Nom : Ena"dariss
Prénom : Raven
Âge de votre personnage : 19 ans
Âge du posteur : 16 ans

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Il pleuvait sur la ville basse alors que la nuit tombait une fois de plus. De longues gorges d'eau frappaient les rares passants. L'eau sale s'écrasait sur les pavés boueux. Les vieilles maisons miteuses étaient voûtées, blotties dans la fange, la brume et la misère. Le malheur rance suintait, suppurant des plaies de leurs murs pourrissants. Multitudes de solitaires décharnés et spectraux sans âme, ni but ni désir, que le brouillard dense avalait ou vomissait, hantait éternellement les ruelles sombres et puantes. Ces dévoués, ces compagnons de l'infortune la plus noire demeuraient hantés et rongés par leurs vermines, leurs pestilences, leurs miasmes putrides. Une lueur d'espoir se dressait cependant dans les ténèbres : une taverne miteuse, infâme et grouillante, qui offrait un oubli éphémère et brûlant en même temps qu'un peu plus de misère. A l'intérieur, entourés d'un souffle tiède et enivrant, ils embrassaient un peu plus la déchéance et la déliquescence, sans volonté, sans passions humaines, se noyant avidement dans l'alcool et dans leur désespoir. Mais, au milieu de cette masse abjecte et animale, il y en avait un autre, un rôdeur, un vagabond. Errant depuis toujours à la recherche de réponses, de raisons. Il était homme, mais pas humain. Attablé seul dans un recoin très peu éclairé et reculé de la taverne, il les observait. Ses traits demeuraient cachés par un long vêtement sombre, ainsi que par les ombres dansantes. Il ne parlait pas. Parfois, il buvait, portant la chope à ses lèvres, avalant alors avec difficultés quelques faibles gorgées du liquide blanchâtre qui emplissait la tasse. Sinon, il ne bougeait pas, jamais, tel une statue ou un cadavre. Mais il pensait, et il les haissait, tous ces vivants déjà morts, il les haissait, tous les autres. Tous sans exception, il les honnissait, les maudissait. Mais il se détestait lui-même bien plus qu'il ne les détestait eux. Sa haine grondait dans son esprit et sa folie le dévorait. Rejeté depuis toujours, il a fini par chercher des raisons dans sa systématique mise à l'écart. Et il a fini par comprendre. Il était ce qu'il était, différent.

Le vagabond se leva lentement, et se dirigea d'un pas calme vers la porte. Il l'ouvrit, et sortit en la laissant claquer violemment. Dehors, un homme l'interpella. Il n'était pas seul. Ils étaient quatre à s'approcher de lui, armés de longues barres de taule. Ils l'insultèrent, le poussèrent contre un mur. Il n'avait pas peur. Il avait presque pitié d'eux, de ce qu'il restera d'eux quand ils l'auront poussé hors des limites de son propre contrôle. L'homme qui l'a interpellé le frappa au creux des reins avec sa batte. Le rôdeur se relèva. Il avait mal, mais ne le montrait pas. Il restait stoïque, et demeurait silencieux. Il savait qu'il ne pourrai bientôt plus se retenir. Mais pour lors, la haine qui l'animait, pauvre pantin du sentiment ardent qui l'écrasait, n’était pas assez brûlante pour le mener au bout de sa folie carnassière. L'homme lui envoya un coup de poing au visage. Le vagabond tomba. Il se relèva, son visage avaot changé. Ses grands yeux noirs ne laissaient voir que la colère qui lui avait envahi le coeur. Bientôt, la danse ensanglantée commencera, il en sera le maître, et les autres suivront, et tomberont ; les histrions pâles et écarlates... La nuit s'achèvait lentement, le temps s'enlisait et s'embourbait. Il ne bougeait pas, il attendait encore que l'instant vienne, et que la valse commence. Puis l'éclat terne du soleil d'hiver franchit l'horizon et transperça le voile poussiéreux du malheur, la ville basse s'éveillait... Il était temps, mais il fallait de la méthode, de l'organisation à une folie meurtrière d'une telle ampleur, qui sans cela était vouée à l'échec. Ils ne devaient pas mourir de manière insignifiante ces maudits futiles, ces détestés... Il lui faudrait faire preuve d'élégance, d'originalité, de talent consommé, et les grands mouvements pourpres de la danse seront gracieux, comme il se devait... Il ne pouvait en être autrement. L'arme : ses propres mains, depuis peu devenues griffes. Pour l'homme, une entaille grossière à la gorge, pour le voir s'étouffer avec son propre sang. Quant à ses sbires, un coup de serre ample, à la hauteur des yeux ; ils pleureront vermeil de souffrance, puis deux coups dans le coeur, et le bal sera fini. Il avait décidé de la manière, et passa à l'acte. Quelques minutes plus tard, la danse s'achèvait, des corps inertes gisaient au sol. Il en avait fini avec eux, et, sans même s’essuyer ce qui redevinrent ses mains, il reprit sa marche. Ainsi débuta son errance au travers de la cité.

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