Sujet 2
Les géraniums dentus étaient peut-être les plantes les plus trompeuses du monde magique. Au premier abord, il s’agissait d’une simple fleur aux pétales larges et mauves. Idéales pour orner les balcons elles présentent cependant une originalité que leurs consœurs « moldues » n’ont pas. Si un nez s’aventure sur ses pistils, il a de fortes chances d’en ressortir en sang. En effet, le cœur de cette jolie fleur est entouré de petites dents aiguisées qui ne font qu’une bouchée des intrus. Mortel pour les insectes, le géranium dentu ne représente pas un danger sérieux pour les hommes. Selon Mervin, il s’agissait d’une plante douloureuse et quelque peu capricieuse. Elle avait pourtant provoqué quelques accidents relativement grave. Le dernier avait été relayé en avril par la rubrique des faits divers de la Gazette. Un sorcier était tombé sur le champ de géraniums qu’il cultivait et c’était retrouvé à Saint Mangouste pour une reconstitution complète du visage. Ainsi étaient les aléas de la vie d’un botaniste magiques. On ne pouvait piétiner aucune plante, pas même les ornementales, sans en subir les terribles conséquences. Le gallois avait rit de bon cœur en découvrant ce billet. Confronté à la plante carnivore pour son examen, il faisait un peu moins le malin. En soi, l’exercice ne le dérangeait pas. Il était censé le maîtriser depuis sa cinquième année et la botanique était une matière dans laquelle il excellait quoiqu’elle fût, hélas, inutile pour la suite de ses études. Mais les fleurs n’étaient pas à prendre à la légère. Il devrait les traiter avec douceur s’il ne voulait pas finir avec des mains en sang et une note sous la moyenne.
Les fleurs, encore très jeunes, étaient maintenue à l’étroit dans des pots trop petits. La terre avait probablement perdu la plupart de ses nutriments et, pour résister, chaque plante s’était recroquevillée sur elle-même. Les pétales flétrissaient tristement et il était difficile de ne pas considérer le spectacle avec peine. Mervin prit un pot plus large. Il attrapa ensuite le géranium à la naissance des racines et tira doucement pour l’extraire de sa prison. La terre asséchée se démoula sans résister. Les fleurs, en revanche, commencèrent à s’agiter mais elles étaient trop faibles pour atteindre sa main. La suite était plus délicate. Après avoir posé la plante dans l’autre pot, il fallait l’entourer de terre fraîche et d’engrais. Les gants en peau de dragon permettaient d’éviter les morsures mais il y avait aussi un moyen de rendre la plante moins agressive. Mervin ouvrit un bocal remplit d’insectes desséchés et coinça de grosses sauterelles vertes dans la bouche des fleurs les plus agressives. Leurs dents se refermèrent dessus et elles n’avaient désormais d’autre choix que celui de digérer leur proie. Sa tranquillité étant assurée pour plusieurs minutes, le Serpentard versa la terre puis il répartit l’engrais sur un centimètre de hauteur et arrosa afin de faciliter l’absorption des nouveaux nutriments. Il allait de soi que l’engrais en question était d’origine magique. Il fallut moins d’une minute à la plante pour retrouver ses couleurs. Elle se mit bientôt à grandir. D’autres tiges apparurent sur les rameaux principaux et des petits boutons roses se formèrent sur les jeunes pousses.
Mervin prépara son sécateur. La plante retrouvait sa férocité en même temps que son énergie. Les sauterelles furent englouties sans difficulté et les dents claquaient pour réclamer à manger. Le gallois ne se laissa pas intimider cependant. Il ouvrit son sécateur devant une pousse naissante et attendit qu’elle fût assez grosse pour la découper. Le premier bouton tomba. La plante frémit furieusement mais il lui était impossible de se venger sur des lames de métal. Elles s’orientaient grâce à la chaleur organique. Or, l’acier ne dégageait rien. Leurs bouches s’ouvraient et se refermaient dans le vide. Il coupa la seconde poussa sans difficulté mais l’agitation du géranium était telle pour la troisième qu’il s’en fallut de peu pour qu’il l’empêche de s’épanouir. Alors que la pince tranchante se refermant sur le bord de la tige, celle-ci se déroba pour essayer d’atteindre son bras. Il la coupa au moment où ses pétales commençaient à s’ouvrir pour révéler une paire de dents. Le bouton tomba à terre en se refermant tristement. Mervin récupéra les trois fleurs dans un bocal. Il donna ensuite d’autres sauterelles au géranium afin de l’apaiser. La plante avait doublé de volume. Il la posa avec sa récolte sur le bureau des examinateurs et quitta la serre en retirant ses gants couverts de terre.