Roooooh la Saint Valentin ! Les filles qui s’affolent et cherchent toutes sortes de stratagèmes pour offrir à l’élu de leur cœur les muffins au chocolat faits maison qu’elles lui ont confectionné avec amour (en fait elles les ont juste commandées dans une pâtisserie mais ça faut pas le dire)... Les garçons qui feuillètent avec frénésie des magazines féminins pour avoir une petite idée du cadeau qu’ils pourraient faire à leur bien-aimée...Ces stupides angelots qui volètent partout en gueulant des chansons d’amour complètement idiotes...

Aussi longtemps qu’elle s’en souvienne, Lou n’avait jamais aimé la Saint Valentin.

D’abord à cause de tout le foin que tout le monde en faisait. A peine avait-elle eu le temps de casser les jouets qu’elle avait reçus à Noël que déjà, dans les magasins, d’énormes ballons rouges en forme de cœurs pendaient du plafond pendant que des stands de bouquets de fleurs et de parfums poussaient comme des champignons.

En plus, quand on n’avait pas d’amoureux à la Saint Valentin, c’était carrément l’angoisse. Vous vous dites peut-être « Qu’est-ce qu’elle raconte celle-là, elle déraille ! », mais sachez qu’à partir de sept ans, le 14 février aussi est une date cruciale. Ne rien recevoir du tout pendant que nos copines se font offrir des tablettes de chocolat (celles qui se mangent hein), c’est presque autant la honte que ne pas réussir à coller un seul poisson en papier le premier avril.
Je ne dis pas que Lou n’avait jamais rien reçu de sa vie (ce serait vraiment trop la lose), car, sans être une mangeuse d’hommes (d’abord elle est trop jeune, et puis de toute façon elle tiendrait ça de qui ?), elle avait quand même été l’ « amoureuse sans divorce » de quelques garçons au primaire. Donc, ce qui l’énervait surtout dans la Saint Valentin, c’était l’angoisse sourde des jours qui la précédaient. « Est-ce que je vais recevoir quelque chose cette année ? Pitié faites que je reçoive quelque chose cette année... ».

Et puis surtout, ce qui l’insupportait davantage que tout le reste, c’était tout le branle bas de combat qui s’opérait chez les filles, justement. Que ce soit pour trouver des chocolats ou pour s’inquiéter de savoir si le garçon qu’elles regardaient tout le temps dans la cour allait leur en offrir, elles se mettaient toujours dans des états pas possibles. Et Lou ne comprenait pas. Ce n’étaient que des garçons ! C’est bête les garçons. Et c’était tellement bizarre pour elle d’imaginer se mettre en chasse de chocolats en forme de cœurs pour des copains avec qui elle jouait à la guerre tous les jours. Non, vraiment, Lou ne voyait pas l’utilité d’une fête aussi stupide que la Saint Valentin. A part avoir des chocolats cadeau, bien sûr.

C’est pourquoi, profitant d’une heure libre, elle flânait dans les couloirs, arrachant de temps à autre l’une des affreuses et innombrables affiches placardées sur les murs pour proposer des recettes de philtres d’amour et des réductions à Honeydukes.

Elle levait de nouveau la main pour percer des trous dans une pancarte annonçant un truc sur les coiffures magiques quand elle entendit un fracas métallique derrière.

Tournant la tête dans un sursaut, elle vit que le couloir était toujours aussi désert qu’à son arrivée, à part un Poufsouffle blond qui la regardait d’un air ahuri.

- Quoi tu veux ma photo ?, lui lança-t-elle en continuant le geste qu’il avait interrompu.

Environ dix millions d’années et des poussières après qu’elle lui ait gentiment demandé ce qu’il lui voulait, le garçon se décida à répondre. Ou plutôt à bégayer une réponse. Mais elle en distingua assez pour ouvrir des yeux grands comme des soucoupes.

De quoi pardon ? Elle ? La Saint Valentin ? Le bal ? Tout ça réuni dans la même phrase ?

Mais euh je crois qu’il me drague là...

Lou cilla et tourna la tête à gauche et à droite pour observer les alentours. Non, pas possible, c’était une blague. Il y avait forcément une caméra cachée quelque part. Ah non, c’était vrai, les appareils moldus ne marchaient pas au sein de l’école.
Bon...alors en fait c’était un gage, oui, obligé ! Apparemment les joueurs de Serpentard n’étaient pas les seuls à avoir imprudemment parié sur leur victoire...Mais nooon. Même pour une défaite, c’était vraiment trop cruel. Les Serdaigle ne pouvaient pas avoir imposé au poursuiveur d’aller draguer une Serpentard, au risque de se faire bouffer tout cru.

Mais alors...quoi ? Il était sérieux alors ????

Lou le regarda des pieds à la tête. Rouge comme une tomate bronzée, il avait l’air au bord de l’évanouissement. Elle n’aurait pas été étonnée de sentir une odeur de pipi s’élever dans l’air...

Ce fut plus fort qu’elle, elle éclata de rire. C’était vraiment trop drôle. Elle en avait vu, des cinglés, mais lui il était vraiment à côté de la plaque.

Il lui fallut deux bonnes minutes pour se calmer, puis elle s’avança vers lui, toujours secouée de rire et des larmes plein les yeux.

- Donne-moi du parchemin et une plume d’abord, lança-t-elle d’une voix légèrement étranglée.

Finalement, peut-être que ça valait le coup de fêter la Saint Valentin. Rien que pour entendre des idioties pareilles...

- Te faire un plan jusqu’à ma salle commune pour que tu viennes me voir le soir..., rétorqua Lou d’un ton ironique en lui arrachant littéralement la plume et le parchemin des mains avant d’aller s’appuyer contre le mur.

Pliant une jambe, elle s’en servit comme appui, posa le parchemin sur sa petite cuisse, le lissa du plat de la main, puis avisa la plume.

- Oh regarde, on a la même, lança-t-elle en jetant un regard pétillant au garçon, si c’est pas un signe qu’on est faits l’un pour l’autre ça !

C’était de la moquerie pure, bien entendu. Les gens en avaient tellement ras le chaudron de devoir se trimballer de grosses bouteilles d’encre (qui de toute façon finissaient souvent par se renverser dans leur sac) qu’il fallait vraiment être un gros naze pourri pour ne pas encore avoir de plume auto-encreuse.

- Amène-toi, viens voir, continua-t-elle en lui faisant signe de regarder, avant de se mettre à dessiner,...ça, c’est nous (un espèce de vieux ver de terre tout fatigué apparut sur le parchemin)...ça, c’est les Serdaigle (loin en bas, elle griffonna un rond difforme qui portait des pattes inégales et un bec triangulaire)...ça, c’est les demeurés de Gryffondor (très très loin en bas, elle fit apparaître quelque chose qui pouvait s’apparenter à une belette famélique avec une coupe afro à la place de la crinière)...ça va jusque là ?

Levant les yeux sur le garçon, elle lui jeta un petit coup d’œil pour s’assurer qu’il suivait. Après tout, c’était un Poufsouffle, c’était peut-être trop dur pour lui, pauvre bête !

Elle se remit à son dessin et griffonna, tooooooout en bas du parchemin, une espèce de longue souris rayée.

- Et ça, c’est vous, conclut-elle, vous êtes tout en bas de la chaîne alimentaire, vous êtes que des riens du tout tout pourris.

Elle se redressa pour lui planter le dessin dans les mains. Malgré ses piètres talents d'artiste, il était assez clair.

- Rien que si j’acceptais de te parler en public, ça te ferait monter tout en haut de l’échelle sociale d’un seul coup, ça serait trop le choc pour toi. Alors t’imagines si on allait au bal ?

Le regardant à nouveau des pieds à la tête, elle avisa soudain les décorations qu’il avait mises sur son sac à bandoulière et éclata à nouveau de rire. Non mais il y avait vraiment cru ????

- Non sérieux, tu m’as bien regardée ?, lança-t-elle en se retournant pour reprendre sa route, en plus ton sac il est vraiment trop moisi. Va attraper des poulets et laisse-moi tranquille.

Quand le garçon la traita de méchante, Lou marqua un temps d’hésitation et se retourna, étonnée. Elle fronça les sourcils en le voyant au bord des larmes et rouge de fureur. Elle, méchante ?

N’importe quoi ! Elle avait juste dit ce qu’elle pensait, où était le mal ?

Les gens n’étaient jamais contents. Quand on faisait semblant d’être gentils avec eux pour ensuite aller raconter des histoires sur eux, ils râlaient. Mais quand on leur disait la vérité en face, ils n’aimaient pas non plus.

Comme la fois où un grand monsieur moustachu avait débarqué à la maison, tout fâché comme un rhinocéros, en hurlant « Tu en vois un autre ! » à sa mère sur tous les tons. Bien sûr, sa mère, qui était très courageuse et n’avait peur de rien, ne s’était pas grattée pour lui dire que oui et l’envoyer péter, mais il s’était mis à hurler plus fort encore, jusqu’à ce que Conchita vienne le chasser avec son balai.

Lou croisa les bras d’un air déterminé.

- Je sais ptêtre pas dessiner mais moi au moins je chouine pas comme un bébé, lança-t-elle froidement, de toute façon jm’en fous.

Elle haussa les épaules avant de continuer.

- Bon, ok. On oublie que t’es un Poufsouffle, que t'as de gros yeux, que t’as des pins sur ton sac, et que tu pleurniches devant une fille. Pourquoi je devrais te laisser m’inviter si y avait un bal ?

Caleb mit ses mains sur ses hanches dans une position de défi. Comme ça, Miss Serpy parfaite je-sais-tout, je-me-la-pete lui demandait de faire un plaidoyer pour lui même ! Caillou n'allait pas laisser cette occasion de rabattre le caquet a la miss ! Vive la rébellion des Pouffys !

Le jeune garçon réfléchissait a toute allure. Il ne fallait pas dire n'importe quoi. Il fallait être franc. Si il y a bien une chose que les Serpentards apprécient, c'est bien la franchise ! Qu'allait-il dire pour se glorifier un peu ? Certes, il avait appris a lancer le Wingardium Leviosa la semaine dernière mais il se doutait que la Serpy soit impressionnée par cette prouesse assez banale.

Le jeune garçon essaya de se rappeler les nombreuses qualités qu'il possédait. Il ne trouvait pas grand chose. Il savait cuisiner, ça oui. Il était assez courageux, la preuve, il avait osé avouer la vérité a la jeune Serpy. En plus, elle n'appréciait même pas ses jolis pin's a leur juste valeur. Non, décidément, Caillou était trop bien pour elle. Caleb décida de tenter une approche pour convaincre la Serpy qu'il n'était pas qu'une crotte de mouche sur un pare brise.

- D'abord, tu devrais savoir que je suis quelqu'un de courageux et de gentil ! Enfin, c'est ce qu'on me dit. Et je suis aussi romantique !

Caillou afficha un sourire satisfait. Voila une réplique qui avait du cachet !

- En plus, je sais trop bien cuisiner, je fais même des chocolats pralinés aux amandes qui sont super bons !

Ah, qu'allait-elle répondre a ça notre Miss Serpy ? Elle n'avait plus d'autre choix que de tomber dans les bras de Caillou le tombeur de nanas, le Don Juan de l'école !

[HJ : Enfin le temps de revenir sur le Miroir, ça me manquait trop ;-)]