Comme elle regrettait l'insouciance de sa première année... Lorsque, les premiers mois, Revan restait pendue pleine d'admiration aux lèvres de Page qui lui racontait ses aventures de BR, rêvant de faire également de la résistance... L'excitation qu'avait provoqué en elle l'enquête démarrée au dortoir des filles de Gryffondor, lorsqu'elle et sa préfète avaient découvert cet étrange portrait dans le mur de leur chambre à coucher... A présent, elle se trouvait réellement au coeur d'une ambiance malsaine et révoltante, incapable de se révolter. Parce qu'elle n'avait que douze ans, et qu'à part faire profil bas dans l'espoir qu'on laisse sa famille tranquille, elle ne pouvait guerre accomplir d'actes de rébellion digne des BR. Et aujourd'hui, le mystère du Beau au Portrait Ronflant n'avait plus grand chose d'excitant à ses yeux. Mais au moins, le fait de se replonger dans cette intrigue commune aux Bloody Ladies lui apportait un souffle de légèreté et de camaraderie, choses qui manquaient cruellement à l'atmosphère de Poudlard cette année.

En réalité, la Chose qui Ronfle, comme elles l'avaient surnommée, n'était plus vraiment un problème depuis qu'elles avaient découvert l'origine primaire du bruit qui leurs gâchaient les nuits l'année précédente. Elles s'étaient débrouillées pour que les ronflements dignes d'un tracteur soient étouffés en un léger bruit de fond pas si désagréable -ça la berçait même parfois-, ce qui avait rendu leur existence au dortoir bien plus supportable. Pour sa part, Revan n'utilisait même plus de boules Quies. Mais la gosse était tout de même restée sur sa faim, et les évènements qui peuplaient sa vie depuis quelques mois n'avaient pas réussi à saper sa curiosité, qui ne demandait qu'à être réveillée par un nouvel élan de motivation... Page n'avait pas hésité à se relancer dans l'opération avec elle, évidemment. Elles s'étaient donc mises à faire quelques recherches dans leur coin, et il était maintenant l'heure de la mise en commun.

Après le dîner, alors que la rouquine était montée en premier dans le dortoir, la deuxième année s'était rendue à la bibliothèque pour récupérer les quelques ouvrages qu'elle avait pu repérer durant ses visites ponctuelles, les avait fourrés dans son sac, et remontait maintenant allègrement jusqu'à la Salle Commune des lions. Elle y trouva son ainée déjà confortablement installée et se jeta elle-même dans le fauteuil réquisitionné pour l'occasion.

-Bon, j'ai pas trouvé grand chose d'intéressant, vu qu'on avait pas de pistes... annonça la gosse en déballant ses bouquins.

Elle replia ses jambes contre elle et attrapa le premier, jetant inutilement un regard autour d'elle pour voir si une autre bloody lady était dans les parages.

-On commence ou on les attend ? Demanda-t-elle, feuilletant les pages de son livre sans encore y jeter un oeil.

L'un des petits biscuits était en instance de sacrifice rituel entre les doigts de la rouquine, en équilibre instable devant le gouffre béant de la bouche Pagienne, et il fut sauvé in extremis par l'arrivée de la comparse Austen. Un grand sourire vint éclairer le visage de la troisième année, et ledit biscuit obtint un léger sursis. La gosse se décala un peu pour laisser à Revan de la place pour s'installer à son aise.
La brunette avait visiblement fait un tour par la sacro-sainte bibliothèque Poudlardienne, puisqu'elle aussi trimballait son quota de papier défraîchi.

- Pas grave, j'ai pris pas mal de trucs... Certainement que la plupart nous aideront pas des masses, mais on sait jamais, toutes les pistes sont bonnes à prendre.

N'importe quel gâteau étant également "bon à prendre", Page engouffra le biscuit qui s'était cru sauvé l'espace d'un instant, et mastiqua avec énergie, décalant de quelques secondes sa réponse à la question de son amie - car on ne parle pas la bouche pleine voyons !
A la place, la lionçonne déglutit et fit un signe de la main à sa compatriote qui venait de débarquer avec énergie, le poil ébouriffé et l'oeil immanquablement attiré vers le tas de petits gâteaux sournoisement mis en évidence sur la table.

- Tu tombes à point pour l'début d'notre suprême tea party, darling ! accueillit la troisième année dans un sourire. Un subtil cookie pour te mettre dans l'ambiance ?

A la place, Shell débita une explication de son début de soirée digne des excuses que Page inventait pour esquiver l'arithmancie. La rouquine pouffa mais son attention fut bien vite captée par le coquillage de l'enfer.

- Hu, y a quoi sur ce truc ? Montre voir ?

Poussant du revers de la main les petits gâteaux qui ne perdaient rien pour attendre, la rouquine fit un peu de place sur la table pour que la seconde année puisse poser son étrange guirlande devant les trois Bloody Ladies, afin de procéder à un examen approfondi, mon cher Watson.

- Non parce que moi j'ai des trucs assez classiques, et pis des magazines de santé sorcière aussi...

-Pas grave, j'ai pris pas mal de trucs... Certainement que la plupart nous aideront pas des masses, mais on sait jamais, toutes les pistes sont bonnes à prendre.

Revan opina du chef et, jetant un oeil aux ouvrages que son aînée avait apporté, avisa les biscuits disposés devant elle -Damn, comment ne les avait-elle pas repérés avant ?! Bien décidée à réparer cette erreur, elle tendit le bras et s'empara d'un gâteau en levant le pouce vers Page pour lui signifier que l'idée était excellente. En règle générale, avec la rouquine on ne manquait jamais de provisions, elle avait l'esprit plutôt pratique. Et les gamines étaient douées pour faire disparaître l'approvisionnement en un temps record.

Page n'eut pas besoin de répondre à sa question, puisque Shell venait d'arriver jusqu'à elle. Confirmant les dires précédents, son regard fut immanquablement attiré par les biscuits, et la deuxième année lui en tendit un sans attendre. Leur camarade prit place à côté des deux gosses déjà confortablement installées, leur racontant son fantastique voyage aux toilettes. Revan ricana mais n'eut pas le temps de sortir une remarque désobligeante à propos des premières années : l'autre brunette venait de déballer un objet qui capta aussitôt l'attention des gamines. Elle n'avait apparemment pas eu besoin d'aller fouiner à la bibliothèque, puisqu'elle arborait maintenant un grand bout de parchemin pour le moins intriguant. Déposant son bouquin à côté d'elle, Revan se pencha sur la guirlande que Shell leur déployait :

-T'as trouvé ça où ? Interrogea-t-elle en complément de la question que Page venait de poser. Pareil pour moi...

Elle s'empressa de parcourir des yeux la trouvaille de sa camarade. Pour sa part, à part un bouquin de médicomagie, un autre où l'on faisait mention des portrais sorciers et de leurs particularités et un ou deux ouvrages ayant vaguement un rapport, elle n'avait rien rapporté d'intéressant. En fait, elle avait fini par se dire que le moyen le plus simple serait de demander à un professeur, mais elle n'en avait pas encore eu l'occasion, et surtout elle avait voulu profiter de cette soirée entre bloody ladies.

Gloire aux gâteaux. Avec une assiette de provisions, elle savait qu’elle survivrait jusqu’au lendemain matin à affronter. Peut-être devrait-elle entamer un système de petites croix à tracer sur son calendrier, une pour chaque jour victorieux. L’idée avait un souffle galvanisant. Jusqu’à ce qu’on y réfléchisse en profondeur, en se basant sur la loi scientifiquement approuvée des probabilités. A treize ans, ça lui ferait une chance sur à peu près 4780 de ne pas calancher, nombre croissant à chaque aube nouvelle. Neh…en fin de compte, elle aurait l’impression d’amorcer un compte à rebours funèbre.

Shell mordit sans attendre dans la mini galette que lui tendait Revan ( pas à même les doigts quand même ) et lissa la longueur de son dépliant sur la table que lui avait dégagé Page.

-Je l’ai trouvé dans la salle de conférence du rez-de-chaussée. Vu les traces de sabot qu’il y a dessus, il a dû rester par terre un bout. , commenta la jeune fille en désignant une empreinte de semelle en travers de la prose recouvrant le parchemin.

Il fallait en réalité attribuer sa découverte à Edgar et sa manie des vols planés incontrôlés à cause desquels l’adolescente avait visité plus d’un endroit abandonné du château pour récupérer l’animal. A deux ans, il battait toujours de l’aile n’importe comment. Il faudrait qu’elle pense à un moyen de prendre son éducation aviaire en main avant qu’il ne les mette dans une situation plus périlleuse que gênante. Elle manquait peut-être d’instinct Gryffondor, en faveur de l’instinct de survie, mais elle n’avait aucune envie de visiter les gouttières du château.

-C’est un peu de la médecine aussi : Introduction aux pathologies des tableaux, gouaches, aquarelles et autres fresques magiques pour néophytes. , lut-elle, son index parcourant les lignes plus ou moins intéressantes le long des petits paragraphes serrés, Donc, "Il est très délicat d'aborder le sujet de la conservation des œuvres vivantes qui enchantent nos murs et"...blablabla. "Pourtant immortalisés, nos compagnons ne sont pas à l’abri de tous les maux, couleurs fanées, accrocs dans la toile, brûlure, et cætera"...blablabla… Ah, Là : "Humidité de la toile pouvant être synonyme de rhume, peinture de mauvaise qualité provocant des démangeaisons"…S’il ronfle c’est peut-être un problème de gouache trop épaisse ? Ou y’a un moyen de le soigner si on découvre ce qui va pas avec ses sinus en lui refilant un coup de peinture. Parce qu’à la fin, ils font de la pub pour des sérums et leur société de restauration. Sans les tarifs.

Et puis comme le papier avait l'air assez vieux, une autre société avait éventuellement repris le flambeau vacillant. Quoique, les choses étaient faites pour durer chez les sorciers, parfois au-delà de l'obsolète.

[Mwahaha, je n'avais même pas vu la réponse de Shell T_T Je poursuis comme convenu avec Revan, avec mes confuses les plus sincères, genre en mode carpette, pour le retard... Shell, si tu as le courage de poursuivre, ce sera avec plaisir Revan, prépare toi, me revlà !]

Tout comme Revan, la rouquine s'était rapprochée de la table, l'air concentré. Bloody hell, c'était une rudement bonne trouvaille. La troisième année échangea un regard étonné et impressionné avec la brunette.

- Ben ça... Tu vois, j'aurais jamais pensé à chercher dans c'domaine là en fait. Un sacré coup d'chance !

Les magazines et autres bouquins de l'irlandaise furent rapidement relégués au fond du canapé, devenu en quelques secondes totalement inutiles aux yeux de la Sang et Or. Non parce que quand même... Déjà, c'était un vieux truc. Donc, ça sentait le mystère à plein nez. Et comme le mystère, elles étaient dedans, et plutôt pas mal, ça pouvait coller. Et ensuite, ça causait directement des pathologies des tableaux. Et là, bingo, dans le mille, that's it my friend ! C'était exactement ce qu'il leur fallait. La troisième année sentait que les fillettes avaient mis la main sur... sur un truc cool. Et forcément, si c'était cool, ça devait marcher.

- J'avoue que j'ai quand même du mal à avoir l'réflexe de penser aux tableaux comme... comme des trucs vivants quoi. Mais pour sûr que ça doit se soigner comme des vrais gens !

Il était certain que la plupart des évidences du monde magique échappaient encore à la lionçonne, et pas une seule seconde elle n'avait imaginé qu'il puisse y avoir des traités de médicomagie adaptés aux compagnons créés à grands coups de pinceau. Elle marqua un temps d'arrêt pour assimiler l'information et bien intégrer ce paramètre avant de reprendre.

- Bon. S'il ronfle, c'est ptêtre bien qu'il est malade du nez. Comme une vraie personne quoi. Ptêtre bien parce qu'il s'est enrhumé oui. Par contre... j'suis pas super chaude pour acheter des trucs tant qu'on sait pas ce qu'il a vraiment non ? Enfin c'est juste que euh... j'ai pas des masses d'argent d'poche vous voyez...

La rouquine avait terminé sa phrase à voix basse, un peu gênée. Ce n'était jamais évident de reconnaître que sa famille n'avait pas un radis. Quand bien même on s'adressait à des amies.

- M'enfin en attendant, on peut essayer d'autres trucs ! poursuivit-t-elle plus enjouée. Après tout, il est resté j'sais pas combien d'années enfermé dans ce mur... C'est qu'c'est humide quand même, ces vieilles pierres ! Il s'est ptetre tout simplement enrhumé ! Alors du coup, on pourrait essayer de sécher sa toile ! Avec un sort, ou un sèche cheveux...

Les méninges de l'apprentie sorcière s'étaient mises à tourner à bloc. Il y avait là un défi de taille, faisant appel à leur imagination et leur ingéniosité, et elle comptait bien le relever. A présent lancée, la rouquine, affichant une bouille concentrée, lançait tout ce qui lui passait par la tête, même les idées les plus saugrenues.

- Ou sinon, on lui peint une écharpe. Mais 'faut s'appliquer, pour pas le blesser ou l'abîmer hein. Ou mieux, on se débrouille pour en trouver une libre dans un autre tableau... 'doit bien y avoir ça à Poudlard, vu le nombre de croûtes qui pendent aux murs... et on lui donne l'adresse !

A présent remontée à bloc, Page regardait les deux Bloody Ladies, attendant leurs réactions ou hypothèses aussi déjantées que les siennes.

[ Ouah, mon premier rp depuis des semaiiines XD je m'excuse du retard, et de la qualité médiocre ]

-C’est un peu de la médecine aussi : Introduction aux pathologies des tableaux, gouaches, aquarelles et autres fresques magiques pour néophytes.

Néoquoi? marmonna la gosse, un peu gênée de montrer son manque de vocabulaire. Elle écouta néanmoins attentivement la suite, se penchant de plus en plus en direction du parchemin au fur et à mesure que Shell leur faisait la lecture. Cette trouvaille était super excitante, quand même ! Revan jeta un regard désolé au maigre fruit de ses propres recherches. Le dépliant était d'autant plus intéressant qu'apparemment, ni Page ni elle-même n'avait même songé à cet aspect-là des tableaux.

-Sacré coup de chance, c'que t'as trouvé... J'adore !

Elle leva les deux pouces en direction de Shell pour féliciter sa camarade. La rouquine avoua qu'elle ne voyait les peintures que comme de simples peintures, ce que la gamine avait tendance à faire également.

-Tu sais, j'ai des tableaux sorciers chez moi, mais je savais même pas tout ce qui est marqué là dedans...

C'était un peu honteux, d'ailleurs. Elle était d'habitude assez fière de sa connaissance des deux mondes, mais pour le coup, elle n'était pas plus avancée que si elle était née moldue. Il était cependant plus dans sa nature de se réjouir d'avoir appris quelque chose plutôt que de rougir de son ignorance. Son esprit se concentra d'ailleurs bien vite sur un autre élément de leur découverte ; si on en croyait ce que Shell venait de lire, il faudrait bidouiller un peu la toile pour arranger le problème du vieux... Page en était arrivée à la même conclusion, mais c'était surtout le côté financier qui l'inquiétait. Sans vraiment comprendre la gêne de son amie, la brunette renchérit :

-De toute façon, je sais pas pour vous, mais je suis une quiche en peinture.

Elle écouta attentivement les idées qui jaillissaient de l'esprit de son aînée avec un ravissement croissant, les poings serrés d'excitation. Elle finit par lancer un « Rah vous êtes géniâââles ! » les yeux pleins d'admiration, mais se reprit très vite une fois que la rouquine eut terminé.

-Je vote pour la tentative de séchage ! J'vous l'ai dit, je suis nulle en peinture... Je risque de le défigurer, le vieux, si j'essaye de lui arranger le portrait... Réalisant le jeu de mot, elle s'esclaffa brièvement, puis reporta rapidement son attention sur leur affaire, qu'elle prenait aussi sérieusement qu'une réunion du G8. Nan, franchement, faut tout essayer t'as raison. Et moi qui pensait demander à un prof ! C'est beaucoup plus marrant comme ça j'trouve...

Saisissant un autre gâteau, elle interrogea

-Du coup, on commence par ça? Ou vous avez d'autres idées ? J'espère que c'est bien une histoire de rhume en tout cas, parce que j'ai vu dans un bouquin médical les différentes origines du ronflement, et y'a des trucs à propos des vibrations de l'air dans la bouche, des amygdales trop grosses ou j'sais pas quoi... Et je vois pas comment on pourrait guérir le vieux si c'est ça son problème.

Elle se laissa aller contre le dossier du canapé et guetta la réaction de ses camarades. Elle avait vaguement conscience de ne pas avoir été forcément claire dans son explication (il manquait d'ailleurs des détails à celle-ci mais elle ne se souvenait plus très bien de ce qu'elle avait lu, les mots étant parfois complètement étrangers à son esprit).

Bon, les choses se présentaient bien, mieux que bien même. Revan était arrivée un peu les mains dans les poches, sa camarade rousse pareil, et voilà que d'un coup une pluie de pistes leur tombait dessus. Bravo Shell, quand même. Si avec tout ça elles ne trouvaient pas... Et bien, rien, mais elles devraient supporter le poids du mystère irrésolu encore un bout de temps. Quelle torture psychologique.

- Bon. Les filles. Qui a un sèche cheveux du coup ? Z'imaginez bien qu'moi j'ai pas ça. Et même si je serais ravie de pouiller les affaires de Cudacier ou Toaster pour les faier chier, parce que je suis sûre qu'elles, elles en ont, c'est tout de suite un peu compliqué. Rev', t'as ça ?

Mééé euh ! A la mention même du mot sèche-cheveux, la fillette s'était tout de suite imaginée en train d'échafauder un plan pour aller piquer les accessoires des blondasses de Serpentard, jubilant d'avance en visualisant leur réaction... Mais si son aînée disait non, alors c'était non. Il était vrai que ça aurait été se compliquer la vie pour finalement pas grand chose, puisqu'elles pourraient aisément trouver l'outil de beauté dans leur propre maison. Et puis, la menace Carrow et leurs punitions carabinées vous passait vite l'envie de faire des trucs interdits. L'ambiance était tout de même tendax au château ces derniers temps... C'était d'ailleurs bien pour ça que Revan prenait tant de plaisir à se lancer dans l'énigme du bonhomme qui ronflait. Revenons sur Terre donc.

-Roh, dommage, ça aurait été vachement drôle... commenta tout de même la gosse, faisant la moue.

-Rev, t'as ça ?

Yeux ronds. Elle avait l'habitude de laisser ses cheveux sécher en les enroulant dans une serviette, puis de secouer vigoureusement la tête pour égoutter. Elle hésita tout de même, faisant inutilement un inventaire de sa malle dans sa tête (bah quoi ? Maman avait bien mis une bouilloire dedans l'année dernière, sans faire exprès...), puis lâcha :

-Euh nan, j'ai pas... Désolée. Mais y'a forcément une des filles qui en a un dans le dortoir, nan ? Ouais... J'suis presque certaine d'avoir vu Mariana avec un truc comme ça... On pourrait pas lui emprunter, juste quelques minutes ?

Elle prit son expression la plus adorable pour regarder Page, espérant que celle-ci ne dirait pas non cette fois. Après tout, emprunter un truc à une Gryffondor, c'était pas du tout pareil que d'aller chiper quelque chose dans l'antre des serpents...

Page ne put s'empêcher de sourire lorsqu'elle vit la moue dépitée de Revan à son refus d'aller chez les Verdâtres pour voler emprunter un sèche-cheveux. Certes, l'idée lui plaisait à elle aussi, mais c'était des risques inutiles et surtout bien compliqué pour ce qu'elles allaient en faire. Si le but était de pourrir la vie des blondasses, elles pourraient toujours s'en charger par d'autres moyens. Pour le moment, l'essentiel était de solutionner leur énigme, et mieux valait être efficace sur tous les points où on pouvait l'être. Malheureusement, la brunette n'étant pas plus accro que son aînée aux conseils de Miss Sorcière Hebdo 98 concernant la mise en pli de leur chevelure divine, les deux lionçonnes n'étaient pas d'un grand secours.
Machinalement, Page se retourna vers Shell, mais se ravisa dans la seconde. Non, impossible. La deuxième irlandaise était plutôt du genre mal embouchée au naturel, alors un accessoire de mode, il ne fallait pas non plus déconner.

Mais Revan eut un trait de génie.

- Ah ben oui, évidemment que Mariana en a un ! Au moins pour se faire belle pour son Oswaldinou, lâcha la rouquine dans une grimace. En plus, elle est obligée de ne le prêter, vu que c'est une BL...

L'affaire était entendue. Big Mama n'étant pas dans les parages, elles ne pouvaient pas lui demander ce prêt vital, ce qui était tout de même un peu gênant : même si Page ne doutait pas un seul instant que sa préfète lui donnerait sans problème son sèche-cheveu pour cette mission de la plus haute importance, fouiller dans ses affaires sans sa permission relèverait certainement aux yeux de la brune à de la haute trahison. Il faudrait donc se montrer discrètes malgré tout.
Sans ciller, Page échaffauda un plan de bataille en deux deux, qu'elle se chargea de partager rapidement avec ses acolytes.

- Bon, les girlz. Mariana s'ra pour sûr pas jouasse si on fouille dans ses affaires sans lui d'mander. Donc, on fait une opération éclair. Shell, tu restes ici, et tu montes la garde. Si Big Mama se pointe, tu euh... fais le cri du Strangulot ou un truc du genre. Ou tu hurles à la mort, ou autre chose, qu'on sache qu'elle arrive. Puis, se tournant vers la brunette. Revan, toi et moi on monte au dortoir. Ta mission, c'est le sèche-cheveu, sûrement dans le coffre de Mariana, et moi, je récupère notre tableau. On fait au plus vite, et on fait une tentative de séchage en direct, en espérant que Big Mama soit occupée bien loin pour un moment... OK ?

Ayant l'assentiment de ses deux comparses, la rouquine laissa passer Revan en tête et s'élança sur ses talons. Top chrono mon général !

Son idée plu à Page, qui s'exclama :

Ah ben oui, évidemment que Mariana en a un ! Au moins pour se faire belle pour son Oswaldinou...

La brunette pouffa à l'entente du surnom. Elle n'était pas du genre à se moquer quand il s'agissait de couple ou d'amour, car pour l'instant elle n'y comprenait vraiment pas grand chose, mais voir une Bloody Lady avec un serpentard, surtout Oswald, c'était tellement... contre-nature que s'en devenait drôle, passé le premier choc. Bon, c'était décidé donc, elles iraient emprunter l'engin de Big Mama. La gosse écouta son aînée énoncer le plan (elle était quand même la meilleure dans ce domaine, c'était prouvé) et l'approuva d'un signe de tête résigné.

Elle s'élança vers le dortoir, Page sur les talons, imaginant une vraie Mission : impossible. Arrivée sur place, elle se jeta littéralement sur les affaires de leur camarade (il était vrai que si Mariana les voyait fouiller ses affaires, elle n'apprécierait pas...) et fouilla en utilisant ses bras comme des pelles. Elle devait avoir l'air sacrément ridicule, mais le jeu de la course contre le temps était trop amusant. Lorsqu'elle mit la main sur l'objet convoité, elle lança un « HA-HA ! » vainqueur, puis signala à la rouquine que c'était bon.

Elle brandit le sèche-cheveu, lorsqu'une horrible révélation lui traversa l'esprit.

-Mais... y'a pas de prise ! Comment qu'on fait ?

Presque aussitôt, elle se frappa le front de la main pour se punir de son imbécillité. Hé ho, Rev', t'es une sorcière ou pas ? Qu'est-ce que c'est que ces vieux réflexes moldus ? C'est un sèche-cheveux de sorcière, t'es bête ou quoi ? Sinon pourquoi Mariana l'aurait-elle apporté à Poudlard ? Dire que tout le monde disait qu'elle ressemblait à sa mère, ma foi fallait se poser des questions... Elle avait sûrement pris pas mal de son père aussi ! Avec une maison bourrée d'objets magiques, elle parvenait encore à avoir des réactions pareilles...

Passé cette première réaction donc, elle mit l'appareil en marche et attendit que Page lui apporte le vieux.

-Il va pas apprécier je pense, le bonhomme..

C'était un commentaire pour la forme, car de toute façon il n'appréciait jamais rien, et elles feraient leur affaire qu'il soit d'accord ou non. S'il était incapable de se montrer agréable, ce n'était pas leur problème. Elles faisaient pas ça pour lui faire plaisir de toute façon, mais parce qu'elles avaient décidé de le guérir, et elles comptaient bien y arriver !

- Par Merlin ! Comment est-il possible de couvrir avec si peu de décence un homme de notre rang ! Non mais des fois ! Et puis il est inadmissible de ne pas nous avoir fait voir le jour plus souvent !

Revan se mordit la lèvre inférieure pour ne pas rire ; ce n’était pas très sympa pour sa camarade qui se faisait réprimander, mais le langage soutenu du bonhomme était si inhabituel qu’il lui donnait toujours envie de se marrer. Page, qui savait faire preuve de diplomatie, ne répliqua pas sur le même ton et parvint même à calmer le gugus, Pas pour longtemps… songea la brunette, qui avait d’avance envie de rigoler en imaginant la réaction du Sir dans une minute lorsqu’elles lui pointeraient le sèche-cheveux sur la tête. D’ailleurs, son amie sembla hésiter un instant à lui expliquer ce qui allait se passer. Elles échangèrent un regard entendu, et Revan se mit en position, bien campée sur ses appuis, l’ustensile tenu à bout de bras des deux mains, comme un pistolet.

Au top, Page lui présenta le portrait, et celui-ci n’eu sans doute pas le temps de se rendre compte de ce qui allait lui arriver quand la gamine mit l’accessoire en route, droit sur la toile. Le bruit couvrit le flot de protestations du vieux, ce que Rev’ trouva bien dommage ; les quelques mots qu’elles percevaient lui donnaient plus que jamais envie de glousser. Elle s’imaginait en fait à la place du gus, et ce qu’elles lui faisaient subir s’apparentait à un super tour de manège en fin de compte…

-ça doit être mieux qu’un train fantôme… souffla-t-elle à Page.

Elle n’y tint finalement plus et éclata de rire, mettant une main sur sa bouche pour ne pas que le bonhomme s’en rendit compte et soit encore plus fâché.

Lorsqu’elle estima que la toile avait suffisamment séché à tous les endroits, elle tenta de se recomposer un visage sérieux et éteignit l’accessoire. Abaissant son arme, elle toussota et se pencha vers la toile, faisant fi du babillage effroyablement outré de son occupant, afin d’observer les éventuels changements dus à l’opération. Elle fronça les sourcils, ne voyant rien de bien différent. Enfin, elle avança même un doigt, voulant vérifier au toucher, mais se retint en songeant que cela serait peut-être trop pour le vieux Sir ; elle leva les yeux vers la rouquine, quêtant son avis.

-Je sais pas si c’est concluant… Faudrait attendre qu’il s’endorme pour voir vraiment, non ?

Elle fit la moue, peu satisfaite. Elle s’attendait à un résultat visible au premier coup d’œil et était déçue.

3...2...1... 0 !

Dans tes dents Angelton ! Page rayonnait. Le souffle déferla tel un cyclone sur le portrait, sans qu'il ait pu comprendre ce qui lui arrivait. C'était en quelque sorte leur petite vengeance pour toutes les douches froides que le Sir leur avait assénées. Que cela faisait du bien de pouvoir se dire que, tout en ayant l'excuse de tenter de le soigner, elles avaient tout de même l'occasion de lui en faire voir un peu aussi ! La rouquine était presque déçue de ne pas voir la trombine du bonhomme, puisqu'elle le tenait à bout de bras vers Revan : elle imaginait les cheveux volant en tous sens, et la moustache fournie suivant le même chemin... Et vu la puissance que devait représenter le flux d'air proportionnellement à la taille du tableau, la tempête devait bien secouer le décor aussi !

Du coin de l'oeil, l'irlandaise aperçut la brunette éclater de rire, et en profita elle aussi pour laisser libre cours à sa bonne humeur. Tant pis si Angelton les repérait... avec un peu de chance, il était bien trop occupé à se protéger des rafales pour darder sur elles un regard plein de reproches.

Enfin, le raffut prit fin. Tout du moins pour celui provenant du sèche cheveu, car le petit bonhomme à brettelles avait pris le relai et relai et inondait les deux fillettes d'injures tout à fait vintage. Occultant ses jérémiades, l'irlandaise retourna le tableau vers elle, curieuse de voir le résultat de leur petite opération... Revan elle-aussi jetait un oeil, mais semblait déçue.
Page n'eut pas autant de retenue que sa cadette. Puisqu'Angelton criait déjà, elle n'en étaient plus à un affront près, et la gosse passa le doigt sur la toile peinte, essayant d'estimer son degré d'humidité tandis que le Sir faisait mine de lui taper sur la phalange avec une canne qu'il sortait d'on ne savait où.

- Bon, ben... ca m'a effectivement l'air un peu plus sec mais bon... Chui pas experte en toiles humides en profondeur non plus hein.

L'homme à la moustache s'était à présent tu, passant ses doigts dans ses cheveux pour remettre de l'ordre dans sa coiffure, et rajustant du mieux possible moustache, costume et décor tout en écoutant les conclusions des deux apprenties restauratrices.

- C'est bête qu'on ne puisse pas voir tout de suite si ça a marché ou pas, poursuivit Page, elle aussi un peu désappointée. Bon. Il ne nous reste plus qu'à voir... enfin à écouter, ce soir.

Sir Angelton était suspendu aux lèvres de la rouquine, mais, une fois n'était pas coutume, il s'abstint de tout commentaire. Tous les trois n'avaient plus qu'à attendre le verdict cette nuit. Ils l'espéraient bon mais... rien n'était moins sûr.


[Fini ici ! La suite pour la rentrée suivante, puisque la tentative sera un échec !]