Minlupin et Minmaugrey sont dans le même bâteau… [PV]

[hj : Minlupin tombe à l’eau, qui reste ? *sort* ]

Holy Shit !

Une fille par terre, des feuilles éparpillées, un garçon bousculé en colère, un préfet qui menaçait le retrait de points, Miss Teigne qui miaulait sa queue écrasée, une armure renversée, une poignée à moitié destroy, un parterre de fleurs écrasé, un tableau devenu bancal qui beuglait… La liste des victimes du Momo était longue ce soir là, dans sa course effrénée. Mais il n’avait pas le temps, non, il n’avait pas le temps.

Pourquoi pile juste ce soir là ?

Il n’avait pas vu le temps passer, et le devoir d’arithmancie était particulièrement complexe… Et pire encore, dans la salle commune des verts et argents, on ne pouvait prendre conscience de la décru du soleil. Surtout que ce devoir était à rendre pour le lendemain, et que le sale gosse en l’occurrence n’avait pas du tout eu le temps de le commencer avant… Mais là, tant pis, il ne serait pas fini. Merlin, pourquoi n’avait il pas vu que l’heure fatidique du levé de pleine lune approchait ? Alors il courait, il courait à en perdre haleine. Fuir fuir fuir encore une fois. Il bousculait tout sur son passage, tout ce qui s’interposait entre lui et la sortie. Mais il ne devait pas aller trop vite, car sinon on risquait de le suivre, et là, ce serait un drame… Une fois arrivé devant les grandes portes pas encore closes, il attendit un instant caché, en attendant un moment où il n’y aurait plus d’élèves qui rentraient. Puis il se faufila, guettant avec inquiétude les chemins menant au parc l’arrivée éventuelle de derniers étudiants flânant au soleil couchant. Il ne devait pas être vu, surtout avec le régime actuellement en place. Une fois suffisamment à distance, il alla se planquer derrière un recoin de mur, faisant une fois encore une pause pour voir si quelqu’un ferait mine de le chercher… RAS mon commandant. Ou tout du moins, sur le cours laps de temps d’attente, RAS. Morgan n’était vraiment pas précautionneux dans l’immédiat, le coucher de soleil lui instiguant une profonde terreur par sa rapidité. Il devait faire vite… Se ramassant sur lui-même, il se mit à courir à moitié courbé, comme un animal, à travers le parc qui passait peu à peu de l’orangé au sombre de la nuit.

L’instinct du loup, quoi qu’en disait et voulait Morgan, prenait de plus en plus sa place dans le comportement du sale gosse, mais sous sa forme humaine. Après tout, on était Loup Garou H24, 7j/7, 365j/365 par an… Même si être Loup tout court survenait que peu dans cette période. Mais le sale gosse se surprenait parfois à dégoût à émettre un grognement rauque quand une chose ne lui plaisait pas, il rentrait sa tête dans ses épaules quand il se sentait agressé, il sentait un appétit féroce à la vue de la viande rouge… Des détails, mais des détails qui horrifiait le gamin… Si ça commençait comme ça, comme cela allait il finir ? On racontait que le célèbre Fenrir Greyback était tellement Lycanthrope que même hors des nuits de pleine lune il avait une apparence et un comportement hybride ! Et c’était cela qui terrifiait le plus le sale gosse…

Il avait peur qu’un jour la bête qu’il était détruise entièrement le garçonnet qu’il fut.

Et cette nuit était une de celles qui hantaient toutes les autres durant ses sommeils agités. Oui, ce soir encore, il mourait une nouvelle fois pour laisser renaître le monstre jusqu’au petit matin. Mais cette fois, nul animal et nul être n’en pâtirait… A la cabane hurlante, il deviendrait monstre en cage. « On » lui avait beaucoup parlé de cette cachette à l’écart de tout et que les sorciers évitaient de par sa salle réputation. On racontait toute sorte de chose comme quoi elle était hantée par des choses peu recommandables et dont on entendait les hurlements régulièrement. Mais la vérité était bien connue maintenant… Mais pour cette nuit, la légende allait renaître. Sortant enfin du sombre passage secret qui y menait, la sale bête consulta sa montre… Il avait encore une 20aine de minutes environ avant que les premiers rayons de la lune ne viennent impitoyablement activer la malédiction. Morgan souffla de soulagement. On ne viendrait pas le chercher ici, non… Il ne voulait pas revivre le cauchemar de sa première nuit. Il planqua le sac contenant ses affaires de rechanges pour le lendemain et y rajouta la chemise et la cape qu’il portait sur le dos… Quitte à se transformer, autant ne pas gâcher toutes ses affaires à chaque fois… S’assurant que tout était bien clos et qu’aucune issue hormis la porte qui le séparait du souterrain n’existait, il alla s’asseoir à moitié ramassé sur lui-même dans un des coins… Attendant dans une peur blanche et froide les premières douleurs de la transformation… plus qu’une quinzaine de minutes.
La cabane craquait de partout sous l’effet du vent qui soufflait fort dehors. Si bien que Morgan ne prêta pas attention aux grincements de l’autre coté de la porte et de son souterrain.

Malgré toutes les promesses qu'elle avait pu faire, la gosse ne parvenait pas à se résigner. A rester tranquille. Du moins, elle s'y forçait, autant qu'elle le pouvait. Surtout que la répression ne se faisant pas attendre à la moindre incartade, les saletés qui avaient pris la tête de Poudlard avaient tout de même de quoi faire trembler la lionçonne, pour courageuse qu'elle fut. Elle avait déjà goûté à la souffrance, et n'était pas masochiste au point d'en redemander volontairement. Aussi essayait-elle dans la mesure du possible de se contenir, comme elle l'avait promis à William lors de leur arrivée à Poudlard à la rentrée. Pour autant, elle avait déjà dérapé, sa franchise dépassant parfois sa raison. En botanique, par exemple, avec ce traître de Bachelard. Ou en DCFM, quand son ego avait voulu prendre le dessus pour prouver à l'autre affreux qu'il avait tort de considérer les élèves au sang "impur" comme des moins que rien. Elle n'avait pas pu s'en empêcher.
Et se retenir, toujours se retenir, elle n'en pouvait plus. Il fallait qu'elle fasse quelque chose. Après tout, William et elle avaient refusé l'infâme et injuste dictature Rose, ce ne serait pas pour subir la dictature Laide sans rien faire. Il fallait qu'elle agisse. Sinon elle se consumerait.

Mais elle savait que si elle tentait le diable, elle le payerait au centuple. Elle ou ses amis. Ou sa famille. En pensant à William et Helen, son coeur se serra. Ils étaient ce qu'elle avait de plus cher à Poudlard. Bien sûr, il y avait beaucoup d'autres élèves à qui elle tenait, mais avec aucun d'entre eux elle n'avait cette relation quasi fusionnelle. Et il était hors de question que ses petites initiatives n'amènent ces êtres chers à en pâtir. Il fallait donc qu'elle agisse seule, pour ne compromettre personne. Et dans le plus grand secret. Il lui fallait être plus prudente encore que lors du règne du Crapaud : ce n'était plus une bête petite sorcière rondouillarde et sa horde de clébards serpentards qui menaçaient Poudlard. C'étaient des sorciers aguerris, qui savaient manipuler la magie, et avais mis la moitié de l'école à leur botte par leur politique de peur et de répression. Si la délation n'avait pas encore commencé, cela n'allait certainement pas tarder, que le fait soit fondé ou pas d'ailleurs. Les vénérables murs de Poudlard devaient avoir des oreilles. Page en était persuadée. Elle n'était même pas certaine que la salle sur demande fût encore un lieu sûr.

Aussi avait-elle décidé de trouver un autre lieu pour s'organiser. Elle avait pris plusieurs jours à la bibliothèque pour faire l'inventaire des lieux qui pourraient être suffisamment éloignés et tranquilles pour qu'elle puisse faire ses petites magouilles loin de toute oreille indiscrète. Car il lui fallait un endroit calme pour pouvoir monter un vrai plan de bataille. Après mûre réflexion, il s'était avéré que rester dans Poudlard était trop risqué. Si elle se faisait prendre, ils trouveraient certainement un moyen d'impliquer ses camarades. Il fallait qu'elle sorte de l'enceinte de l'école. Et le lieu idéal, c'était... la cabane hurlante.

La réputation de la sombre demeure n'était plus à faire. La plupart des élèves avaient encore trop peur pour emprunter le petit chemin qui y menaient, tant les superstitions étaient vivaces. Mais en laissant traîner quelque peu ses oreilles dans la salle commune des Lions, et en posant les bonnes questions, la môme avait appris quelques informations cruciales, par des Rouges de l'année de Harry.

Il était impossible de pénétrer dans la maison depuis l'extérieur. Parfait donc, pour un lieu tranquille. Mais trouver le véritable accès avait été bien plus difficile, car ceux qui le connaissaient se comptaient sur les doigts de la main. Pourtant, la fillette finit par arracher qu'un souterrain partait du pied du saule cogneur pour rejoindre la fameuse maison. Page avait dû lutter pour réprimer un sourire ravi : jamais les Carroxs ne viendraient la chercher là-bas. C'était dangereux, c'était inconscient... C'était l'idéal.

La gamine avait pris toutes les précautions nécessaires. Et ce soir, c'était le grand soir. Elle avait décidé de partir au crépuscule, quand la plupart des élèves regagnaient tranquillement leurs dortoirs, pour éviter un maximum de curieux, ou les rondes de Rusard si elle opérait de nuit. Elle n'avait aucune envie de se faire attraper par sa chatte miteuse.

Ce fut donc entre chien et loup () que la rouquine se faufila hors du château, vêtue de vêtements passe partout - son fidèle sweet à capuche que son père lui avait renvoyé réparé par hibou après son escapade avec Alix, et son vieux jean sale, et ayant alourdi sa sacoche de cuir de quelques ouvrages qui pourraient lui être utiles, ainsi que des ingrédients de potion, pour faire quelques tests. Les documents un peu trop compromettants étaient, comme au bon vieux temps des BR, cachés sous son T-shirt, coincés dans son pantalon, tout contre sa peau, pour déjouer une éventuelle fouille.
Page sentit un frisson d'excitation la parcourir lorsqu'elle posa le pied dans l'herbe humide du parc. L'adrénaline affluait à nouveau. Comme lors des missions des Brigades Rousses. Mais cette fois, elle faisait cavalier seul, songea-t-elle avec un pincement au coeur. William l'avait bien prévenu. Elle pourrait compter sur lui, mais lui avait choisi de faire profil bas cette année. Aussi la petite irlandaise ne l'avait-elle pas mêlé à son début de Croisade.

Silencieusement, la gosse fila dans le parc, et atteignit le célèbre saule, restant néanmoins à une distance respectable. Un bref instant, la Rouge et Or se dit qu'elle était complètement inconsciente. Cette arbre était un violent, et passer n'allait pas être de la tarte. Mais elle chassa vite cette pensée. La cabane hurlante était l'endroit idéal. Il fallait qu'elle y aille. Scrutant les racines, la gosse réussit à apercevoir une petite anfractuosité. Ce n'était pas facile à voir, mais comme elle savait ce qu'elle devait chercher... Inspirant profondément, la gosse prit son élan et fonça, sautant à droite et à gauche pour esquiver les branches rageuses du végétal peu coopératif. Un choc à l'épaule faillit lui faire perdre l'équilibre, mais la gosse se rattrapa in extremis et plongea dans le trou. Ouf. Elle était passée. Elle s'en sortirait avec un beau bleu, ce qui ne serait pas ben grave. Par contre, mieux valait ne pas songer au retour, sous peine de se créer des inquiétudes pour rien. Epoussetant machinalement son jean, la rouquine se redressa et sortit sa baguette. Un Lumos vint éclairer le boyau qui, sous les derniers rayons du jour, était bien trop ombre pour y progresser.

Le tunnel était bas de plafond, suintait l'humidité et racines comme toiles d'araignées tombaient du plafond. La gosse ne s'en formalisa pas. Elle en avait vu d'autres. Baguette en avant pour voir où elle mettait les pieds, elle progressa à pas vif vers la cabane et atteignit bientôt une porte de bois. Elle y était !

Satisfaite de ce plan qui se déroulait sans accroc, ce fut avec un sourire aux lèvres que la troisième année poussa la porte, qui pivota dans un grincement sordide. Telle une conquérante, Page posa le pied sur le vieux plancher de la cabane, et risqua quelques pas à l'intérieur, tournant sur elle même pour appréhender les lieux du regard. Mais la rouquine se figea lorsque son regard se posa sur une silhouette, recroquevillée dans un coin, à peine éclairée par un dernier rayon de soleil maussade, qui projetait faiblement ses dernières touches oranges sur le visage de...

- Morgan ??? lâcha une Page aussi incrédule qu'étonnée.

Morgan sursauta.

Il était tellement obnubilé par les derniers rayons du soleil déclinant qu’il n’avait nullement prêté attention aux bruits qui pouvaient provenir du petit tunnel, de sorte que seule la voix de Page le tira de sa torpeur. Il leva d’abord des yeux tout aussi incrédule sur la rouge et or. Il devait rêver, ce n’était pas possible. Elle n’avait pas le droit ! Pas cette nuit là ! La co-fondatrice du Fight Club tombait de surcroit au pire moment. Ne pouvait-elle pas être là plus tôt ? De sorte qu’ils n’en soient pas déjà l’heure J, sans aucune marge de manœuvre. Ou mieux, ne pouvait elle pas n’être pas là ? Elle l’avait suivi ? Impossible ! Il avait pourtant fait son maximum, et même s’il s’était hâté en route, il avait sans cesse regardé derrière lui pour chercher un éventuel poursuivant. Le Serpentard dans son angoisse ne put même pas réaliser que tout cela n’était qu’un jeu de malchance.
Et plus les secondes passaient, plus la luminosité déclinait, plus il pensait, et plus la fureur du loup montait en lui. Son regard ne tarda pas à se voiler d’une colère noire, une douleur sourde commençait à résonner au fond de ses os qui avaient commencé lentement à s’étirer.

« Par Merlin, qu’est ce que tu fous encore là ?! C’est décidément ton truc de te foutre dans les emmerdes jusqu’au cou ! Il t’est impossible de te tenir tranquille ne serait ce qu’un soir ? En fait, toutes tes histoires, c’pas étonnant, tu les cherches ma parole ! Ca t’arrive jamais d’essayer d’être une élève normale et de rester dans ton dortoir au lieu d’jouer les rebelles la nuit ?... »

Il s’en voulait. Il s’en voulait alors il souhaitait lui en vouloir, pour rejeter la faute sur la Gryffondor. Elle était venue, c’était de sa faute. Mais non. Quoiqu’il dise, il s’en voulait.
Par Merlin, que foutait-il encore en pleine nuit au beau milieu de Londres ? C’était décidément son truc de chercher les emmerdes à vouloir faire le caïd du côté de l’allée des embrumes. Ca lui avait été définitivement impossible de ce tenir tranquille juste ce soir là où il était sensé voir son grand père et puis point barre. Mais ça n’était même pas étonnant, il l’avait cherché dans le fond, à ce croire plus malin qu’il ne l’était… Après tout, il n’avait qu’à pas jouer les sales gosses en pleine nuit, alors qu’il aurait dû être chez lui.
Il se mit debout, ne cherchant même plus à cacher son torse mutilé comme il le faisait avec précaution pourtant à Poudlard. Les blessures causées par la magie ne guérissaient jamais pour de vrai, surtout quand elles provenaient d’une créature maléfique. La morsure avait laissé une cicatrice béante et violacée à l’épaule, et les griffes du loup avaient laissé de profondes meurtrissures un peu partout et surtout sur les bras. Depuis, le Serpentard ne portait que des chemises à manches longues, et en fermait bien tous les boutons.
Mais là, il n’en n’avait plus rien à faire. Dans peu de temps, la rouge et or verrait bien pire.
Toute son ossature n’était que souffrance, celle du squelette du loup trop grand qui poussait dans un corps trop petit pour le contenir. Il passa un doigt sur sa dentition : c’était désormais des crocs acérés fait pour transpercer la peau, déchirer la viande et broyer les os.

« Tu ferais mieux de partir. Et vite. Je ne sais même pas si je pourrais retenir cette chose assez longtemps… »

« On » lui avait fait consommer un peu de potion tue-loup. Trop peu, car cette dernière coutait bien chère, et que le gamin se refusait de plus en plus à la prendre. Il était dans la pire phase possible de la médication : le moment où il en avait suffisamment pris pour avoir quelques effets, mais également le moment où il en avait trop pris en fait pour que ce soit anodin. En effet, il gardait contre son gré contrôle de sa personne juste le temps que la transformation soit totale, de sorte à en ressentir toute la souffrance, de sentir son esprit s’évanouir écrasé par celui du loup qui le ronge. Les premières fois, il perdait vite conscience, tandis que là il lui arrivait d’aller jusqu’à « voir » ses pattes monstrueuses commencer à bouger non pas à ses ordres, mais à son instinct.

Les derniers fragments du jour avait disparu depuis plusieurs secondes déjà, la deuxième phase débuta à l’instant : les premiers rayons lunaires arrivaient. La rafale de souffrance qui en résultat fit littéralement tomber le Serpentard. La transformation allait devenir plus sérieuse.
A genoux sur le sol, Morgan luttait, luttait comme il n’avait jamais lutté avant. Car cette fois-ci, ils n’étaient pas dans la forêt interdite. Car cette fois-ci, il n’y aurait pas un Troll des Forêts pour venir perturber le prédateur dans sa chasse. Car cette fois-ci, ils étaient loin de toutes oreilles pouvant venir à l’aide.

Car cette fois-ci, le Loup Garou ne voulait pas perdre face au monstre.

Impossible.

Comment ce foutu Serpentard pouvait-il se trouver lui aussi dans ce lieu secret que Page avait eu tant de mal à dénicher pour être au calme ? Il n’avait pas le droit ! Et pourtant, il était là… Les deux gosses se dévisageaient, en chien de faïence, et mirent un instant à vraiment réaliser que contre toute attente, l’improbable duo se retrouvait encore, et dans des circonstances encore plus étonnantes.

Ce fut le Vert et Argent qui rompit le silence, choisissant l’attaque verbale comme stratégie défensive. Déstabilisée, la lionçonne en resta un instant sans voix. Passée la surprise, la gosse se reprit. Nom de nom, ce n’était pas ce sale vermisseau qui allait lui dire quoi faire !

- Non mais oh, tu te crois où ? T’as pas à me dire c’que j’ai à faire. Et pis d’abord, qu’est-ce que tu fich…

La fin de la tirade s’étrangla dans la gorge de la Gryffondor. Son ancien collaborateur venait de se redresser, offrant son torse nu aux derniers rayons de l’astre solaire.

- Bloody hell, souffla l’irlandaise dans un murmure rauque. Morgan tu…

- Tu ferais mieux de partir. Et vite. Je ne sais même pas si je pourrais retenir cette chose assez longtemps…

Partagée entre la surprise, le dégoût et la compassion, la troisième année ne pouvait que rester sur place. Qu’était-il arrivé au sale gosse ? Le regard de la lionçonne parcourait les plaies sombres avec un intérêt clinique. Elle n’y connaissait rien mais… il était certain que ce n’était pas joli à voir. Et surtout, elle savait une chose. L’horrible couleur des blessures ne pouvait avoir qu’une origine. La même que celle qui lui faisait garder un avant bras bandé depuis sa première année. Les sombres puissances. La magie noire. Qu’importe le nom qu’on pouvait lui donner, il s’agissait forcément d’un événement atroce qui avait mis le Serpentard dans cet état. Et tout verdâtre qu’il était, il ne méritait pas ça. Si la rouquine avait souffert de sa mésaventure, elle n’en gardait que des cauchemars et une très curieuse et hideuse cicatrice. Morgan lui, avait dû subir une violente agression pour être aujourd’hui dans cet état.

- Non. J’peux pas te laisser comme ça. T’as besoin d’aide.

Le corps de l’irlandaise était tendu à l’extrême et n’aspirait qu’à une chose : fuir. Elle savait que c’était ce qu’elle devait faire. Elle voyait le visage du gosse se tordre de douleur, et sentait parfaitement que quelque chose de terrible se préparait. Mais les paroles avaient franchi ses lèvres sans qu’elle s’en aperçoive. Morgan avait beau être un sale gosse, un serpentard, il n’en était pas moins un valeureux complice et un garçon que, malgré tout ce qu’elle pouvait en dire, Page avait appris à apprécier pour les qualités qui lui avaient valu sa répartition. Et malgré leur relation qui tenait plus du «chien et chat», elle ne pouvait pas le laisser comme ça.

Le deuxième année s’effondra au sol, gémissant de douleur et son aînée fit quelques pas dans sa direction, avec l’intention de poser une main sur son épaule pour le soutenir. Mais son instinct l’interrompit. Elle resta à une courte distance de l’enfant recroquevillé, ne sachant pas que faire pour l’aider mais bien décidée à mettre en oeuvre le maximum pour son collabo’. Elle ne comprenait pas du tout ce qui lui arrivait, n’ayant pas fait attention au petit geste de son vis-à-vis lorsque celui-ci avait passé son doigt sur ses dents.

- Morgan, qu’est-ce qui t’est arrivé ? Qui t’a fait ça ? T’es empoisonné ? Faut qu’on aille chercher de l’aide. Tu peux pas rester comme ça, t’as besoin de soins !

Si seulement l’irlandaise avait plus vite fait le rapprochement ! Elle aurait su que le mieux pour aider le Vert et Argent était simplement de le laisser déverser douleur et fureur à loisir dans une pièce vide...

« Tu ne peux pas m’aider !... »

Sa voix s’étrangla au fond de sa gorge. Y penser lui faisait encore plus mal que son corps.

« Personne ne le peut… »

Non, personne. Il était tout seul.
Depuis cette nuit là, le gosse n’a fait que se renfermer sur lui-même de jour en jour, fuyant la compagnie des humains. Lui-même s’exécrait, alors comment les autres pouvaient ils l’apprécier ?
Au fond de lui, il éprouva de la reconnaissance pour la rouge et or. Dans l’état hybride qui était le sien, ses perceptions allaient bien au delà de ce que les simples humains pouvaient ressentir. Il faisait sombre, pourtant les yeux du vert et argent y voyait encore mieux qu’en plein jour. Aucun craquement du bois de la Cabane Hurlante face au vent ne lui échappait. Et enfin, en bon prédateur, il percevait les émotions des autres. Il sentait l’envie de fuir de la Gryffondor. Il sentait de la peur, son instinct qui lui instiguait de partir tant qu’elle le pouvait.
Mais elle n’avait pas fui face au monstre. Et pourtant, Morgan savait que ce n’était pas l’envie qui manquait. Ange avait déjà pris les jambes à son cou au même stade de transformation. Et il lui en était reconnaissant, même s’il aurait mieux valu le contraire.

Mais au moins, la préfète des serpents s’en était tirée, pensa le sale gosse avec amertume. Il n’était pas sur qu’ils pourraient en dire autant dans la situation actuelle.

Plus les secondes passaient, et plus ses sens accrus amplifiaient la douleur toujours croissante. Et la potion tue-loup l’empêchait de sombrer dans l’inconscience, tant physique qu’émotionnelle. Trouvant quelques soupçons de force au fond de lui, il parvint à se redresser tant bien que mal sur… Ses pattes arrières. Il porta son regard sur Page, de coutume, ils étaient à peu près aussi grands l’un que l’autre, là, il la surclassait d’une dizaine de centimètres. Il mourrait d’envie. Et c’était d’ailleurs là où il haïssait le plus sa médication, c’était ce moment là où il ressentait les envies du monstre comme étant les siennes. Il mourrait d’envie d’attraper et de mordre la petite humaine. Non ! Pas l’humaine, sa collabo. Le Loup Garou tentait de repousser ses pensées au plus loin, non, ce n’était pas juste une humaine, c’était Page. Et il ne voulait pas lui faire de mal. Et pourtant, qu’est ce qu’il en avait envie… Morgan parvint à se contraindre d’avancer en direction de l’escalier, afin de monter à l’étage… Car il ne voyait plus qu’une seule solution.

Il parvint également à forcer sa langue à prononcer les paroles qu’avait formées son esprit. C’était une voix rauque qu’il ne parvenait pas à reconnaitre comme la sienne, à mi chemin entre l’humain et des grognements, qui formula la seule solution qu’il avait envisagé tandis qu’il trainait son corps mi loup mi gosse dans les escaliers.

« Y’a une pièce à l’étage, une ancienne chambre. Si on parvient à m’y enfermer et à barricader suffisamment la porte, alors p’t’être que t’auras le temps… »

Car le Loup Garou ne se faisait pas d’illusion, même alors que sa transformation n’était pas encore complète, l’odeur de la rouge et or lui emplissait les narines. S’il cédait maintenant, le monstre aurait tôt fait de sentir sa piste, de se jeter à sa poursuite et de la rattraper dans le tunnel.

Enfin, encore fallait il qu’il tienne jusque là.

L'ingénue.

Finalement, peut-être que l'irlandaise ne portait pas si mal sa cicatrice. Cette pensée fugitive traversa son esprit tandis que Morgan se redressait. Le regard planté dans celui du garçon, Page le vit se déplier et bientôt arriver en station debout, la dépassant à présent. Son coeur battait à cent à l'heure. L'enfant se transformait.

Une lueur au fond du regard de son collabo. Page fit un pas en arrière, brisant le contact visuel qu'elle avait maintenu jusqu'alors avec le Serpentard. Ce qu'elle avait lu dans les prunelles de son cadet lui avait glacé les sangs. Enfin, elle remarqua la transformation radicale qu'avaient subi les jambes du Vert et Argent. Ce n'étaient plus des jambes. Alors que la lumière finissait de mourir, Page comprit.

La voix méprisante de Rogue explosa dans son esprit. "Les loups garous sont un fléau pour la condition sorcière". HOLY SHIT. Les souvenirs affluèrent, confus et désordonnés, s'entrechoquant dans le crâne de la Rouge et Or. Transformation. Chair. Douleur. Potion. Instinct.

Lorsqu'une voix rauque s'éleva, la troisième année sursauta, pointant sa baguette... Sa baguette ?! Mais quand donc l'avait-elle attrapée ? Sans se poser plus de questions sur la manière dont son instinct de survie lui avait fait saisir la seule arme qui puisse lui permettre de se défendre, la rouquine dirigea son ustensile vers la créature qui venait de s'exprimer. Car la voix n'avait rien de celle de Morgan. Et Page savait à présent que bientôt, il ne resterait plus rien du malicieux Serpentard. Que la Bête reprendrait le dessus.
Et pourtant, elle se raisonnait. Ce n'était pas un monstre. C'était son collabo. Malade. Elle se forçait à graver cette réalité dans son esprit.
La gorge trop sèche pour rajouter quoi que ce soit à la proposition du Loup en devenir, la rouquine emboita le pas de l'enfant qui montait déjà dans les escaliers, la main crispée sur sa baguette. Il avait raison. Si elle voulait sortir de cette cabane vivante, le seul moyen était d'enfermer la Bête. De l'éloigner d'elle le temps qu'elle puisse se mettre hors de portée. Comme le château lui paraissait loin à présent !

Plus d'une fois depuis son arrivée dans le monde magique, elle avait eu peur. L'agression de Pré-au-lard. Les cachots. Le troll. Mais cette fois, c'était différent. Cette fois, la créature qui se dressait face à elle... C'était un ami. Mais un ami incontrôlable. Bientôt capable de la blesser sérieusement - de la tuer ? - alors même qu'il n'était plus lui-même. Et cela changeait tout. Car si elle n'avait eu aucun scrupule à balancer tous les sortilèges connus sur le troll dans la forêt interdite, quitte à lui faire du mal pour en réchapper, ce soir, il lui était impossible de tenter n'importe quoi. Si elle blessait le Loup, si un accident arrivait... C'était le sale gosse qui en faisait les frais à l'arrivée. Alors oui, cette fois, Page tremblait de tous ses membres.
Ce fichu hasard l'avait mise dans de sales draps, et il était à présent trop tard pour reculer. Il fallait qu'ils trouvent une solution pour que demain matin, Rouge comme Vert puissent être entiers.

Mentalement, la rouquine répétait en boucle le Stupéfix appris avec l'Armée de Dumbledore. Elle n'avait pas eu l'occasion de l'utiliser souvent, et vu son niveau scolaire, elle n'était pas persuadée qu'il fonctionnerait du premier coup, mais c'était la meilleure défense qu'elle pouvait envisager pour l'instant. Immobiliser le Loup Garou restait la meilleure alternative pour ne blesser personne. Aussi la troisième année se répétait-elle inlassablement le sortilège, prête à le lancer à tout instant.

Pour le moment, les deux élèves atteignaient le palier, et Page regardait avec un détachement dû au choc de la compréhension les mains de son collaborateur qui, à mesure qu'il prenait appui sur les murs de bois pour se hisser, s'étaient allongées et avaient vu leurs ongles lentement pousser et durcir. La Bête allait être là d'un instant à l'autre.

- Grouille Morgan, s'étrangla la fillette. Fonce là-dedans que j't'enferme. Faut... qu'on en sorte tous les deux vivants.

L'histoire se répétait.

Chaque nouvelle marche était à la fois une torture et une nouvelle épreuve. Comme cette nuit là, où il avait dû gravir à moitié mort l'escalier menant à la sortie de la cave. Peut être que quelque part dans le ministère, au département des mystères, se trouvait une prophétie lui étant destiné et le mettant en garde contre tout ce qui possède des marches.
Chaque pas était une nouvelle lutte contre le Loup dont la faim était de plus en plus attisée par l'odeur de la Gryffondor à portée de griffe juste dans son dos. Tantôt, la pensée que tout était foutu s'imposait dans l'esprit du garçon, il la repoussa en revoyant la rouquine armée. Avec sa baguette d'ors et déjà pointé sur lui, elle partait déjà avec un atout dans sa poche. Une nouvelle marche, maintenant, c'était la colère et la haine qui venait s'infiltrer dans sa volonté. Il les chassa en se remémorant la chaleur de sa collabo' dans son dos lors de leur excursion dans la réserve de la bibliothèque. Plus que deux avant d'atteindre enfin le tant convoité palier. Le Loup persistait à faire tomber le morveux, lui craquait si facilement et le laissait libre d'agir à sa guise toutes les autres nuits, ce lâche qui ne s'était jamais battu. Et pourtant, quand l'irlandaise et lui avait fondé le Fight Club, ce n'était pas pour faire salon de thé. Pour l'ultime marche, l'héritière de Godric se chargea elle même d'éloigner les mauvaises pensées de sa tête.

Oui. Il fallait qu'ils s'en sortent vivants tous les deux. Le serpentard ne voulait pas mourir, mais pire encore, il ne voulait... Il ne pourrait pas vivre avec le sang de Page sur les mains. Il eut une montée d'angoisse. Non, ça n'arriverait pas, non, il ne fallait pas qu'ils s'en sortent : ils s'en sortiraient, point.

Enfin, il y était, cela n'avait pas dû prendre plus d'une minute, mais c'était toujours une minute de trop face à la montée en puissance de la bête. Il se précipita à l'intérieur de la pièce exiguë. Dans ses derniers soupçons de conscience, Morgan cherchait de quoi consolider sa propre cage. Son regard trouva rapidement de quoi faire : un sommier à moitié pourri gisait dans un coin de la piaule. Ni une ni deux, le lycanthrope s'en empara et le tira sans aucun effort contre la porte. Le gamin fut surpris de sa propre force, et en même temps inquiété. Pas grand chose ne devrait pouvoir faire face à ça à main nue. La fureur de la bête monta d'un cran, et le serpentard sentit sa conscience vaciller. L'animal savait ce qu'ils tentaient de faire, et cela le mit dans une colère noire. Le sale gosse sentait ses dernières barrières tomber.
Il eut une dernière idée. Il avait beau prier qu'ils n'en n'arrivent pas là, que la barricade tiendrait, mais sa raison savait bien que tôt ou tard ça lâcherait... Et au vu de la force qu'il pouvait déployer sous cette forme, ça serait l'option tôt. Alors il se mutila. Il utilisa les propres griffes du lycan pour s'acharner avec force sur ses pattes. Le moment venu, la bête serait nettement moins rapide que ce qu'elle aurait dû être. Le gamin s'acharna comme il put, chaque nouvelle entaille serait une seconde de plus pour la fuite de la rouquine. A chaque blessure auto-infligée, c'était trois signaux de souffrance qui déferlaient sur lui. Son propre corps, déjà bien trop abîmé pour un enfant de son âge, sa propre conscience qui y était rattachée, et le Loup, qui cherchait d'autant plus à abattre la conscience du gamin au fur et à mesure que le sang perlait sur le sol... Et ce jusqu'à ce que l'enfant soit trop épuisé mentalement pour tenir d'avantage la charge. La cadence de l'auto-mutilation diminua pour finir par s'arrêter, et la dernière trace d'humanité disparu du regard de l'animal.

C'était fini.

En un hurlement de rage, le Loup se jeta avec fureur sur le peu qui avait été fait pour l'arrêter par les deux collabos. D'un coup de patte rageur, les linteaux de bois volèrent en éclats. La bête transperça de son autre patte la porte, et guère plus longtemps après, le monstre était dans le couloir, les débris de sa trop frêle prison éparpillés sur le sol. Il était libre.

L'histoire allait encore se répéter, comme avec Ange. La chasse pouvait commencer.

Maintenant qu'elle avait compris quel mal frappait son collabo', la rouquine savait que chaque seconde pouvait compter. La montée des escaliers, à ce titre, lui avait paru interminable. Mais enfin, ils y étaient. Tout était délabré, et la lueur du crépuscule parait le bois de couleurs de feu en train de mourir. Morgan, enfin, la créature, se précipita dans la petite pièce. L'heure approchait. Frénétiquement, les deux acteurs de la scène se dépêchèrent de barricader la porte du mieux qu'il le purent : après que le lycanthrope eut commencé à traîner des meubles de son côté, Page avait placé la baguette entre ses dents et avait commencé le travail de son côté, le plus rapidement possible. Mais si le loup semblait doué d'une force surhumaine, l'irlandaise, elle, était un petit gabarit, et l'adrénaline avait beau décupler ses forces, elle ne parvenait pas à traîner les débris les plus lourd. Elle monta rapidement quelques planches en travers de l'encadrement de porte, mais elle doutait que cela soit bien efficace. Elle sentait un noeud se créer insidieusement dans son ventre, au fur et à mesure que les objets s'entassaient, et qu'elle s'apercevait de la fragilité de l'ensemble. Par acquis de conscience, elle lança un Incarcerem, dans le fol espoir de solidifier l'ensemble à l'aide des liens magiques.
Subitement, la troisième année prit conscience... du silence. Enfin de l'arrêt des bruits de meubles que l'on traîne, du barda que l'on jette. Seuls des grognements lui parvenaient de la petite chambre. La lionçonne n'avait pas la moindre idée de ce que pouvait faire le loup, mais il n'était plus temps de traîner. Elle avait fait du mieux qu'elle avait pu. L'heure était à présent à la retraite straté...

Un fracas interrompit la bonne résolution de la rouquine. Dans une pluie d'éclats de bois et un vacarme de tous les diables, la maigre barricade des deux sorciers explosait.

La Bête était là.

Prise de court, la rouquine avait reçu plusieurs débris de plein fouet, et avait chuté en arrière, contre la cloison de bois. Fort heureusement elle n'avait pas lâché sa baguette, la serrant au contraire à s'en faire blanchir les jointures. Terrifiée, elle regarda la silhouette du Loup Garou se détacher dans l'encadrement de la porte à présent ouverte, les rayons de la lune l'éclairant à contre jour.

Il n'y avait plus aucune trace du Serpentard dans la créature. La transformation était complète, et dans son regard brillait une lueur que Page n'avait encore jamais vu que chez une seule autre personne. La réaction, épidermique, ne se fit pas attendre.

- INCARCEREM ! hurla-t-elle.

[HJ : tu fais ce que tu veux du sort, tu le prends ou pas, tu cognes ou pas, fais-toi plaisir, Page encaisse niarkhéhé

]

Le service à domicile, c'était pas si mal.

A peine la prison tombée que le loup trouvait sur le pas de la porte son repas. Un petit tas de chair était avachi contre la cloison de bois, manifestement propulsée par sa violente sortie. Le Loup sentait sa peur et se délectait de cette aura de terreur. L'odeur de la fille le rendait fou tant sa faim était intense et tant les petits êtres avaient vainement tenté de le contenir. La bête n'aurait même pas pu définir laquelle des deux proies étaient la plus appétissantes tant la faim l'aveuglait. Quoique, la première, il avait eu le plaisir de la chasse qui s'était mêlé au reste. Pour un prédateur, rien ne valait une bonne partie de chasse, la viande n'en n'était que meilleure. Le monstre ne pourrait apprécier de la nourriture si elle ne s'était pas imprégnée de terreur avant. En plus, la dernière fois, il était à l'air libre, et non cloisonné dans une si étroite cabane de bois. Mais la dernière fois, le gibier était aussi parvenu à s'enfuir. Cette fois, cela n'arriverait pas.

Sauf que si un des petits tas de viande avait choisi de courir, celui-ci prit plutôt l'option défense.
Le gibier brandissait un petit bout de bois, et de celui-ci jaillit des cordes qui vinrent entraver le monstre... Ce qui eut pour effet de le mettre dans une colère noire. L'autre avait déjà tenté de l'enfermer, et il ne supportait pas ça. Poussant un hurlement de rage, il se démena avec rage et son bras droit ne tarda pas à se défaire des faibles cordes qui cédèrent pour la plupart. Et d'un mouvement brusque, il l'abattit sur l'épaule de la petite humaine. Deux griffes acérées s'y enfoncèrent légèrement et il la propulsa avec force et violence dans l'étroit escalier.

Il tenta de faire un pas en direction de ce dernier, mais une douleur et un blocage l'empêcha d'avancer ses pattes. Baissant le museau, la bête se rendit compte que les cordes qui avaient été utilisé pour tenter vainement de consolider sa cellule s'étaient enchevêtrées autour de ses pattes ensanglantées par les mutilations. Ils avaient décidément tout fait pour le contrarier. Mais s'ils croyaient que quelques plaies et des cordes si insignifiantes pouvaient arrêter la fringale qui était sienne... Il arracha avec force et grognements les dernières cordes qui l'entravait faiblement avant de se précipiter à toute allure dans les escaliers retrouver son cass'dalle, où qu'elle put aller durant ses poignées de secondes de répit.

C'estMorganC'estMorganC'estMorganC'estMorganC'estMorgan... se répétait inlassablement la fillette. Modérer ses sorts. En sortir vivants tous les deux.
Pourquoi diable n'avait-elle pas lancé le Stupéfix mûrement préparé à l'avance ? Pourquoi un bête Incarcerem ? La peur avait simplement été trop grande à l'apparition de la Bête. Page avait instinctivement lancé un sortilège qu'elle maîtrisait bien, contrairement au Stupéfix. Pourtant, elle savait que celui-ci serait bien plus efficace si jamais elle le réussissait, lui donnant plusieurs dizaines de secondes pour fuir, alors que ses faibles entraves...

...venaient de céder. Pas le temps de dire Quidditch qu'un bras musclé et poilu s'abattait sur la rouquine, lui arrachant un cri de douleur. La violence du choc l'envoya valser vers les escaliers, qu'elle dévala en roulé-boulé, recroquevillée sur elle-même dans un réflexe non contrôlé. Ce qui ne l'empêcha pas de heurter murs, marches et rambarde au passage. Complètement sonnée et le souffle coupé, l'irlandaise se remit tant bien que mal à quatre pattes, tandis que le Loup, encore à l'étage, poussait des hurlements de fureur. Son épaule lui faisait un mal de chien, et tout son corps était endolori par la chute. Mais la frousse anesthésiait la douleur pour l'instant, et l'ultime but était de fuir à présent. Le sang coulait le long de son bras gauche, s'étiolant en corolles rouges sur le bandage de son avant bras. Un grognement plus fort que les autres le fit sortir de sa torpeur, et la gosse se redressa pour détaler, cahin caha. Elle lança un sortilège de croche-pied en aveugle à l'arrière, car déjà elle entendait une cavalcade dans les escaliers. Il fallait qu'elle atteigne ce fichu tunnel. Là dedans, au moins, le loup aurait une marge de manoeuvre réduite, et elle pourrait l'inonder de sortilèges sans risque de le rater.

Encore fallait-il y arriver.

Les escaliers, c'était définitivement plus dur de les monter que de les descendre.

Les marches que le serpentard avait mis des lustres à gravir, le loup les descendit en moins de temps qu'il n'avait fallu pour en monter une seule marche il y a quelques instants. Il atterrit lourdement sur le parquet du rez de chaussé, et se tapi sur le sol en chasseur prêt à bondir sur sa cible. Un sort lancé à l'aveuglette fusa au dessus de sa tête. Cette proie était amusante, même dans sa situation elle cherchait à tout prix à riposter. C'est que son mental n'était pas encore à bout.

Et le monstre voulait faire monter sa terreur à son paroxysme. Prenant appui sur ses pattes arrières, il effectua un puissant bond et éventra le parquet à un cheveu du tas de chair et se retrouvait derrière elle, il sentait littéralement sa respiration rythmée par le manque de souffle et la peur.

C'était une chance pour la rouquine que le loup, encore jeune, éprouvait le besoin de jouer avec la nourriture avant de la manger. ~~C'est ce qui arrive quand les papas loups n'éduquent pas leurs petits après les avoir mordus.~~ Car sinon il ne faisait nul doute que le coup au lieu de défoncer le parquet juste à côté du bout de viande, cette dernière serait déjà devenue du hachi-parmentier.

D'ailleurs, ce n'était pas suffisant s'il l'attrapait maintenant, ils l'avaient tant fait attendre, ils avaient tant retardé ce moment, ils avaient tant tenté de le cloîtrer et la nuit allait être encore si longue que le Loup ne voulait pas que ça s'arrête maintenant. Il laissa la souris prendre quelques secondes et s'engouffrer dans le tunnel, le temps qu'il lécha le sang sur ses griffes. Ce fut comme s'il buvait pour la première fois de l'eau après des années de sécheresse. Maintenant, l'avis de la Bête était catégorique, rien en ce monde ne valait le sang humain.

Un impact au sol, faisant trembler la structure entière de la cabane. La situation aurait-elle été moins dramatique que Page aurait plaisanté sur le poids que la transformation avait fait prendre à son collabo'. Mais ce n'était pas *du tout* le moment de plaisanter. En panique, la rouquine tâtonnait sur le mur, à toute vitesse et à sen écorcher les mains, pour trouver la sortie, à présent que l'ombre avait gagné sur la lumière du jour.

Un silence. Bref, mais glacial. Le loup avait pris son élan et s'abattit dans un fracas de l'autre côté de l'irlandaise, qui ne put réprimer un cri d'effroi. La Bête s'était écrasée à quelques centimètres d'elle, et elle pouvait quasiment sentir son souffle sur sa peau. L'odeur en tous cas, était prenante, presqu'enivrante. Une odeur forte et musquée. Une fragrance sauvage et bestiale, mêlant la transpiration à l'odeur de poil et d'animal farouche. Page eut même l'impression de "sentir" la puissance du lycanthrope. Elle eut un haut le coeur, et manqua de défaillir tant la proximité de la créature lui fichait les foies. Ses jambes étaient flageolantes et elle dut faire appel à toute sa volonté pour ne pas abandonner et se laisser tomber au sol.
L'animal sembla la contempler un instant, et la troisième année ne se posa pas plus de questions. Elle mit à profit ce bref répit pour s'engouffrer par le passage que ses mains, qui n'avaient pas arrêté de tâtonner par réflexe de survie, venaient de trouver. Un souffle d'air ténu y circulait, laissait entrapercevoir un espoir, au bout du tunnel. Hors d'haleine, la gosse se mit à courir, regrettant amèrement que la magie ne put lui permettre d'obstruer le conduit derrière elle. Ralentissant un bref instant, elle se retourna pour lancer un nouveau sortilège un peu approximatif pour couvrir sa retraite.

- Cracbadab... OUCH !

Le sortilège avorté alla s'écraser au plafond, faisant tomber un peu de terre. La rouquine, tournée vers l'arrière, n'avait pas vu arriver une des grosses racines qui pendait du plafond, et l'avait prise en pleine tempe. Stoppée net dans la course, l'irlandaise dérapa et atteignit durement le sol, à nouveau sonnée, alors même qu'elle entendait les grognements du loup se rapprocher...

Assez de temps s'était écoulé, assez d'avance avait été donné. Le jeu allait maintenant prendre une autre forme.

S'immisçant dans le souterrain à pas de velours, le loup entra dans les ténèbres du tunnel sans un bruit. Pour un humain banal, l'étroit conduit ne devait être qu'obscurité et odeur rance de renfermé si typique de ce genre d'endroit. Pour le lycan, c'était un vrai festival son et parfum. Il entendait les nombreux rongeurs courir le long des parois, quelques rats, des souris, des mulots qui filaient se planquer dans leurs trous, guidés par leur instinct ayant ressenti l'arrivée du monstre. Il entendait au loin le vent souffler au delà du tunnel, comme une ultime promesse pour la fillette et comme le chant de la liberté pour lui. Et puis surtout, il l'entendait, elle, sa distraction. Son action d'il y a un instant avait eu son petit effet, à la peur se mêlait la panique dorénavant, au point qu'elle tenta derechef d'utiliser la magie contre lui. Sans succès, puisqu'elle tomba au sol après avoir percuté une des nombreuses racines qui piégeaient sol et air du conduit.

S'en était trop facile, même si ses yeux percevaient à travers le noir des lieux, rien que son ouïe et son odorat étaient suffisants pour la détecter avec précision. Il commençait à trop connaître sa proie, cela était moins amusant. Il allait falloir amplifier encore plus le jeu pour que l'intérêt de la chasse reste intact.

Puisqu'elle avait choisi la voie de la riposte, le loup-garou allait la pousser encore plus dans ce sens. Profitant du peu de luminosité ambiante, la bête se tapi dans l'ombre, silencieuse, et avancait à pas feutré en direction du petit tas de chair. Tantôt, lors de ses fuites, il viendrait proche d'elle et grognerait à ses oreilles. Tantôt, lorsque la capacité d'attaquer lui sera revenu, il se cacherait dans le noir afin qu'elle ne sache où tirer.
Elle ne pourrait pas lancer à la fois des sorts et éclairer le souterrain. Elle ne pourrait pas fuir et guetter la bête dans son dos en même temps. Elle allait devoir faire des choix. Et une seule erreur et ce serait la fin.

Comme cette nuit là par une nuit pluvieuse à Londres où Morgan avait choisi de tourner à droite, droit dans un cul de sac.

C'était fini. La Bête allait arriver, et elle serait à sa merci. La fin serait brutale, sanglante... Pas le genre de mort qu'on imagine à 13 ans.
Secouée, endolorie, la gosse était en train de lâcher prise. Les faibles rayons de la lune qui parvenaient jusqu'à l'entrée du tunnel lui avaient permis de deviner une ombre y entrer, tandis qu'elle essayait de reprendre ses esprits.
Holy shit. Elle n'allait pas abandonner comme ça ! "En sortir tous les deux vivants !" Voilà la promesse qu'elle s'était faite. Et, foi d'irlandaise, elle comptait bien la tenir. Une nouvelle vague d'adrénaline déferla dans ses veines. Non. Elle n'allait pas se laisser croquer ainsi. La peur était toujours là, bien trop présente, nouant ses entrailles, mais la détermination de la lionçonne reprenait doucement consistance. Se relever sur un coude. Ne pas écouter les cloches qui tintaient dans sa tête. Se lever complètement, vite, sans prendre appui sur le bras gauche. Temporiser, rapidement, pour essayer de redonner un rythme moins effréné à la situation.

- Lumos !

A présent remise sur pieds, bien que toujours un peu flageolante, l'irlandaise brandit sa baguette vers la cabane, afin d'essayer de localiser le lycan : les ténèbres dans lesquelles elle s'était enfoncée sans réfléchir dans le vain espoir de fuir ne pourraient être qu'un handicap pour elle. Il fallait qu'elle voie venir la menace. Il fallait qu'elle puisse réagir, et ne pas se laisser surprendre. La lumière était vacillante, tant à cause de son épaule blessée que de la fatigue croissante - faire fuser du sortilège à gogo, ça use sa petite sorcière, ma bonne dame - mais suffisante pour voir à quelques mètres devant elle. Le loup serait obligé de sortir des ténèbres si jamais il voulait l'attaquer. Et là... là, il n'y aurait plus qu'à prier Merlin et le Dieu du Nutella pour que la gosse soit assez rapide pour lui balancer un sortilège dans les crocs avant que ses puissantes mâchoires ne parviennent à goûter sa peau pâle.

- Tu m'auras pas... Chui une dure à cuir. Une saloperie de rouquine irlandaise. Le sale mangemort m'a pas eue. Le troll m'a pas eue. Ni Ombrage ni les Carrow ne m'ont eue ! TU M'AURAS PAS !

D'abord murmurée d'une voix rauque, la tirade s'était terminée en cri. Elle ne comptait pas un seul instant impressionner le poilu mais... elle avait besoin de s'encourager. Et même si tous les évènements énoncés ne s'étaient pas tous terminés de manière heureuse, Page était encore là. Ils ne l'avaient pas eue.

Les irlandais bornés ont la couenne dure. Et la troisième année ne comptait pas démériter.

Ca le rendait fou.

Parmi toutes les odeurs du souterrain, l’odeur de la jeune fille le rendait fou. L’odeur du sang coulant de son bras gauche le rendait fou d’envie. Maintenant qu’il y avait gouté, s’il aurait du le décrire le monstre aurait pu trouver 1000 façon de le faire, la majorité même pas traduisible en langage humain. C’en était une véritable torture, un supplice de Tantale, d’avoir ce met à portée de crocs sans y toucher. Mais le repas n’en n’était pourtant que meilleur plus il était désiré et attendu. Et surtout, il en devenait divin lorsque la terreur en avait imprégné la chair.

Le petit tas de chair vociféra quelque chose dans le vide. La bête n’y prêta même pas attention, comme si la voix d’un bout de viande l’intéressait. Après tout, qui se préoccuperait des pensées des gibiers à l’abattoir ? Néanmoins, il fut contrarié. Elle restait plantée là, malgré ses grognements et le noir oppressant, elle restait plantée à la même place tournée dans sa direction, sans même tenter de fuir un tout petit peu.

Ce n’était pas drôle. Son jouet ne faisait pas ce qu’il attendait d’elle. Et que faisons-nous quand un jouet est cassé ? Et bien on ne joue plus avec et on le jette. Et dans le cas présent, puisque le bout de viande ne l’amusait plus, c’est qu’il était tant de passer à la ripaille. Il poussa un ultime hurlement à la mort dans l’étroit tunnel, générant un écho sans nom des plus glaçants, amplifié par le lieu. Puis il passa des ténèbres à la lumière, donnant presque l’illusion que le noir venait dévorer l’éclat généré par le lumos de part l’ombre que créait le Loup. La gueule ouverte laissant paraitre l’arme du crime, des crocs meurtriers aussi blanc et luisant que de l’ivoire, il s’approchait dangereusement de la rouquine avec un seul et unique but en tête.

Entre vie et trépas, tout n’était qu’une question de réflexe maintenant.

Assurant chaque pas avec précaution, la gamine commença à reculer lentement dans le tunnel, le cœur battant à cent à l'heure, les yeux scrutant frénétiquement les ténèbres du tunnel au delà de son halo lumineux. Elle n'avançait pas vite, mais, pas à pas, elle se rapprochait de plus en plus de la sortie, sans s'exposer trop à son adversaire. Elle avait mal au ventre, le souffle court, et les mains moites, mais elle sentait qu'elle avait réussi à rééquilibrer la situation un tant soit peu. Ce n'était plus le loup qui imposait son rythme. Page avait réussi à interrompre leur effrénée et macabre danse. Elle allait y arriver. Il fallait qu'elle y arrive ! Si le lycan continuait à rester à distance, elle pourrait sans doute atteindre l'autre bout du tunnel et alors, alors, il n'y aurait plus qu'à négocier le difficile passage du saule cogneur et enfin, le salut serait là. Poudlard à portée de main. Des soins. Les murs rassurants du château. Page sentit poindre les larmes. La tâche paraissait insurmontable. Jamais la Bête ne lui laisserait le temps d'arriver à l'autre bout du tunnel. Que croyait-elle ? Qu'il allait attendre bien sagement ? Que la lumière lui faisait peur ? Balivernes. Elle le savait. Il attendait simplement son heure. Et elle-même savait que jamais elle ne pourrait passer le saule cogneur avec le loup à ses trousses. Déjà libre de ses mouvements, c'était une catastrophe, alors poursuivie... Non, il fallait qu'elle trouve un moyen d'immobiliser la créature... Non, pas la créature. Morgan. Il fallait qu'elle parvienne à immobiliser son collabo' suffisamment longtemps pour prendre de l'avance et...

Soudain, un hurlement, à lui glacer les sangs. Avant qu'elle ait eu le temps de réaliser, une masse noire émergeait dans le halo de lumière, semblant emplir l'espace et absorber toute la lueur. L'instinct prit le dessus avant même que la rouquine n'ait eu le temps de réfléchir à ce qu'elle allait faire.

- STUPEFIX !

Cette fois, il était sorti. Avec précipitation et maladresse en raison de la peur, mais elle l'avait enfin lancé. Restait à savoir si cela serait suffisant pour stopper la masse de muscles et de poils qui fonçait vers elle à toute vitesse. Il le fallait. Car sinon, la mâchoire immaculée qui semblait luire sous le Lumos ne ferait qu'une bouchée de ses os sans que Page puisse rien faire pour se défendre.

Les mâchoires du Loup se refermèrent dans un claquement sinistre sur... Rien. Point de sang pour le rassasier, point du délicieux liquide pour le régaler. Ses crocs s'étaient refermés, et ne desserraient pas.

Tout s'était joué à une fraction de seconde, et à une fraction de chance. Le sort fusa alors que sa gueule passait pile devant la trajectoire de la baguette et heurta les crocs. Le sort n'avait pas affecté l'intégralité de la Bête, mais avait rudement bien fonctionné là où l'éclair de magie avait frappé. Le monstre avait beau s'acharner, sa mâchoire ne lui répondait plus et restait fermement close. Ce fut la goutte d'eau qui fit déborder le vase de sa fureur.

Le tunnel était étroit, même pour un être humain. Le Loup devait s'y déplacer à quatre pattes, et c'était entre autre pour cette raison qu'il n'avait pas tenté de saisir le petit bout de viande avant de mordre. Mais là, sa colère était telle qu'il se redressa du maximum qu'il put et se débattait contre cette entrave invisible qui lui muselait la gueule. Se débattant de toute sa puissance, son corps percutait les parois du souterrain, faisant tomber des mottes de terres et des cailloux. Mais force et rage ne parvenait à défaire l'invisible entrave.

Sa colère ne tarda pas à se reporter sur la fillette. Morte la bête, mort le venin disait le proverbe. C'était de la faute du tas de chair s'il était muselé. Plein de hargne, ses griffes ne tardèrent pas à voler en direction de la rouquine. Il enchaîna les attaques, mais la majeur partie devait sans doute partir dans les murs et le sol, tant l'espace restreint l'empêchait de donner pleine mesure à ses assauts. Néanmoins, le parfum du sang parvenant à sa truffe lui fit savoir qu'au moins un avait fait mouche. Cette odeur dont il ne pouvait se repaître. Il en devint d'autant plus fou de rage.

Le Loup luttait contre le sortilège, et ses dents se desserraient lentement, mais sûrement, de leur étau. Ce n'était plus qu'une question de temps.

Ce n'était pas encore son heure. Page ne mourrait pas encore ce soir. En tout cas pas en cet instant. Par un hasard miraculeux, le sortilège lancé avec la force du désespoir avait fait mouche. Certes, il n'avait pas été aussi efficace qu'escompté mais... au moins avait-il stoppé la Bête dans son élan. La rouquine ne comprenait pas exactement ce qui s'était passé, mais ce qu'elle savait c'est qu'au moment où elle avait crispé ses paupières, elle pensait ne jamais les rouvrir, et pourtant, alors que le noir s'était à nouveau abattu sur le tunnel, elle avait pu entendre les grognements de rage de son adversaire. Quoi qu'elle ait pu réussir, cela lui avait sauvé la vie. Pour l'instant.

Comme dans un cauchemar, les ténèbres semblèrent s'agiter la fraction de seconde suivante. L'irlandaise fit un bond en arrière par réflexe tandis que la bête sautait en tous sens, de fureur, se cognant contre les parois. Page ne comprenait rien à ce qui se passait. Dans le noir, tout était confus, et la tornade de hargne, de puissance et de terre projetée était impossible à concevoir pour la gosse. Ses jambes se dérobèrent sous elle et elle tomba sur les fesses, incapable de tenir plus longtemps face à l'effroi personnifié. Pourtant, son instinct menait toujours la barque et, en aveugle, elle reculait, aussi vite qu'elle le pouvait. Bien lui en prit car bientôt, le lycan, fou de rage, battit des pattes en tous sens, enchaînant attaque sur attaque. La rouquine se prostra en position de défense, esquivant ainsi la plupart des attaques. Malheureusement, le tunnel n'étant pas bien large...

- Huuuunnnnnnng !

Plusieurs coups atteignirent leur cible, lacérant les chairs, projetant le liquide carmin contre les parois de terre. L'irlandaise crut perdre conscience à chaque blessure. Mais la flamme, la hargne, le désir de vivre, la maintinrent consciente. La vue brouillée de larmes, les membres tremblants de douleur, l'irlandaise, allongée au sol, tendit sa baguette dans un ultime réflexe de survie.

- Stupéfix... Stupéfix. STUPEFIX !

Un goût métallique inondait sa bouche mais elle continuait de cracher les sorts à la volée.

- Incarcerem ! Petrificus totalus !

La lueur des sorts éclairait le tunnel par flashs colorés, laissant deviner la montagne de muscles étendue au sol, sur laquelle la rouquine envoyait sortilège sur sortilège.
Hoquetant, elle finit par se relever, lâchant un gémissement de douleur. Elle ralluma la pointe de sa baguette de noisetier et observa brièvement la bête, immobilisée au sol.

- Morgan...

La tête lui tournait. Le loup était inconscient. Sa respiration soulevait son pelage hirsute par à coups. Page fit une grimace. Rien ne laissait deviner son collabo'. Elle ne s'attarda pas. Malgré la volée de sorts dont elle avait gratifié le loup, sans doute suffisamment pour assommer un cheval, le lycan semblait être un animal pour le moins robuste, et l'irlandaise ne comptait pas attendre pour voir combien de temps son anesthésie maison ferait effet.
Ahanant, elle se traîna sur les derniers mètres du tunnel, et prit une profonde inspiration avant de sortir à l'air libre. Il lui restait à passer le saule. Et elle n'était pas vraiment en état de gambader. C'était à peine si elle tenait debout.
Voilà la solution ! Se lançant à quatre pattes, la rouquine enchaîna les roulades, chacune lui arrachant un gémissement mais l'éloignant de plus en plus du pied de l'arbre.
Lorsqu'enfin elle fut hors de portée, elle se releva sur ses jambes flageolantes et contempla un bref instant le saule. Pas de signe du loup. Avait-elle réussi ? Tant qu'elle ne serait pas entre les murs de pierre du château, elle ne pourrait l'affirmer.
Clopin clopant, s'efforçant de maintenir ses mains sur ses plaies pour freiner la fuite du liquide vital, la rouquine se mit en direction de Poudlard. Elle avait besoin de soins. Rapidement. Mme Pomfresh allait avoir du travail.

Et Page espérait que Morgan lui en donnerait également le lendemain matin. Car alors, elle saurait qu'il en serait sorti vivant.

[Finiiiii ! merci infiniment Yeux

]

Le petit tas de chair avait fait fort.

Alors qu'elle venait de tomber au sol sous l'effet de l'assaut, le sac de viande était parvenu à lui lancer pas moins de trois stupéfix à la gueule. Le Loup fut immobilisé, et l'enchaînement des sorts eut l'effet d'une masse avec lequel on le frappait de plein fouet à répétition. Les cordes vinrent de nouveau l'entraver, et un dernier sort l'envoya au tapis. Tant de sort d'immobilisation avait été jusqu'à atteindre en partie diaphragme, bloquant et saccadant la respiration de la bête, et d'autres muscles important dans la gestion de tout corps, si bien que le lycan ne tarda pas à perdre connaissance.

Environ une heure plus tard, alors que l'efficacité des sorts commençait à se réduire, le monstre reprit conscience. Il était étendu sur le sol, et sa rage ne tarda pas à se remontrer. C'était la deuxième fois qu'une proie lui échappait. Il se débattit. Il tentait de faire lacher l'emprise des sorts sur ses muscles, il voulait être libre, lui qui passait la majeur partie du temps enfermé, il voulait se lancer à la poursuite du tas de chair, il sentait encore sa piste... Alors il se débattait, provoquant le déchirement tous les muscles trop paralysés par la magie. Il grogna de douleur, mais plus que la souffrance, c'était la haine qui l'habitait. Il voulait tellement la rattraper...

Il parvint à se redresser sur ses pattes. L'emprise des sorts était inégale, les régions où les sortilèges avaient frappé étaient dur comme de la rôche, et le reste le loup mettait toute son énergie à le mouvoir. Il tremblait littéralement de s'être relevé, mais la colère était plus forte, il se lança dans le tunnel aussi vite qu'il le put. Il la voulait, il la voulait, il la voulait, il la voulait...

D'un coup violent au coin de la truffe, le saule empêcha la bête de sortir du conduit. L'arbre avait été planté là pour en protéger l'accès, autant dans un sens que dans l'autre, et le loup ne s'acharna pas plus dans son état. La bête finit par se rouler en boule, faute de mieux, et sombra dans le sommeil pour le restant de la nuit...

* * *

Morgan s'éveilla avec les premières lueurs de l'aube filtrant à l'entrée du souterrain sous le saule cogneur.

Son corps n'était que souffrance et refusait de réagir. Le gamin resta un moment là, recroquevillé de douleur à même la terre humidifiée par la rosée du matin. Et pourtant, il devra bien bougé tôt ou tard. Le serpentard leva avec horreur ses bras endoloris à la faible lumière du levée de soleil. Ses mains étaient sales d'un mélange de boue et sang séché. Il ne lui fallut pas longtemps pour deviner à qui il appartenait.

Il se ratatina encore d'avantage sur lui même, en dépit de tout ce que ses muscles hurlaient à ses nerfs. Il voulait disparaître. Il savait qu'il devait retourner à Poudlard, mais il ne pouvait pas rentrer dans cette tenue. Il serait obligé de retourner à la Cabane Hurlante récupérer les affaires qu'il y avait laissé. Et en l'occurrence, il avait peur. Peur de découvrir ce qu'il pouvait y avoir au bout du tunnel, de voir les marques de ce qui avait bien pu se passer, voir pire. Comme il n'avait aucun souvenir, rien ne lui disait qu'il ne trouverait pas le corps de la lionçonne. S'il avait pu, il serait parti très loin de ce conduit symbolisme de tous ses cauchemars, mais il n'avait pas le choix...

Il vécut la remontée du souterrain comme son chemin de croix personnel.

Le gamin n'arrêtait pas de chuter, il aurait préféré continuer à quatre pattes ou en rampant, mais sa conscience l'assaillait à chaque fois de remords. C'était les bêtes qui se déplaçaient ainsi. Alors il se relevait, inlassablement, marchant courbé dans la souffrance plutôt que confortablement mais face contre terre. Il parvint au niveau de l'endroit où Page avait immobilisé la bête, et le champ de bataille lui arracha un frisson. Entre les éclaboussures sanguines sur les parois, les profondes marques de griffes un peu partout et les monceaux de terre, on voyait assez clairement le combat acharné qu'il y avait eu là. Le lycan dût faire appel à tout sa volonté pour sortir du souterrain et rentrer dans la maison.

Alors qu'il marchait sur le parquet pourri de la cabane hurlante, son propre sang qui coulait de ses pieds et de ses jambes lacérées venait se mêler aux tâches noirâtres laissées par les éclaboussures de celui de l'irlandaise. Tout autour de lui était de nouveaux chefs d'accusations au monstre qu'il était. Il pouvait visualiser ce qu'il s'était passé ici rien qu'en observant la Cabane Hurlante. Des traces de griffes qui couraient sur les marches et parois de l'escalier, de la trace d'impact de la bête lorsqu'elle a bondit, le parquet défoncé, les tâches séchées parsemées, l'éboulement de terre dans le tunnel... L'histoire de ce qui c'était passé cette nuit était littéralement gravée dans les lieux qui en furent le théâtre.

Il enfila les vêtements empaquetés dans un coin qu'il avait prévu à cet effet, ce fut une vraie torture de forcer l'extension de ses muscles pour y rentrer au point qu'il abandonna l'idée même de mettre plus que chemise pantalon. Il se sentait vraiment pas de se pencher pour enfiler et lacer ses chaussures. Néanmoins, le serpentard fut soulagé : nul cadavre dans la maison, la gryffondor n'était pas dans les parages. Elle avait donc réussi à s'enfuir. Mais elle devait être dans un sale état d'après tout ce qu'il avait vu.

Morgan rentra aussi vite que son corps en souffrance lui permettait. D'ailleurs, il allait même trop vite par rapport à l'étendue des dégâts musculaires. Il ne veillait pas particulièrement à ne pas aggraver son état, le lycan voulait savoir. Maintenant. Son esprit transcendera la douleur et ne se donnerait de répit que quand il saura comment allait sa collabo'.

La chance fut pour une fois avec lui une fois dans l'école, il était à la fois suffisamment tôt et suffisamment tard pour qu'il n'y eut ni élève levé en route vers la grande salle ni préfet finissant la dernière patrouille nocturne. Heureusement, car il aurait été bien en vaine d'expliquer l'état débraillé et couvert de large plaque d'hématome dans lequel il se trouvait. Sans même parler des gouttes de sang qui perlaient de ses jambes, Rusard allait être ravi... Et il eut encore une fois l'occasion de maudire des escaliers qu'il mit des plombes à gravir : qui avait eu l'idée de coller l'infirmerie au premier étage et non au rez de chaussée ?

Il n'eut pas à attende longtemps avant de voir Pomfresh, puisque ce fut elle qui, sortant sur le pas de la porte de son infirmerie, comme si elle l'attendait, vit arriver le garçon et alla à sa rencontre.

"Ah, te voilà enfin, je m'inquiétais."

Et sans un autre mot, elle attrapa avec douceur le bras du lycan afin de l'aider à marcher jusque là où elle pourrait lui donner tous les soins dont il avait besoin. Mais ce n'était pas que pour ça que le serpentard avait mis tant de hâte à se rendre à l'aile hospitalière. Non, c'était autre chose qu'il voulait savoir à tout prix.

"P... Pag..."

Son nom lui était impossible à prononcer. Pas après tout ce qu'il lui avait fait. L'infirmière lui lança un regard inquiet, alors Morgan prit une inspiration. Il fallait qu'il sache, alors il fallait qu'il lui pose la question.

"Mon amie, comment va t'elle ?
- Oh, ne t'en fait pas mon garçon. As tu déjà vu un élève quitter mon infirmerie sans avoir la pêche ?"

Elle arbora un sourire à la fois sincère, rassurant, réconfortant et déconcertant tout en même temps. Comme si plus que de le rassurer, elle était ravie d'entendre le mot "amie" de la part du lycan, mot qui semblait avoir disparu du vocabulaire du garçon depuis qu'elle l'avait accueilli et régulièrement suivi dans son infirmerie. Et pourtant, cela avait été plus simple pour lui de l'appeler ainsi. Page, c'était la fille qu'il avait blessé et tenté de tuer. Son amie, c'était la fille avec qui il avait fait le FC, avec qui il avait été dans la réserve de la biblio, avec qui il se disputait pourtant mais qui n'avait pas fui en le voyant.
Les rideaux séparant les différents lits de l'infirmerie avaient été tiré pour la nuit, et Morgan ne put voir la gryffondor, alors que Pomfresh le tirait déjà en direction d'un sommier. Le serpentard savait qu'il était vain de chercher à s'opposer à la volonté de l'infirmière sur son terrain, alors il la laissa faire ses soins et prit la potion de sommeil qu'elle lui donna. Le repos restait la meilleure des médications selon elle. Et il s'endormit, il faudra qu'il lui parle... Mais demain.

Car il y avait encore un demain pour tous les deux.

[FINIIIIIIII I love you

merci à toi pour ce super topic ~~fusée~~ cheers

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