Le cognard partit à pleine puissance sur Harrisson, le poursuiveur des Faucons de Falmouth qui tenait le souaffle. Et Sbam ! Apollon émit un rire bruyant lorsque la balle s'emplafonna pile dans la tête du pauvre type, qui tomba comme une pierre de son balai.
« FAUUUUTE ! Azy, faute-là ! » beugla en retour le batteur des Faucons, qui n'avait pu intervenir à temps.
Il fila droit vers Oaken, sa batte levée au-dessus de sa tête, avec l'air de vouloir sérieusement en découdre.
« Enfoiré ! Tu l'as à moitié buté !
— Et où y a une faute, connard ? T'as qu'à faire ton taff au lieu de mater le public. Casse-toi où j't'éclate ! »

Le souaffle passa des Faucons aux Flèches d'Appleby, et un but fut marqué sans que le gardien ne puisse rien y faire. Apollon poussa un cri de joie et les Flèches se rassemblèrent un instant, pour se féliciter et se frapper dans les mains.
« Bien joué, Oaken ! Ça leur apprendra, à ces salauds de Faucons !
— Ils se la jouent brutal, mais on va leur montrer c'que c'est, la violence ! » renchérit Oaken, en jetant un regard narquois aux deux autres batteurs qui s'étaient réunis pour le fusiller du regard.

Le jeu reprit, encore plus intense. Les Faucons, violents de nature, redoublaient d'effort pour abattre les Flèches, mais l'équipe d'Apollon était rapide et agile, et n'était d'ailleurs pas en reste en matière de puissance de tir. Ils gardaient l'ascendant sur l'équipe adverse avec une férocité de lion, sans se soucier des coups, des cognards et des fautes qui se multipliaient.
La final du Championnat Junior de Quidditch se jouait à ce moment, et les Flèches, après un entraînement intensif et une soif de victoire qu'aucune de leur précédentes réussites n'avaient assouvi, jouaient comme s'il en allait de leur propre vie. Si les Faucons ne se laissaient pas faire, ils dominaient malgré tout le terrain, et qu'importait que les trois quarts de leurs poursuiveurs avaient la tête en sang. Apollon lui même avait pris un cognard dans l'épaule, qu'un des batteurs lui avait lancé dans le dos pour essayer de le mettre hors-jeu. Peine perdue. En plus, ce con là avait visé la mauvaise épaule, et son bras droit n'avait donc rien perdu de sa force de frappe.
Un nouveau but fut marqué grâce au deuxième batteur des Flèches, qui avait déstabilisé le gardien par un lancé de cognard bien senti. 285 à 205. C'était serré, car le vif d'or pouvait encore tout faire basculer. Si White repérait le vif avant leur attrapeur, ils étaient foutu, mais Apollon faisait confiance à son acolyte, Adriel. Il avait un œil de lynx et des réflexes digne d'un mec qui passe le clair de son temps à s'entraîner avec son père, père n'était autre que l'attrapeur actuel des Flèches d'Appleby, catégorie pro. Et Adriel comptait bien lui succéder.

« Batteurs ! L'attrapeur ! »

Beugla-t-on à l'autre bout du terrain, et Apollon réagit immédiatement. Au loin, White avait prit en chasse le vif, alors qu'un combat féroce pour le souaffle continuait en dessous d'eux. Leur attrapeur était lui aussi parti à la poursuite de la précieuse balle, à l'opposée de White. C'était certainement une question de millisecondes, il ne fallait qu'aucun d'eux se loupe. Apollon prit en chasse un cognard, complètement couché sur son Nimbus 2001, et le fit dévier d'un de ses poursuiveurs vers White. Celui-ci l'esquiva, mais cela fit gagner assez de temps au vif d'or pour déguerpir. Heureusement, Adriel fit une pirouette à 180 degrés sur son balai pour suivre le chemin emprunté par le vif. Sa main se tendit, ses doigts semblèrent s'allonger tant il forçait et, la tête en bas, il effleura le vif. Ses doigts se refermèrent sur le petit objet alors qu'il reprenait avec une fluidité incroyable sa position initiale, quelques mètres plus bas. Il rugit littéralement son contentement, et le coup de sifflet retentit.

Ce fut un boxon comme on en avait rarement vu sur le terrain d'Appleby. Ça hurlait, ça faisait des pirouettes, ça s'adressait des accolades digne d'une gay pride et ça hurlait de nouveau, tandis que le public se levait pour acclamer les vainqueurs. Les Faucons, médusés, s'étaient figés dans les airs, sans réaliser qu'on venait bel et bien de leur souffler la victoire.
Deux heures et demi d'un jeu qui n'avait pas faiblit une minute. Tout le monde avait été en haleine et maintenant, l'adrénaline et la testostérone éclataient avec d'autant plus de puissance que le match avait été long, et le final incertain.
Enfin, lorsque les balles furent rangées et que trois autres coups de sifflet furent lancés pour rappeler les joueurs, tout le monde se posa à terre, non sans brandir le poing en direction du public avant de rentrer aux vestiaires. On but, on se chahuta, on blagua, et l'arbitre entra dans la salle pour les rappeler sur le terrain. Le public applaudissait toujours (la chance de jouer sur son propre territoire) et acclamait les semi-pros, tandis que le recteur du Championnat les attendait sur une estrade levée à la va vite au milieu du stade. Les Flèches passèrent devant les Faucons, chacun serrant la main à son adversaire, et sur le bout des lèvres, le batteur qui s'était énervé plus tôt contre Apollon le félicita. Il était tout vert, et ce n'était pas une métaphore. Oaken lui donna une tape sur l'épaule, pas rancunier pour deux sous, et trotta derrière les autres pour gravir les marches de l'estrade. On remit la coupe à l'attrapeur – qui était, bien sûr, le capitaine, quitte à être le héros du jour, autant l'être deux fois plutôt qu'une – et celui-ci la brandit au-dessus de sa tête, tandis que le commentateur du match énumérait les noms des vainqueurs et complimentait leur jeu. On se passa la coupe, afin que chacun puisse en profiter, puis, comme un même homme, l'équipe des Flèches lancèrent avec leur baguette des sorts en forme de flèche d'argent, qui volèrent et tombèrent en douceur au-dessus du public, pour finalement s'éteindre. Dans tout ce bordel, Apollon ne sut même pas comment il se retrouva de nouveau dans les vestiaires, sous la douche.
« On a gagné, les mecs ! On a gagné ! » entendait-on encore alors que tout le monde se rhabillait, mais le capitaine, en bon chieur, les coupa dans leur élan pour leur faire un petit speech bien sentit, et commenter leur méthode de jeu.
« Hey Adriel, ta gueule ! Faut grave qu'on aille signer des autographes !  » le coupa Apollon, et tout le monde se leva, plantant leur capitaine en plein milieu de son discours. Celui-ci se résolue à suivre ses joueurs jusqu'aux tribunes, dans lesquelles ils montèrent pour saluer ceux qui avaient eu la patience de les attendre.

« Putain, Apo, matte ça ! Y a Heva Schmit là-bas ! »
Apollon se figea sur place, en position d'arrêt. Ses yeux s'arrondirent lorsqu'ils aperçurent la célèbre poursuiveuse, et, pendant un moment, il crut qu'il allait baver. Par le slibard de Merlin, elle était encore plus canon que sur les photos !
« Putain, comment elle est bonne... !
— Pas cap d'aller lui signer un autographe ! » ricana Turner, le second batteur, qui cherchait manifestement à pousser son acolyte à la connerie.
Car il était évident que quand une phrase commençait par « pas cap », Apollon y allait, dusse-t-il pour cela se jeter par la fenêtre. Il jeta donc un regard supérieur à Turner et sauta par dessus les sièges pour parvenir jusqu'à Heva.
Lorsqu'il fut à un mètre d'elle, il ralentit cependant. Elle était vraiment classe (enfin, au goût de Apollon) et pour le coup, Apollon se sentait légèrement impressionné par la donzelle. Heureusement, l'excitation de la victoire donnait des ailes. Le Gryffondor enjamba donc le dernier siège et lança un grand sourire à Schmit, tout en glissant les mains dans les poches de son jean.

« On attend pour un autographe ? »