La poste façon sorciers n’avait pas que des avantages, Nikolaï ne le savait que trop bien. En effet, pour pouvoir envoyer une missive quelconque chez les sorciers, encore fallait-il posséder un hibou ou en emprunter un à quelqu’un. Ainsi, quelle meilleure façon de s’assurer qu’une personne ne puisse pas communiquer avec l’extérieur qu’en la privant de hibou, de manière à ce qu’elle doive passer la censure à chaque fois qu’elle désire envoyer une lettre ? Et c’était exactement ce que vivait le garçon depuis toujours. Pour être sûrs que ses fréquentations restaient sous contrôle ses parents refusaient de lui acheter un hibou et, par conséquent, dès que les vacances arrivaient il était en silence radio vis-à-vis de ses amis pour deux mois, car ceux-ci n’étaient jamais du goût de son géniteur.

Mais, cela ne lui avait jamais posé problème. En effet, jusqu’à son arrivée à Poudlard, il n’avait jamais vraiment fait d’amitié durable et ensuite, il n’y avait eu qu’Akiko à qui il aurait vraiment voulu parler durant l’été (il ne connaissait pas encore bien Isaac ou Ara à l’époque) or il savait qu’elle serait aussi strictement contrôlée que lui, donc la question était réglée. Néanmoins, les grandes vacances avaient apportées leur lot de surprises avec elles lorsqu’il avait reçu une lettre de Pernelle ! Une fois la première surprise passée -il ne s’attendait pas à une lettre de la part de la Gryffondor qu'il n'avait fait que recroiser depuis leur rencontre mouvementée dans les Cuisines-, il avait grandement apprécié le geste. Sauf que, dans l’incapacité de répondre, il avait craint que ça n’endommage son début de relation avec la petite albinos ; ce qui l’aurait attristé parce que, mine de rien, elle était très drôle bien que franchement étrange par moment avouons-le. Il s’était ainsi fait un sang d’encre pendant plusieurs jours jusqu’à ce que la lettre suivante arrive. Puis la suivante, puis celle d’après et ainsi de suite pendant tout l’été.

Bref, il comprit bien vite que Pernelle n’avait pas mal pris son absence de réponse. Et, bien que légèrement étonné de son comportement, il ne s’en plaignit nullement. Ça lui faisait de la lecture. D’ailleurs, il avait Lev à remercier pour cela. En effet, c’était le bras droit de son père qui se chargeait toujours de vérifier le courrier envoyé aux Dmitriev -pour s’assurer qu’il ne contenait aucune menace- et, bien que l’homme se soit rendu compte que Nikolaï recevait beaucoup de lettres en provenance de la même adresse, il n’avait rien dit à Mikhaïl ou Natalia. Il se contentait de passer les lettres à l’adolescent avec un sourire amusé peint sur le visage, Niko le soupçonnait d’ailleurs de croire qu’il s’agissait d’une imaginaire petite amie, mais vu qu’ainsi il pouvait maintenir le contact avec Pernelle, il ne le contredisait pas.

Néanmoins, dès la rentrée arrivée, il avait expliqué la situation à Pernelle de vive voix. Il n’avait pas eu l’impression qu’elle y ait prêté une grande attention, mais lui s’était senti mieux. Ensuite, ils s’étaient revus durant les cours et une ou deux fois en dehors. En effet, peu après la rentrée, Pernelle lui avait fait découvrir une salle fort pratique et ils s’y retrouvaient de temps à autres pour discuter. Il commençait même à s’en sortir pas mal du tout avec le langage des signes ! Enfin, il demandait encore souvent à la Rouge-et-Or de signer moins vite mais au moins il ne la faisait plus répéter vingt-cinq fois une phrase. Par contre, il était franchement mauvais quand il s’agissait de parler en signes lui-même. Il n’y avait rien à faire, ses mains n’arrivaient pas à reproduire les mouvements bizarroïdes de l’alphabet des signes. Il se contentait donc de parler vu que Pernelle le comprenait parfaitement. Voire parfois, il lui écrivait.

Et c’est ce qu’il avait fait quelques jours auparavant pour lui proposer si elle serait partante pour tenter une potion qui était censée améliorer la coordination gestuelle. En effet, il n’appréciait pas vraiment de se ridiculiser à chaque fois qu’il tentait de signer -bien que cela amusait grandement Pernelle-, il avait donc cherché à la biblio un quoique ce soit de magique qui puisse l’aider et était tombé sur cette potion qui n’avait pas l’air spécialement compliquée. Encore heureux sinon ils étaient foutus étant donné ses compétences en la matière -bien que depuis qu’il avait Ara comme partenaire, il avait fait des progrès notables, c’était indéniable.

Il entra donc dans la salle sur demande et fut surpris par la décoration. Pas vraiment ce à quoi il se serait attendu pour une séance de potions en privé mais il ne pouvait décemment pas dire que ça lui déplaisait. Dommage que l’illusion n’impliquât pas la température qui allait avec le décor, il aurait bien enlevé son gros pull sinon. Il salua Pernelle d’un hochement de la tête et la moue qu’elle lui renvoya lui explicita que quelque chose n’allait pas. Il n’eut pas longtemps à réfléchir pour deviner -commençant à connaître l’étourderie maladive de son amie- que cette dernière avait probablement oublié le pourquoi du comment il l’avait invité à se joindre à lui. Enfin, au vu du chaudron trônant au milieu de la pièce, elle n’avait pas tout oublié, c’était déjà ça ! Restait à espérer que la pièce leur fournirait les ingrédients dont ils auraient besoin car il comptait là-dessus, n’ayant eu aucune envie de se mettre Miss Byrne à dos si elle le choppait en train de piquer des ingrédients dans sa réserve personnelle.

Il sourit ainsi à son amie et la taquina :

-Alors moi je me tue à la tâche pour trouver une potion qui me rendra plus doué pour le langage des signes et toi, sale ingrate, tu n’es même pas fichue de t’en souvenir ! C’est à se demander pourquoi je fais autant d’efforts ?