Qu'est ce qu'il faisait ? Où est-ce qu'il était ? Etait-il à une place où le ciel continuait de le protéger ?

Kelsey ne l'avait plus vu depuis qu'elle avait retrouvé sa longue chevelure blanche. Son regard courroucé en suivant les longues méches qui voltigeaient, sa main tremblante lorsqu'il en avait prit une dans sa main. Pas tremblante d'une émotion joyeuse. Non. Lui, il rêvait de les lui recouper. Et le clou du spectable c'était lorsque d'une voix complétement dénuée d'intonation mais semblant venir du plus profond de sa haine, il avait désigné d'un coup de tête la porte menant à la Salle Commune depuis le dortoir où ils étaient.

-C'est pour lui que tu l'as fait pas vrai ? Pas pour notre mère.

Sa petite flamme s'était alors volatilisé de son coeur, semblant se diluer dans son sang pour s'évaporer à travers la peau. Elle ne l'avait pas sentie sur le coup, mais elle le notait maintenant, dans cet endroit sombre, sale et malodorant qu'était la volière. Peu importe le vent qui soufflait dans cette pièce, l'odeur des hiboux semblait plus tenace que n'importe quoi d'autre. Les cadavres de petits animaux jonchaient le sol, et agenouillée derrière les chouettes hulottes et hiboux grand-duc qui dormaient, l'enfant aux cheveux couleurs neige pleurait sa perte. Le fait qu'il l'ait toujours supporté dans le passé, le fait qu'il la faisait toujours sourire. Le prix que lui coûtait cette perte lui semblait absurde. Elle, qui pour survivre tendait ses mains et se débattait pour se remettre. Pourquoi est-ce qu'elle s'en voulait autant ?

Elle n'avait que sauvé sa peau, parce qu'il valait mieux prévenir que guérir. Parce que sinon elle était bonne pour rejoindre Dumbledore de l'autre côté. Parce que son frère, lui, n'aurait pas autant hésité. Lui, il s'en serait moins voulu. Et elle, elle aurait été bouffée par le désespoir. Oh pour se consoler elle avait les autres et Damien. Oh, elle faisait en sorte de s'occuper avec eux, de se divertir pour ne pas trop remarquer sa misère. Mais lorsque les activités s'arrêtaient, lorsque la nuit tombait. Alors ses angoisses venaient l'étouffer dans son lit, l'empéchant de trouver le repos et la paralysant dans sa peur du rejet fraternel si elle venait dormir avec Gabriel. Elle avait peur de l'éxaspérer. Qu'il lui dise "... Quoi ?" si sa présence se faisait trop imposante pour lui. C'était stupide, parce qu'elle pouvait se réconcilier avec, elle le savait, autant que le vent le lui soufflait à l'oreille. Elle pouvait retrouver tout ce qu'elle avait perdu. Mais elle ne le ferai pas.

Sa poitrine était opprimée par la solitude et le désespoir, et son coeur semblait être brisé. Même lorsqu'elle était avec les autres, elle se sentait seule. Même avec Damien, comme elle l'avait prédit. Sa présence ne pouvait pas remplacer celle de son frère, mais elle ne pouvait pas non plus se passer de la sienne. De leur silence qu'ils se partageaient. Elle ne pouvait pas non plus lui en parler, il ne pouvait pas comprendre, il n'avait pas de frère ou soeur. Et elle ne voulait pas le mêler à ça, parce que de toute façon elle savait qu'il n'aimait pas se mêler des affaires des autres.
En parler avec Anazel n'arrangerait rien non plus, elle trouvait normal et dans leur bien qu'ils se séparent un peu. En parler avec Canelle... Bien que la jeune-fille soit intelligente, il semblait à Kelsey qu'au niveau relationnel, en ce moment, elle soit assez renfermé. Alors elle ne pourrait pas l'aider.

Et ce sourire qui remontait de ses souvenirs...

Kelsey hoqueta, se penchant en avant pour laisser son haut de coeur sortir en une éclaboussure orangée sur le sol. Elle se répugnait, se faisait honte et en plus de cela, elle se disait ironiquement qu'au final, ils s'étaient bien trouvé le brun et elle. Deux anorexiques : youpie ! Elle releva la tête, s'essuyant la bouche dans sa manche puis sortie sa baguette pour la pointer sur sa honte.

-Recurvite.

Elle réitéra le sortilège sur sa manche et la trace malodorante de son rejet disparut, emportant avec l'humidité de ses sanglots essuyés précédemment. Il serait là, il l'aurait engueulé pour la faire se ressaisir, puis il l'aurait consoler.

Toujours à m'encourager, retournons dans ce temps là.

Les larmes remontèrent dans ses yeux impairs et déjà humides.

Je suis sure que nous serions bien cette fois-ci.

Elle replongea sa tête sur ses genoux en se mordant les lèvres pour ne pas manifester trop bruyamment son désespoir, se contentant d'hoqueter en pleurant.

Je rierai toujours à tes côtés.

-Qu'est-ce que tu fais maintenant ? Où ça ? souffla-t-elle dans un murmure qui se termina en hoquet.

Elle ne l'avait plus croisé dans Poudlard depuis ce week-end. Elle n'en avait plus entendu parlé, nul part. Comme s'il n'eut jamais existé. Anazel ne disait rien sur lui pour ne pas blesser la gamine, Canelle ne demandait pas de ses nouvelles, comme si elle avait eut vent qu'ils étaient en froid. Et si elle le cherchait, le trouverait-elle ? Aurait-il un sourire comme avant en la voyant ? Non.

Non, elle ne pouvait pas aller le chercher, se serait être faible envers sa protection, ce serait se laisser alors. Ses larmes se tarrirent et elle s'adossa contre le mur crasseux dans un soupir. Elle ne pouvait plus qu'espérer qu'il aille bien, et qu'elle le croiserait, au détour d'un couloir, seul à seule, histoire de pouvoir profiter d'un moment entre eux, même si la foule autour d'eux se presserait pour aller en cours, et même s'ils ne diraient rien. Elle, elle profiterait de la vue de son frère en face d'elle pour se rassurer.

L'albinos prit une mèche de cheveux dans entre ses doigts et la fixa dans une expression lasse. Que sa mère aille en enfer. Elle n'avait pas le moindre instant pensé à séduire Damien avec ses cheveux, elle avait juste obéit parce que sinon, elle savait que la mère aurait tout fait pour convaincre le père d'arrêter d'envoyer de l'argent à Gabriel -ce qui lui permettait de se payer des clopes en passant. Être maudite, c'est pas facile à vivre. Elle soupira, et le bruit de pas qui montait l'escalier lui parvint à l'oreille. Qui montait ? Est-ce qu'on la verrait ? Heureusement qu'elle avait envoyé un hiboux avec sa lettre et la photo prouvant sa soumission à la mère supérieure avant de fondre en larmes, sinon elle n'aurait pas été cachée par les volatiles...

Après avoir réfuté l'hypothétique retenue à la Carrow, Gammach pointa son doigt auprès de Kelsey, qui le fixait toujours de manière stone.

-Ca te dérange si je m’assois un peu ? Après toutes ces marches pour arriver ici, je suis toujours esquinté. Et puis ça fait du bien un peu de calme après le brouhaha des couloirs et des cours, t’as raison de venir ici…

Oui, le silence c'est ce que je cherchais. Donc tais-toi.

Ses yeux dépareillés s'ouvrirent sous la surprise de la demande. Mais il devait pas envoyer un courrier ? Ravalant la réplique acerbe trop vite, n'ayant même pas eu le temps de réfléchir à la sortir ou pas en réalité, le gamin était déjà assit à côté d'elle. La gamine songea un instant à se décaler sur le côté, montrant que plus loin il serait d'elle, mieux elle se porterait. Néanmoins, elle avait été là avant lui ! Et la stricte étiquette enseignée par son père ne cessait de lui crier "ce n'est pas polie !" .

Néanmoins, l'albinos resta coite un moment, songeant ironiquement que d'habitude, elle n'avait de réplique acerbes qu'avec son frère à ses côtés. Etait-ce donc déjà le signe de l'indépendance irréversible ? Cette indépendance de lui ? Celle dont elle ne voulait pas pour l'instant, même si elle en crevait un peu plus chaque jour, à ne pas le voir. Est-ce qu'elle lui manquait ? Pouvait-il... ?

Pardonne moi s'il te plait.

Son coeur poussa un de ces soupirs qui lui faisait atrocement mal à l'intérieur de sa cage thoracique. La douleur de l'abandon, combiné à celle de l'ignorance, ne semblait plus être si douloureuse que ça, pour qu'on lui inflige encore en plus des piques dans son coeur. La douleur pouvait presque être comparé à celle d'un arrêt cardiaque. Sentir ce brusque manque de battement dans la poitrine. L'arrêt ne pouvait durer qu'une seconde, le coeur reprendre ensuite, comme ces nuits où elle dormait sans son frère, la douleur restait brutale. D'ailleurs, par la peur de ces brusque petits arrêts, elle n'osait plus dormir.

S'il te plait. Arrêtes ce feu, essais n'importe quoi, tout mes cauchemars. Même si j'en suis le sacrifice.

Une voix lointaine lui parvint alors, tandis qu'elle relevait doucement la tête de ses genoux, qu'elle avait finit par entourer de ses bras en position de protection.

-Moi je suis venu pour envoyer un hibou à mes parents. Je n’ai pas trop de nouvelles, et je m’inquiète un peu…

Ses yeux ternes fixèrent un instant le gamin à côté d'elle. Oui, envoyer son courrier. Bah il l'avait déjà dit, il radotait là ! Il voulait quoi ? Qu'elle le rassure ? Qu'elle prenne ça comme une invitation à donner la raison de sa présence ici ? Qu'elle l'enfonce ? Soupirant de lassitude tout en gardant les yeux dans le vide en face d'elle, elle souffla un simple :

-Logique.

Elle, elle pouvait ne plus avoir de nouvelles durant des mois, elle ne s'en porterait que mieux. Car de toute façon, vivants ou non, ses parents ne s'occupaient ni d'elle, ni de Gabriel. Confiant cette tâche à une bonne. Ils vivaient dans un orphelinat, tenu par leurs géniteurs. On pouvait dire ça comme ça.

-Moi, ils peuvent crever, je m'en porterai mieux, laissa-t-elle échapper, tout ce qui compte, c'est Gabriel.

Même si je dois me sacrifier.

Elle resserra son étreinte sur ses genoux, ne pleurant plus. A croire qu'elle avait épuisé les ressources naturelles aqueuses de son organisme.

-Ecoute, je sais pas quoi te dire… mais si tu veux parler, au moins je sais écouter. Si tu préfères te taire, je peux aussi rester sans rien dire, juste pour te tenir compagnie. Et si ma présence t’ennuie, je peux aussi partir. A toi de me dire ce que tu préfères.

Le silence recommença alors à prendre sa place entre les deux jeunes enfants. Et dans la tête de Kelsey, ça bouillonnait. Un peu prise entre deux façon d'agir. Il y avait l'éternel côté rancunier de la Verte, qui lui disait de continuer à se taire, ou bien de lui lancer une vanne pour rétablir son honneur déchu lors du match. Et il y avait l'autre côté, celui qu'elle possédait d'ordinaire lorsqu'elle était sans son frère, et qui lui disait de sortir un p'tit truc pour détendre l'atmosphère ou bien d'essayer de lui faire confiance en rasant ses antécédents de batteur intraitable...

Levant la tête vers une maigre meurtrière coincée en hauteur, la gamine resta un moment les yeux fixés dans le vague du ciel à peine perceptible, puis tout en fixant continuellement cette meurtrière, sans darder son regard sur son voisin, elle prit la parole.

-As-tu déjà perdu ce qui te maintien en vie ? Ou bien à défaut, un être qui t'es si cher que tu le considère comme... une part de toi ?

Soupirant avec un maigre sourire ironique, la gamine resserra ses bras autour de ses genoux et détourna enfin son regard vers le jeune Serdaigle.

-Et sinon, tu aimes bien regarder les étoiles ?- son faible sourire s'élargit- Moi j'adore, j'y passe mes nuits.

Un faible éclat aurait alors pu se faire remarquer dans ses prunelles si souvent vides si l'on y faisait attention, et sa voix devint plus chaude en continuant sur ce sujet.

-J'apprécie beaucoup les observer en été, et lorsque les soirées de printemps ou d'automne ne sont pas trop couvertes. Malheureusement, en hivers c'est plus rare, lorsque le ciel est dégagé, il fait un froid de canard.

-Non, je ne pense pas. Jusqu'ici, j'ai eu de la chance je suppose, j'avoue que je n'ai pas eu à surmonter de grandes difficultés dans la vie, répondit le Serdaigle d'une voix faible.

Aussi, Kelsey eut une sorte de sourire compatissant, un mélange de soulagement que tous ne vivaient pas des évènemnts tragiques, mais en même temps un peu triste que rien ne lui arrive. Oh, pas par sadisme. Non. D'ailleurs, elle lui fit savoir son point de vue en un faible murmure, pour ne pas trop faire de ce sujet, le sujet principal de la discution.

-C'est dommage en un sens. Tu n'as rien vécu. Si l'on ne vit rien, quelles leçons la vie nous apprend-t-elle ? Même si ça peut paraitre trop dur, trop douloureux, au final on en ressort plus fort... Ou alors on en ressort pas, et on prouve à tous qu'on est qu'un lâche stupide qui préfère se suicider. Mais j'avoue que lorsqu'il ne se passe rien dans ma vie, je sais profiter de ces instants de calme.

Apparemment, le Serdaigle ne semblait pas dérangé par les silences qui entrecoupaient leurs discutions. Encore un. Kelsey avait le chic pour tomber sur les bonnes personnes ou quoi ? Entre Damien, Gabriel -un pincement au coeur la prit- et Gauvain... Il n'y avait qu'Anazel qui n'aimait pas le silence, le plongeant, disait-elle, dans des souvenirs à ne pas vouloir revivre. Et cela lui changeait à Kelsey, quelqu'un qui n'aimait pas le silence, et la forçait à parler d'elle, à expliquer ses problèmes. Ca lui faisait du bien d'abaisser son masque de temps en temps. Et Anazel était l'une des privilégiés qui y avaient droit.

-Oui, j'aime bien les étoiles. Pas forcément le cours d'astronomie, même si c'est intéressant, mais je n'ai pas besoin de savoir le nom d'une constellation pour la trouver belle ou pour la regarder... Ca me permet de m'évader un peu, de laisser mes pensées vagabonder, de rêver éveillé en quelque sorte...

Kesey sursauta un peu lorsqu'il reprit la parole. Elle s'était trop perdue dans le silence de ses pensées. Aussi, elle répondit avec un sourire.

-Pareil. Les cours d'Astro sont un peu fastidieux. Je n'apprends que les noms de constellations qui me plaisent. Pour la beauté de se perdre dans la beauté de leurs formes, et de les nommer pour les reconnaitre comme m'étant particulière.

Gauvain s'agita alors, semblant chercher quelque chose dans ses poches. Un peu intriguée, Kelsey l'observa et ne cacha pas sa surprise face à la proposition du brun, qui lui tendait un morceau de sa barre de chocolat. S'empourprant face à ses réactions peu sociales lors de son apparition ici, l'albinos ne se sentit pas à la hauteur de ce geste de gentillesse. Aussi, sans prendre le bout de chocolat, elle regarda d'abord Gauvain et s'excusa.

-Je suis désolé. J'ai pus paraitre désagréable tout à l'heure. Mais faut avouer que tu m'as sacrément fai mal lors du match !, rajouta-t-elle comme pour se justifier avant de reprendre en baissant la voix tout en prenant le chocolat, j'aime pas non pus être surprise en position de faiblesse comme ça, et si ça pouvait rester entre nous, tant mieux. Merci pour le chocolat.

Croquant un petit bout, elle sentit une douce chaleur se répendre doucement dans son corps. A défaut de la châleur humaine, elle se contenterait de celle-ci. Et la friandise fondait sur son palais, aussi doux que du miel. Fermant les yeux l'espace d'une seconde pour savourer le chocolat, la gamine entraperçut l'image de leur prof de Duel, le drogué de chocolat de service qui ne se séparait jamais de ses plaquettes. Un frisson de peur la parcourut. Ce prof foutait la pétoche non ? Aussi, se tounant vers Gauvain, l'albinos lança :

-Eh, tu trouves comment le prof de Duel ? Moi, perso, il me fou la trouille avec sa balafre là ! J'étais au premier rang la première fois, et... Brrrrrr ! Il est peut-être cool hein, je dis pas, mais... et puis c'est quoi son nom là ? Kill ? J'parie qu'il a eu sa balafre parce que c'est un psychopathe qui a trouvé plus fort que lui...

La conversation prenait de plus en plus une tournure normale et sympathique, voir bonne enfant. Kelsey laissant tomber la rigidité de ses discours pour parler comme une gamine de douze ans normale, avec ses erreurs, ses incompréhensions, ses questions futiles. Tout ce que son père ne voulait pas d'elle. Mais après tout, elle n'était pas une machine non ?