Samael poussa violement la porte de son dortoir qui claqua contre le mur dans un bruit assourdissant. Il la referma avec la même violence et le même fracas avant de s’étaler sur son lit. Oui, c’était assez puéril de claquer ainsi les portes, mais Merlin que ça faisait du bien. Affalé sur le dos, sur son matelas, le jeune garçon repassait en avance rapide les scènes du bal. La ceinture, le cadeau qu’il avait offert à Morgwen, celui qu’elle devait lui offrir, le baiser que sa cavalière avait déposé sur sa joue pour le remercier de son présent, la danse, et le baiser qu’il avait à son tour déposé sur la joue de la jeune fille. Et qui ne lui avait apparemment pas plût.

Le jeune Serpentard ne tenait plus en place, et il se leva pour s’accouder à la fenêtre après l’avoir ouverte. Un courant d’air froid balaya la salle, faisant voler des feuilles de parchemin qui trainaient au sol, et soulevant les rideaux des lits. Merlin qu’il était idiot, tout de même. Il regrettait à présent son geste qui lui avait peut-être coûté l’amitié de Morgwen. Le vent glacial balaya les mèches brunes qui cachaient une partie de son visage, et le jeune homme soupira.

Joyeux noël, pensa-t-il avec ironie. Joyeux Noel… Depuis combien de temps n’avait-il pas profité de cette fête pour s’amuser ?
**Dommage de tout gâcher par ta bêtise hein ?**pensa-t-il dans une ironie cinglante.
Se moquer de lui-même, c’était ce qu’il avait toujours fait lorsqu’il s’en voulait ou lorsqu’il était la cause d’un problème. Et ce soir, plus que jamais, il avait besoin de ceci pour se remettre les idées en place. Samael haussa les épaules pour lui-même, et se décida à enfiler son pyjama, puisqu’il ne comptait plus sortir ce soir.

Il attrapa un bout de tissu noir en coton et l’enfila. Assez large, il n’était orné que par une vipère qui remontait le long de sa cheville. Samael enleva alors sa chemise, et souleva son oreiller pour trouver le haut de son pyjama, qui n’était pas à sa place. ‘Mael n’était pas quelqu’un de très ordonné, et si d’habitude cela l’amusait, ce soir, ça le mettait plutôt sur les nerfs.

« Merlin ! Qu’est ce que j'ai foutu pour mériter ça ?! »

Excédé, le jeune garçon parlait à voix haute. Il se mit à genoux près de son lit, regarda en dessous en espérant voir le vêtement recherché.

« On y voit vraiment que dalle… » Bougonna-t-il.

Il se savait seul, et se permettait de parler, et de râler à voix haute, chose qu’il évitait en public. Enfin, sa main rencontra un bout de tissu ! Un sourire victorieux aux lèvres, il se releva, en époussetant sa veste de pyjama. Un craquement de parquet retentit soudain derrière lui, et le jeune homme se retourna, surpris, toujours torse nu, avec son vêtement à la main.

[ Manque un peu d'inspi', désolé... ]

La personne qui venait de pénétrer dans son dortoir n’était autre que Morgwen elle-même. Elle n’était quand même pas venue jusque là pour lui dire qu’elle lui en voulait tout de même… Non, Samael voyait mal la jeune fille le poursuivre à travers Pouldard juste pour lui dire ce qu’elle pensait de lui et de ses agissements. Mais alors, que venait-elle faire ici ? Ce n’était sans doute pas un hasard s’il elle était entrée dans son dortoir. Le jeune homme aperçut alors le cadeau qu’elle tenait à la main.

Peut-être était-elle simplement venue déposer son cadeau sur son lit, pour ne plus à avoir à lui parler après. Mais comme il était là, ça compliquait les choses. Bon, là, le jeune garçon se sentait légèrement mal à l’aise, surtout que c’était de sa faute s’ils s’étaient disputés… Il attendait cependant, sans rien dire. Ce fut Morgwen qui pris la parole, alors que ‘Mael la regardait sans rien dire, sa veste de pyjama toujours à la main. Ce qu’elle lui dit l’étonna. Il ne s’attendait vraiment pas à des excuses, et lorsqu’elle lui proposa des explications, son étonnement grandit encore un peu.

« Tu n’as pas à t’excuser, après tout, je n’avais pas à faire ça, sans savoir si tu étais d’accord ou pas. »

Il s’assit sur son lit, l’invita d’un geste à faire de même.

« Mais je veux bien des explications, si tu le souhaites, évidement. »

Samael ne voulait d’explications forcées qui ne la soulageraient absolument pas et qui le rendraient mal à l’aise. La jeune fille lui tendit alors son cadeau de noël, et un sourire joyeux illumina le visage du garçon, malgré la situation un peu tendue. Un cadeau restait un cadeau, quelle que soit les conditions. Il le déballa avec un enthousiasme mal caché, et découvrit un bracelet en cuir très simple, mais très beau. La simplicité du bijou correspondait tout à fait au goût du garçon, et il s’empressa de le mettre.

Il adressa à Morgwen un sourire ravi, et après un instant d’hésitation, ne l’embrassa pas comme elle l’avait fait dans la salle de bal. Il ne savait pas quelles allaient être les explications de la fillette, et ne voulait pas recommencer une bêtise, encore une fois. Il se contenta alors de lui dire combien il lui plaisir.

« Il est superbe ! Je l’aime beaucoup ! Merci. »

Le sourire sincère qu’il lui adressa était la preuve de sa joie, mais il redevint vite sérieux, en attendant les explications de la jeune fille. Il imaginait bien qu’elles avaient un rapport avec son passé dont il ignorait tout, et il espérait pouvoir l’aider même s’il était conscient de ses faibles moyens. Il se tût alors, en attendant que Morgwen commence, si elle le voulait toujours.

[ Je te pardonne, dans ma grande générosité ]

Morgwen s'assit sur le lit après que Samael lui ait fait signe de le suivre. Le garçon saisit ensuite le paquet et le déballa avant de passer le bracelet de cuir à son poignet.
La jeune fille sourit, il l'aimait, sans oublier de remarquer l'habileté avec laquelle il avait refermé le bracelet.

Suivi ensuite les remerciements chaleureux, il se contenta seulement de mots. Une attention qui n'étonna pas Morgwen, son ami lui avait prouvé à plusieurs reprises qu'il était loin d'être idiot.
Le silence qui avait suivi les mots de Samael n'était là que pour laisser Morgwen s'exprimer, elle s'était passée de mots depuis qu'elle avait tendu son cadeau au garçon.

Elle baissa alors la tête vers le sol, ses longues mèches noires glissant devant son visage, avait-elle bien fait de lui proposer des explications ?
Oui, c'était une certitude qui s'imposait à elle. Seulement le fait d'exposer ses faiblesses à quelqu'un la révulsait, bien évidemment Samael n'était pas "quelqu'un".
Les doigts de la petite brune s'accrochèrent à la vipère d'argent qui s'enroulait autour de son poignet alors qu'elle se mettait à parler d'une voix sûre.

" Je sais très bien que ma réaction était excessive, je te dois donc des excuses. "

Son ton était sans appel.
C'est plus doucement qu'elle reprit d'abord légèrement réticente puis plus librement. Il comprendrait où non, il considèrerait ses problèmes infimes les comprendrait. Morgwen s'avait que l'issu de cette conversation changerait leur relation... Elle n'était pas sûre de vouloir que cela change.

" Je n'ai pas de père. Un simple géniteur qui doit être écoeuré à l'idée d'avoir participé à la création d'une petite bâtarde. Quoi qu'il ne sait rien de moi, je ne sais pas plus de choses de lui, seulement qu'il s'appelle Sullivan. Le nom que je devrais porter s'il m'avait, rien qu'une fois, considéré digne d'intérêt. Enfin, j'imagines qu'il a une famille qu'il aime.
J'ai donc grandi avec un certain manque et couverte par un amour malsain et exclusif. L'amour maternel je crois. Je crois surtout qu'elle voyait dans mes yeux ceux de son amant. Je ne sais pas si elle m'aimait pour ce que j'étais où pour ce que je lui rappelle.
Tu sais, mon père était un homme magnifique, je comprends ma mère des fois... "

Morgwen s'arrêta un instant comme pour respirer. Elle n'avait pas relevé le visage depuis qu'elle s'était mise à parler. Elle savait cette attitude impolie mais ne se sentait pas le courage de raconter son histoire en regardant Samael.
Nerveusement, elle jouait avec son bracelet pourtant la voix qu'elle employait pour parler était froide d'indifférence comme détachée.
Samael ne s'y tromperait certainement pas, c'était seulement une façon de rendre les choses plus faciles et de paraître plus forte.

" Je n'arrêtais pas de demander à ma mère des détails sur mon père. Des petites histoires, ou même juste la couleur de ses yeux, la forme de son visage... Je n'ai jamais rien eu. Lorsque j'étais petite elle se contentait de m'offrir quelque chose pour faire passer les questions. Quand j'ai grandi c'est devenu impossible. Elle devenait donc froide et imperméable à toutes mes tentatives.
D'un autre côté elle m'étouffait en affection superflue, en caresses trop amoureuses, elle aurait certainement voulut que je reste à elle jusqu'à sa mort... Mais je suis trop entêté et j'ai fini par retourner toutes les pièces à la recherche du moindre indice sur mon père. Tu sais je m'étais imaginé quelqu'un de bien, pour moi il était mort loin de nous, c'était la seule explication à sa si longue absence.
J'ai fini par trouver une photo dans la chambre de ma mère, sous de vielles lettres, derrière un nom : "Sullivan". Alors, trop heureuse de ma trouvaille je suis descendue voir ma mère. Nous ne nous sommes plus reparlé depuis cette conversation.
Elle ne m'a même pas accompagné à la gare, n'a jamais envoyé une lettre. " Un rire dénudé de joie secoua la jeune fille. " Cette femme qui faisait tout pour me garder près d'elle ne m'a plus fait un signe depuis mon départ. C'est drôle non ? "

Un silence s'installa un instant, le temps que Morgwen redresse la tête, elle dégagea son visage et regarda Samael. Un regard sec, sans expression et dénué de larmes.
Elle lui sourit d'un sourire peu convainquant et finit.

" Je pense que c'est pour ça que j'ai un comportement si incohérent, je n'ai pas connut d'amour saint ou normale si tu préfères.
Je supporte mal les marques d'affections, les contacts trop doux qui n' ont aucune justifications. Je crois que je me suis habitué à l'amour de ma mère, elle prenait toujours quelque chose en échange de sa douceur. Moi."

Et de nouveau son regard fuyant le visage de son ami. Son ami ? Non, c'était plus pour elle mais elle n'avait aucune envie de l'accepter.
Elle se laissa tomber en arrière sur le lit et ajouta une dernière fois en fermant les yeux.

" Je t'aime vraiment bien Samael, je n'avais pas envie de te faire de peine et j'ai beaucoup aimé cette soirée avec toi ..."

[ Que serais-tu sans cette générosité... ^^']

Morgwen lui accorda alors des explications, et ce fut tout une partie de son passé qu’elle lui raconta. L’histoire de son père absent et de sa mère qui ne voulait plus la voir le toucha. Il n’était pas surpris que son passé soit douloureux, quelque chose dans l’être de Morgwen le clamait, mais elle le cachait si bien qu’il était impossible de savoir ce que c’était, et de pouvoir l’aborder avec elle. Son regard le fuyait, mais Samael ne s’en formalisait pas, il savait la facilité que cela procurait.

Lorsque la jeune fille releva la tête vers lui, elle lui adressa un sourire tout à fait différent de celui qu’il avait l’habitude de voir, et le jeune garçon se contenta de lui rendre son regard. Il ne pouvait pas décemment lui adresser un sourire après qu’elle lui ait raconté cette dure partie de sa jeunesse, et ses yeux étaient pour lui la seule façon de s’exprimer, de lui faire comprendre qu’il était bien là. La jeune fille baissa à nouveau son regard lorsqu’elle lui avoua que toutes marques d’affections lui étaient insupportables, à cause de sa mère qui la retenait malgré elle avec ce trop grand amour étouffant. Le jeune homme aurait aimé pouvoir la conseiller, la rassurer, mais malheureusement, l’amour parental n’était pas son fort, et il ne le connaissait pas. Il se contenta alors de garder le silence, réfléchissant.

La jeune fille lui dit ensuite qu’elle l’aimait bien, après s’être laissé tomber sur le lit, sur le dos, et ajouta qu’elle n’avait pas envie de lui faire de peine. Le jeune garçon ne sut pas exactement ce qu’il devait comprendre dans cette phrase ; si c’était une façon gentille de lui dire qu’il valait mieux qu’il arrête ses avances ou si…. Il se contenta alors de se laisser tomber sur le ventre, à coté d’elle, et ramena ses coudes sous sa tête pour la maintenir en hauteur.

« Moi aussi, j’ai beaucoup aimé cette soirée. »

Il lui jeta un regard discret, avant de dire, avec un fin sourire dénué d’expression.

« Je crois que je te dois aussi des excuses, tu sais. Après tout, je n’avais pas à t’embrasser sans savoir ce que tu en penserais, si en avais envie. »

‘Mael se savait maladroit avec les filles, il n’avait pas l’aise que procure l’habitude, celle des grand séducteur.
Mais après qu’elle lui ait parlé de son passé, le jeune homme se demanda si ce n’était pas pour lui le moment de lui parler du sien. Parce qu’il commençait à comprendre et à accepter ce que son cœur lui criait, Samael pensait qu’il pourrait peut-être lui parler de sa vie d’avant Poudlard. Parce qu’il lui faisait confiance mais il craignait aussi qu’elle le fuit après.

« Un jour, si tu acceptes de l’entendre, je te raconterais aussi mon passé. »

C’était une façon de trancher sur son dilemme ; il ne le lui raconterait que lorsqu’elle le voudrait, lorsqu’elle le lui demanderait, ce qui pouvait être aussi bien dans les minutes qui suivraient que dans les mois où les années à venir. Le jeune garçon lia un instant son regard sombre aux yeux gris de la fillette avant de les détourner pour regarder devant lui.

« Je suis content que tu sois venue me voir… »ajouta-il à mi-voix.

[ Encore pleins de choses:niarkniark: tu veux vraiment que j'énonce toutes mes qualités ? :sifle: ]

Samael avait sût l'écouter sans l'interrompre, peut être avait-il comprit que la couper l'aurait empêché de reprendre son récit. Il l'avait donc laissé parler, sans un sourire, juste des regards qui signalaient sa présence.
Morgwen se doutait qu'il ne l'avait pas lâché des yeux de tout son récit, elle en sourit doucement.
Elle se rendait compte, par ce petit pincement au coeur, combien il était douloureux de concrétiser par des mots ce qui l'obsédait.

Morgwen sentit alors le matelas s'enfoncer un peu à côté d'elle, elle rouvrit les yeux et tourna la tête là où Samael s'était laissé tomber.
Il lui déclara ensuite avoir lui aussi apprécié la soirée. Morgwen ne put s'empêcher de se sentir légèrement coupable, il aurait pu avoir une meilleure soirée si elle ne l'avait pas si froidement arrêter. Il ne faisait que profiter de la fête, ils y seraient encore si elle n'avait pas réagi si bêtement.

Le garçon s'excusa à nouveau, d'abord la jeune fille voulut protester mais savait que ça serait inutile, elle haussa donc doucement les épaules.
Pour elle, il n'était pas en tord.
Cette fois elle détourna le regard vers le plafond, elle n'aurait jamais détourné le regard devant quelqu'un d'autre. Elle ne comprenait pas vraiment ce qui lui arrivait.
Une petite fille perdue face à son étrange comportement, voilà ce qu'elle était.
Elle avait préféré la mâtiné légère qu'ils avaient passés ensemble, là elle s'était sentie comme une enfant de onze ans. Juste à s'amuser de la neige et des rôles qu'ils avaient joués.

Là, le silence persistait entre eux, Morgwen se demandait si s'était parce qu'il n'arrivait pas à lui pardonner son comportement ou s'il s'apprêtait à lui parler et choisissait donc ses mots.
La jeune fille tourna un regard surpris vers Samael lorsqu'il lui déclara être prêt à lui dévoiler son passé si elle se sentait prête à l'entendre.
Elle ne s'attendait pas à ce que ce soit ce genre de déclaration qui briserait leur silence.
S'il était prêt à lui confier son passé c'est qu'il avait confiance en elle, son passé était lourd. On n'avait qu'à plonger dans ses yeux sombre pour s'en apercevoir.
Elle finit par reprendre le dessus sur ses émotions et lui sourit doucement.

" Ce n'était pas dans ce but que je t'ai dis ce que j'ai dis. "

La petite brune avait par contre totalement occulté la dernière phrase du jeune homme. Pour elle qu'il la pense digne de confiance était rassurant, mais elle ne voulais pas qu'il se sente obligé de lui expliquer pourquoi il avait cette lueur coupable dans le regard juste parce qu'elle avait tenté de lui expliquer ses réactions...

" Je ne veux pas que tu te sentes obligé, mais si tu en as vraiment envie je veux bien..."

Elle se doutait qu'entendre le passé du jeune homme ne serait pas comme plaisanter à propos d'une pantoufle de verre...
Pour qu'un enfant de onze ans est un tel regard et une telle maîtrise de ses émotions il fallait qu'il ait enduré de terribles épreuves.

Maintenant elle ne fuyait plus le regard de Samael, s'il décidait de se livrer elle ne pensait pas décent de regarder ailleurs.
Un faible sourire d'encouragement apparut sur les lèvres de la jeune fille.

[ Me revoila :) ]

Les quelques secondes de silence qui suivirent sa proposition lui parurent aussi longue que des heures, et c’est avec un soulagement caché qu’il vit la jeune fille lui adresser un fin sourire. Elle lui dit qu’il ne devait pas se sentir obligé de lui faire ces confessions, et le jeune garçon hocha doucement la tête. Samael savait que c’était une chose qu’il ne pourrait pas faire par obligation ou sous pression. C’était une proposition qui venait du fond de son cœur, par confiance, amitié.

Morgwen lui dit alors qu’elle acceptait d’entendre le récit de son passé, et ‘Mael eut un instant d’hésitation. Tout révéler lui semblait à la fois difficile et salvateur. Alors que le garçon gardait le silence, la jeune fille lui adressa un sourire d’encouragement timide, et ce fut ceci, plus que le reste, qui l’aida à commencer son histoire. Le Vert et Argent s’assit à nouveau, le dos appuyé contre le mur, les genoux ramené contre son torse, dans un geste dérisoire de protection.

« Comme toi, je ne connais pas cet amour parental sain dont tout les livres parlent. Ma mère est décédée à ma naissance, et mon père m’en a toujours tenu pour responsable. Avec le recul, je me dis qu’il avait peut-être raison, mais gamin, je ne pouvais me résoudre à accepter cette idée. Moi et …. » - Sa voix vacilla un instant, incapable d’articuler un simple prénom. –« … et mon frère, on vivait donc tous les trois, dans une maison reculée, en pleine campagne. On suivait des cours par correspondance, ce qui permettait à mon père d’éviter tout aller-retour en ville et avec mon grand frère, nous étions vite devenus inséparables. »

Le garçon détacha un instant son regard songeur du visage de son interlocutrice pour le tourner vers la fenêtre ouverte d’où s’échappait un vent froid. D’un geste machinal, il se leva, referma le battant qui claquait contre le mur avec le vent, et revint s’assoir sur le lit, dans la même position.

« Mon géniteur buvait déjà beaucoup, mais lorsque … »- Son visage se crispa violement alors qu’il prononçait enfin ce nom. – « Lorsque Antoine découvrit ses pouvoirs magiques, son don de sorcier, George, c’est le nom de mon paternel, perdit complètement la raison. ‘Toine était son préféré, son fils chéri…. Alors il devint saoul en permanence et soulageait la douleur des échecs de sa vie par des coups violents. »

Le garçon ferma un instant les yeux pour chasser les images insupportables qui jaillissait sous ses paupières.

« Mon frère était trop fragile, beaucoup trop… Il… Il n’a pas survécut. »

Cette dernière phrase prononcée d’une voix si froide résonna un instant dans le dortoir, comme une sentence. Le visage de Samael se durcit pour cacher sa douleur et ses remords alors qu’il reprenait la parole.

« Moi, je n’ai rien dit, tu vois. J’étais trop lâche, je l’ai laissé mourir. Je l’ai tué. J’en suis tout autant responsable que mon père… »

La voix du garçon avait pris en ampleur et en agressivité alors qu’il parlait, et Samael se tut pour reprendre son souffle, se contraignant au calme. Un air neutre, inexpressif pris place sur le visage pale du Vert et Argent.

« Je suis revenu venger mon frère plus tard, j’ai mit le feu à la maison. »

Il se tut un instant.

« Mon père était dedans. »

Voila, c’était dit. Leur amitié était soumise à une rude épreuve, entre les deux récits. Le jeune Serpent espérait simplement qu’elle puisse continuer après ça, après qu’elle sache exactement ce qu’il était. Levant les yeux au plafond pour cacher les regrets trop visibles qui faisaient scintiller ses yeux, ‘Mael reprit enfin la parole, avec un sourire aussi fin que timide.

« Tu sais, moi, je ne te demanderais jamais rien en échange de ton amitié… »

Cette phrase maladroite prouvait simplement combien il respectait les sentiments de Morgwen et combien sa compagnie lui était précieuse. Il laissa son regard errer sur les planches du plafond, évitant les yeux gris de la jeune fille, alors qu’il attendait une réponse, une réaction.