Plusieurs mois s'étaient écoulés depuis ses dernières recherches pour la quête du parchemin d'Alexandre. La sorcière avait eu bien d'autre priorités entre sa traque de ses anciens collègues mangemorts, son mariage, puis ses contrats avec la mafia si bien qu'elle en avait presque oublié sa vielle ambition de mettre la main sur l'artefact. Ses motivations avaient évolués, ses aspirations aussi mais le désir d'être celle qui retrouverait et s'approprierait la relique restait intact.

James R. McCann, le journaliste qui avait écrit en 1981 l'article des funérailles d'Adalbert Lasornette n'avait pas été très difficile à retrouver. La ténébreuse disposait d'un réseau d'informations non négligeable et particulièrement efficace lorsqu'il s'agissait de trouver une personne. Elle avait ainsi découvert que le sorcier résidait depuis plusieurs années dans le village sorcier de Loutry Ste. Chaspoule.

L'air était frais en ce début d'après midi dans la campagne anglaise lorsque la légilimens transplana à l'entrée du village. Tout était incroyablement paisible, les quelques habitants présents dans les rues vaquaient tranquillement à leurs occupations sans se presser; on était bien loin de l'agitation londonienne. Vêtue d'une sobre robe pourpre surmontée d'une cape souple assortie, la jeune femme s'avança sur les pavés le long de la rue principale, en cherchant à repérer sur les murs des bâtisses les noms des rues adjacentes et les numéros des habitations.

D'après ses sources, James McCann habitait au 15, rue du Chaudron, il s'agissait d'une maisonnée modeste mais plutôt coquette et bien entretenue. La sorcière s'arrêta un instant pour observer les lieux tout en s'efforça d'imaginer la personnalité de leur occupant. Ella traversa le jardin à pas mesuré et hésita un instant avant de frapper à la porte. Ce n'était sans doute pas commun qu'un inconnu débarque chez vous pour vous en raison d'un article que vous auriez écrit 20 ans plus tôt. D'autant plus que ce McCann ne connaissait peut être Lasornette que de réputation et n'aurait peut être rien de plus à lui apprendre. Bah, elle verrait bien. Maintenant qu'elle était venue jusque là, elle n'allait certainement pas faire demi-tour, jouer les timorées n'était définitivement pas dans ses habitudes et si le journaliste savait quelque chose, elle le saurait d'une manière ou d'une autre. Elle frappa à la porte.

Un homme de plus d'une cinquantaine d'année lui ouvrit après quelques minutes, l'art visiblement étonné d'avoir de la visite. Ella était parfaitement consciente du culot dont elle faisait preuve en s'imposant de la sorte chez le sorcier mais cela n'avait que peu d'importance. S'il savait de quoi elle était capable et ce qu'elle avait pu faire dans le passé pour acquérir des informations, il saurait à quel point il était chanceux.

« Bonjour, je vous prie de m'excuser de venir vous importuner chez vous de la sorte, mais je suis à la recherche de Monsieur James McCann.. Suis je à la bonne adresse ? »

Demanda-t-elle jouant la carte de la politesse, bien qu'elle n'ait en réalité pas le moindre doute sur le fait d'être au bon endroit.

« Ma requête risque certainement de vous surprendre, cependant j'ai l'espoir que vous serez peut être en mesure de m'aider dans une quête bien difficile que j'ai entreprise. Accepteriez vous de m'accorder un peu de votre temps pour répondre à une ou deux questions ? Je vous promets de ne pas vous ennuyer bien longtemps. »

James R. McCann, journaliste retraité

Lorsqu'il ouvrit la porte de sa petite maison, James McCann ouvrit de grands yeux. Bien qu'il n'ait plus fréquenté le grand monde depuis longtemps, il était parfaitement conscient du rang de la jeune femme qui lui faisait face. Et dans sa robe pourpre, elle ne s'en cachait d'ailleurs pas. Il ne dit rien, faisant tourner entre ses doigts l'une des extrémités de sa moustache, alors qu'elle lui adressait une formule de pure politesse. S'il n'était pas dupe, il appréciait au moins le geste. Âgé de plus de soixante-dix ans, James McCann avait toujours mené une vie saine, d'autant plus propice à sa bonne forme physique depuis qu'il avait pris sa retraite, presque dix ans plus tôt. Et tous ses efforts payaient, le faisant paraître plus jeune qu'il n'était. Mais n'était-ce pas normal chez les sorciers ? Veuf, il n'avait jamais cherché à remplacer son épouse. Aussi, si la visiteuse souhaitait user de ses charmes pour obtenir quoi que ce soit, elle risquait d'être déçue.

Il se contenta de hocher la tête à la question. Oui, il était bien James McCann, oui, elle était bien à la bonne adresse. Et alors ? D'ailleurs, elle enchaîna bien vite, comme si elle avait compris qu'il ne valait mieux pas laisser traîner les choses. Tant qu'elle n'était pas entrée, il était libre de lui claquer la porte au nez. Quête bien difficile, une ou deux questions, pas longtemps. Hum. L'homme pesa un instant le pour et le contre, mais son passé de journaliste le rattrapa bien vite : il n'avait jamais cessé d'être curieux, et elle avait titillé ce point sensible. Il s'écarta, ouvrant plus grand la porte :

"Oui, oui, entrez, entrez." fit-il, de sa voix un peu enrouée.

Après avoir refermé derrière elle, il fila vers le salon, en lui faisant signe de le suivre. Tout en marchant, il cherchait ce qu'elle pourrait bien lui vouloir. Il ne l'avait jamais rencontrée... Peut-être enquêtait-elle sur une vieille affaire que lui-même avait traitée dans le passé ? A part en lien avec ses anciennes activités, il ne voyait pas ce qu'elle voudrait lui demander d'autre... D'un geste, il invita la femme à s'asseoir. Il ne lui avait pas demandé son nom. D'ailleurs, il n'en eut pas besoin. Il se souvint.

"Von Königsberg. Ca me revient. J'ai lu quelque chose sur votre mariage."

Ce n'était pas une question, et elle ne pourrait pas nier. Pourquoi le ferait-elle ? Au moins montrait-il que sa mémoire était intacte, bien qu'il faille parfois un peu de temps pour l'activer. Après s'être assis à son tour, il attrapa sa pipe et l'alluma d'un coup de sa courte baguette magique. Il ne lui offrit rien. Offrir quelque chose à boire reviendrait à faire traîner l'entretien, et elle avait bien dit qu'elle n'en aurait pas pour longtemps, non ?

"Donc. Que puis-je faire pour vous ?"

Il croisa les jambes et fixa la jeune femme. Son regard avait souvent réussi à rendre mal à l'aise les gens qu'il interviewait, et parfois, ça lui avait permis d'obtenir quelques informations qui n'auraient jamais dû sortir. Mais il avait pris sa retraite, poussé vers la sortie, pour être remplacé par la nouvelle génération. Rita Skeeter, par exemple. La pimbêche. A la pensée, il aurait pu cracher. Mais s'abstint.

La Ténébreuse avait une certaine expérience pour ce qui était d'amener les gens là ou elle le souhaitait, aussi elle savait que le plus important se jouait dès les premiers mots échangés. Néanmoins, elle parvint sans trop de mal à susciter l'intérêt de l'ancien journaliste, en en disant juste assez pour piquer sa curiosité tout en restant assez vague pour qu'il désire en savoir plus. Elle le vit hésiter quelques secondes avant qu'il ne se décide à l'inviter à l'entrer. C'était gagné ! Désormais il n'y avait plus qu'à espérer qu'il est puisse effectivement lui apporter des réponses sans quoi toute la démarche aura servi à rien. La jeune femme suivit Monsieur McCann à l'intérieur. Il la guida vers un petit salon cossu où il s'invita à s'assoir.

Tandis qu'elle s'installait sur l'un des fauteuils faisant face à son hôte, le journaliste la surprit légèrement en trouvant son identité. Elle ne le lui avait pas donné, car cela n'avait aucune importance et l'Allemande avait l'habitude de rester volontairement dans l'anonymat. Elle n'était pas encore habituée à être devenu sur une figure publique que des inconnus soient en mesure de reconnaître dans la rue et elle ne s'y attendait pas. Cela n'aurait pourtant pas du l'étonner, James McCann étant un ancien journaliste, il devait continuer à lire régulièrement la Gazette mais qu'il se souvienne de l'article concernant son mariage prouvait sans l'ombre d'un doute qu'il avait une excellente mémoire. Tant mieux car cela augmentait ses chances d'obtenir l'information qu'il lui manquait pour avancer dans sa quête.

« C'est exact. » répondit-elle courtoisement avec un sourire poli.

L'homme l'invita à formuler sa requête. Son attitude montrait clairement qu'il était habitué à ce type de face à face, probablement à force d'interviewer des personnalités. Le regard fixe et inquisiteur du journaliste avait de quoi déstabiliser, cependant la légilimens n'aurait pu souhaiter mieux. Rien de tel qu'un contact visuel pour savoir si l'interlocuteur vous disait la vérité ou au contraire vous cachait des choses, sans qu'il soit question toutefois d'aller s'immiscer de force dans son esprit. C'est le genre de chose qui a tendance à déplaire et c'était tout sauf courtois. La ténébreuse décida de parler franchement. Si elle voulait obtenir une réponse précise, elle n'avait pas d'autre choix que d'être tout aussi claire et précise dans sa demande. Et elle n'avait pas de temps à perdre à tourner 100 ans autour du pot; il y avait fort à parier que James McCann non plus, or elle ne souhaitait pas abuser de sa patience.

« Vous avez écrit, il y a une vingtaine d'année, en 1981 pour être exacte, un article sur les funérailles du grand Théoricien de la magie Adalbert Lasornette et je me demandais si vous ne pourriez pas m'en dire un peu plus sur les personnes présentes ce jour là. » 

Il fallait tout d'abord replacer rapidement les choses dans leur contexte, voilà pourquoi elle avait estimé nécessaire d'expliquer brièvement ce qui l'avait conduite vers lui avant d'enchaîner.

« A vrai dire, je recherche plus particulièrement le nom d'un ami d'Adalbert que je n'ai pu trouver nulle part dans les articles que j'ai lu. Il s'agirait apparemment d'un ancien professeur d'histoire de la magie avec qui Monsieur Lasornette aurait travaillé.. Cela vous évoque-t-il quelque chose ? »

Qu'elle confirme ou non son identité, peu importait. C'était un fait avéré. Au moins comprendrait-elle qu'elle avait devant elle un homme qui savait, et qui éventuellement pourrait profiter des informations en sa possession si jamais l'entretien tournait mal. Mais l'entretien se déroulerait dans le plus grand calme, la plus grande courtoisie, n'est-ce pas ? Alors qu'une nuage de fumée commençait à se former juste en dessous du plafond, Elle Von Königsberg exposa les raisons de sa présence. Un article de 1981, presque vingt ans auparavant. Rapidement, McCann fit le tour des événements marquants de cette année-là, juste avant qu'elle ne parle de Lasornette. Ah, oui, ça, il s'en rappelait. Ca avait été une grande perte pour le monde magique, et James avait représenté la Gazette du Sorcier aux funérailles. Pas seulement en tant que journaliste, mais aussi en tant que connaissance du célèbre théoricien. Il revit la pierre tombale et les figures qui l'entouraient. Et s'autorisa, pipe en bouche, un petit sourire ému.

Elle enchaîna bien vite, précisant ce qu'elle recherchait. Son objectif était donc de découvrir l'identité de quelqu'un en particulier. James haussa un sourcil. Un visage en particulier lui apparut, celui d'un homme qui portait déjà plus que son âge à l'époque. Ella termina son explication, et un long silence suivit. Puis l'ancien journaliste se leva et se dirigea vers sa bibliothèque, sans un mot. L'une des étagères portait de nombreux classeurs, chacun comportant une date. Il tira celui noté "1981" et le feuilleta rapidement, jusqu'à découvrir le fameux article dont elle parlait. Il le lut à haute voix, sans quitter sa position.

Citation :

30 mai 1981.

Du beau monde aux funérailles d'Adalbert Lasornette

Loutry Ste Chaspoule, Devon. Hier après-midi, sous une pluie battante, le monde magique a dit adieu à l'un de ses plus grands théoriciens. Adalbert Lasornette, auteur du très célèbre Magie théorique, bien connu des élèves de Poudlard, a effectué son dernier voyage et repose désormais dans le cimetière du tranquille petit village de Loutry Ste Chaspoule.
Après une cérémonie toute en sobriété, la mise en terre a été suivie par son vieil ami et correspondant Albus Dumbledore, mais aussi d'autres sommités, comme Newt Scamander, Miranda Fauconnette ou Bathilda Tourdesac. Des professeurs de Poudlard étaient également présents, autour de leur directeur. Puisse la mémoire de ce grand homme perdurer !

James R. McCann

Sa lecture achevée, il le remit à sa place et rangea le classeur. Et tout en s'affairant, il reprit :

"Je me souviens de chaque présent à l'enterrement. Et il me semble savoir lequel d'entre eux vous intéresse. Son nom n'est pas totalement inconnu, mais sa relation avec Lasornette a toujours été entretenue dans la plus grande discrétion. Je n'ai aucune idée de la raison profonde de ce mystère... Et j'ai quelque chose à vous montrer."

Il tira de son emplacement un autre classeur, celui-ci daté de l'année 1997. Tournant les pages, il arriva jusqu'à l'article qu'il recherchait. En quelques pas, il arriva à la hauteur de la jeune femme, il lui tendit le livre, ouvert à la bonne page. Bien sûr, il n'était pas l'auteur, mais il avait tiqué à l'époque en lisant le nom.

"Je vous invite à être attentive. Le plus anodin des détails peut souvent s'avérer crucial, foi de journaliste. Bien qu'ici, il n'y ait pas de grande subtilité."

Laissant l'article de novembre 1997 entre les mains d'Ella, il retourna s'asseoir et reprit tranquillement ses jets de fumée, qui allaient rejoindre le nuage déjà formé.

Un long silence suivit ses explications. Ella attendit sans faire le moindre geste une quelconque réaction de son vis à vis. Au bout d'un moment l'homme se leva sans un un mot et traversa la pièce en direction de la bibliothèque. Elle le regarda s'affairer, prendre un premier classeur sur l'une des étagères, tourner rapidement les pages avant de commencer à lire à voix haute l'article qu'elle avait mentionné plus tôt. Dès qu'il eut terminé, James McCann rangea le dossier à sa place et déclara qu'en effet il pensait savoir qui était la personne qu'elle recherchait et qu'il avait quelque chose à lui montrer.

Avec un mélange de curiosité et d'excitation grandissante, la ténébreuse laissa l'homme revienir vers elle avec un second classeur. Bien qu'elle brûlait d'impatience de découvrir enfin l'information tant désirée, elle prit sur elle pour contenir son excès d'enthousiasme. Elle était suffisamment maitre de ses émotions pour pas faire étalage de son intérêt. L'allemande prit dans ses mains le classeur ouvert sur lui présentait le journaliste et se mit à parcourir avidement l'article qui y était consigné. Ce dernier passait en revenu les professeurs successifs qui avaient trouvé la mort au cours de l'exercice de leur fonction ses dernières années dans des circonstances assez troubles. Il y avait d'abord Dumbledore, bien évidemment, assassiné il y a 3 ans de la main de Severus Rogue, bien que cela ne soit pas indiqué dans l'article. Kyra Whitman dont le nom évoquait vaguement quelque chose à Ella qui l'avait probablement croisé à Poudlard pendant sa scolarité mais ne suivant pas les cours de Runes elle ne la connaissait pas vraiment. Puis Charity Burbage, ancienne professeur d'Etude des Moldus, celle là, Ella s'en souvenait bien dans la mesure où elle avait été tué sous ses yeux par le Seigneur des Ténèbres lui même. L'image d'une femme flottant dans les airs tête en bas pendue par un fil invisible au milieu de la salle à manger des Malefoy s'imposa à son esprit mais elle la chassa bien vite. Et enfin Ernest Chausson.

Il est étrange de voir comment l'évidence vous frappe parfois de plein fouet à partir du moment ou vous avez la réponse sous les yeux alors que juste là vous nagiez en plein brouillard. Ernest Chausson, ancien professeur d'Histoire de la magie - d'ailleurs il y avait un erreur dans l'article – avait enseigné quelques temps à Poudlard avant d'être tué lui aussi dans des circonstances mystérieuses, par le Seigneur des ténèbres selon certaines rumeurs. Elle devait être en 3ème année lorsque c'était arrivé, autant dire que ça lui semblait être des souvenirs d'une vie antérieure. Ernest Chausson, ami de longue date d'Adalbert Lasornette. Tout prenait sens.

La sorcière réfléchit quelques instants. Sa découverte soulevait une série de nouvelles questions, comme à chaque fois. La première qui se posait était de savoir si oui ou non Ernest avait été la dernière personne à avoir eu la fameuse relique entre les mains ? Et si oui qu'en était il advenu à sa mort ? Ella était seulement certaine d'une chose, Voldemort n'avait jamais mis la main sur le parchemin d'Alexandre (Merlin soit loué) donc logiquement la piste de la relique s'achevait bien avec Chausson. Deux hypothèses commençaient à germer dans la tête de l'Allemande. Soit à la mort d'Ernest le parchemin était resté caché quelque part à Poudlard, soit il avait été enterré avec lui..

La ténébreuse referma la classeur et se leva pour le rendre à son propriétaire.

« Ernest Chausson, donc. Vous venez de me fournir une aide précieuse, Merci infiniment. Je ne vais pas abuser plus longtemps de votre temps.  »