jeu dangereux… il n’y aura qu’une seule survivante. »

Et pour illustrer ses propos, Précieuse inspira un grand coup et se rua sur la rouquine tout en tendant ses mains pleines d’encre noire en avant.

« GNIAAAAAAAAAAAAAAA »

Encore pleine de rage, elle sauta sur sa rivale et lui planta ses mains sur les joues pour dans le but de s’essuyer sur elle. Ce qu’on appelle le retour à l’envoyeur.

« T’avais bien besoin d’un petit ravalement de facade… »

- Oups, fit innocemment la gosse en voyant avec délectation l'atterrissage catastrophique du flacon McLane.

Ah, ça, c'était vraiment ballot ma bonne dame, hein. Un large sourire naquit sur le visage constellé de tâches de rousseurs de la gosse. Bien fait. Elle voulait son encre, elle l'avait, ce n'était tout de même pas sa faute si un "malencontreux" accident était survenu. La rouquine rangea prestement la carte de Salazar dans sa poche. Elle avait déjà été souillée par le gloss de Cudacier, il valait mieux éviter de l'abîmer plus encore... Surtout que les représailles ne tarderaient certainement pas.

Le ricanement d'un poufsouffle fournit à Page les quelques instants nécessaires à la mise en lieu sûr du Directeur de Serpentard. Précieuse avait déjà ramené son regard noir vers l'irlandaise, qui jubilait intérieurement. Précieuse était vraiment furieuse, et ça valait son pesant de chocogrenouilles.

- Ouuuuuh, j'ai peur, blondasse...

Les menaces de la préfète des serpents ne la touchaient absolument pas. Pour sa part, les hostilités étaient ouvertes depuis bien longtemps, et elle n'avait pas peur de son ennemie. Elle avait risqué bien trop l'an passé pour s'effrayer des mots de la blonde. S'il s'était agi d'Ultan, il n'en aurait pas été de même. Mais la rouquine n'arrivait pas à se représenter le danger que pouvait être McLane, et comment la blonde et son influente famille pouvaient lui pourrir la vie. En cet instant, la deuxième année ne voyait que sa meilleure ennemie, sa rivale de toujours, à peine son ainée, et simple élève de son école. Elle ne mesurait pas vraiment à quoi elle pouvait se frotter en réalité.

Page s'était attendue à une longue tirade indignée de la Verte -et noire, à présent - mais absolument pas à une réplique physique. Ca c'était son répertoire à elle, pas celui auquel la blonde était accoutumée. Aussi n'eut-elle pas le temps d'éviter l'attaque de Précieuse, et se retrouva bien vite avec les joues tartinées d'encre, et une Cudacier en furie à une distance bien trop proche à son goût. Page avait envie de rire. Depuis le temps qu'elle rêvait de pouvoir cogner un peu sur MacLane, c'était la blonde qui ouvrait les hostilités. La gosse ne se fit pas prier, et repoussa violemment son ainée d'un bras, faisant voler son autre main prestement en direction de la joue ennemie.

[HJ : prendra ou prendra pas la claque ? Libre à toi, Page peut te rater en t'ayant repoussée trop fortement Pis je fais court pour qu'on puisse faire plein de petites actions ^^]

Précieuse regarda avec un mélange de joie et de consternation les quelques cheveux roux qui gisaient dans sa main. Cela valait son pesant d’or, tant la symbolique était grande. Un peu comme la carte de Salazar qui reposait à présent dans la poche de sa rivale. Cependant, l’idée de conserver des cheveux humain (et roux) sur elle la dégoûtait au plus au point. Sans attendre plus longtemps, elle s’en débarrassa en les laissant tombant au sol comme s’il s’était agi d’un détritus polluant.

Quand Page se tordit sous le choc du coup de pied, Précieuse dévoila un large sourire. Elle s’empressa de tourner son visage vers la foule en délire pour vérifier que chaque individu se trouvant en cet instant dans la Grande Salle avait prit note de sa superbe revanche. Mais soudain, alors qu’elle saluait d’un petit signe de la main un élève qui la regardait avec béatitude, un groupe de personne retint son attention. A l’embouchure de la grande porte d’entrée, McGonagall venait de faire son apparition, sans doute alertée par les cris hystériques du public. Heureusement, la vieille femme semblait trop occupée à discuter avec un élève pour se soucier de leur petit combat de maternelle. A moins que… non ! L’élève en question pointait un doigt dans leur direction ! Quel imbécile, il allait les faire repérer !

Précieuse était tellement effrayée à l’idée de perdre son grade de préfète qu’elle ne comprit pas tout de suite que Page lui avait littéralement sautée dessus. Elle essaya tant bien que mal d’esquiver les coups qui arrivaient à la vitesse d’une mitraillette tout en reculant du mieux qu’elle pouvait. Mais un des coups la déstabilisa tellement qu’elle en perdit l’équilibre. Ne sachant où se raccrocher, elle agrippa la veste pleine d’encre de la petite furie rousse et l’emmena avec elle dans sa chute. Juste avant de se retrouver fesses contre terre, Précieuse eut le temps d’apercevoir la directrice de Gryffondor regarder dans leur direction. Il sembla cependant à la blonde qu’elle n’avait pas eu le temps de les apercevoir. Il y avait donc encore des chances d’échapper à la retenue.

L’atterrissage sur le sol froid et poussiéreux ne fut pas des plus plaisants pour l’héritière des McLane, surtout que cette imbécile de McHenry lui était tombée dessus comme un gros sac de pommes de terre. Anticipant la suite des attaques de cette dernière, Précieuse préféra la mettre en garde immédiatement :

« Pouce !!!! La McGo est à quelques mètres et il vaudrait mieux pas qu’elle nous voit ainsi, si tu vois ce que je veux dire… Et il est pas question que je perde mon badge par ta faute McHenry ! »

Précieuse sentit une violente douleur lui parcourir le dos. Ses fesses en avaient pris un coup ! Elle allait avoir des horribles bleues pendant des jours, quel calvaire !

« Bon on fait quoi ? On se cache, on s’enfuie ou on reste plantées là comme des potiches à attendre de se faire prendre la main dans le sac ? »

Collaborer avec Page juste après un combat orageux ne faisait absolument pas parti de ses plans. Mais pour garder ce qu’elle avait de plus cher en ces lieux, Précieuse était prête à tout, vraiment tout.

« Et ne crois pas que j’ai dit mon dernier mot ! Dès qu’on a résolu le problème on se retape dessus, promis… »

« Lâche-moi sale rousse! » murmura-t-elle à Page quand celle-ci lui attrapa le bras pour la remettre sur pied.

Précieuse se débattit légèrement mais fut stoppée net dans son élan par l’apparition de Minerva à quelques mètres d’elle. Avant de déglutir, elle entendit Page lui ordonner de rester immobile et de se taire. Nan mais pour qui se prenait-elle celle là ? Jamais elle n’obéirait à une sang de bourbe ! Cependant dans le cas présent, la blonde n’eut pas vraiment le choix et fut forcée de laisser sa rivale parler à sa place. Si leurs propos n’étaient pas cohérents entre elles, elles risquaient fort de devoir adieu à leur badge adoré.

Précieuse sentit son corps se figer quand elle entendit l’excuse minable que Page venait de sortir à la co-directrice de Poudlard. La rousse avait-elle perdu la tête ? Jamais McGo ne croirait une seconde à de pareilles sottises. Leur haine mutuelle n’était plus une légende mais un fait avéré dont chaque élève de l’école connaissait l’existence. Suivant la trace de Potter et Malefoy, les deux fillettes étaient certainement les plus fidèles représentantes du combat sans fin qui avait débuté à l’époque de Godric et de Salazar. Les raisons de cette lutte de pouvoir étaient assez obscures en revanche. Etait ce par pure jalousie, provocation, désir de popularité, envie d’imposer sa manière de penser et de vivre ou encore par simple besoin de s’amuser que les deux préfètes s’opposaient régulièrement ? Le mystère restait entier.

Le pot au rose fut le moment ou Page lui demanda pardon. Trop peu habituée à ce genre de comportement de la part de son ennemie, Précieuse resta un instant silencieuse, immobile, laissant juste ses cils couverts de mascaras battre la mesure. Il fallait réfléchir vite, très vite. Les options qu’elle possédait pour sortir saine et sauve de cette situation étaient plutôt réduites. Vu la tournure qu’avait pris les évènements, elle avait le choix entre jouer le jeu et simuler son amitié avec Page ou nier en bloc. Même si la deuxième solution était plus tentante, il fallait bien avouer que la première était sans doute la seule qui les sauveraient toutes les deux.

Prenant son courage à deux mains et inspirant un grand coup, Précieuse tourna sa tête vers Page et lui fit un grand sourire. Puis elle passa sa main derrière le dos de cette dernière jusqu’à la poser sur son épaule opposée, comme deux meilleures amies ravies d’exprimer leur amitié.

« On dirait pas comme ça, mais Page et moi on est super copines maintenant. A force de se croiser dans nos rondes quotidiennes on a fini par sympathiser. N’est ce pas Mc…Page ? » déclara-t-elle avec le même sourire toujours scotché au visage, tout en pinçant rapidement le bras de la Grtffondor.

Puis elle donna une petite tape amicale sur la chevelure de sa rivale tout en serrant les dents pour s’empêcher de pousser un hurlement. Jamais elle n’avait eu autant de contacts physiques avec son ennemie de toujours. C’était franchement déstabilisant. Tournant sa tête vers McGo, elle espéra voir derrière ses lunettes rondes, la preuve qu’elle croyait un peu à leur énorme mensonge et que la délivrance était proche.

Blondasse 1ère sembla hésiter une fraction de seconde, et papillonna des cils comme un snargalouf devant une plume à papotte, autrement dit, avec un air des plus étonnés et stupides. Cependant, Page n'eut pas besoin de froncer les sourcils pour inciter son ennemie à se ranger à sa stratégie, et Cudacier démontra qu'au final, elle n'était pas totalement dénuée de bon sens, malgré les apparences. Maintenant que leur technique de sauvetage désespérée avait été amorcée, elles ne pouvaient plus revenir en arrière. Et par miracle donc, le peu de neurones que la rouquine attribuait à la blonde finirent par se connecter, et Précieuse joua le jeu. Sa prestation fut d'ailleurs remarquable.

Cette peste de blonde ne fit pas les choses à moitié, et passa sa main dans le dos de la lionçonne, qui frémit au contact répugnant de la garce. Bloody Hell, que ne fallait-il pas endurer pour se sauver la mise ! Page n'avait pas pu faire autrement que de se raidir légèrement par instinct, et en ajoutant le sourire de faux-cul de McLane femelle ainsi que son petit pincement, tout ce que put offrir Page en retour fut un rictus assez étrange : si Précieuse savait jouer du sourire hypocrite, la Rouge et Or était loin d'être une as dans ce domaine. Elle se força néanmoins. Un bref instant, elle songea qu'il faudrait qu'elle fasse elle aussi preuve de bonne volonté pour finir de convaincre McGonagall mais... C'était trop lui demander. Elle s'était déjà excusée, ce qui lui avait coûté énormément. Fallait pas pousser Dumby dans les orties non plus

Le regard sévère de la Directrice des Lions terrifia cependant tellement la petite irlandaise que ses appréhensions s'envolèrent, et elle imita sa rivale, passant sa main également autour des épaules de "l'autre", et ses lèvres s'élargirent en un sourire forcé.

- Hin... Hum... Oui.

Un raclement de gorge plus tard, et c'était au tour la vieille enseignante de reprendre la parole. Pas un instant elle n'avait quitté des yeux les deux fillettes, impassible et revêche. Elle avait écouté les deux enfants déployer des trésors d'ingéniosité et faire des efforts surhumains pour éviter la punition, tout en se gardant bien de laisser transparaitre l'amusement qui la gagnait petit à petit.

- Mesdemoiselles, je ne sais pas ce qui s'est tramé ici. Assurément rien de bon à ce qu'on m'a rapporté... fit la directrice d'un air sévère

Page se tassa sur elle-même, le coeur battant à cent à l'heure.

- Cependant, il semblerait que cet incident vous ait appris à coopérer, c'est déjà un beau progrès. Vous avez évité le flagrant délit Mesdemoiselles, cela vous sauve pour cette fois, mais n'oubliez pas que vous vous devez d'être un exemple pour vos petits camarades. Je ne serai pas si magnanime au prochain incident...

Relâchant l'air de ses poumons, la lionçonne se risqua à regarder autre chose que la pointe de ses baskets tâchées d'encre, et glissa un regard vers McGonagall, qui semblait sur le point de tourner des talons. Fatale erreur. Le regard de l'enseignante croisa celui de la jeune préfète.

- Oh, j'allais oublier. Miss McHenry, ce sera cinq points en moins pour l'initiative de ce mensonge plus gros que vous. Filez donc vous changer à présent, votre tenue n'est pas digne de votre charge préfectorale, Mesdemoiselles.

Les joues de la petite irlandaise avaient viré au carmin. C'était injuste ! Pourquoi c'était elle qui se voyait retirer des points ! Déjà McGonagall s'éloignait, avec la certitude que les deux préfètes ne broncheraient plus, mais Page était révoltée. Elle avait pourtant essayé de les sortir de la mouise sans fuir ! D'ailleurs, si elles avaient pris la tangente et que la Directrice les avait attrapées, leur sort aurait-il été plus enviable ? Mais, holy shit, pourquoi est-ce que McLane n'avait pas perdu de point, elle ? Parfois, Page ne comprenait pas sa Directrice de Maison. Il est pourtant bien difficile d'être juge et parti, et la gosse, du haut de ses douze ans, n'était vraiment pas à même de comprendre les motivations de l'enseignante.
Maugréant, elle jeta un regard noir à sa némésis.

- Tu perds rien pour attendre Cudacier...

[Un petit mess de fin pour la forme]

Précieuse dû faire un effort surhumain pour rester immobile quand Page l’imita et plaça elle aussi une main dans son dos. Elle avait espéré que son geste écœurant serait le dernier du siècle mais la petite rousse n’avait pas dû juger cela suffisant puisqu’elle en rajouta une couche. La blonde frissonna lors du contact et se mordit immédiatement la lèvre pour éviter de calomnier devant la co-directrice de Poudlard.

Le supplice continua ainsi jusqu’à ce que la vieille dame se décide à prendre la parole. Le cœur de Précieuse battait s’y vite qu’il était surement possible de l’entendre dans les kilomètres environnants. Elle risqua un regard vers la directrice et comprit immédiatement que celle-ci n’était pas dupe de leur petit jeu.

*Tout ca parce que McHenry ne sait pas mentir*

Le mensonge était un art où Précieuse excellait. Elle avait arrêté de compter le nombre de pigeons qu’elle avait eu en inventant des histoires à coucher dehors. Mais cette fois, en plus d’avoir été moins convaincante qu’à l’ordinaire, elle devait se coltiner l’incompétence de la rousse en la matière. Pour une première coopération, c’était raté. McGo allait surement les renvoyer pour quelques jours histoire de leur remettre les idées en place. Ou pire, elle allait les forcer à passer du temps ensemble dans le but d’améliorer la fraternité entre les élèves. Bullshits.

Cependant contre attente, la vielle bique leur annonça qu’elle leur épargnait toute punition. Précieuse pu enfin respirer normalement et pousser un soupir de soulagement. Comme quoi leur pseudo-alliance n’avait pas été vaine. La préfète ne se fit pas prier pour ôter son bras de l’épaule de la rousse et tourner les talons. Elle était sur le point de prendre la poudre d’escampette quand la voix Minerva se fit à nouveau entendre. Avait-elle changé d’avis ? Aussi vite c’était tout de même peu probable.

Finalement la nouvelle qu’annonça le professeur de métamorphose était on ne peut plus réjouissante. Précieuse se félicita d’avoir Rogue comme directeur de maison. Lui n’aurait jamais eu la sotte idée d’ôter des points à un élève de Serpentard. Que les Gryffondors pouvaient être bêtes parfois avec leurs grands principes.

Quand Page lui lança un regard noir, la blonde lui répondit par un grand sourire railleur et supérieur.

« Ne sois pas si négative Page, c’était plutôt une belle coopération. On devrait remettre cela plus souvent tu ne crois pas ? »

Sur quoi elle éclata de rire et s’éloigna en effectuant qu’elle pas de danse. Et une victoire de plus dans le palmarès McLanien.