- Nom : Keith
- Prénom: Craft
- Age en HJ : 19 (presque 20 )
- Age du personnage s'il est du livre ou d'une famille 15 ans. Personnage d'une famille. Normalement en cinquième année.
- Statut de Sang de votre personnage : famille considérée comme pure.
- Comment avez vous connu le forum ? C'est un retour aux sources après avoir abandonné un personnage précédent à l'été dernier.

Keith Craft

Lorsqu’elle fut noyée et dériva
De ruisseaux en plus grandes rivières
L’opale du ciel prit un ton étrange
Comme s’il devait apaiser le cadavre.
Varech et algues s’enroulèrent à elle
Et peu à peu elle s’alourdit
Les poissons glacés glissaient près de sa jambe
Plantes et animaux alourdirent encore son dernier voyage.
Et le soir, le ciel s’assombrit comme de la fumée
Et la nuit, il tint avec les étoiles, la lumière en échec.
La clarté toutefois se fit tôt, afin
Que pour elle aussi il y ait un matin et un soir.
Lorsque son corps pâle fut pourri dans l’eau
Il arriva (cela se fit lentement) que Dieu l’oublia peu à peu
Tout d’abord son visage, puis les mains et enfin sa chevelure.
Alors elle devint charogne parmi les charognes des rivières.

BERTOLT BRECHT, 1926. Poème sur une jeune noyée

* * *

Ces quelques vers étaient inscrits au fer rouge dans sa mémoire. Ils disparaitraient en dernier. Comme Caïn et l'œil dans la tombe ils le nargueraient jusqu'au bout. Déjà ils étaient devenus une obsession, un tourment. Parfois la nuit il se surprenait à les répéter inlassablement avant de s'endormir. Ou alors, lorsque chaque soir venait le moment de consigner dans son cahier les brumes éparses de ses souvenirs du jour, sa main se mettait à tracer d'elle même ces rimes accusatrices.

Hanté par la culpabilité, menacé par l'oubli. Comment vivre lorsqu'on porte un tel paradoxe en soi ? Comme tout bon personnage de tragédie le destin avait lancé Keith dans une spirale qui n'avait qu'un seul aboutissement : sa destruction. D'un côté son âme portait la trace de la mort de sa douce et tendre petite sœur, avalée par des flots aussi noirs que le néant. De l'autre, son esprit partait doucement en déliquescence. Son monde s'effaçait lentement et surement. Comme la mythique Babylone que le désert érode, grignote et enseveli doucement, son passé était voué à perdre tout sens pour lui.

A gauche, la pile de ces petits cahiers bleus couverts d'une écriture rapide et torturée ; fragiles remèdes contre l'amnésie. A droite le feu ronflant de la cheminée.
A gauche le souvenir de sa sœur, à droite la douceur de l'oubli.
Il n'avait qu'à faire geste. Il lui suffisait d'abandonner ses papiers à l'appétit des flammes pour s'éteindre comme une chandelle mouchée. D'un geste il pouvait tracer un trait définitif sur une existence si courte et si dramatique. Il soupesa la pile de ses souvenirs. Elle semblait étonnement légère. Après tout XI ans de vie, peuvent tenir sur 200 pages et quelques grammes.

Les crépitements du feu l'attiraient. Il imagina ses souvenirs se corner, se racornir avant de tomber en cendres pour finir lavés dans l'âtre par les coups de serviettes rageurs d'un elfe de maison trop zélé. Jeter ses cahiers au feu c'était faire disparaître son monstre de père, c'était aussi oublier cette pauvre mère trop faible pour s'opposer à son tyran de patriarche. Enfin c'était surtout consumer ce frère indigne et fratricide qu'il avait incarné. Il secoua la tête, toujours hésitant. Il pensait sa résolution ferme, mais la voilà qui chancelait au moment de commettre l'irréparable.

La porte s'ouvrit, en grinçant sur ses gonds. Sa mère, frêle créature à la beauté pâle et évanescente entra dans la pièce. Elle ne faisait pas de bruit. Ses pantoufles effleuraient à peine le sol. Elle semblait glisser comme une âme en peine. Son regard triste aux yeux aussi insondables que des lochs se posa sur son fils. Sa main aux doigts longs et fuselés déposa une lourde enveloppe sur son lit. Elle se détourna et quitta la pièce, sans un regard, sans un mot, sans un sourire pour retourner se plonger dans les délices de l'opium et ses fantasmes de gloire.

Intrigué, Keith s'approcha du lit. Comme un petit animal aux abois il renifla l'enveloppe, la soupesa avant de s'intéresser à l'écriture gothique qui ornait son rabat. Son cœur fit un bond dans sa poitrine. Un nom magique se mit à résonner à ses oreilles : Poudlard ! Sa chambre s'emplit de visions oniriques de lacs mystérieux, d'obscures incantations, de grimoires poussiéreux, et de tours déchiquetées par les déflagrations des éclairs. Adroitement il décacheta le plis et parcourut les quelques lignes de Dumbledore. Il en frissonna.

Enfin, un sourire hésitant étira la commissure de ses lèvres avant de gagner son visage. Comme le printemps revient après l'hiver le plus rude, les couleurs envahirent cette figure défigurée par la tristesse. Étrange métamorphose, en quelques instants il était redevenu ce qu'il était : un petit garçon de XI ans.

Sa décision était prise. Il se redressa, laissa tomber son enveloppe et bomba le torse. Ses épaules libérées d'un grand poids se déplièrent comme les ailes d'un oisillon qui va tenter son premier vol.
Sa pile de cahiers-souvenirs bien calée dans ses bras, il s'approcha du feu et la laissa tomber...dans une grosse valise qu'il boucla avec application.

* * *

Une jeune moldue à la démarche chaloupée poursuivait des pigeons. A chaque fois les placides volatils la laissait s'approcher. Elle exultait, elle y était presque encore quelques centimètres et elle pourrait caresser ce plumage chatoyant...
Peine perdus ils s'envolaient pour retourner se poser quelques mètres plus loin. Et le jeu recommençait. éternel cercle vertueux qui pouvait se poursuivre jusqu'à l'épuisement.

Sur l'esplanade pavée devant la Garde King's Cross Keith c'était arrêté pour regarder ce spectacle si anodin, tout ce qu'il y a de plus désespérément banal pour une grande ville comme Londres. Impatients, ses parents endimanchés comme jamais tapaient du pied devant les excentricités de leur gosse. Ils n'avaient aucune envie de laisser croire qu'ils avaient donnés naissance à un demeuré.

Ils ne pouvaient pas comprendre. C'était lui le bébé, et les pigeons c'étaient ses souvenirs. Toujours si proches, mais pourtant intouchables. Il avait beau courir derrière son passé, jamais il ne le rattraperait. Au contraire, il allait s'effondrer en cours de route, pour mourir là oublié de tous et de lui même. Et ses souvenirs désormais vautours tournoieront au dessus de sa dépouille en se moquant de la futilité de ses actions.

* * *

Le stylo courait avec rapidité sur le petit carnet bleu :

Citation :

Le train est là. Il est plus beau que dans mes rêves. Une locomotive rutilante, sifflante et éclatante qui souffle et gronde comme un troll endormi. Quelle puissance se cache derrière ces pistons magiques ? Des panaches de vapeur et de cendres noient le quai baignant le tout d'une aura tellement féerique.

Ah que le monde est beau, clair et lumineux une fois sortit des austères manoirs ! Et cette foule chatoyante, qui cavale. Ici une tribu de rouquins poursuit un rat, là un hibou s'envole, là un elfe de maison croule sous les bagages. Derrière moi une mère pleure autant que sa petite fille. Ah tant de diversité ! Que le monde est vaste ! Que le monde est mystérieux. Seul accoudé sur ma valise, je me fait l'effet d'une vieille branche que la rivière a abandonnée sur une rive, condamnée à regarder défiler les événements sans pouvoir plonger dans le flux.

Ah petite sœur chérie tu me manque. Comme tu aurais aimé voir ça, toi qui détestait la grisaille de nos murailles et la noirceur de nos cœurs. Et puis tu étais mes yeux. Tes petites mains n'avaient pas leur pareil pour croquer un dessin et saisir les impressions fugaces de l'instant présent.

Il faut que j'écrive, il faut que je note. Ah mon petit stylo, béquille de mon âme déchiquetée coure, vole, rature. Deviens filet, pour saisir au vol les papillons de l'instant pour les agrafer dans mon carnet-mémoire.

-Que fais tu ? Des devoirs de vacances ? La voix amusée chantait comme l'ondée un soir d'été.
Keith leva la tête, pour chercher qui venait d'interrompre sa course contre le temps. Cétait une jeune fille de son âge. Elle avait les joues rouges, et un sourire jusqu'aux oreilles. Ses yeux étaient autant amusés qu'intrigués.
Il secoua la tête, et lui dit avec une gravité contrastant avec sa voix fluette :
-J'écris mes souvenirs.
Il s'attendait à ce qu'elle rigole. Elle n'en fit rien, elle se contenta de lui prendre le bras et lui dit avec douceur :
-Allez viens avec moi. Il serait dommage que tes souvenirs s'arrêtent sur un quai de gare. Le train va partir.

Le train s'ébranla et s'élança avec un sifflement de joie. Flèche de sang tirée vers son destin. Dans ses entrailles de bois, de tissu et de verre un petit garçon le nez contre la vitre regardait le paysage devenir de plus en plus flou à mesure que la locomotive prenait de la vitesse.

* * *

Poudlard : un château gothique. Un mélange d'escaliers tortueux, de ponts, de passerelles. Ses créneaux semblaient déchirer la nuit de leurs dents acérées, ses girouettes grinçantes s'élevaient jusqu'aux étoiles et ses fondations s'enfonçaient jusqu'aux enfers enfermant en leurs cryptes des secrets oubliés de tous.
A l'entrée, une immense horloge rythmait la vie de ses habitants. Le balancier hypnotique poursuivait inlassablement ses allers retours. A chacun de ses passages, un souvenir de Keith s'effaçait.

Il soupira, le stylo nota :

Citation :

-J'ai fait trois marques : une sur une barque, une sur une pierre et une sur un tronc. Elles seront les gardiennes de mon passage. Les preuves irréfutables, qu'ici Keith Craft est venu, a vu et a oublié.

-Tu viens ? Tu vas rater la cérémonie ? Surpris le stylo dérapa et balafra la page. Le garçon se tourna. C'était une jeune fille de son âge. Elle avait les joues rouges, et un sourire jusqu'aux oreilles. Ses yeux étaient autant amusés qu'intrigués.
-Qui es tu ?
-Nous somme croisés sur le quai. Tu te rappel ?
-Non. Le couperet tomba froid comme la lame d'une guillotine. Elle blêmit sous l'affront. Il se détourna, l'abandonnant sans un regard en arrière. Sa silhouette s'effaça à mesure que l'écho de ses pas décroissait.

Keith était comme ça. Être un souvenir, ça se mérite.

* * *


* * *



Voilà. Peut être un peu court sur la fin, mais j'ai tout ecrit d'une traite et la machine commençait à devenir poussive à mesure que la nuit avançait.

J'espère n'avoir rien "oublié".
Ma fiche peut paraître vide, néanmoins elle est à mettre en perspective avec celle dressée par mon illustre prédécesseur.

J'espère réussir à me glisser dans le moule déjà dessiné pour Keith Craft. D'ailleurs si nos gentils administrateurs pouvaient modifier mon pseudo en conséquence ce serait gentil .

Autrement que dire, sinon que j'ai hâte de commencer à jouer avec vous. Et de remplir de nouvelles pages du carnet-bleu.

Chouette fiche, je valide, et vais changer ton pseudo de ce pas... Bon jeu parmi nous !

EDIT : ah oui, j'ai failli oublier : envoie un MP à Ultan Bower pour te faire recenser, je me charge de t'ajouter aux listes du ministère

Oui merci beaucoup.

Me reste plus qu'à me trouver des camarades de Rp.