-On ne court pas dans les couloirs, soupira pour la énième fois le jeune préfet en voyant un groupe de deuxième années le dépasser en riant.

Bon sang mais est-ce que c’était vraiment si difficile à retenir comme règle ? On ne court pas dans les couloirs d’un train en marche, ça paraissait plutôt logique, non ? Et bien apparemment pour certains ça ne l’était pas. Et le pire c’est qu’il ne pouvait pas y faire grand-chose. Dans à peine quelques heures ils seraient de retour chacun chez soi alors la menace de retirer des points n’allait effrayer personne. Sans compter qu’il avait vraiment autre chose que de s’énerver contre le premier excité venu. Tout le monde avait hâte de rentrer pour les vacances et résultat l’excitation rendait les élèves impatients d’où les courses effrénées dans des couloirs bien trop étroits pour une telle utilisation. Le Serpentard se contentait donc de répéter la phrase rituelle dans l’espoir que, la prochaine fois qu’ils les croiseraient, les gens auraient au moins la décence de ralentir à son approche. Enfin, à vrai dire, il n’avait pas beaucoup d’espoir de voir ses souhaits se réaliser mais il ne lui restait rien d’autre à faire donc autant jouer les préfets pour la dernière fois de l’année. Dans tout juste quatre heures, il serait de retour au manoir et pourrait se la couler douce pendant deux mois complets, d’ici là il pouvait fournir un dernier effort.

Enfin, se la couler douce … tout est était relatif. En effet, il n’avait pas eu de nouvelles de Kelsey depuis la signature de leur contrat et il n’espérait plus avoir de quoi faire chanter Alekseï avant d’arriver à King’s Cross. Il lui faudrait donc faire attention à ses arrières une fois à la maison. Mais bon, il avait de l’expérience en la matière donc ce n’était pas la fin du mode non plus. Surtout qu’il n’avait pas non plus eu à sortir Kelsey d’ennuis avec d’autres préfets donc finalement leur deal était simplement en suspens. Pour un peu, il pourrait presque se dire qu’il n’y avait pas de deal du tout. Seulement, il n’était pas assez naïf pour ne pas savoir qu’une fois un document scellé par magie, il ne disparaissait pas aussi facilement. Par conséquent tout comme il ne pourrait s’échapper si Kelsey venait à lui demander son aide dans le futur proche ou lointain, lui aurait tous les droits de lui demander des comptes si elle mettait trop de temps à lui fournir des renseignements valables. Après tout, le contrat n’était valable que tant qu’il était réciproque.

-…me, … me, … jeune homme !

Le troisième année fut soudain sorti de ses pensées par la dame des confiseries qui lui faisait signe de se pousser sur le côté pour la laisser passer avec son chariot. Honteux de ne pas l’avoir remarquée plus tôt, il décida de se faire pardonner en lui commandant une belle quantité de Patacitrouilles. Personne n’avait encore précisé qu’il était interdit de manger pendant une patrouille non ? Il s’empara donc d’une des délices orangées dont il raffolait tant et l’enfourna avec un plaisir non dissimulé. Odin, c’était tout simplement divin ! Ça lui permettait même d’oublier qu’il était coincé à faire des rondes dans le train au lieu de se reposer dans un compartiment comme tout le monde. Il jeta d’ailleurs un coup d’œil envieux à un trio de septièmes années de Serdaigle qui profitaient de leurs derniers instants ensembles avant la séparation définitive avant de continuer d’avancer. Jusqu’à ce qu’il tombe sur ni plus ni moins que Kelsey qui avait la tête dans un compartiment. Elle semblait chercher quelqu’un car elle referma de suite la porte. Il l’appela donc, prêt à se rendre utile, quitte à devoir faire des allers-retours que cela serve à quelqu’un.

-Kelsey ! Tu cherches quelqu’un ? J’ai fait les trois-quarts du train, je pourrais peut-être t’indiquer dans quel compartiment se trouve la personne que tu cherches si tu me donnes un nom ou une description.

Ou peut-être pas dans le fond. Parce qu’elle était mieux placée que personne pour savoir qu’il n’était pas spécialement physionomiste, il ne retenait que les figures particulièrement originales, or de l’impression qu’il s’était fait de sa camarade de maison, cette dernière ne traînait pas avec les gens qui aimaient à se faire remarquer. Mais les apparences pouvaient être trompeuses alors qui savait ?

Spoiler:

L’expression de joie qui illumina soudain le visage habituellement impassible de Kelsey surprit pour le moins le Préfet. Wow, qu’est-ce qu’il se passait là ? Qu’est-ce qu’on avait fait à sa partenaire en affaires ? Il espérait qu’elle n’était pas sous l’emprise d’une potion d’Egayement ou de quelque autre substance qui abaisserait ses capacités mentales, car il n’avait aucune envie d’avoir à gérer une fille incapable de se contrôler. Et encore moins Kelsey, c’était toujours les plus renfermés qui étaient de loin les pires lorsqu’ils se lâchaient ! D’ailleurs, il espérait que le jour où ce serait son tour, personne ne serait là pour assister à l’humiliation et en particulier pas Kelsey, il n’avait aucune envie de se retrouver avec des photos compromettantes se baladant dans tous Pourlard, merci bien. Le chantage, lorsqu’il en était le commanditaire, il était à cent pour cent pour, mais dans le cas inverse, ça ne lui disait rien qui vaille.

-Ah, Nikolaï ! Oui, tu tombes bien, merci ! Je cherche un garçon, il est pas spécialement grand, mais pas petit, pâlichon, les cheveux noirs... Il est à Serpentard et y est Préfet si je me souviens bien.

Lorsqu’il comprit qu’elle se fichait ouvertement de sa gueule, il se permit un sourire narquois et leva brièvement les yeux au ciel. Il appréciait ce genre d’humour cynique, c’était typiquement le genre de choses qu’il aurait pu dire si la situation avait été inversée. Il ne répliqua cependant rien car son aînée passa immédiatement en mode business et il ne put retenir l’air surpris que les paroles de la jeune femme lui causèrent. Alors comme ça, elle avait fini par remplir sa tâche contrairement à ce qu’il avait initialement pensé ? Voilà qui annonçait un été soudainement bien plus tranquille.

Un sourire satisfait désormais fermement planté sur ses lèvres, le Russe s’approcha donc de sa camarade et put observer … un peu plus qu’il n’aurait souhaité pour son bien être mental. Non parce que savoir que son frère couchait avec tout ce qui bougeait et en avoir la preuve en images était deux choses très différentes. Certes, il était celui qui avait demandé des preuves tangibles pour pouvoir garder Alekseï à distance, mais sur le coup il n’avait pas pensé à ce que ça allait impliquer au moment de les recevoir. Non vraiment voir son frère à moitié nu dans des positions compromettantes, il aurait définitivement pu se passer de telles images. Ce qu’il ne fallait pas subir pour un peu de tranquillité durement gagnée …

-C’est plus que suffisant, plus et j’aurais fini par rendre mon déjeuner merci bien. En tout cas, rien à redire, s’il tient à garder sa virilité -à laquelle visiblement il tient- intacte, mieux vaut qu’il me foute la paix. Si mon père venait à apprendre ses exploits …

Il ne termina pas sa phrase, se contentant d’un sourire vicieux qui en disait long. En effet, le patriarche Dmitriev n’apprécierait déjà pas qu’Alekseï courre les jupons alors qu’il était fiancé, même si la fiancée en question n’avait pas été vue à Poudlard depuis un an, mais il pourrait comprendre -hormones en ébullition et toutes ces conneries-, par contre l’histoire de la maladie vénérienne -urgh soi-dit en passant-, là, ça ne passerait jamais. S’il venait à contracter quoique ce soit et à le refiler à Angelina lors de la nuit de noces … Niko se réjouissait de la scène d’avance. Bon, pas pour Angelina bien sûr, la Poufsouffle ne méritait pas un traitement pareil, mais rien que d’imaginer la discussion entre son père et son frère … c’était tout bonnement jouissif. Il pouvait voir le blabla sur la descendance de la famille et la sécurité de l’empire et gnagnagna d’ici, ce serait brillantissime. Il revint néanmoins sur terre quand une question des plus inappropriés lui vint à l’esprit.

-Mais j’y pense, c’est pas ingrat de suivre les gens quand ils s’adonnent à, il secoua les photos dans sa main, ce genre d’activités ? La rémunération en vaut vraiment le coup ?

Non parce que lui, il ne le ferait pour rien au monde. Peu importe le prix. Il y avait des scènes auxquelles il valait tout bonnement mieux ne pas assister.