S’il y avait bien une activité moldue qui n’avait pas été oubliée par Arsène Vawdrey malgré son statut de sorcier émérite, il s’agissait bien évidemment du football. Biensûr les matchs de Quidditch étaient bien plus impressionnants à regarder, mais un bon match de foot de la ligue des champions valait aisément un Krum sur un balai. Surtout que techniquement parlant, le quidditch s’était pas trop ça alors que vingt-deux gugus qui couraient après un ballon c’était du vrai sport viril qui ne se ratait pas. Et sans magie s’il vous plait. Que de la testostérone en mouvement. La vrai classe !

Le médicomage avait sa soirée de libre et vu le temps qu’il faisait dehors, il ne fallait pas espérer lui voir pointer son nez dans le pub du coin. Il était bien plus raisonnable de rester à la maison en tête à tête avec son écran plat et sa bière. C’était rare, mais ce soir il n’avait pas envie de la compagnie d’une quelconque demoiselle. Si son père n’avait pas été invité dans son club privé, il aurait probablement rejoint son fiston pour une soirée entre homme accompagnés d’une bonne pizza et d’un pack de bières qui n’attendaient qu’à être bues. Mais force des choses, Arsène se retrouvait ce soir-là tout seul comme un grand dans son gigantesque appartement, posé sur son splendide canapé en cuir.

Tout en ouvrant sa première bière dans un « psiiiich » sonore, Arsène appuya sur le bouton power de sa télécommande 100% Moldu et attendit que l’écran affiche les chaines en buvant une gorgée du breuvage froid qui le détendit instantanément.

Driiiiiiiiiiing !

Relevant un sourcil interrogateur, le sorcier ne leva même pas ses fesses du canapé, décidant que qui que ce soit, il n’était pas attendu et par conséquent pas le bienvenu. Il porta un œil mauvais sur la porte d’entrée avant de s’en retourner à sa télévision HD. Il zappa sur la chaine voulu qui passait des publicités pour des shampoings et des crèmes pour filles. Les mannequins étaient à croqués et il se rinça l’œil tout en s’installant confortablement dans son canapé en cuir de dragon, rouge. Oubliant momentanément la porte.

Driiiiiiiiiiiing ! Driiiiiiiiiiiiiiing ! Driiiiiiiiiingdriiiiiiiiiiingdriiiiiiiiiiiiiiiiingdriiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiing !

- Arsène, ouvre ! Il y a un match ce soir, tous les hommes mariés sont rentrés chez eux pour le regarder, donc tu ne peux être en train de débaucher la femme de personne !

La gorgée de bière qu’il venait de prendre passa tout droit, lui arrachant une quinte de toux alors que son sang se glaçait dans ses veines. Les deux équipes entrèrent sur le terrain au même moment sous les acclamations du public. Attrapant la télécommande, Arsène baissa le son et reposa sa bière sur la table en en renversant la moitié sur le verre. Il retint un juron et s’enfonça dans son canapé le souffle coupé.

Transit sur son canapé, il tendit l’oreille sans oser bouger d’un poil. Allait-elle insister ou partir ? Le médicomage n’avait baissé le son que par acquis de conscience car son appartement était tellement bien insonorisé qu’une bombe pouvait exploser à l’intérieur sans que les voisins ne se réveillent. N’empêche qu’il ne s’attendait pas à ça. Que venait-elle faire là ?

Patiemment, il attendit que les événements suivent leur cours tout en tendant une oreille en direction de la porte et l’autre en direction du match où le coup de sifflet d’envoi retentissait, tout juste audible.

Le silence qui suivit les coups de sonnette de Mercedes Brady n’était pas annonciateur de bonnes nouvelles. L’oreille tendue et le corps aux aguets, Arsène n’osait le moindre mouvement, de crainte de ne pas percevoir le moment où les choses tourneraient mal pour lui. Les secondes passaient, le ballon se transmettait de joueurs en joueurs, mais rien de grandiose ne s’était encore passé dans le stade bondé où les supporters entamaient des chants, d’une seule et même voix. Dehors, c’était le silence radio. Que se passait-il ?

Se redressant légèrement, le médicomage tendit l’oreille en direction de la porte et osa même un coup d’œil, prêt à apercevoir la brune bouclé impeccable déjà sur le pas de sa porte. Mais biensûr c’était impossible. Déjà car il lui aurait fallut un peu plus de deux minutes et trente-six secondes pour défaire tous les contre-sorts qu’il avait appliqué sur son appartement, ensuite car elle n’aurait jamais eu l’audace de forcer sa porte. Elle ne lui donnerait tout de même pas une occasion aussi magnifique de lui lancer un sort par inadvertance. Et encore, inadvertance n’étant que le prénom . Quelque chose clochait.

Arsène se glissa au bout de son canapé pour attraper sa baguette au moment où un des joueurs, de l’équipe qui jouait à domicile, tira violemment sur le but adverse, créant une panique hystérique au sein des supporters et attirant comme un aimant le regard du sorcier qui ne pouvait se permettre de rater une miette de ce match si important. Mais déjà l’action était passée et le ballon sortait sous le sifflement de l’arbitre. C’était l’occasion inespérée de se lever sans manquer de rater une action primordiale du jeu.

Attrapant sa baguette de sa main gauche, le professeur de soins magiques se leva et s’avança jusqu’à la porte d’entrée pour coller y coller son oreille. Aucun bruit. Avait-il rêvé ? Le médicomage se gratta un instant le sommet du crâne l’air surpris avant de jeter un œil à travers le judas. Horreur ! Il n’avait pas rêvé, Mercedes Brady était bien là ! Il retint un juron d’énervement, pris une grande inspiration et ouvrit la porte.

Je savais bien que tu n’abandonnerais pas. Je préfère encore t’ouvrir moi-même avant que tu ne mettes le feu à ma porte et à tout l’immeuble. Enlève tes chaussures, tu vas trouer ma moquette avec tes talons aiguilles.

Sans laisser le temps à la jeune femme de s’exprimer, il lui lança un regard haineux et méprisant avant de lui tourner le dos pour retourner s’asseoir sur le canapé où le score affichait un goal qu’il venait de rater. La mine sombre, il attrapa sa bière et posa ses deux pieds croisés sur la table basse du salon.

S’il y avait bien une qualité que l’on pouvait attribuer à la brune pulpeuse qui se tenait sur le pas de sa porte, c’est qu’il ne lui arrivait jamais de ne pas se sentir à l’aise lorsqu’elle venait chez vous. Qu’elle prenne donc ses aises, mais qu’elle laisse Arsène regarder son match sinon les effluves de sang ne tarderaient pas.

Referme la porte ! Il y a des courants d’air sinon !

Biensûr la venue de Mercedes ne l’enchantait guère et venait de lui gâcher sa soirée en célibataire. Mais il n’avait nullement l’intention de lui montrer à quel point sa présence même pouvait l’horripiler. Ça serait s’avouer vaincu devant la femme et s’était hors de question de se rabaisser à ce genre de manière quand on savait ce qu’elle avait pu lui faire endurer durant son adolescence. Même pire, si on comptait les derniers mois qu’il venait de passer. Arsène ne voulait pas savoir pourquoi elle était là. Si la dame s’était donné tant de peine pour venir lui rendre visite ce n’était certainement pas par pur courtoisie, non, c’était bien parce que Mademoiselle Brady avait une idée derrière la tête. Une idée forcément malsaine qu’Arsène devrait subir quoi qu’il arrive. Alors autant repousser l’échéance en restant quelques minutes supplémentaires dans l’ignorance.