We wish you a merry Christmas … Chanson débile que chantaient un nombre incalculable de tableaux depuis le début de la journée, Emilien la connaissait par cœur, maintenant. Mais c’était normal après tout, c’était Noël ! Accessoirement, c’était aussi les vacances, donc très peu d’élèves étaient là pour entendre ces stupides chants de Noël. Le Serpentard, quant à lui, avait refusé de rentrer chez lui, et l’avait bien fait comprendre à ses parents dans sa dernière lettre. Au moins, ça leur aurait évité de se disputer pour savoir où leur fils allait passer telle ou telle fête. Bien sûr, ils n’avaient pas tellement apprécié, mais il faudrait qu’il s’y habitue, car Emilien avait l’intention de prendre de plus en plus d’indépendance, au fur et à mesure que ses études à Poudlard avanceraient. Il envisageait même de passer les vacances d’été sur le Chemin de Traverse, ou chez Camille, sans consulter ses parents. Ça lui demanderait pas mal d’argent … Enfin on n’y était pas encore. Pour le moment, il se souciait plus de savoir si son père allait mettre sa menace à exécution ou pas.En effet, Monsieur Backhand avait écrit, dans la lettre qu’Emilien avait reçue le matin même avec ses cadeaux, qu’il viendrait le chercher jusqu’au château, si son fils refusait encore de rentrer à la maison en février. Quel cadeau !

En parlant de cadeau, comme tous les élèves de Poudlard, ce matin-là, Emilien avait ouvert les siens. Ça lui faisait assez bizarre de ne pas être chez son père ou chez sa mère, pour Noël. Mais finalement, c’était plutôt chouette. Seul inconvénient : il ouvrait ses cadeaux en compagnie des autres Serpentard restés pour les vacances, et il n’y en avait aucun qu’il n’appréciait particulièrement. Tant pis ! Il s’y ferait. En se réveillant, Emilien avait découvert une petite pile de cadeaux, rien de très impressionnant, il se demanda même si ses parents n’avaient pas fait exprès de lui offrir moins de choses que d’habitude, pour se venger. Bah, il se faisait des idées … Le jeune Backhand ne s’était pas attardé sur le cadeau de son père : un livre, quelle surprise ! Tant que ce n’était pas le Da Vinci Code, hein. Emilien avait à peine jeté un coup d’œil à la couverture, un truc de Zola, et l’avait lancé dans un coin de la chambre. Si un de ses camarades de dortoir en voulait … Sa belle-mère avait fait encore mieux : un livre, mais de religion. Wouhou ! La vie de Jésus, génial. La vie du pauvre mec cloué sur une croix en bois termina sous le lit du Serpentard. De la part de sa mère, il avait eu une horreur qu’il ne nommerait même pas : un maillot de l’équipe de football italienne. Elle se moquait de lui ou quoi ?

Il devait être onze heures, quelque chose comme ça. Emilien avait laissé sa montre au dortoir, et avait pris la direction de la volière pour envoyer une lettre à sa cousine. Celle-ci lui avait envoyé un cadeau, bien sûr ! Le Serpentard y repensa tandis qu’il montait les nombreuses marches qui menaient à la volière. C’était un cadeau bien étrange qu’il avait reçu, en tout cas il avait mis du temps à comprendre. En effet, en ouvrant un paquet, il était tombé nez à nez avec … Un lecteur de musique moldu ! Emilien avait maudit ses beaux-parents dans la seconde qui avait suivi, ça ne pouvait être qu’eux ! Ils étaient les seuls à ne pas savoir qu’il était dans une école de sorcellerie, et que tous ces trucs de moldus ne marchaient pas là-bas. Mais il avait découvert une lettre avec le paquet, dont l’écriture lui était très familière. Et c’était en réalité un cadeau de Camille ! Emilien s’était d’abord dit qu’elle avait perdu la tête, mais après lecture de la lettre, il était dubitatif. Ça, c’était fait pour marcher même à Poudlard ? On verrait bien, quand il saurait s’en servir ! Il n’y comprenait rien, et écrivait à sa cousine non seulement pour la remercier, mais aussi pour lui demander un mode d’emploi.

Emilien entra dans la volière et eut un frisson. A cause des nombreuses ouvertures dans les murs de la tour, afin de laisser les oiseaux entrer et sortir quand ils le voulaient, il y faisait bien froid ! Heureusement qu’il avait son écharpe, mais il aurait dû prendre également un manteau. Enfin, il ne comptait pas y rester très longtemps, normalement … Ça ne devrait prendre que quelques minutes. La vue de tous ces hiboux rappela à Emilien sa rencontre avec Mariana, la Gryffondor de deuxième année. Rencontre qui avait bien mal tourné, d’ailleurs, car en essayant d’échapper à Rusard – ils n’avaient rien fait de mal, pourtant – ils avaient pris un passage secret, avaient dévalé un long toboggan humide, et s’étaient retrouvés … Dans les cachots ! Bref. Emilien faisait toujours très attention, à présent, lorsqu’il empruntait ce genre de passages. Le première année choisit un hibou à l’air docile – pas besoin de lui lancer de caillou, à celui-ci – et attacha soigneusement sa lettre à sa patte. Et il allait envoyer l’oiseau par la fenêtre, lorsqu’il entendit du bruit et se retourna … Pour se retrouver face à Lucy !

- Ah, salut !

Emilien adressa un sourire à son amie, ça faisait un moment qu’il ne l’avait pas vue … Ou plutôt, qu’elle ne l’avait pas vu. Car le Serpentard avait bien aperçu la Serdaigle quelques jours plus tôt dans le parc, mais s’était gardé d’aller lui adresser la parole à ce moment-là. Il n’en dit pourtant pas un mot, après tout c’était Noël, un jour de fête normalement, et il ne tenait pas à envenimer la conversation. Emilien remarqua les paquets dans les bras de Lucy, apparemment elle était un peu en retard pour Noël … Le jeune Backhand n’avait rien à offrir à ses parents, cette année il n’avait même pas fait l’effort de chercher un cadeau. De toute façon, rien ne ferait plus plaisir à sa belle-mère qu’un livre de religion – Emilien cherchait toujours à comprendre comment elle pouvait lire autant de livres sur Jésus, peut-être lui trouvait-elle un certain charme … Aargh, beurk. Il préférait ne pas y penser. Quant à son beau-père, ce n’était même pas la peine d’y penser, à moins de lui envoyer un cadeau piégé, mais il se méfierait s’il recevait quoi que ce soit de la part d’Emilien. Et ses parents … Depuis qu’ils l’avaient trahi, il n’avait aucune envie de leur faire plaisir. Non, la seule personne de sa famille qui aurait le droit à quelque chose de sa part, c’était Camille.

Alors qu’il s’attendait plutôt à voir son amie choisir un hibou, la Serdaigle lui souhaita un Joyeux Noël en lui tendant un paquet. Il ne sut pas vraiment quoi répondre tout d’abord et se contenta de prendre le cadeau. Bien sûr, cela lui faisait vraiment plaisir, c’était la première fois qu’il recevait un cadeau d’une amie …. Mais surtout, il fut pris de remord. Lui, il n’avait rien acheté ! Quel égoïste, vraiment … Dire que l’idée ne lui était même pas passée par la tête ! Il avait beau se dire que c’était parce qu’il n’avait pas l’habitude, parce qu’il n’avait jamais vraiment eu d’amis, il était vraiment mal à l’aise. Néanmoins, il fit de son mieux pour ne pas le montrer, pas la peine que Lucy voie le véritable effet que son cadeau avait eu sur lui. C’était censé lui faire plaisir ! Emilien se rattraperait dès qu’il en aurait l’occasion, soit il irait à Pré-au-Lard dans les prochains jours, soit il écrirait à Camille, qui l’aiderait, sans aucun doute. Pour le moment, il fallait faire comme s’il en avait acheté un, comme les gens normaux, qui pensent à leurs amis, eux. Le Serpentard sourit et répondit :

- Joyeux Noël à toi aussi ! J’avais pas pensé te voir, alors je te donnerai ton cadeau plus tard !

Attention, le grand moment, l’ouverture du cadeau ! Tandis que la Serdaigle envoyait son colis – Emilien remarqua au passage que, prévoyante, contrairement à lui, elle avait pensé à mettre un pull. Le Serpentard, lui, n’avait qu’un t-shirt et une écharpe, oui il était peut-être un peu cinglé, mais ce n’était pas grave... Bref ! Pendant que Lucy s’occupait de son courrier, donc, Emilien déballa le cadeau, sans déchirer le papier n’importe comment. Pour une fois qu’il avait un paquet soigneusement emballé … C’était une boîte, apparemment normale, mais Emilien repéra sans mal le signe de fabrique de Zonko, le magasin de farces et attrapes de Pré-au-Lard. Il eut un sourire amusé avant même d’avoir ouvert la boîte, quoi qu’elle contienne, ça lui serait forcément utile. Et il l’ouvrit enfin, pas la peine de faire durer le suspense des heures durant, la boîte était remplie de diverses choses telles qu’on en trouvait chez Zonko, avec une petite notice explicative : seule une personne pouvait voir les effets des objets. Emilien réfléchit deux secondes. Cela voulait dire que, par exemple, s’il laissait traîner l’une de ses baguettes piégées qui se métamorphosaient dès qu’on les prenait, et que son beau-père la prenait, il serait le seul à voir la métamorphose de l’objet ? Emilien sourit à nouveau, ça devenait intéressant ! Et les prochaines vacances de février promettaient d’être passionnantes …

- Merci beaucoup ! s’exclama le Serpentard.

Puis il fit la bise à son amie, chose qu’il n’avait pas l’habitude de faire, mais après tout, il n’était jamais trop tard pour changer. Promis, il lui trouverait un cadeau à la hauteur du sien, dès que possible. Mais le geste qu’il venait d’avoir, en embrassant son amie sur la joue, lui rappela la scène qu’il avait entre aperçue l’autre jour dans le parc … A cette pensée, Emilien eut l’impression de bouillir intérieurement, bien qu’il fasse très froid, que des flocons de neige se posent sur ses bras nus et qu’il ait les pieds dans la neige. Pourtant, Lucy était son amie, seulement son amie. Il n’y avait pas de doute à avoir là-dessus. Mais bon, c’était comme ça. C’était peut-être juste parce qu’il n’aimait l’autre Stanislas, qui était dans le même dortoir que lui … Il ne savait pas trop. En tout cas, il préférait penser à autre chose, surtout ne pas en parler ! Sinon, il sentait qu’il n’allait pas dire que des choses gentilles, et après tous les efforts qu’il avait fait pour rester calme en toutes circonstances, depuis deux ans, ce serait dommage de tout anéantir en quelques minutes …

Pour Lucy, c’était tout naturel d’offrir des cadeaux à ceux auxquels elle tenait. Après, elle était heureuse d’en recevoir, comme tout le monde, mais elle ne faisait pas attention si elle n’en recevait pas [nan en fait elle piquait une colère noire et vous faisait la gueule pendant 3jours]. Emilien n’avait pas à avoir de remords, et cette possibilité ne lui était même pas venue à l’esprit. La petite était simplement contente de remettre son présent à son ami.

Voyant qu’elle avait réussi à trouver quelque chose qui lui plaisait, elle arbora un sourire victorieux. Elle avait tellement cherché pour parvenir à çà ! Et ses efforts étaient largement récompensés par le sourire du Serpentard. Qui, à sa grande surprise, lui fit même la bise. Ce n’était pourtant pas son genre. Pas son genre du tout. Mais son étonnement était positif. Ils étaient passés du stade « je ne peux pas te sentir, navré » à celui de vrais amis. En tout cas, c’était le cas pour elle… La Bleue et Bronze ignorait totalement qu’Emilien avait tout vu de la scène qui s’était déroulée au parc, elle comptait lui raconter, bien sûr, mais attendait un peu que la conversation évolue. Elle ne se voyait pas annoncer qu’elle avait un petit ami, comme çà, de but en blanc. La fillette était encore moins au courant que les deux garçons se connaissaient, dormaient dans le même dortoir, et, mauvaise nouvelle pour elle, ne s’appréciaient guère. En tout cas, Emilien n’aimait pas Stanislas.

- J’ai pensé que çà pourrait t’être utile pour tes prochaines vacances en famille, déclara-t-elle d’un air innocent que démentait un grand sourire.

Pour les vacances de Pâques, elle rentrerait probablement chez elle aussi. Elle pourrait en profiter pour se balader dans Londres, après avoir été enfermée dans le château pendant de longs mois ! A ce moment-là, elle se rappela sa proposition d’invitation à Emilien. Elle tenait toujours bien entendu.

- A moins que tu ne préfères venir à la maison.

Ainsi, il pourrait rester dans le monde sorcier qu’il affectionnait tant, et repousserait encore un peu l’échéance de sa mort la vision de ses beaux-parents. Elle n’avait pas encore demandé à ses parents, mais c’était pas grave, sa mère serait très certainement d’accord, elle acceptait toujours que Lucy invite des amis à la maison.
Sans se douter du combat qui faisait rage dans la tête d’Emilien, l’Aiglonne avisa un recoin de la volière, dans lequel la neige n’avait pas pénétré. Comme ils semblaient bien partis pour discuter, elle alla s’y asseoir, de façon à être à l’abri du vent, et des déjections régulières des oiseaux, au-dessus de leurs têtes.

- Sinan, t’as été gâté ? demanda-t-elle.

L'habituelle question, mais elle doutait que son ami ait reçu quoi que ce soit susceptible de lui faire plaisir; elle savait que ses parents ne lui enverraient que des objets moldus, et qu'il en serait de même pour ses beaux parents. Pire encore, sa belle-mère affectionnait les trucs de religion. Emilien lui avait expliqué le principe, c'était un truc trop chiant très rébarbatif, sans aucun intérêt, qui parlait d'un quelconque dieu. Lucy voyait d'avance le genre de cadeau qu'elle avait du lui offrir: un pavé traitant du sujet. Il pourrait toujours s'en servir comme somnifère les soirs où il peinerait à trouver le sommeil, à moins que ce ne soit pour assommer quelqu'un.
Elle songea aux cadeaux qui l’attendaient toujours, dans le dortoir. Mince, il faudrait ensuite qu’elle revienne à la volière afin d’écrire la lettre de remerciement qui s’imposait. Pour l’instant, là où elle s’était placée, elle n’avait pas froid, mais dès qu’elle quitterait les imposants murs de pierre de la volière, ce serait une autre paire de manche. Si seulement elle avait aussi pensé à prendre une écharpe ! Oui, elle était frileuse, et le froid était son pire ennemi [il devait trembler de peur] ! Que voulez-vous, on est marmotte où on ne l’est pas !

[7h13 ? Oo C'est ce qui s'appelle être matinal XD]

Lucy avait tout à fait raison, ça lui serait très utile pour les prochaines vacances, pendant lesquelles il irait selon toute probabilité chez son père. Sa belle-mère n’avait qu’à bien se tenir ! Emilien se promit à cet instant de faire des recherches pour pouvoir piéger l’une de ses petites statues représentant Jésus – encore et toujours sur sa croix. Rien qu’à imaginer sa belle-mère prendre une de ses statues chéries, et celle-ci se mettre à bouger subitement, il avait envie de rire. Sa belle-mère croirait que la statue était possédée si Jésus se mettait à lui tirer la langue ! Dans la boîte, il y avait largement de quoi faire, même si Jésus qui faisait des grimaces serait pour une autre fois. Emilien savait qu’elle en deviendrait folle, elle irait sûrement se confier au curé … Que de complications ! Mais ça ne risquait pas de lui retomber dessus, puisque sa belle-mère serait la seule à voir les effets magiques des farces et attrapes. Après ça, son père ne voudrait plus tant le voir à la maison !

- Très utile, même, ajouta Emilien avec le même genre de sourire qu’affichait son amie.

C’était très bien, cette conversation, ça ne lui faisait pas trop penser à l’autre idiot. On pouvait continuer longtemps comme ça, à parler des cadeaux de Noël, des prochaines vacances … Tant qu’Emilien faisait des efforts, il n’y avait pas de problème. Lucy lui proposa de venir chez elle, s’il préférait. A un autre moment, deux semaines plus tôt par exemple, Emilien aurait répondu oui sans hésiter. Des vacances sans ses parents ? Avec joie ! Mais le souvenir de la scène du parc le poursuivait toujours, et il faillit répondre « Tu préfères pas inviter Stan’ ? » Mais comme il s’était promis de ne rien faire pour gâcher la discussion, il se retint à temps. Après tout, Lucy faisait ce qu’elle voulait, elle pouvait sortir avec n’importe qui, même le plus idiot des abrutis … Donc, on n’en parlait pas. Seulement, Emilien avait déjà du mal à discuter avec Lucy sans dire un mot sur Stanislas, alors s’il passait les vacances chez elle, il imaginait parfaitement à quel point ce serait difficile ! Pour le moment, le jeune Backhand ne se sentait pas capable de s’en empêcher assez longtemps, il répondit donc :

- Malheureusement, j’crois que mes parents apprécieraient pas trop. Mon père m’a écrit que si je refusais encore de rentrer chez moi, il viendrait me chercher à Poudlard ! Je sais pas s’il le ferait vraiment, mais j’ai pas spécialement envie d’essayer …

Son père à Poudlard, quelle horreur ! Après ça, il pouvait dire adieu à toute réputation positive, c’était clair. Il y avait donc une grande part de vérité dans ce qu’avait dit Emilien, même s’il ne donnait pas la vraie raison qui l’empêchait d’accepter. Il y eut ensuite un tout petit blanc, à peine quelques secondes de silence dans la conversation, mais cela suffisait pour que les pensées d’Emilien reviennent vers le Serpentard qu’il aimait le moins. Si on lui avait demandé de répondre franchement, il aurait eu du mal à dire pourquoi il ne l’aimait pas. Ils étaient dans le même dortoir, forcément puisqu’ils étaient tous deux en première année, mais ils ne s’étaient jamais adressé la parole. Pourtant, rien que penser à Stanislas énervait Emilien, qui fut ravi que Lucy reprenne la parole. S’il avait été gâté ? Oh oui, comme toujours ! Des livres, encore des livres, toujours des livres. Si encore ça avait été des livres intéressants, bon. Mais même pas ! Parfois, c’était juste histoire de le critiquer, comme lorsque sa belle-mère lui avait offert Orgueil et Préjugés.

- Ouais, j’ai eu droit à un super livre de la part de ma belle-mère, sur la vie de Jésus ! répondit le Serpentard, faussement enthousiaste. Un livre de la part de mon père, au moins comme ça il prend pas trop de risque, j’vais pas m’en servir pour l’attaquer. Ma mère m’a offert une horreur italienne, et j’ai rien eu de la part de mon beau-père. Comme quoi, que de surprises !

Bah, au moins, il avait eu des cadeaux … Est-ce qu’il n’aurait pas préféré ne rien avoir ? Il se le demandait, depuis qu’il était réveillé. Si sa famille lui envoyait quelque chose, c’était juste histoire de respecter la tradition de Noël, afin de ne pas passer pour des égoïstes. Ils savaient tous très bien que ça ne lui plaisait pas, ce qu’ils lui offraient. Donc finalement, autant ne rien recevoir ! Emilien, lui, ne jouait pas aux hypocrites : il n’aimait pas sa famille, donc il n’offrait rien. Au moins, c’était clair. Bon, il y avait le cas de Lucy, il avait oublié de lui acheter un cadeau, mais ça, c’était … Tiens, et Gatween, il lui avait offert quelque chose, lui ? Il avait intérêt, sinon ce n’était pas la peine de faire autant de manières pour paraître poli et bien élevé. Emilien fit un nouvel effort pour penser à autre chose. Tiens, la famille de Lucy, par exemple. D’après ce qu’il en savait, elle avait une famille plutôt normale, des frères et sœurs, et tout ça. Elle avait dû en recevoir, des cadeaux, de la part de sa famille, et des trucs qui lui plaisaient. Il retourna donc la question à son amie, toujours mine de rien :

- Et toi, alors ?

[Ah, c'est vrai, pas encore en vacances ]

Comment ça, étonnant pour quelqu’un qui … Ah ! Emilien avait laissé échapper ça sans réfléchir, mais bon, ce n’était pas faux. S’il avait eu la permission de rester à Poudlard, c’était parce qu’il avait refusé de rentrer chez lui. D’accord, au moment où il avait annoncé que ses parents étaient d’accord, dans la bibliothèque, c’était un mensonge. Et en fait, ils n’avaient jamais été vraiment d’accord mais … Enfin, si, aux dernières nouvelles, son père acceptait – il était temps – mais Emilien ne s’y trompait pas : c’était juste pour ne pas être du même avis que sa mère. Mais bon, c’était bien compliqué à expliquer, tant pis si Lucy n’avait pas tout compris. De toute façon, un petit mensonge comme ça, ça ne faisait de mal à personne. Et puis, ça avait plus l’air d’amuser son amie que de la vexer. Dans ce cas … Il avait dit ça pour simplifier les choses, la dernière fois, ça faisait moins le pauvre garçon qui se plaint sans arrêt parce qu’il a une vie pourrie. La prochaine fois, il ferait plus attention, tout simplement. C’était vrai que mentir à ses amis, c’était plus compliqué que de mentir à ses professeurs, avec qui l’on n’avait pas souvent l’occasion de discuter.

Ah oui, un livre sur la tête, ça faisait mal ? Emilien imaginait bien, seulement les livres offerts par son père étaient toujours des livres de poche, donc ça ne risquait pas de lui faire grand chose … Par contre, cet énorme livre qu’il avait trouvé dans la salle sur demande, celui-là il pouvait faire bien mal. Le Serpentard s’imagina en train d’en donner un grand coup sur cette tête à claques de Gatween, et il afficha un sourire amusé. Bien sûr, il ne le ferait jamais, ça risquerait d’aplatir un peu son crâne – et surtout de lui attirer des ennuis – mais l’image était très plaisante. Non non, Emilien n’était pas violent de nature, du moins il avait décidé de ne pas l’être depuis deux ans – il fallait dire qu’on l’y avait un peu forcé, aussi, entre son père, sa belle-mère et ce stupide psychologue à la noix qui avait dû gagner son diplôme dans une fête foraine. Et donc, Lucy était bien placée pour parler de ça ? Pourquoi, on l’avait déjà assommée à coup de livre ? Emilien se demanda si Mrs Pince trouverait très correct qu’on se serve d’un livre à de telles fins.

La Serdaigle n’avait pas ouvert ses cadeaux. Quoi ? Mais elle n’était pas normale ! Enfin, Emilien, de son côté, ne les ouvrait que pour s’exclamer des trucs du genre : « Quelle horreur ! » ou « Ah, beurk ! ». Mis à part le cadeau de Camille, qu’il attendait toujours avec impatience, sachant qu’elle trouverait toujours quelque chose de bien mieux qu’un livre à lui offrir. Mais si Lucy oubliait d’envoyer ses cadeaux, aussi … Emilien s’en était occupé la veille, enfin il s’était occupé d’envoyer son seul et unique cadeau, celui pour Camille. Il avait fait dans l’originalité, hein, en lui envoyant un énorme paquet rempli de friandises de Honey Dukes en tout genre. Mais malgré la banalité du cadeau, il savait que ça plairait à sa cousine, et puis c’était l’intention qui comptait. De toute façon, il n’allait pas lui offrir un livre, même si ça lui aurait plus. Elle en avait déjà assez comme ça ! Quoique, si jamais un jour elle voulait une des horreurs qu’on lui offrait tous les ans … Tiens, est-ce que ça ne lui plairait pas, le Da Vinci Code ? Euh, non, j’ai rien dit.

Puis Emilien ne sut pas trop quoi ajouter. De quoi pouvait-il parler en évitant le sujet Gatween ? De plein de choses me direz-vous, mais … Ce n’était pas évident, tout de même. A chaque fois qu’il ouvrait la bouche, il avait envie de lancer une réplique à ce propos, mais il se retenait et faisait gentiment avancer la conversation. A ce petit jeu là, il pouvait encore tenir longtemps, pensait-il. Mais ce n’était pas très amusant … Plus Emilien y pensait, plus il hésitait. Lucy était son amie, donc elle sortait avec qui elle voulait, mais … Pourquoi avait-il fallu qu’elle choisisse ce mec-là en particulier ? Il y avait plein de gentils garçons dans les autres maisons, mais non, il fallait qu’elle ait choisi un Serpentard, et de plus quelqu’un qu’il ne supportait pas. Même si ce Gatween avait l’air tout gentil, tout poli, tout bien élevé, il y avait bien une raison pour laquelle il était dans la maison des serpents. Le jeune Backhand compta jusqu’à cinq dans sa tête, histoire de ne pas dire n’importe quoi. Ça, c’était une idée du débile de psychologue de l’école, mais par habitude …

- Sinon, quoi de neuf ?

[bah je suis sortie mardi à midi on est sensés réviser… je suis bien obligée, ma mère me surveille]

Il y eut un léger blanc dans leur conversation. Lucy avait l’étrange impression qu’Emilien mourrait d’envie de lui dire quelque chose, mais qu’il ne voulait pas, ou qu’il ne pouvait pas. Etait-ce grave ? Etait-ce important ? Telles étaient les questions qui traversaient l’esprit de la Bleue et Bronze, qui le sentait tout près de lui dire ce qu’il avait à déclarer, puis se raviser. C’était comme çà depuis le début de leur conversation. Assez désagréable, mais si çà avait été catastrophique, il le lui aurait dit sans hésitation… non ? Non. Les mauvaises nouvelles par exemple, sont les plus délicates à annoncer. Cependant, la petite préféra ne pas en tenir compte et laisser la conversation suivre son cours. Emilien finirait bien par lui dire ce qu’il avait sur le cœur.

Il lui demanda ce qu’il y avait de neuf dans sa vie, depuis la dernière fois qu’ils s’étaient croisés. La réponse était brève, un nom pour tant d’émotions…

- Euh…

Je sors avec Stanislas Gatween, tu le connais ? Non, c’était vraiment étrange annoncé comme çà. Enfin, c’était tellement important, et pourtant les mots pour le dire étaient tellement simples… c’était quand même vachement direct comme manière de l’annoncer. Ce n’était pas ses fiançailles, ce n’était pas son mariage ou la mort de quelqu’un qu’elle devait lui annoncer. C’était son premier petit ami. Premier. Peut-être – sans aucun doute – le détail qui changeait tout. On lui avait maintes fois dit qu’on se souvenait toujours de son premier baiser, que c’était un souvenir exquis. Se le remémorerait-elle avec tendresse, comme tant de gens, lorsqu’elle serait plus âgée ? C’était important, certes, mais tellement soudain…
Elle n’avait jamais cru au coup de foudre auparavant. C’était tout simplement impossible de tomber amoureux de quelqu’un sans le connaître selon elle. Mais elle avait eu tort, et le reconnaissait à présent. C’est ce qui c’était passé avec Stanislas, elle avait tout de suite été subjuguée.

Lucy voulait le dire à Emilien, c’était ce qui la rendait si heureuse, elle opta donc finalement pour une autre façon de lui déclarer la nouvelle. Elle était loin de se douter du combat qui se déroulait dans la tête de son ami, et elle se serait abstenue de faire cette révélation si elle avait su à quel point le sujet pouvait l’irriter.

- J’ai rencontré un garçon, déclara-t-elle, les yeux brillant, Stanislas Gatween… on… on sort ensemble.

Voilà. C’était dit. Qu’allait répondre Emilien ? Le connaissait-il ? Tiens, il faisait une drôle de tête. Allait-il bien ? Il y avait manifestement un problème, mais ne dit-on pas que l’amour rend aveugle ? Lucy n’imaginait pas un seul instant que cela puisse causer des soucis au Serpentard qu’elle sorte avec son camarade de dortoir.

[c'est court désolée ]

[C'est vrai que y'a le brevet demain ... bah, c'est facile ]

Quoi de neuf ? Question bien banale, que les gens prennent souvent pour une invitation à raconter leur vie, alors que c’est simplement pour faire avancer la conversation. Enfin vous me direz, ça dépend des cas. Dans celui d’Emilien c’était un mélange des deux, d’un côté c’était pour dire quelque chose, de l’autre il voulait comprendre ce que Lucy trouvait à Gatween. Ce mec lui paraissait tellement inintéressant … C’était sûrement pour ça qu’Emilien trouvait tellement insupportable l’idée de voir Lucy avec Stanislas, ou encore parce qu’il les avait vus ensemble, et que la scène lui avait paru niaise au possible. Il n’arrivait pas à se décider là-dessus, mais en tout cas il était évident pour lui que ça posait problème. Peut-être qu’on pouvait tout simplement expliquer ça par de la jalousie, après tout il considérait Lucy comme sa meilleure amie, alors la voir avec un autre garçon … Enfin, Emilien ne pensait même pas à cette possibilité. Il se contentait de ne pas aimer Gatween du tout.

Lucy semblait hésiter à répondre, elle n’allait pas lui annoncer qu’il n’y avait rien et lui retourner la question, quand même ? Si elle faisait ça, il serait obligé de faire une allusion à Stanislas, parce que sinon … Lui, il en avait assez de faire semblait de s’intéresser au reste de la conversation. Ça allait bien deux minutes, mais pas plus ! Et voilà. « J’ai rencontré un garçon. » Bien ! C’était étonnant, dis donc. Un garçon, vraiment, à Poudlard ? Stanislas Gatween … Rien que son nom l’horripilait, Stanislas, c’était bien un prénom de noble, ça. Ou de bourgeois, à la limite. Emilien fit la moue, Lucy avait l’air bien heureuse, mais il se demandait s’il y avait bien de quoi. Ouais, trop bien, je sors avec un mec moche, sans aucun intérêt, et qui en plus est à Serpentard ! C’est sûr, il y avait vraiment de quoi sauter de joie. Mais comme on dit, l’amour rend aveugle … Il fallait croire que c’était pour ça que Lucy était tellement contente.

- Ouais, je le connais …

La voix d’Emilien était hésitante, il se demandait ce que Lucy attendait de lui comme réaction. Qu’il saute de joie, lui aussi ? Qu’il la félicite ? Non mais, il ne fallait pas rêver ! Bravo Lucy, tu as choisi le pire garçon possible ? Bien sûr qu’il n’allait pas dire ça, si depuis le début de la conversation, il se retenait pour ne pas faire de remarque dans ce genre-là, il n’allait pas tout à coup changer d’avis. Enfin, tout ce qu’il espérait, c’était que Lucy n’espérait pas que ça allait lui faire plaisir. Comment cela se pourrait-il ? Emilien n’était pas du genre à être heureux pour les autres … Et puis, s’il réfléchissait un peu aux conséquences, il sentait surtout qu’il allait beaucoup moins voir son amie, ou alors avec Gatween, et il préférait ne pas la voir du tout dans ce cas. Les deux première année s’étaient mis dans un coin de la volière plus ou moins protégé des courants d’air et des oiseaux, là où il y avait une table pour qu’on puisse écrire. Emilien s’assit sur la table.

- Par contre je vois pas vraiment ce que tu lui trouves …

Voilà, c’était dit. Enfin, il n’avait pas clairement dit qu’il pensait que Gatween était un abruti, mais … La discussion commençait à être délicate pour Emilien, qui ne voulait pas non plus vexer son amie. Si c’était possible, il préfèrerait qu’elle avoue qu’il n’avait aucun intérêt et qu’elle était bête de sortir avec lui, mais évidemment, il n’y comptait pas trop.

[Si je rate les math demain c’est de ta faute ]

Emilien semblait hésitant, lorsqu’il déclara qu’il connaissait Stanislas. Pourquoi donc ? Lucy ne s’attendait pas à des félicitations, elle voulait simplement informer son ami, elle n’était elle-même pas du genre à s’ébaubir sur la relation amoureuse de ses amis « Han y sortent ensembles t’as vu comment y forment un trop beau coupleuh ». Non, décidément, ce n’était pas son genre du tout. Elle était plutôt du genre à dire « tant mieux pour toi, c’est bien si t’es heureuse », et puis basta. Cependant, Emilien ne semblait pas surpris du tout de l’annonce, ce qui ne manqua pas d’étonner Lucy, qui elle, ne pensait pas avoir été vue dans le parc. Il est vrai que la scène n’avait pas été des plus originales, mais elle avait su conserver le romantisme de l’amour . L’air maussade d’Emilien, sa phrase suivant l’expliqua d’elle-même, elle était on ne peut plus claire :

- Par contre je vois pas vraiment ce que tu lui trouves …

Lucy resta un instant perplexe devant cette réflexion, Emilien savait quand même pour quelles raisons une fille pouvait se mettre à sortir avec un garçon, non ? Cela semblait pourtant évident, rien qu’à la vue de Stanislas. Il le connaissait, n’était-ce pas suffisant pour comprendre quel jeune homme parfait il était ? Et puis, détail non négligeable, il était à tomber. Oui, Lucy trouvait Stanislas magnifique, et ses manières galantes n’étaient que pour renforcer l’amour qu’elle lui portait déjà.

- Oh c’est bien simple, il est affreux, mal élevé, méchant et bagarreur. Et le mieux de tout, c’est que c’est un pervers, ironisa-t-elle avec un sourire amusé.

Emilien avait raison de ne pas compter à ce que Lucy trouve Stanislas bête, et qu’elle l’était également de sortir avec lui. Car en effet, çà ne se serait jamais produit, à moins que Lucy ne sorte d’un coma provoqué par Mariana et soit profondément choquée.
Le Serpentard s’était assis sur une table qui traînait mystérieusement dans les environs [et au bon moment s’il vous plait !], et elle le dévisageait à présent, le fixant, lui sur son perchoir, elle assise au sol. Elle n’était pas gênée du fait que son ami n’apprécie pas Stanislas, il était dans ses droits, et elle ne forcerait pas à l’aimer, Lucy respectait cela, mais elle avait du mal à saisir les motivations du jeune homme. En effet, il était impensable pour notre Bleue et Bronze que ce cher EMilou puisse être jaloux. L’amour ne rend pas seulement aveugle, il peut rendre stupide, même si c’était loin d’être le cas de la jeune Serdaigle [si vous avez pas reconnu la maison malgré le kit, vous êtes un boulet ].

[Et là, c’est la panne d’idée, alors comme j’avais promis un super message et que je tiens mes promesses, on va étoffer hein ]

Là dans la neige, on aurait pu se dire ; ils sont vraiment stupides, ils pourraient rentrer, et continuer cette discussion dans les couloirs, au chaud, ouvrir leur cadeaux pour ceux qui n’ont pas pu le faire plus tôt, et se trouver dans une ambiance plus festive, moins glacial. Au lieu de quoi, le vent s’était mis à souffler dans les branches des arbres du parc, provoquant cette longue plainte, caractéristiques aux nuits d’hiver agitées, durant lesquelles Lucy aimait à se recroqueviller dans son lit, en quête de chaleur. Oui, rien n’était plus agréable aux yeux de la grande frileuse que d’être au chaud quand dehors, on risquait de subir les morsures du froid.

- Tu ne l’aimes pas trop j’ai l’impression… je me trompe ? demanda-t-elle.

Elle n’était pas contrariée. Seulement un peu déçue que les deux garçons qu’elle adorait ne s’entendent pas. Mais elle n’en obligerait aucun à apprécier l’autre, çà c’était sûr et certain. Elle n’était pas pour l’option bourrage de crâne, et préférait les laisser tranquille et continuer à fréquenter les deux, que de provoquer des disputes.

Mais avant tout, elle avait froid, et n'osait pas le dire à Emilien qui semblait parfaitement à l'aise. C'était folie que de sortir ce matin ! Les cadeaux de sa famille avait intérêt à tous être fantastiques, sinon elle piquerait sa crise elle avait quand même affronté la neige pour leur envoyer les leurs ! Bon, d'accord, elle aurait pu y penser la veille mais c'était un détail ! En fait, on se moquait de les ouvrir le 24 décembre au soir, le 25 décembre au matin ou le 14 juillet après-midi ! Tout ce qui comptait, et ce aux yeux de tout le monde, c'était de recevoir les présents tant attendus un jour ou l'autre. Tant mieux si l'oiseau avait du retard finalement, cela ferait une surprise à ses petits cousins d'avoir encore des cadeaux, malgré le fait que la date officielle soit passée [de quelques heures rappelons-le] ! Ils étaient toujours si enthousiaste lorsqu'ils s'éveillaient et courraient autours du sapin en piaillant - ils n'avaient pas la voix assez élevé pour crier - d'excitation, attendant que les parents, fatigués de la fête de la veille, se réveille, pour avoir la permission d'ouvrir les cadeaux. A partir de là, quoi qu'il se passe, il était absolument impossible de séparer un petit enfant de son nouveau jouet. Christopher avait essayé quand il avait neuf ans, de prendre le camion magique - on était dans une famille de sorciers, vous avez déjà oublié ? - de leur cousin de 5ans. Tout à fait impossible. De même pour l'ours en peluche de leur cousin de 3ans et la poupée de leur cousine de 7. Echec complet à chaque fois comme le Front Populaire qui marqua l'histoire Noëlesque de la famille Duncan le Front Pop lui il avait marqué notre histoire sociale.
C'était donc les lèvres prenant peu à peu une teinte bleu de froid - elles étaient d'ordinaire de couleur rouge, comme vous et moi - que Lucy tentait de comprendre les raisons qui poussaient Emilien à ne pas aimer Stanislas. Les quelques flocons de neige qui parvenaient jusque dans leur abri, se déposaient sur ses étranges cheveux blancs, lesquels avait une tendance non moins étrange à blondir légèrement [çà c'est pasque c'est plus pratique pour trouver des vava ensuite ].

*Pourquoi est-ce qu'il ne l'aime pas ?* se demandait-elle, curieuse.

Si elle avait su que rien que son nom l'énervait parce qu'il faisait noble, ou bourgeois, Lucy aurait certainement trouvé l'excuse ridicule, et il valait mieux qu'Emilien trouve des arguments plus convainquants, surtout qu'il s'adressait à une bourgeoise. Lucy le savait, ses parents avaient de l'argent, une grande maison, de quoi nourir et habiller leurs quatre enfants. Ajoutez la piscine en plus, et vous comprendrez que la famille Duncan était loin d'avoir des problèmes d'argent. Seulement, ils n'étaient pas du genre à dédaigner ceux qui avaient moins d'argent qu'eux, ou à envier désespérément ceux qui en avaient plus. Ils se moquaient totalement des classes sociales et ne jugeaient pas les gens selon leurs moyens financiers.
Oui, il valait mieux qu'Emilien présente des arguments valables s'il voulait réussir à persuader Lucy que Stanislas ne valait pas le coup. Et quand bien même il lui aurait prouvé par maints exemples que ce n'était pas quelqu'un de bien, il n'aurait pas immédiatement réussi à détruire l'amour grandissant que Lucy avait pour le jeune homme [si c'est pas romantique et gnangnan tout çà ], à moins de lui expliquer que c'était un violeur, tueur de série [cf: "Le jour où Mariana décide de faire ses devoirs" dans les Couloirs et Escaliers], se qualifiant dans le meurtre de pauvres petites Lucy innocentes comme Mariana et mangeur d'artichauts. Oui, généralement, les Anglais sont choqués que les Français mangent des cuissent de grenouilles, et les apellent "frog's eater", ou "mangeurs de grenouille". Eh bien Lucy était choquée du fait que des gens soient capables de manger des artichauts sans être dégoûtés . Ce genre de personne était sûrement une race humaine possédant des papilles gustatives particulièrement innefficace. C'était sûrement la même catégorie que ceux qui n'aimaient pas le chocolat ! Cà y est, vous avez tous compris de quel genre de personnes complètement dérangées il s'agit, et nous pouvons désormais continuer notre rp !
Donc, il valait mieux qu'Emilien se prépare soigneusement, aussi bien que s'il allait rédiger un texte argumentatif, sachant que les étapes seraient notées: introduction en trois points, développement avec arguments et exemples, et enfin conclusion. En serait-il capable ? Sans doute pas de convaincre Lucy, qui flottait toujours sur son petit nuage rose d'amour, momentanément congelé par une perturbation nous venant du nord est.

[Est-ce suffisament long ? Je suis pardonnée ? Y devrait y avoir un smiley avec les yeux du chat dans Shrek je l'aurais mis... mais je vais me contenter du coeur qui marche à tous les coups ]

[Ce fut long et laborieux, mais finalement voilà ta réponse ... Vu que t'as le brevet demain tu seras sûrement partie dormir avant Si tu lis ça après le brevet, encore déprimée par les maths, dis toi que t'es pardonnée, ça te remontera peut-être le moral XD]

Bien sûr, il n’était absolument pas difficile de deviner pourquoi Emilien avait l’air si enthousiaste à l’annonce de la relation entre son amie et Gatween : la jalousie expliquait tout, sûrement mieux que tout ce qu’il pourrait dire. De la jalousie purement amicale, attention, car si Emilien avait fini par trouver la jeune fille sympathique, il n’était pas allé jusqu’à tomber amoureux d’elle. C’était peut-être parce que le garçon n’avait jamais vraiment eu l’occasion de se faire des amis, que ce soit en Angleterre parce qu’il n’allait à l’école qu’un mois sur deux, ou en Italie où il ne parlait pas un mot de la langue du pays. À l’époque, Emilien avait encore plus pour habitude de prendre les autres pour des idiots, alors ça n’aidait pas, de plus de par sa situation, il ne s’était pas très intégré. En tout cas, ça jouait forcément un rôle : pour une fois qu’il avait une amie, elle allait passer tout son temps en compagnie de son petit ami. Pas très marrant … En plus, c’était un garçon qu’il voyait tous les jours, quand il se levait, quand il prenait son petit-déjeuner, en cours … Toute la journée, quoi.

Si Lucy avait bien perçu l’hésitation et l’aversion qu’il avait pour Stanislas, Emilien lui, avait bien compris l’ironie des paroles de son amie lorsqu’elle avait décrit son petit. Comment pouvait-on trouver Gatween beau ? Pour Emilien, il avait une tête à claque, des yeux de poisson, et comme un air de vieux bœuf rabougri. Mais bon, après, chacun ses goûts, comme on dit. Il pourrait proposer des lunettes à son amie, mais il n’était pas sûr que ça changerait grand chose. Si elle en était arrivée à trouver cette horreur beau, on ne pouvait plus rien pour elle. Bien élevé … Ah, ça, c’était sûr, il avait même été beaucoup trop bien élevé ! La façon dont il parlait l’insupportait, il avait l’air de les prendre de haut. Mais après tout, ça ne l’étonnait qu’à moitié que ça plaise à Lucy : la première fois qu’il l’avait vue, elle-même ne faisait-elle pas des phrases affreusement compliquées, avec des tournures inutiles ? Si, c’était même l’une des premières choses qui l’avaient énervé. Au mot « bagarreur », Emilien fit de son mieux pour ne pas réagir instantanément. Mieux valait ne pas le chercher sur ce point …

Belle ambiance … La volière n’était pas l’endroit le plus confortable du château, il fallait bien le dire, d’autant plus lorsqu’il faisait froid comme en ce jour de Noël. Non seulement la pièce était assez petite, il n’était évidemment pas prévu que cinquante élèves envoient leurs lettres en même temps, mais en plus, il y avait tous ces oiseaux qui ne pouvaient pas passer deux minutes sans faire du bruit. Ils n’avaient pas autre chose à faire, eux, non ? Évidemment, la plupart des élèves étaient rentrés chez eux, alors ces hiboux n’avaient pas vraiment de travail … Les pauvres. Il n’y avait même pas de vitres, dans la volière, juste des ouvertures, alors bien sûr, lorsqu’il faisait froid, on se gelait ! Les deux première année auraient pu aller terminer leur discussion ailleurs, mais Emilien n’avait pas l’esprit à ça. Le Serpentard n’avait même pas remarqué la drôle de couleur qu’avaient pris les lèvres de Lucy – et il était loin de se douter que les siennes étaient dans le même état – et ne se souciait plus du fait qu’il n’avait même pas de pull. Pour le moment, c’était surtout le sujet Gatween qui l’intéressait.

Lucy semblait un peu déçue, mais bon, après tout, c’était à Emilien qu’elle annonçait la nouvelle ! Le Serpentard détestait plus de gens qu’il n’en aimait, alors il y avait plus de chance pour qu’il n’aime pas Stanislas … Tiens, elle avait l’impression qu’il n’aimait pas beaucoup ? C’était bizarre, ça ! Pourtant, Emilien sautait de joie, faisait de grands sourires, non ? La Serdaigle était décidément très perspicace, on peut dire qu’elle faisait honneur à sa maison. Tout ça avait mis Emilien de mauvaise humeur et il se moquait intérieurement du moindre détail, la moindre chose qui lui paraissait ridicule chez son amie. Et encore, il n’avait pas exposé ses arguments ! Une fois qu’il l’aurait fait, les réponses de Lucy l’énerveraient sans doute encore plus. Maintenant, il lui paraissait impensable d’arrêter la conversation avant d’avoir expliqué tout ce qu’il détestait chez Gatween. Il fallait juste qu’il trouve les bons mots, mais de toute façon, la Serdaigle ne serait pas d’accord avec lui. Elle avait déjà son avis sur son petit ami, et elle avait l’air persuadée qu’il était merveilleux. Décidément, l’amour rend vraiment aveugle, c’est fou.

- Tiens, tu as cette impression là ? lâcha le Serpentard.

Remarque assez ironique, mais autant l’ironie peut parfois être assez amusante, autant la réplique d’Emilien avait été dite sur un ton froid. Il n’avait pas pu se retenir, la bêtise de son amie n’aidait pas. Il y eut un blanc dans la conversation, si tout avait bien commencé, avec des « Joyeux Noël ! » sympathiques et sincères, l’ambiance était devenue tendue. Comme lorsqu’ils s’étaient rencontrés au bord du lac : Emilien avait commencé à discuter avec Bill, très innocemment, à coups de « Merci beaucoup ! » et de « Enchanté ! », puis Lucy était arrivée. Et encore une fois, c’était le Serpentard qui avait placé une remarque qu’il aurait mieux fait de taire. Le vent se mit à souffler au-dehors, et avec toutes les ouvertures de la volière, cela faisait un drôle de bruit, un peu sinistre. Et personne ne parlait pour le couvrir, ce qui n’améliorait pas l’ambiance, loin de là. Pourquoi est-ce qu’il fallait toujours que ce soit Emilien qui gâche les conversations ? Parce qu’il disait ce qu’il pensait, c’était tout. Parfois il mentait, mais il n’était pas hypocrite. Toujours assis sur la table, il ne souriait plus du tout, et regardait droit devant lui. Puis il tourna son regard vers Lucy, assise par terre à côté.

- Eh bien écoute il y a de nombreuses raisons. Tu veux que je les énonce toutes ?

Rien à voir avec le gentil Emilien des bons jours. Le jeune Backhand ne se reconnaîtrait pas lui-même, à vrai dire, s’il se voyait. Il parlait calmement, en articulant bien, et sur un ton bien froid. Ça ne l’amusait plus du tout, mais il était décidé à aller jusqu’au bout. Lucy voulait savoir pourquoi il n’aimait pas Stanislas ? Très bien, comme elle voulait ! Emilien s’en fichait pas de mal de savoir ce qu’elle penserait de lui, après ça. Il était trop tard pour qu’elle se ravise, et admette qu’il avait raison. Peut-être qu’il valait mieux qu’ils ne soient plus amis, s’ils n’étaient pas capables de conversations normales ? Il n’y avait qu’à la bibliothèque que ça s’était vraiment bien passé. Et encore, c’était la vieille Pince qui les avait interrompus, qui sait comment ça aurait terminé, autrement ? Finalement, Emilien avait parfaitement sa place à Serpentard. Si au début de l’année, il avait été dégoûté d’y être envoyé, à présent il était parfaitement conscience qu’il appartenait à cette maison pour de bonnes raisons. Et Gatween, lui, pourquoi il était à Serpentard, d’ailleurs ? Il fallait qu’il soit bien hypocrite pour y être et se comporter comme il le faisait … Emilien attendit quelques secondes, puis, toujours avec le même ton calme, il poursuivit :

- Alors pour commencer, il n’a aucun intérêt. Il n’a pas de personnalité, il se contente d’être poli et d’étaler sa culture, tout en prenant soin de faire des phrases inutilement compliqués qui sont ennuyantes à mourir. Et je l’ai jamais vu faire de l’humour, il est triste à mourir. Avec son vouvoiement idiot et dépassé, on se demande s’il ne prend pas les gens de haut. C’est gentil de dire que c’est à cause de son éducation, mais y’a un moment où on doit être capable de penser un peu par soi-même et pas juste comme on nous a appris à le faire. Il est tellement sympathique qu’il a refusé que les gens s’installent dans le même compartiment que lui, dans le Poudlard Express avant la rentrée. Et je suis bien placé pour le savoir, j’ai essayé d’entrer dans le compartiment de Monsieur Gatween, qui m’a gentiment jarté d’un petit signe de tête hautain. Et pour ne rien améliorer, il est à Serpentard.

Il avait énoncé tout ça sans changer de ton, comme si ça n’avait pas grand intérêt. Après tout, était-ce encore important pour lui ? Emilien avait surtout l’impression qu’il s’éloignait de Lucy, qu’il considérait pourtant comme sa meilleure amie quand il était entré dans la volière. Cette conversation avait tout changé, lui semblait-il. Rien ne serait comme avant, désormais. Après s’être tu trois secondes, le Serpentard ajouta :

- Et si tu veux qu’on parle de son physique, il ressemble plus à un vieux bœuf qu’à Apollon, il te faut peut-être des lunettes.

[Je m’en suis bien sortiiie ! xD j’ai fini le sujet ! En math tu te rends compte ?]

Lucy n’avait pas cherché à vexer Emilien en mentionnant le terme « bagarreur ». D’ailleurs, elle ne trouvait pas que le jeune homme soit de ce genre de garçon, qui cherchaient sans arrêt à « tabasser » les autres et n’avaient rien dans le crâne. Loin de là. Très loin même.

Le ton froid qu’Emilien employa la blessa plus que l’ironie qu’il avait mise dans ses propos. Elle ne cherchait pas à lui faire aimer Stanislas, elle voulait simplement comprendre son point de vue. Ce n’était pas si difficile à comprendre, si ? Il n’y avait aucun besoin d’être agressif, et Lucy ouvrait la bouche pour répliquer quand son ami reprit, toujours du même ton.

- Eh bien écoute il y a de nombreuses raisons. Tu veux que je les énonce toutes ?

Oui, elle voulait qu’il lui explique pourquoi cette haine qu’il nourrissait envers le Serpentard. Il semblait évident à Lucy qu’elle n’allait pas diminuer le temps qu’elle passait avec Emilien pour en passer plus avec Stanislas. Les amis avant tout. Mais de toute évidence, son meilleur ami ne pensait pas comme elle…
A présent, elle voulait qu’il abrège, et surtout, qu’il cesse de lui parler sur ce ton, froid, indifférent, comme s’ils ne se connaissaient qu’à peine. Chacune des paroles d’Emilien était comme un coup de poignard planté cruellement dans le cœur de la Serdaigle.

Pas d’intérêt ? Pas de personnalité ? Comment Emilien pouvait-il dire çà alors qu’il n’avait visiblement même pas essayé de le connaître ?
Cependant, Lucy n’avait pas grand-chose à dire sur ce point-là, après tout, elle le connaissait à peine elle aussi… ce qui ne l’empêchait pas de sortir avec lui. Sa conscience, bonne ou mauvaise, ressurgissait, et elle se demandait une fois de plus, si elle n’aurait pas mieux fait d’attendre un peu de faire connaissance avec lui avant de l’embrasser.
Elle avait fait quelque chose de stupide, mais aussi têtue qu’elle était, elle refusait de reconnaître qu’elle avait eu tort sur ce point là.

Le vouvoiement… elle avait été la première à se moquer des manières quelques peu défraîchies de son namoureux et n’était par conséquent, pas la mieux placer pour expliquer à Emilien que c’était pas grave, que c’était une marque de respect…

L’exemple qu’Emilien lui servit la sidéra. Elle n’imaginait réellement pas Stanislas agir ainsi, mais en même temps, et une fois de plus, que savait-elle vraiment de lui ? La première chose qu’elle ferait, mais il était hors de question de l’avouer devant Emilien, serait de lui demander la confirmation de ce fait, sachant très bien que son ami n’était pas un menteur.

Côté physique, chacun ses goûts, n’est-ce pas ? Mais s’il y avait une chose dont Lucy était sûre et certaine, c’était que pour elle, Stan ne ressemblait aucunement à un vieux bœuf. Mais ce n’était pas cet argument là qui la choqua.

- Tu crois tellement qu’être dans des maisons différentes est un problème ? Et puis, Serpentard « la maison des méchants pas-booo » çà va bien hein ! Rappelle-moi déjà tu es dans quelle maison ? Ah oui, c’est vrai, à Serpentard, et pourtant tu es mon meilleur ami ! Si çà peux te rassurer, le Choixpeau a longuement hésité avant de me répartir à Serdaigle… et devine avec quelle maison ? Serpentard ! s’exclama-t-elle.

Elle se mordit la lèvre à cet instant. En cédant à la colère, elle avait révélé deux choses qu’elle n’avait encore jamais dites à personnes. Qu’Emilien était son meilleur ami, et que le Choixpeau avait voulu l’envoyer à Serpentard avant de décidé que Serdaigle lui convenait mieux. Ce en quoi il n’avait pas eu tort, elle n’aurait pas supporté de se retrouver avec les McLane la plupart d’entre eux.

Elle tremblait, de froid, de colère, de tristesse. Emilien semblait faire comme s’il l’ignorait, et l’indifférence était difficile à supporter. Nous sommes dans un monde où nous tentons de nous fondre dans la masse, mais dès qu’il s’agit de briller aux yeux de ceux qu’on adore, on est prêt à tout. Elle sentait qu’elle perdait son meilleur ami, et cela, elle ne le voulait pas. Elle refusait de laisser ainsi les évènements découlés sans rien pouvoir faire de plus.
La Bleue et Bronze essayait de retrouver le regard d’Emilien, celui du garçon auquel elle s’était attachée, celui avec qui elle avait eu tant de mal à s’entendre au début, et puis finalement…

Goodbyyye my loveeer, goodbye my friiiieeeeeennd :sifle:

Cette discussion avait pourtant bien commencé… les cadeaux de Noël, des sourires… et là, PATATRAM ! tout était chamboulé. Si elle n’avait pas été si furieuse de la vieille excuse sur les Serpentards, elle aurait peut-être pleuré qui sait, pas devant Emilien, elle était trop fière pour çà, mais une fois seule…

Elle prit soudainement conscience de l’une des choses que dévoilaient également cet argument. Emilien trouvait que les Serpentards n’étaient pas des gens biens. Il ne se trouvait pas bien. Pas étonnant vu le bourrage de crâne que lui imposaient ses parents et beaux-parents comme quoi il était un gamin atroce.

- Et saches que tu es quelqu’un de formidable , murmura-t-elle.

[La fin est un peu baclée et j'l'ai pas passé au correcteur parce que j'dois bientôt y aller ... Mais j'voulais finir avant.]

Lucy parut bien étonnée au fur et à mesure qu’Emilien parlait. Quoi, l’épisode du train ne lui paraissait pas réaliste, par exemple ? Si elle ne le croyait pas, elle n’avait qu’à aller lire sa fiche de présentation aller le lui demander ! Son Monsieur Parfait de nobliau à la noix lui dirait sans doute toute la vérité à moins que, comme beaucoup de Serpentard, il soit un bon menteur. En tout cas, il était certain qu’elle ne le connaissait pas vraiment, bien sûr il n’était arrivé qu’au milieu de cette scène ridicule dans le parc, mais c’était la première fois qu’il les voyait ensemble. Il fallait croire que Lucy n’avait pas perdu son temps ! Elle savait comment on les appelait, chez lui, les filles comme ça ? Non, il ne dirait pas, ce mot lui brûlerait les lèvres, et il n’avait pas envie de parler d’elle comme ça … Pourquoi est-ce que, dès qu’il réussissait à se faire des amis, il fallait qu’il gâche tout ? Comme à l’école, il avait eu un ami, et puis … Après l’ « incident » - c’était son père qui l’appelait comme ça – il avait refusé qu’Emilien l’approche.

La preuve qu’il avait raison sur tous les points, c’est que Lucy ne répondit même pas à tout ce qu’il avait dit sur Stanislas, concernant son manque d’intérêt, son manque d’humour, sa politesse dépassée et finalement vexante, l’épisode du Poudlard Express, non ! Elle n’accorda d’importance qu’à son dernier argument : Gatween était à Serpentard. Et ça, ça ne lui plaisait pas, oh non ! Maintenant Lucy était énervée elle aussi, selon toute apparence, et commençait à lui répondre sur un ton qu'il n'aimait pas beaucoup. Mais non, le problème ce n’était pas d’être dans des maisons différentes ! Le problème, c’était qu’il était à Serpentard ! Il aurait été à Gryffondor, ou à Poufsouffle, il n’y aurait pas prêté attention … Mais Gatween avait été envoyé à Serpentard, et ça ne pouvait pas être pour rien ! Alors c’était quoi, qui l’avait dirigé vers cette maison ? C’était peut-être un grand hypocrite, ça ne l’étonnerait pas, tiens. Avec ses manières, son vouvoiement stupide … Emilien continuait à penser que les Serpentard n’étaient pas des gens très fréquentables, ou alors des gens sur lesquels il valait mieux ne pas trop compter, des fois qu’ils feraient passer leurs intérêts avant tout.

Justement, lui, il était à Serpentard ! Ce pourquoi il savait très bien que ce n’était pas une bonne chose. Dans d’autres circonstances, Emilien aurait sûrement été touché du fait que Lucy le considère comme son meilleur ami – à moins que ce ne soit qu’un mensonge, après tout c’était facile de le dire. Mais là, il s’en fichait un peu, il eut juste une pointe de déception en pensant que ce ne serait sans doute plus le cas, après cette discussion. Comment parler normalement avec elle, après l’avoir trouvée stupide à plusieurs reprises, après avoir failli la traiter de tous les noms mentalement ? Lucy ajouta que le Choixpeau avait failli l’envoyer à Serpentard. Grand bien lui fasse ! Le Choixpeau avait peut-être hésité, mais il avait basculé du côté de Serdaigle, et c’était ce qui faisait toute la différence ! Pour Emilien, il n’y avait pas eu d’hésitation, ah ça non. Est-ce que le Choixpeau avait remarqué le mépris qu’il avait pour la plupart des gens ? Ou bien sa facilité à mentir ? Ou encore avait-il fouillé dans ses souvenirs ?

Et Lucy en rajoutait une couche, comme quoi il était quelqu’un de formidable. Elle ne savait pas à quel point elle se trompait ! Finalement, elle était peut-être assez naïve, ça expliquerait pourquoi elle était tombée sous le charme de cette face de vieux bœuf de Gatween ! Lui, quelqu’un de bien ? Dans ses rêves ! Emilien n’avait rien de quelqu’un de bien. Il était méprisant, égoïste, menteur, insociable, méchant lorsqu’il le voulait, susceptible, impulsif, bref ! Que de défauts pour bien peu de qualités, il n’y avait pas de place pour la pitié, la compassion, la générosité … Autant dire que Lucy se fourrait le doigt dans l’œil jusqu’au coude. Emilien hésitait à expliquer clairement à son « amie », - pouvait-il encore l’appeler comme ça ? – ce en quoi il n’était pas quelqu’un de formidable. Malgré tout, il n’avait pas envie de passer pour quelqu’un de non fréquentable … Enfin, il ne savait pas trop, est-ce qu’il pourrait encore être ami avec Lucy ? Est-ce qu’il pourrait encore continuer à dire qu’il n’était pas comme les autres Serpentard ? Non, lui qui n’aimait pas l’hypocrisie, il ne pouvait pas.

- Non, absolument pas, désolé de te décevoir !

Emilien avait haussé le ton lui aussi, parler sur un ton froid et distant, ça allait bien deux minutes, mais il avait fini par craquer. Si Lucy voulait qu’il lui peigne un portait détaillé de lui-même, très bien ! Peut-être que quelqu’un d’autre se serait mis à pleurer après la réplique de Lucy, du genre « Toi aussi, tu es formidable » et tout le monde pleure, tout est bien qui finit bien ? Ce n’était pas son genre, pas du tout. De toute façon, la phrase de la Serdaigle, c’était juste pour le faire réagir comme ça ! Elle ne pouvait pas le penser sérieusement, ou alors c’était qu’elle le connaissait bien mal. Demandez aux parents d’Emilien de faire un portrait de leur fils, par exemple ! Eux le connaissaient très bien. Ou à ses anciens professeurs, tiens, aussi. Ils auraient tous quelque chose à dire, d’après eux Emilien n’avait jamais que des défauts. Le pire qu’il ait jamais entendu dans la bouche d’un adulte, c’était « Votre fils est un monstre. » Ça l’avait touché plus profondément qu’il ne l’avait cru. Bien sûr, c’était dans des circonstances particulières …

- Tu veux que je t’explique pourquoi, peut-être ?

Il ne la laissa pas parler, il ne manquerait plus qu’elle l’arrête, dans son élan de révélation de la vérité. Non, il irait jusqu’au bout, ou presque, et ne voulait pas qu’elle le coupe. Ce pourquoi il reprit aussitôt :

- Alors d’abord, je suis un grand menteur ! Tu t’imagines peut-être le savoir parfaitement, mais tu veux que je te donne des exemples ?

De toute façon, il avait déjà franchi un certain point de non retour, comme on dit. Il savait que ça ne lui ferait pas du bien, à Lucy, de l'entendre raconter à quels moments il avait menti. Par exemple pour cette histoire de cadeau. Avec son mensonge, il passait pour quelqu'un de normal. Sans, c'était un véritable égoïste, et le fait qu'il ait menti n'arrangeait rien. Emilien regardait la Serdaigle droit dans les yeux, il allait certainement briser la belle image qu’elle avait de lui, mais c’était déjà bien parti, alors autant continuer … Oui, Emilien était un menteur, quand ça l’arrangeait. Des exemples ? Il en avait plein ! La vie du garçon était jalonné de petits mensonges, il en plaçait au moins un par conversation. Parfois, il valait mieux ne pas dire la vérité, lorsque celle-ci pouvait être merveilleusement bien améliorée par un mensonge. Evidemment, il était obligé de faire attention à ce qu’il disait, ensuite, mais … Emilien continua :

- Si je dis « J’avais pas pensé te voir, alors je te donnerai ton cadeau plus tard », ça te dit quelque chose ? Ou encore « Malheureusement, j’crois que mes parents apprécieraient pas trop » ?

Il avait insisté sur le « malheureusement ». Etait-ce vraiment un malheur que ses parents refusent qu’il aille chez Lucy ? Déjà à ce moment-là, il n’aurait peut-être pas supporté de passer les vacances avec la Serdaigle … Au moins ses parents lui donnaient une excuse pour ne pas aller chez son amie. Le jeune Backand n'avait jamais cru qu'ils puissent lui servir à ça, s'il avait imaginé seulement qu'il serait heureux que ses parents soient si sévères ... Evidemment Emilien avait dit ça en pensant que son amie ne serait jamais au courant que c’était un mensonge. Maintenant, c’était fait. Au point où il en était … Il poursuivit :

- Autrement, je suis un égoïste de première, incapable de faire le moindre cadeau sans y être obligé ! C’est super, non ? J’imagine que ça te fait plaisir de le savoir ! On peut encore continuer longtemps, tu sais. Je suis absolument pas gentil, je suis prétentieux, pas sociable, violent parfois …

Il l’avait laissé échapper, tant pis. On continuait.

- … je n’aime personne, les gens sont tous des idiots pour moi, j’ai des préjugés, des à priori, je me fie aux apparences, je souhaite plus que tout pousser ma belle-mère au suicide … ! T’en veux encore ou c’est bon ?!

Il avait presque hurlé sa dernière phrase, elle avait voulu savoir, elle savait, maintenant. Alors, ça lui faisait quoi ? Elle était contente ? Ah, elle pouvait être fière d'elle ! Ce n'était pas tous les jours qu'on obligeait son "meilleur ami" à exposer tous ses défauts, c'était sûr !

C’était peut-être un euphémisme de dire qu’Emilien avait presque crié, d’accord. Son cri avait résonné dans toute la volière, et sans doute dans les escaliers et les couloirs alentours. De toute façon, c’était les vacances, qui plus est le matin de Noël, alors il n’y avait personne pour l’entendre … Ça n’avait pas plus aux hiboux, qui avaient pris peur et s’étaient tous envolés en même temps, dans un grand bruit de bruissements d’ailes et de hululements paniqués. Les chouettes se cognaient entre elles, certaines sortaient, rentraient. Encore plus efficace que de leur lancer un caillou, apparemment ! Il le conseillerait à Mariana, la prochaine fois qu’il la verrait, si elle voulait forcer un hibou à lui obéir, il valait mieux qu’elle lui hurle dessus, plutôt qu’elle lui balance quoi que ce soit. Surtout si elle n’était pas seule dans la volière, mais là c’était plutôt pour la sécurité de l’autre personne. Emilien ne prêtait pas une grande attention aux oiseaux, ni aux plumes qui commençaient à pleuvoir. Il s’était levé, et fixait son amie d’un air furieux. Il n’arrivait pas vraiment à se rendre compte de ce qu’il venait de faire, mais il n’était plus en état de réfléchir.

Après quelques secondes de silence – interrompu par le cri lointain d’un tableau, dans le couloir, qui demandait si on assassinait quelqu’un – Lucy se décida enfin à parler. Elle … Elle admettait qu’il avait raison ? Comme ça ? Elle était d’accord avec lui, en ce qui concernait Gatween ? Comme quoi c’était idiot de sortir avec lui alors qu’elle le connaissait à peine, qu’il n’avait aucun intérêt, et même que son vouvoiement était stupide ? Emilien ne savait pas trop qu’en penser. Lui qui dès le début croyait que rien ne comptait plus que de raisonner son amie, en vérité, ça ne lui faisait pas si plaisir … C’était pour ça, pour ces quelques phrases, qu’il était allé jusque-là ? Qu’il s’était montré si désagréable envers son amie, qu’il s’était mis à hurler, en énonçant tous ses propres défauts ? Il s’était battu parce qu’il pensait avoir raison, mais l’entendre dire par son amie ne lui amenait finalement aucun plaisir, aucune joie. C’était bien la peine de faire tout ça … Emilien ne savait plus trop quoi dire, il était trop fier pour avouer que finalement, il s’en fichait bien.

De toute façon, Lucy avait repris la parole. Ses qualités ? Mais quelles qualités ? S’il en avait, elles se comptaient sur les doigts d’une seule main, c’était clair. Ah, oui, la franchise, bien … C’était une super qualité, ça ! Ça lui attirait plus d’ennuis qu’autre chose … Tout ça, c’était bien gentil, mais ça n’entrait pas au panthéon des Grandes Qualités, telles que le courage, la gentillesse, la générosité. Si Emilien avait possédé l’une de ces qualités, il ne serait sans doute pas à Serpentard, mais plutôt à Gryffondor, ou à Poufsouffle. Lucy parlait aussi de sa détermination, oui par exemple, sa détermination à lui faire avouer qu’elle avait tort, alors qu’il s’en fichait totalement, au final. Super, la détermination, vraiment. S’il s’agissait juste d’avoir des qualités qui ne servaient à rien, alors là peut-être qu’on pouvait lui en trouver un bon paquet. De toute façon, il avait largement plus de défauts, alors bon … La Serdaigle lui demandait s’il en voulait d’autres. Quelles autres ? Il lui semblait qu’elle avait déjà énoncé tout ce qu’il était possible de considérer comme des qualités chez lui.

- Y’en a pas, d’autres, répliqua le Serpentard.

Et il ne la laisserait pas répliquer. En effet Emilien avait décidé que le mieux pour le moment, était de s’arrêter là. Ça l’avait amené à quoi, de s’énerver comme ça ? D’ailleurs, il était toujours sur les nerfs, et … Il avait besoin de temps pour se calmer, pour réfléchir. Il n’arrivait à rien, là, la « discussion » n’avancerait plus, de toute façon. Ils pourraient continuer pendant encore longtemps à s’échanger des propos comme ceux-là, mais qu’est-ce que ça changerait ? Non, le Serpentard avait besoin d’aller se calmer, il connaissait de très bonnes techniques pour ça, mais il ne pouvait pas le faire dans la volière. Même balancer des cailloux aux oiseaux ne lui suffirait pas. Quand il était dans cet état, il lui fallait quelque chose de plus important. Si ça avait été une simple dispute avec ses parents, il se serait contenté d’aller s’enfermer quelque part. Mais là … C’était plus compliqué … Emilien fixa encore Lucy un moment, puis fit demi-tour sans un mot. Il valait mieux ça que de partir en disant n’importe quoi.

Il fallait croire que Mariana était la seule à qui il arrivait des malheurs avec la porte de la volière. Emilien se souvenait encore du jour où elle avait voulu partir la tête haute, et où elle avait coincé sa jupe dans la porte en la fermant. Sur le moment, ça avait été très comique, mais ça ne le faisait même pas rire, maintenant. Le Serpentard put claquer la porte de toutes ses forces sans qu’il ne lui arrive quoi que ce soit, en même temps, il ne portait pas de jupe, lui. C’était peut-être ce qui l’avait sauvé de la porte. Emilien ne s’arrêta pas, et dévala les escaliers, sans attendre de voir si Lucy le suivait ou pas. Si elle avait un peu de jugeotte, elle attendrait qu’il soit parti avant de sortir de la volière à son tour … Le Serpentard avait toujours son cadeau à la main, il ne l’avait tout de même pas oublié là-haut … Lorsqu’il passa devant une armure qui lui beugla « We wish you a merry Christmas » dans les oreilles, il ne put s’empêcher de lui flanquer un bon coup de pied. L’armure s’écroula et le Serpentard continua son chemin, à grands pas, en direction de la salle commune …

[On se réconciliera une autre fois ]