« J'en appelle aux nuages pour éteindre la lune
Et rendre noirs ces rivages, sur le seuil des dunes.
Une nuit sans lumière, pour des rêves sans ombres
Et cacher les chagrins de la Terre, enfouis sous les décombres. »

Sven était l'ombre de lui-même. Il avait l'air encore plus mystérieux que d'habitude, silencieux aussi... Pas une parole ne franchissait la barrière de ses lèvres et ce pendant des heures; l'Animagus était toujours plongé dans ses papiers administratifs ou d'autres plus personnels qu'il cachait avec soin évidemment. Malheureusement ces recherches sur le meurtrier de Tobias avançaient mais rien ne lui permettait de dire avec certitude qu'Ella était l'assassin; sans compter que se venger semblait improbable car le jeune homme devait à tout prix protéger ses frères et soeurs. De plus, un meurtre pour répondre à un autre meurtre n'aurait certainement pas plus à son amant. Celui-ci n'était plus là pour lui faire la morale mais s'il y avait bien une personne dont le Slave voulait respecter les désirs c'était ceux de l'homme de sa vie, sans compter que tout ceci ne le ferait pas revenir et qu'une telle action inconsidérée mettrait ses frères et soeurs en danger... Pourtant il continuait sans cesse ses recherches, comme si savoir qu'Ella avait effectivement tué son compagnon allait le soulager. Ce n'était pas la solution, Sven le savait! L'envie de vengeance n'en serait que plus forte une fois les preuves accumulées.

Sergueï Molovich était mort de ses mains et si ceci ne lui faisait pas faire de cauchemars ou éprouver des remords, il avait encore à coeur de protéger sa réputation pour que ses frères et soeurs ne sachent jamais quel monstre leur paternel avait été! Pourtant un jour ceux-ci lui demanderaient des comptes et avouer qu'à 8 ans, Sven avait assisté à des viols répétés lui paraissait vraiment trop glauques! L'Animagus ne savait plus que faire, il s'engluait dans ses mensonges, pensant aussi à Stephen avec qui il avait préféré cesser toute correspondance afin de ne pas faire face à ses réponses... La situation était compliquée, malgré sa libération du joug de Voldemort et de son géniteur, il lui restait trois chaines à son cou, les plus difficiles à enlever car il aimait celles-ci... Comment pourrait-il songer à se débarrasser de ses frères et soeurs même quand sa vie lui pesait terriblement et que chaque respiration lui coûtait?! C'était terrible car même en présence de Gladyss sa petite soeur si éveillé avec qui il se retrouvait souvent en tête à tête-les garçons partant souvent à des fêtes alors que la Serdaigle semblait vouloir veiller sur son frère/père.- n'arrivait pas à profiter de sa nouvelle liberté... Tout lui paraissait bloqué!

Alors le jeune homme se concentra sur l'héritage reçu par son père qui le croyait si bon fils. Chacun avait une part égale mais en ce qui concernait la sienne, Sven la dépensait sans compter pour ses frères et soeurs, ne touchant pas un centime pour lui, préférant ne pas piocher dans l'héritage d'Andréa, Glenn et Gladyss pour leur laisser prendre un bon départ avec pas mal d'argent, car quoi qu'on en dise, la fortune servait quand même le bonheur. De toutes manières qu'aurait-il acheté lui? Refaire sa garde robe comme l'avait suggéré Gladyss avant la guerre? Quelle étrange idée... Il n'avait personne à qui plaire, surtout pas lui-même et encore moins un compagnon, Tobias étant décédé pourquoi faire des efforts? Ses frères et soeurs l'aimaient pour lui-même pas ses habits, inutile donc. Le jeune homme n'avait toujours rien dis à Gladyss à ce sujet d'ailleurs et éludait toute question sur son "compagnon de travail", s'emmurant dans un silence qui parlait pour lui.

Soupirant, le sorcier referma doucement un livre de comptes, regardant autour de lui avant de se permettre un étirement en règle qui était tout sauf aristocratique; par mégarde il poussa un léger soupir qui tenait bien plus du chien que de l'homme puis il grogna contre sa personne de la même façon, mécontent de ses manières et de son laisser aller. Se houspiller sans arrêt, se fustiger intérieurement était sa manière, certes peu agréable mais c'était sa façon quand même de s'encourager, de tenir le choc pour ne pas abandonner ses frères et soeurs. Après avoir escaladé les escaliers, le jeune homme se dessina un masque de neutralité parfaite, hélant Gladyss.

-Allons viens, il est temps d'aller sur le chemin de traverse pour tes achats. Nous y achèterons quelques habits comme tu l'avais suggéré, tu en as effectivement bien besoin... Pour les courses scolaires nous verrons plus tard, pour le moment tu peux bien profiter un peu.

Il était devenu plus tolérant avec ses frères et soeurs, n'ayant pas Sergueï derrière son dos et leur laissait donc quelques petites libertés maintenant. Seul "père" à la maison, âgé de 26 ans, il faisait de son mieux, ce qui n'était pas facile avec trois adolescents et une éducation aussi stricte que la sienne... Mais il fallait bien faire des compromis parfois. Voir les siens heureux était sa seule façon de grappiller un peu de bonheur, de ne plus penser à tous ses problèmes...

Sven soupira en entendant la jeune fille déblatérer sur tout et n'importe quoi; mais là où l'Animagus prouvait qu'il pouvait s'améliorer c'est qu'il la laissa faire sans lui faire la leçon sur l'inutilité et la perte d'énergie ou de temps. En effet le jeune homme commençait tout juste à comprendre que c'était normal pour une gamine de cet âge d'agir ainsi... Que c'était lui qui avait raté quelque chose dans sa vie, alors pourquoi brider sa soeur? Maintenant que Sergueï ne leur demandait plus de comptes, ils pouvaient bien être libres! Même si c'était encore difficile à intégrer pour le Slave, ce dernier essayait de se montrer moins strict avec ses "enfants", malheureusement il s'éloignait aussi d'eux, perdant peu à peu sa vitalité et le désir de vivre déjà amoindri d'avant. Oh oui il avait ses chers frères et soeurs mais c'était différent d'avec Tobias, irremplaçable... Il lui manquait un adulte avec qui discuter, quelqu'un de son âge qui l'avait comprit et même materné au contraire de ses propres parents, un homme qui lui avait fait l'amour, lui apprenant à saisir quelques sentiments inconnus de lui. Des personnes dont il prenait soin ne pouvaient pas lui apporter ça -et heureusement! Ce serait bien malsain dans ce cas là.- Alors s'il fournit un effort immense pour accorder un sourire à sa soeur, le Croate ne put faire guère plus, se contentant de prendre ses affaires et ayant déjà disparu pour n'écouter la jeune fille que d'une oreille discrète, attentif à sa sécurité, à ses questions plus importantes mais ne pouvant s'empêcher de décrocher de temps en temps, et s'en sentant d'ailleurs coupable... Mais comment tenir bon avec tout ce blabla typiquement féminin? Sven eut même le temps et l'audace de remercier la nature de lui avoir donné ces penchants, ainsi il éviterait toujours le mariage ou d'avoir affaire à une autre femme que Gladyss.

-Ai-je l'habitude de parler pour ne rien dire? Si je te fais cette proposition c'est que je peux effectivement l'accomplir. Et bien allons-y maintenant, j'ai comme l'impression que ces courses vont être longues.

Le jeune homme hocha la tête lorsque Gladyss lui signifia tous ses projets, il lui accordait les vêtements de couleur, moins sûr pour sa participation mais bon on verrait bien... Le sorcier la réfrènerait lorsque la limite du raisonnable menacerait d'être dépassée quand même car s'ils étaient riches, il fallait savoir rester dans la zone de l'acceptable afin de ne pas devenir un gosse gâté bon à rien. De plus si on avait tout, tout de suite, la vie finissait bien par vous lasser et malgré le décès de Sergeï, Sven avait ses propres principes et voulait les inculquer à ceux qu'il élevait, faisant de son mieux possible malgré son très jeune âge.

Lorsqu'ils sortirent, il faisait beau, et de nombreuses familles déambulaient, exactement pour la même raison qu'eux, pour faire du lèche vitrine et contenter les enfants revenus à la maison, beaucoup observaient le duo, désapprouvant le fait qu'un homme si jeune soit déjà père ou ayant assez d'esprit pour comprendre que c'était son frère et se demander où étaient les parents... Sans doute morts pendant la guerre, celle-ci avait fait tellement d'orphelins. Sven était persuadé que si les gens étaient mis au courant de sa situation de mangemort involontaire, de fils martyr ils n'auraient pas la même compassion au fond des yeux et le brûleraient sur le bûcher... Aucune pitié pour les anciens porteurs de la marque des ténèbres, quelque soit les excuses de ces derniers... Mais qu'importe! L'Animagus n'accordait d'importance qu'au jugement de ses frères et soeurs ou bien malgré lui de feu son amant. Il se tourna vers sa soeur, ne lui faisant pas part de ses sentiments comme toujours, situation un peu malsaine mais après tout le Slave faisait de son mieux, sans être passé par la case de l'adulte, il s'était retrouvé accablé de responsabilités alors qu'on ne lui avait offert aucune liberté, comment s'occuper parfaitement d'enfants alors? Savoir que ceux-ci avaient besoin qu'on leur demande, qu'on leur parle? C'était ainsi chez lui, on ne se confiait pas, on écoutait mais on ne partageait pas. Il aimait les siens à sa manière, les adorant même avec une extrémité frôlant la folie, le sacrifice effectué chaque jour en silence, celui de se lever était la plus belle preuve avec ces années passées à tout prendre pour éviter que les enfants ne soient éclaboussés par les colères ou désirs d'appropriation de Sergeï.

-Très bien, où allons-nous? Je te laisse me guider

Fit le jeune homme perdu dans cette foule joyeuse d'après guerre. Malgré la fin de Voldemort et de son père il n'y trouvait pas son compte; se concentrant alors sur sa soeur et uniquement elle, détournant la tête lorsqu'une étudiante de son âge ne se priva pas pour l'observer de haut en bas, envoyant un message significatif de séduction mais s'éloignant déjà en voyant la gamine aux côtés de sa proie... Les gamins font toujours fuir les potentiels partenaires qui n'avaient pas envie de se retrouver dans une histoire compliquée de pères très jeune ou de famille recomposée... En donnant deux ou trois ans de plus à Sven, 3 ou 4 de moins à Gladyss, la chose était possible à imaginer, et pas très agréable pour celles qui se pâmaient devant Sven de toutes façons nullement intéressé. Il avait beau être galant, ceux qui le connaissaient -et ils étaient très rares- savaient qu'il faisait ça uniquement par devoir mais sans envie aucune de séduire en retour; chose assez amusante et étrange quand on voyait son succès... Mais lui n'avait d'yeux que pour une seule jeune femme! Sa soeur...

A ses yeux, elle et ses frères étaient les merveilles de sa vie et en la contemplant à la dérobée le jeune homme s'aperçut à quel point elle avait grandit, s'était épanouie malgré la triste ambiance. Qu'elle était belle, forte aussi! Gladyss devait avoir une vie magnifique... De princesse, et l'idée de l'aimer encore mieux poussait Sven à accepter n'importe quoi...

-Gladyss, voudrais-tu une mère? J'ai conscience de ne pas toujours être le compagnon de jeu ou de discussion voir de confidence idéal... Alors je pensais... Hortense est une jeune femme très aimable après tout. Elle vous aime beaucoup...

C'était difficile à prononcer pour lui, mais il était prêt à retomber dans les affres d'un mariage pour trouver un équilibre aux siens. Il y avait bien cette fille qui venait souvent les voir, gentille, sincère, intelligente qui était amoureuse de lui et semblait adorer les enfants... Hortense, 35 ans-donc plus expérimentée-une française d'origine sans enfants ni attache, pas sang pur mais c'était désormais une chose imaginable que Molovich sénior était décédé, restait à savoir si ses visites faisaient plaisir à Gladyss et ses frères. Alors il consentirait au sacrifice... En parlant de ce sujet, il voudrait aussi aider sa soeur à ce propos, lui demander si elle avait un fiancé (voir une? Brr... Impossible à concevoir pour lui encore! Pourtant c'était bien sa situation...) et vérifier que celui-ci soit correct, potable -bien non, car personne ne pouvait réellement mériter sa Gladyss, personne ne lui arrivait à la cheville à part Andréa et Glenn.- mais il ne savait évidemment pas comment aborder la chose; d'ailleurs c'était assez surprenant que l'idée lui soit venue...

[HJ: je te laisse inventer pour la fille^^ c'est pour donner du piment et montrer combien il peut aller loin pour ses frères et soeurs... En gros c'est elle ou une autre mais il serait capable de se marier si Andrea, Glenn et Gladyss le demandaient ^^ ]