Ceres, depuis son arrivée à l'école, n'avait parlé à personne. Elle faisait comme si elle s'isolait elle même, se protégeant ainsi des moqueries que les gens pouvaient lui faire à cause de sa cécité. En effet, la jeune fille était aveugle, elle ne connaissait plus rien aux merveilles de ce monde, elle ne faisait qu'imaginer, mais dans son esprit tout n'était que noirceur et désolation. Elle n'avait quitté la Grèce que depuis trois ans, et ses blessures dues à ce pays n'avaient toujours pas cicatrisées. On lui avait ôté le seul remède à ses blessures, sa raison de vivre en quelque sorte...Son frère jumeau, dont elle s'occupait ardamment à chaque fois qu'il avait eu besoin d'elle. Lorsqu'il pleurait, Ceres séchait ses larmes...Lorsqu'il criait, elle faisait fuir ses peurs...Lorsqu'il tremblait, elle lui tendait ses bras ouverts et l'enveloppait de sa propre chaleur, ne le lâchant que lorsqu'il avait fini de trembler...La vie n'avait fait que marteler son coeur et son âme, les seules choses qui lui restaient en ce monde. Tout le reste n'était que poussière maintenant, elle n'avait plus aucun moyen en sa possession pour retrouver la lumière qui envahissait irrévocablement son coeur par le passé...En l'espace de quelques mois, suivants la disparition de Shuro, son jumeau, la jeune fille avait perdu son âme d'enfant. Elle n'était maintenant plus qu'une vaste coquille vide attendant la mort avec impatience...Elle qui avait si souvent peur de la mort, cette effroi s'était comme balayé de lui même lorsque son grand père lui avait énoncé ce que pouvait être la mort pour un mortel en quête de salut...Il lui avait dit que ce n'était pas effrayant, car nous quittons tous un jour la noirceur pour la lumière...Le chemin est verdoyant, l'eau y est claire et tout est beau et idyllique...La souffrance semble disparaître pour ne jamais revenir, et le sourire prend place sur notre visage et dans notre coeur pour ne nous laisser que du bonheur à partager. Ceres aurait voulu connaître cette douce utopie dans laquelle son grand père l'avait baignée lorsqu'il l'avait reccueillie. C'était pourquoi elle ne craignait pas la mort, pas le moins du monde...

Par cette belle après midi d'octobre, Ceres avait l'impression d'étouffer littéralement alors qu'elle était allongée sur son lit dans la salle commune des Serpentards. Elle n'avait pas pris le temps d'aller manger après les cours, elle n'avait nullement faim et n'avait absolument aucune envie de se lier à la foule pour le moment. Le bruit l'horrifiait, le contact physique accidentel avait le don de la mettre dans une colère noire...Et les regards portés sur elle, qu'elle sentait parfaitement même en étant aveugle, étaient insupportables. Elle évitait donc par dessus tout de se rendre dans la Grande Salle lorsque celle-ci était bondée. Elle se rendait plus volontiers aux cuisines, bien que ce lieu lui soit interdit en principe, et se restaurait dès que les Elfes l'avaient servie et retournaient à leurs occupations. Ceres n'avait jamais aimé manger devant les gens...Ce fut donc dans un état d'esprit plutôt calme qu'elle se rendit près du Lac, en quête de fraîcheur...L'automne avait longtemps été sa saison préférée, mais depuis qu'elle ne pouvait plus en contempler les couleurs chaudes, elle avait tendance à ne plus aimer aucune saison...

Elle se fit surprendre par un arbre qu'elle n'avait pas pu sentir, et tomba littéralement à la renverse, sous la violence du choc. Elle n'avait pourtant pas fermé les yeux, pour être sûre que personne ne remarquerait qu'elle était aveugle, mais cela ne lui avait pas suffit pour éviter l'arbre qui se trouvait en plein milieu de son chemin...Sonnée, elle mit une de ses mains sur sa tête, sentant la colère jaillir en elle comme une fontaine...Elle espérait simplement que personne ne l'ai vue, mais à priori, comme elle n'avait entendu aucun bruit, il ne devait y avoir personne...