Mais la main du jeune Gryffondor ne toucha pas le bois de la porte, car celle-ci s'ouvrit juste avant qu'il n'en ait eu le temps. Affairé dans son bureau sur une créature quelconque, Maugrey avait vu à travers les murs arriver William. Par habitude, l'oeil magique de l'ancien auror faisait des observations un peu partout... On ne savait jamais qui pouvait se pointer... Non, il n'était pas paranoïaque, juste prudent. Mais là, il n'y avait pas de danger. Tous les objets disposés dans la pièce circulaire le lui auraient signalé... Glace à l'ennemi, par exemple, mais aussi d'autres...

"Entre." grogna-t-il à l'adresse du Deuxième Année.

Il indiqua la chaise devant son bureau et prit appui contre ce même bureau. Il attendit que l'élève ait pris place avant de commencer. Il s'assura tout de même que ce qu'il avait entendu en classe, et avec des déductions, était correct. Et enchaîna.

"Tu t'appelles William, c'est bien cela ? Si je t'ai demandé de venir, c'est pour comprendre et te faire comprendre plusieurs choses... Quelque chose me dit que tu es fils de moldus... Et que tu n'avais aucune connaissance du fait qu'il puisse exister un monde magique..."

Avant de poursuivre, il attendit une confirmation. Certes, il y avait d'autres élèves aux mêmes origines que lui, mais il devait aussi y avoir autre chose du côté du jeune garçon. Et ce qu'il allait découvrir, l'ex-auror...

Will fut stupéfait lorsque la porte s'ouvrit, juste au moment où il allait frapper... Il s'était déjà demandé si l'oeil magique de Maugrey pouvait voir à travers les murs, et il avait désormais la réponse. Il entra et s'assit timidement, sur le bord de la chaise. Le professeur Maugrey était impressionnant, même s'il n'avait pas de mauvaises intentions... Le petit garçon confirma, d'une voix faible malgré la certitude qu'il ne risquait rien dans ce bureau:

-Oui, je m'appelle William, monsieur... et je suis bien fils de Moldus. En fait, je suis même le premier sorcier de toute ma famille...

Il n'osa rien dire, mais il était certain que d'autres élèves étaient dans sa situation- mais tous ne s'évanouissaient pas... Pourquoi lui? Il essaya de ne pas regarder l'oeil magique du professeur qui allait et venait dans son orbite, surveillant apparemment de tous les côtés. Silencieux, Will attendit la suite, à la fois impatient et inquiet. Et si Maugrey lui révélait que les enfants de Moldus ont une faiblesse incurable? cela donnerait raison à ceux qui critiquaient les "Sang-de-Bourbe"...

William garda le silence quelques instants. Du travail? il en fournissait... l'envie de réussir? mais il n'en manquait pas... Il était content d'entendre dire que les enfants de Moldus valaient autant que les autres, mais il se sentait un peu blessé. Maugrey n'allait pas lui parler comme si le fait de s'être évanoui faisait de lui un mauvais élève... Il avait toujours été sérieux, et ce n'était pas parce qu'il avait eu une faiblesse qu'il fallait le blâmer... Tenant à mettre les choses au clair, il expliqua, sans regarder le professeur:

-J'étais malade, hier. Je n'avais pas dormi de la nuit, et je ne me sentais pas très bien... Vous croyez que les Povrebines en ont tiré parti, professeur?

Affronter un Détraqueur, on n'en était pas là. Will avait lu quelques petits trucs sur eux, et il espérait bien ne jamais avoir à leur faire face. Le ton de Maugrey, cependant, lui donna des doutes: et s'il allait ramener un Détraqueur en cours? Il en était bien capable... puis il se rappela ce que disait le livre: les Détraqueurs étaient des êtres très dangereux, et ils ne quittaient qu'exceptionnellement la prison d'Azkaban... Will chassa cette pensée de son esprit et demanda:

-Vous allez ramener des Povrebines la prochaine fois, monsieur?

Autant savoir à quoi s'attendre, et se préparer si possible...

Lorsque Maugrey lui assura qu'il n'y aurait pas de Détraqueur, William eut un sourire. Il l'avait donc pensé si fort?... enfin, c'était déjà une bonne nouvelle... quant aux créatures que le professeur allait amener, il était inutile de chercher à deviner ce que c'était, car les créatures nuisibles étaient trop nombreuses... Will prit le paquet que lui donnait Maugrey en se demandant ce que c'était- il n'avait jamais goûté de Patacitrouilles auparavant. Un peu embarrassé, il répondit:

-Euh.. merci, professeur... (Il marqua une pause comme pour chercher ses mots et se décida enfin à demander lentement:) Vous croyez que si je n'avais pas été malade, ils auraient eu cet effet-là sur moi? Je veux dire... vous avez l'air de dire que je manque de confiance en moi... Est-ce que ce manque de confiance aurait suffi pour que je m'évanouisse face aux Povrebines?

Il avait décidé que sa maladie avait été la seule cause de cette faiblesse, mais Maugrey ne semblait pas de cet avis. Et il fallait savoir ce qui avait été le plus grand point faible du Gryffondor face aux créatures, pour pouvoir le combattre... Will avait hâte d'être au cours suivant, pour voir si, étant en forme, il se débrouillait aussi bien que les autres. Finalement, jusqu'à cette discussion avec Maugrey, il n'avait jamais vraiment eu le sentiment de manquer de confiance en lui-même...

Il aurait dû s'en douter, mais la réponse mortifia cependant William. Oui, selon Maugrey, son seul manque de confiance aurait pu, seul, expliquer son évanouissement. Venant d'un homme expérimenté comme le professeur de Défense contre les forces du mal, c'était un avis à prendre en considération. Will se jura de travailler d'arrache-pied pour devenir plus assuré, plus puissant aussi... et alors, il n'aurait plus aucune raison de connaître ce genre de faiblesse... Le petit garçon posa les yeux sur le visage détruit de Maugrey, et répondit:

-Non, monsieur, je n'ai plus de question. Je voulais juste... vous remercier d'avoir pris le temps de m'expliquer tout ça...

Tous les professeurs ne l'auraient pas fait, et tous n'auraient pas été si positifs avec un élève sortant d'un évanouissement. William aimait bien la façon dont Maugrey l'avait traité, pas comme un malade ou un faible, juste comme quelqu'un qui a connu un incident de parcours... Il n'aurait pas voulu qu'on se préoccupe de sa santé, ou qu'on juge bon de le traiter différemment de ses camarades... et le professeur de Défense contre les forces du Mal n'avait pas commis cette erreur.