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 [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James]
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  • Aïlin Bower
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MessageSujet: [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James]   [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James] EmptyLun 27 Fév - 15:42:48

Aïlin releva la tête de l'interminable compte rendu qu'il était en train de rédiger pour observer la jeune femme qui s'activait avec beaucoup de sérieux, au milieu d’innombrables fioles de toutes les couleurs, et de plantes toutes aussi bigarrées.

« Miss Botcharov ? »
L'assistance releva un regard curieux en direction de son employeur, et, d'un sourire, lui fit signe qu'elle l'écoutait avant de replonger le nez dans son travail.
« Vous êtes toujours d'accord pour ce soir ?
- Bien sûr Monsieur Bower, répliqua-t-elle avec un fort accent de l'est. Vous pouvez me faire confiance, je ne compte pas m'éclipser en cachette lorsque vous aurez le dos tourné.
Un rire lui échappa.
- Vos transmutations peuvent compter sur moi, je ne les laisserai pas se désagréger par manque d'attention. ...Quoi que je pourrais changer d'avis si vous persistez à m'appeler de cette façon. »

Ses yeux d'un bleu perçant se braquèrent sur Aïlin une longue seconde et celui-ci fit mine de se guinder. Lorsque le regard de son assistante s'abaissa, il eut un sourire pour lui-même.
Depuis quelques semaines, tout se passait bien dans le meilleur des mondes. Ses relations avec la mafia de Mikhaïl et de Murray s'étaient renforcées et Aïlin avait réalisé plus d'une dizaine d'échantillons de drogue – en comptant les corrections et les dérivés – pour le compte de ses éminents patrons. Tout le monde semblait satisfait. L'une de ses compositions avait même déjà investit le marché et cette réussite précoce n'était pas sans le rassurer quant à son avenir et à la prospérité de ses relations avec Dmitriev. Quant à Murray, il, lui avait donné l'ordre d'opérer quelques infimes changements sur le produit far sur lequel reposait ses espoirs, et il ne s'agissait plus que de courtes semaines avant que le produit puisse être lancé.
Cela lui avait coûté énormément de travail et de rigueur dans son organisation, qui avait souvent été mise à mal par des assistants qui ne s'étaient pas montré à la hauteur de ses attentes. Il les avait tous renvoyé les uns après les autres, sans le moindre sentiment, déçu par leurs compétences ou leur imagination trop limitées. Quand il ne les trouvait pas paresseux, ou manquant de vivacité. Un assistant, aux yeux d'Aïlin, n'était pas un apprenti, mais devait au moins égaler les compétences de son patron, ou au moins le compléter dans un domaine. Il n'avait jamais trouvé ces qualités dans les potionistes qu'il avait déniché, ou que Mikhaïl lui avait proposé, jusqu'à ce que ce dernier fasse venir Tanya directement de Russie. En plus d'être parfaitement attrayante au regard, la jeune femme était brillante, dynamique et douée d'une fraîcheur qui rendait le travail beaucoup plus fluide et efficace que si la communication manquait. Le seul désavantage à avoir Tanya dans son atelier, malgré sa disponibilité et sa rigueur toute scientifique, c'était que la chute de ses reins avait parfois tendance à le déconcentrer. Toutefois, il ne pouvait décemment pas la renvoyer sous ce prétexte, à moins de vouloir passer pour mysogine et de s'attirer les foudres de Mikhaïl Dmitriev. Puis, Aïlin doutait qu'il puisse trouver meilleur élément. Avec elle, sa productivité avait été multipliée, et Tanya n'avait pas été étrangère à sa dernière idée de génie pour satisfaire une clientèle riche et demandeuse de produits raffinés.


« Je peux rester jusqu'à la fin de votre dîner, si vous le souhaitez. » Proposa la russe tandis qu'Aïlin se replongeait dans son rapport.
« Merci, Tanya, mais ça ira. Il ne vous restera plus grand chose à faire lorsque les dernières transmutations seront achevées. Je me chargerai du reste en fin de soirée, ou demain à la première heure. Le plus gros du travail est fait, mais il nous reste quand même beaucoup à faire demain. Je préfère que vous ne manquiez pas de sommeil. »
Elle lui adressa un sourire entendu et Aïlin acheva de rédiger les dernières pages qu'il destinait à l'attention de Murray. Lorsque dix-sept heures sonnèrent, l'alchimiste rangea sa blouse de travail et quitta la potioniste pour s'apprêter, en vue d'un repas qu'il attendait avec impatience.

Cela faisait bien des années qu'il n'avait plus revu James Kirkby. Lorsqu'ils s'étaient rencontré pour la première fois, Aïlin et lui étaient très jeunes, mais ils s'étaient bien entendu dès les premières conversations qu'ils avaient eu. Le jeune homme avait une retenue et une intelligence qui avaient plût à Aïlin, et le fait qu'ils avaient passé leur scolarité dans la même Maison n'était peut-être pas non plus étranger à leur entente. Mais, lorsque leur père respectif avait plus ou moins cessé de se voir, les deux jeunes gens s'étaient perdu de vue, jusqu'à s'oublier finalement. Recevoir une lettre de son ami d'enfance avait été une agréable surprise, même s'il s'agissait plus d'un rendez-vous d'affaire que d'un repas en vue de renouer contact. C'était l'occasion pour faire de nouveau connaissance et se raconter ce que l'un et l'autre était devenu. Possibilité plutôt rare lorsqu'il s'agissait d'histoire d'accords et de contrats. C'était d'ailleurs pour cette seule raison qu'Aïlin avait fait preuve de curiosité et avait accepté de rencontrer James. Il savait qu'un surplus de travail risquait de bouleverser ses habitudes ainsi que ses projets personnels, mais il ne pouvait pas refuser tant qu'il ne savait pas ce que Kirkby avait à lui proposer. La proposition d'un ami de longue date était bien trop intrigante pour qu'on puisse la rejeter d'un revers négligeant de la main.

Quand Aïlin fut apprêté et le salon prêt pour recevoir James, dix-huit heures étaient proches de sonner. Le jeune homme alla surveiller brièvement ce qu'il se passait en cuisine, tout en rajustant nonchalamment ses boutons de manchettes aux tonalités saphir, puis retourna s'installer au salon avec un livre en attendant la venue de son invité. Il n'eut guère le temps que de lire quelques lignes qu'on sonna, et, en bon hôte, Aïlin se déplaça lui-même pour ouvrir la porte à l'arrivant.

Il lui fallut quelques secondes pour découvrir dans les traits du jeune homme l'adolescent qu'il avait connu autrefois, mais un sourire accueillant se dessina sur ses lèvres. Nul doute que James devait être autant frappé que lui par les changements qui s'étaient opérés sur Aïlin. L'âge et leur vécu les avaient tous deux transformés, et Aïlin n'avait plus rien du garçon timide et réservé que James avait connu autrefois. Si sa réserve demeurait toujours bien réelle, elle était largement camouflée par une assurance tranquille, peut-être un peu arrogante, qui n'était pas sans rappeler celle de son père avant que celui-ci ne sombre dans ses névroses et perde peu à peu cette dignité que ses fils avaient toujours admiré chez lui.


« James ! C'est un plaisir de vous revoir. »

Entonna Aïlin avec un enthousiasme non feint tandis qu'il lui tendait la main. Il se décala pour laisser entrer son invité, puis le laissa le précéder dans le large couloir qui servait d'entrée au manoir. Erycius, en bon serviteur anglais, s'était approché de James pour le débarrasser de ses vêtements d'extérieur. Il s'éclipsa avec la même discrétion, tandis qu'Aïlin indiquait à James l'arche ouverte qui menait au salon, à leur droite.

« Venez vous installer, je vous en prie. »

Aïlin suivit James dans le vaste salon. Ils dépassèrent les deux statues de bronze qui ornaient l'arche et passèrent à côté d'un vieux piano à queue avant d'atteindre enfin les fauteuils disposés autour d'une table basse ouvragée, à quelques pas de la cheminée. Le temps peu clément avait forcé Aïlin à faire brûler un feu pour se protéger du vent froid et sec qui soufflait au-dehors et qui s'immisçait parfois entre les interstices des larges fenêtres. Malgré la blancheur du ciel, le salon demeurait lumineux, et la neige rare mais continue qui tombait mollement à cette heure conférait à l'atmosphère un on ne savait quoi de chaleureux et d'intime, qui contrastait de façon frappante avec son austérité et sa froideur d'antan, et dont James pouvait avoir le souvenir.

« Je peux vous servir un verre ? C'est le meilleur Whiskey que j'ai en cave, vous ne serez pas déçu. De quoi vous prémunir contre le froid du pays ! »

Proposa le jeune homme en prenant la bouteille de Whiskey qui attendait sur la table entre deux verres et une coupelle de glaçons. Il attendit l'aval de James pour les servir tous deux et lui tendit son verre.

« Glaçons ? »

Demanda-t-il en attrapant son propre verre ainsi que sa baguette magique, jusqu'alors posée sur la table basse. Il s'installa face au jeune homme, dos au feu, et agita son arme en direction du bac de glaçons. Quatre morceaux de glace lévitèrent et vinrent docilement atterrir dans le verre des jeunes gens, tandis que le regard de l'irlandais se braquaient sur son hôte, l'invitant à prendre la parole.


Dernière édition par Aïlin Bower le Dim 28 Oct - 10:19:45, édité 1 fois
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  • James Kirkby
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MessageSujet: Re: [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James]   [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James] EmptyVen 2 Mar - 18:41:35

Travailler pour Xenophius était un remède garanti contre l'ennui et la routine. Le chef de clan débordait d'idées, dont il confiait la réalisation à ses subordonnés, sans s'embarrasser de savoir si l'exécution était seulement possible... Il pouvait aussi bien vous expédier au Tibet pour arracher au yéti le poil de nez indispensable à la confection d'une potion, que sur l'Allée des Embrumes à la recherche d'un artefact perdu depuis de XVIIème siècle... Il se montrait sourd à toutes les objections, voire pire, de sorte que ses employés perdaient très vite l'envie de discuter ses ordres. Aussi, James n'avait-il rien dit lorsque, de sa voix ferme, son parrain lui avait ordonné :

-Débrouille-toi comme tu veux, mon garçon – cette seule entrée en matière indiquait une mission irréalisable – débrouille-toi comme tu veux, mais je veux que tu me trouves un alchimiste. Le meilleur. Offre-lui ce qu'il faudra, mais j'en ai besoin. Tu as dix jours pour me le ramener.

Peste, la bonne blague. Depuis la fin de la guerre, les alchimistes ne couraient guère les rues : soupçonnés d'être liés au grand vilain aux yeux rouges, beaucoup avaient été emprisonnés, et ceux qui restaient s'étaient faits plus discrets que des poux sur la tête d'un chauve. L'alchimie était une activité en perte de vitesse en Angleterre, et à moins d'aller prospecter à l'étranger, il ne serait pas facile de donner satisfaction à Xenophius... Un informateur avait indiqué à James le nom d'un Norvégien très renommé dans sa branche, mais dont les antécédents ne donnaient guère envie de le rencontrer (ne disait-on pas que l'usage se perpétuait, dans sa lointaine contrée, de boire dans le crâne de ses ennemis ?).
De guerre lasse, James s'était résolu à faire le voyage en Norvège, lorsque – il ne savait comment – le nom d'Aïlin Bower était parvenu à ses oreilles. Voilà qui changeait tout, et la pénible mission allait devenir nettement plus agréable. Le plus jeune fils Bower avait été l'un des rares amis d'enfance de James ; leurs pères se portaient toute l'estime et toute l'amitié que deux fous furieux peuvent se témoigner, et ils se rencontraient régulièrement ; James se rappelait les visites en famille au manoir Bower, durant lesquelles « les petits » - c'est-à-dire Aïlin et lui-même, la jeune soeur d'Aïlin étant sagement tenue à l'écart de cette marmaille masculine – n'avaient même pas le droit d'approcher de l'endroit où « les grands » tenaient leurs conciliabules. Comme leurs caractères s'accordaient parfaitement, ils ne voyaient guère d'inconvénient à faire bande à part, et ils passaient une part non négligeable de leur temps à échafauder des vengeances jamais accomplies contre leurs aînés. Leur appartenance commune à la maison Serdaigle avait, par la suite, confirmé leur amitié, puis ils s'étaient tout simplement perdus de vue, chacun absorbé dans ses propres occupations... James gardait un excellent souvenir de son amitié avec Aïlin, et était sincèrement heureux à l'idée de renouer avec lui, fût-ce pour une seule soirée. Bien entendu, il espérait pouvoir le convaincre de mettre ses talents au service de Xenophius, mais il se doutait que l'alchimiste, s'il était aussi reconnu qu'on le lui avait dit, devait crouler sous le travail...

-On verra bien, se répéta-t-il pour la dixième fois en se préparant pour le dîner auquel Aïlin l'avait convié.

Il hésita un moment sur la tenue appropriée – pas trop stricte, Aïlin était un ami... pas trop décontractée non plus, l'amitié n'empêche pas le respect... Par chance, Xenophius, fin connaisseur des péchés mignons de son filleul, veillait à garnir sa garde-robe de vêtements de grande qualité, et le jeune homme n'avait que l'embarras du choix. Il finit par se décider pour un costume prince de Galles encore neuf, qu'il assortit avec une chemise blanche (en soie, s'il vous plaît, on ne plaisante pas chez McGregor) et une cravate noire. La classe ultime, jugea-t-il en observant son reflet dans le grand miroir de sa chambre. Une cape, un chapeau, une canne – il avait pris l'habitude d'en traîner une avec lui pour les jours où son genou se réveillait – et il était fin prêt, quelques minutes avant l'heure convenue. Légèrement nerveux, James quitta sa demeure et se rendit jusqu'à la ruelle déserte où il avait pris l'habitude de transplaner.

Le manoir Bower n'avait guère changé, vu de l'extérieur, depuis sa dernière visite, songea-t-il en remontant l'allée de graviers qui menait au perron. Sans doute le gros arbre, au fond du parc, conservait-il les symboles runiques qu'Aïlin et lui avaient gravés un jour en guise de signe de ralliement des cadets opprimés... Ce serait amusant d'aller voir, mais ce n'était pas le moment. La montre de James indiquait dix-huit heures précises, l'heure du rendez-vous. Le jeune homme se hâta de gravir le perron, sonna en rajustant machinalement sa cravate, pestant silencieusement contre la nervosité qui lui faisait légèrement trembler la main gauche. Pourquoi se sentir fébrile au moment de renouer avec un ami d'enfance ? Il n'y avait aucun risque, sinon celui de la nostalgie, et James se croyait à l'abri de ce mal.

La porte s'ouvrit bien vite, et le visiteur ne put dissimuler sa surprise en découvrant Aïlin Bower, qui avait pris la peine de venir ouvrir lui-même. L'adolescent effacé qu'il avait connu était devenu un homme au maintien élégant, à la prestance digne du chef de famille qu'il était devenu inopinément. La première surprise passée, un grand sourire éclaira le visage de James, qui se découvrit et serra la main de son ami avec chaleur :

-Le plaisir est partagé, Aïlin.

Il précéda son hôte dans le vestibule où un majordome stylé le débarrassa de sa cape, de son chapeau et de sa canne, puis dans le salon – incomparablement plus chaleureux que la pièce austère dont James conservait le souvenir. Sur un signe de son hôte, il prit place sur l'un des fauteuils disposés devant la cheminée, et accepta le whisky en souriant :

-Très volontiers... Cela me fera oublier le vent glacial de votre pays. Je ne me rappelais pas qu'il fît si froid, par chez vous.

Il hocha la tête lorsqu'Aïlin proposa des glaçons, et s'adossa confortablement au fauteuil, un peu moins nerveux à présent. Il laissa passer quelques instants de silence, à peine entrecoupés par les craquements du feu, puis se décida à énoncer l'objet de sa visite :

-Je suis très heureux que les affaires me permettent de renouer avec vous, Aïlin. Comme je vous l'ai dit par lettre, je suis envoyé par un puissant personnage, et vous pourriez certainement trouver ma proposition intéressante... Bien sûr, j'imagine que vous devez crouler sous le travail, mais monsieur McGregor aimerait beaucoup pouvoir compter sur vos services.

Il s'interrompit, et, sourire aux lèvres, observa Aïlin pour juger de sa réaction en découvrant l'identité de son commanditaire. Même au fin fond de l'Irlande, le nom de McGregor était connu, et devrait produire son petit effet...
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  • Aïlin Bower
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MessageSujet: Re: [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James]   [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James] EmptyLun 9 Avr - 12:00:39

Aïlin s'était confortablement installé dans son fauteuil et détaillait à présent son ami d'enfance avec discrétion. Au vu de la qualité de son costume, les affaires semblaient plutôt lui réussir, et le jeune Bower s'en trouvait heureux pour lui. On racontait, dans le petit milieu des Sang-Purs, que la famille Kirkby avait eu quelques difficultés financières. James n'avait pourtant rien d'un bourgeois désargenté. Son patron devait grassement le payer pour les services qu'il rendait. James n'avait donc pas bluffé, l'homme au nom duquel il se présentait ne devait pas être un simple anonyme.
Un rire court échappa à Aïlin lorsque son hôte fit une remarque sur le climat rude de l'Irlande. Londres n'était pas très chaleureuse non plus, mais, près des falaises irlandaises, le vent soufflait fort à cette période de l'année. À vrai dire, il était rare que la bise ne vienne pas frapper les murs du manoir Bower.


« Oh, j'ai connu des hivers bien plus rudes... Nous pouvons nous enchanter qu'il ne pleuve pas ! »

Répliqua le jeune Lord sur un ton badin, en adressant un regard brillant à l'une des hautes fenêtres qui diffusait sa lumière à travers le salon. Les rideaux écrus flottaient paisiblement de part et d'autre des vitres qu'ils couvraient à moitié, mais ciel, neige et flocons se confondaient dans la blancheur éblouissante de l'extérieur.
La pluie, en Irlande, pouvait tomber n'importe quand, quelles que soient les saisons. La neige n'était pas un obstacle, tant que la température se réchauffait. Alors, les nuages se formaient en un temps record au-dessus des falaises irlandaises, et un crachin infect encrassait le paysage en transformant la neige en gadoue noirâtre. Le temps était bien pire lorsqu'il faisait humide que lorsqu'il faisait simplement froid.


« Slainte, James. »

Sourit Aïlin en levant son verre, puis en goutant une gorgée de Whiskey. Il ferma les yeux une courte seconde, profitant de l'arôme qui caressait son palais. Un instant de silence passa, pendant lequel le jeune homme adressa un regard chaleureux à son hôte pour l'inviter à entamer la conversation. Ce que ne tarda pas à faire James, avec entrain et, lui semblait-il, une petite once de malice. Le jeune homme savait intriguer. Il mesurait ses paroles, parlant avec une certaine lenteur pour attiser la curiosité de son hôte. Un sourire passa sur les lèvres d'Aïlin, puis une expression fugace de surprise lorsque le nom du commanditaire fut prononcé. Xenophius McGregor, rien que cela ! Bower se pencha contre le dossier de son fauteuil, sans perdre son petit sourire. James avait habilement réussi son jeu. Aïlin avait bel et bien envie d'en apprendre davantage. Pourquoi l'éminent Sir McGregor avait-il besoin d'un alchimiste ?
Si les affaires continuaient aussi bien à fonctionner pour lui, il devrait songer à monter une école pour répondre à la demande de toutes ces figures de la société, pensa-t-il avec amusement, tandis qu'il reposait son verre sur la table basse et croisait ses doigts fins. Ou alors, il ferait bien de créer un homonculus au plus vite pour l'assister dans ses travaux.

« Je suis à la fois surpris et honoré que mon nom soit jugé digne d'intérêt par un homme aussi respectable que Monsieur McGregor. Mais quelque chose m'intrigue. Qu'est-ce qu'un tel homme peut bien attendre d'un alchimiste ? La coopération magique se passionnerait-elle soudain pour la transmutation ? »

Sa question avait été prononcée sur un ton gentiment railleur. Il se doutait que si on lui envoyait son ami d'enfance, la commande provenait non pas du Ministère, mais de Xenophius en personne. Cependant, il voulait l'entendre de la bouche de James. Aïlin attendait qu'on l'éclaire davantage sur les ambitions de McGregor. S'il n'avait pas rechigné à travailler pour les hommes les moins fréquentables de l'Angleterre, il se refusait néanmoins à oeuvrer dans le mystère, sans connaître les fins de ses travaux. Il reprit son verre, désinvolte, et lança un nouveau regard en direction de la fenêtre.


« Sommes-nous dans une crise économique si profonde que le Ministère fantasme de transformer le plomb en or ? »

Prononça-t-il lentement, avec une naïveté factice qui ne trompait personne. L'alchimiste reporta son attention sur son invité et bu une autre gorgée de Whiskey pour camoufler son amusement. Puisqu'il était question d'affaires, l'irlandais se refusait à ménager son ami. James devait se douter que le jeune homme n'avait pas besoin de Xenophius pour subvenir à ses besoins, mais il imaginait certainement que recevoir une commande de sa part, au moins, l'impressionnerait. Or, se montrer dur en affaires était plus susceptible de consolider sa réputation que de s'émouvoir dès lors qu'un grand personnage s'intéressait à ses travaux. Sa désinvolture risquerait de rendre la tâche difficile à James, mais, ainsi, il demeurait libre de refuser, ou, s'il acceptait finalement, d'obtenir sans condition ce qu'il désirerait. Mieux valait préparer le terrain avant de regretter de n'avoir pu pleinement profiter de la situation, pensa Aïlin en souriant pour lui-même.


Slainte : À la vôtre.
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  • James Kirkby
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MessageSujet: Re: [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James]   [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James] EmptySam 28 Avr - 16:27:12


Son verre de whiskey en main, James s'était laissé aller contre le dossier de son fauteuil, savourant la chaleur de la cheminée toute proche. En hôte prévenant, Aïlin lui avait laissé la meilleure place devant l'âtre ; cette politesse n'était pas de trop, tant James avait eu froid en traversant le parc du manoir. La conversation débutait tranquillement, et le jeune homme en profita pour jeter un coup d'oeil au décor du salon. Il avait bien connu cette pièce, jadis, du temps de Devin Bower – encore qu'il fût interdit aux enfants d'y stationner lorsque leurs pères discutaient. On les y tolérait le temps de dire bonjour, qui à l'hôte, qui à l'invité, puis l'ordre tombait, systématiquement, prononcé en même temps par Devin et Thomas : « Allez jouer dehors, les garçons. » Quel que soit le temps, quelle que soit l'heure. James n'avait jamais autant joué dehors que lors des visites chez les Bower. À cette époque, le salon du manoir lui semblait sinistre, glacé, sombre – comme l'était sa propre demeure sous la poigne de fer de son grand-père. Les choses étaient différentes depuis que le manoir avait changé de mains ; le salon était plus chaleureux, plus clair, la décoration moins pesante : en un mot comme en cent, on s'y sentait bien. Il était étrange de constater qu'il suffisait de presque rien pour changer radicalement l'ambiance d'une maison. Alba était en train d'opérer la même métamorphose à The Den, la lugubre demeure familiale qui, grâce à elle, prenait des airs coquets étonnants. Décidément, les deux familles semblaient destinées à connaître des évolutions parallèles. James sourit à cette pensée, et leva son verre en réponse au toast de son hôte :


-À votre santé, Aïlin.

Le whiskey était excellent, et tout souvenir d'avoir eu froid se dissipa dès la première gorgée bue. James déboutonna sa veste, parfaitement à l'aise à présent, fin prêt pour une discussion moins innocente. Il éprouva une intense satisfaction en voyant, l'espace d'une seconde, une expression de surprise passer sur le visage de son hôte : il ne s'était pas attendu à cela, peut-être même avait-il soupçonné James d'en rajouter pour capter son attention. C'était l'avantage, lorsqu'on travaillait pour Xenophius : prononcer son nom situait d'emblée la conversation et associait le messager à l'insolente richesse du commanditaire. Peu importait que le jeune homme ne fût qu'un rouage de l'empire McGregor ; il représentait un sorcier puissant, et pesait d'autant dans une négociation.
Très vite, cependant, le visage d'Aïlin reprit son expression de tranquille assurance, et le jeune alchimiste posa quelques questions sur un ton badin. Il avait donc décidé de jouer le benêt... Soit. Puisqu'il voulait se faire passer pour encore plus bête qu'il ne l'était réellement, il pouvait compter sur son vieil ami pour l'aider. James répondit, sur un ton tout aussi innocent :


-Oh... Pour tout vous dire, je crains que le Ministère n'ait rien à voir là-dedans. Bien sûr, cela demanderait confirmation, mais...

Il toucha son nez du bout de l'index, avec un air de fin limier sûr de lui, et prit une gorgée de whiskey en ayant le plus grand mal à garder l'expression mystérieuse qu'il s'était donnée. L'envie de sourire se dissipa cependant assez rapidement – après tout, James n'était pas là pour s'amuser, et il savait qu'il devait avant tout penser à la conclusion (favorable, évidemment) de cette discussion pour pouvoir se détendre et profiter de la compagnie de son ami. Soudain redevenu sérieux, il posa son verre sur la table basse, et tira de la poche intéreure de sa veste un petit écrin de velours noir. Une bague de fiançailles !


-Je suppose que vous n'aurez aucun mal à identifier cette pierre, lança-t-il en tendant l'écrin à Aïlin.

La question était posée pour la forme : un alchimiste incapable de reconnaître la shungite méritait d'aller pointer au chômage à grands coups de pied au derche... mais mieux valait vérifier tout de même, Bower ne serait pas le premier escroc à s'improviser alchimiste. Reprenant son verre, James poursuivit :


-Cette pierre renferme un précieux élixir, et seul un alchimiste averti peut l'extraire convenablement. Comme vous le voyez, il ne s'agit que d'une collaboration ponctuelle. Rien qui vous engage à long terme, à moins que vous ne souhaitiez, ensuite, rendre d'autres services à mon patron. C'est une activité qui peut être intéressante, conclut-il négligemment, en examinant les ongles de sa main gauche.
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  • Aïlin Bower
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MessageSujet: Re: [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James]   [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James] EmptyLun 7 Mai - 13:44:55

Aïlin observait James répondre à sa pique avec un air peu intéressé qui frisait l'insolence. Certes, James représentait un grand homme, particulièrement respecté dans la société. C'était une raison de plus pour démontrer que le rang de ses clients ne l'impressionnait pas. Un sourire amusé passa néanmoins sur ses lèvres lorsque son ami d'enfance effleura son nez de l'index, avec un air de renard qu'Aïlin lui avait connu lorsque son ami fomentait des plans extravagants et irréalisables pour se venger de leurs aînés qui n'avaient de cesse de les tourmenter. L'innocence de l'enfance en moins.
Bien qu'il n'en laissait rien paraître, sa curiosité redoubla lorsque le représentant de McGregor chercha un objet dans sa poche. Tiens donc, on avait pris le soin d'apporter quelque chose à même d'éveiller son intérêt ? C'était très avisé, il n'y avait rien de tel que de déposer quelque précieux objet entre les mains de son interlocuteur pour dédoubler ses chances d'obtenir une réponse positive de sa part. Légèrement méfiant, Aïlin se pencha en avant pour se saisir de l'écrin que lui tendait James. Il le fit tourner entre ses doigts, puis l'ouvrit avec délicatesse. Une exclamation appréciatrice lui échappa lorsqu'il reconnu la pierre rare que renfermait le réceptacle. De la shungite ! C'était une pierre qui ne se trouvait pas partout, et dont la puissance magique n'était plus à prouver. Cette magnifique pierre noire renfermait un élixir aux propriétés particulièrement redoutables contre les effets néfastes des maléfices et des sortilèges. Tout ce que les contre-sorts et les potions actuelles ne savaient pas soigner, l'élixir de shungite en avait le pouvoir. La simple présence de la pierre dans une maison ou autour du cou avait d'étonnants effets protecteurs et revitalisants. Associée aux bons charmes de protection, elle faisait un outil de défense particulièrement efficace. D'ailleurs, on racontait quelques légendes à propos de ces effets. On racontait les pouvoirs étonnants d'un fourreau de baguette composé de shungite, qui permettait à son possesseur de ne jamais voir sa baguette se briser. Plus encore, on disait que le propriétaire de cette relique ne pouvait être arrêté par aucun maléfice de magie noire. L'Histoire comptait aussi le récit d'une vieille sorcière qui avait déposé cette pierre sur le pas de sa porte pour se protéger d'un mage noir qui lui voulait du mal. Celui-ci avait subi un terrible retour de flamme des envoûtements qu'il avait incanté à l'encontre de cette sage dame. On disait, depuis, que là où la shungite veillait, le mauvais œil ne rentrait pas. Un seul échantillon permettait de préserver son foyer ou sa personne des énergies négatives pour des décennies. Seuls les sorciers les plus riches avaient eu le bonheur de l'avoir entre les mains, correctement préparée pour remplir sa fonction.
L'alchimiste sortit un mouchoir de soie noire de son veston, un accessoire qu'il réservait seulement à la manipulation des pierres et qu'il conservait sur lui la plupart du temps, puis attrapa la petite pierre pour la faire briller sous les éclats du feu de cheminée. Il contempla les reflets rosés sur la pierre, qui prouvaient qu'il ne s'agissait en aucun cas d'une contrefaçon, et qu'elle provenait d'un minerai de haute qualité. Aïlin était curieux de savoir où Xenophius McGregor s'était procuré la petite merveille. S'il parvenait à connaître la région où il l'avait obtenue, le jeune Bower songeait à envisager un petit voyage de curiosité...


« Cela commence à devenir intéressant... »
Murmura-t-il en relevant les yeux en direction de James, qui admirait négligemment ses ongles. Renard, c'était bien le terme qui convenait à son vieil ami. Il était persuadé qu'à présent, il coûterait trop à Aïlin de refuser sa proposition et peut-être même celles qui étaient à venir, si elles s'avéraient aussi intéressantes.
« L'élixir de shungite ne s'obtient en effet que par le travail d'un alchimiste, je connais la théorie. Néanmoins, la pratique est bien plus fastidieuse. La première phase du processus prends trois mois au minimum, si l'on ne se permet aucune marge d'erreur. Il consiste en l'extraction de l'eau de shungite pure, qui engendre, d'ailleurs, la destruction de la pierre. Une seule pierre de cinq centimètres de diamètre peut produire près d'un litre d'élixir à l'état brut, si l'on s'y prend dans les règles de l'art... Autrement, c'est à peine quelques centilitres, ce qui explique sa presque inexistence sur le marché et dans les hôpitaux... avec, bien sûr, le manque considérable d'alchimistes pour pratiquer une telle opération. Quant à l'affinement de l'élixir, il s'opère en trois mois environ. J'espère que votre patron est un homme informé à propos de ces pratiques, et pourvu d'une grande patience. »
Sourit Aïlin en reposant la pierre dans son écrin, qu'il referma et posa sur la table basse, entre eux deux.
« Personne, jusqu'à présent, n'a su trouver une méthode aussi sûre et plus rapide pour produire en masse. Si c'est ce qu'attend Monsieur McGregor, je salue l'audace de ce pari. »

McGregor était chanceux, car Aïlin trouverait également profit à travailler sur cette pierre. Ce profit, d'ailleurs, serait autant intellectuel que social. S'il parvenait à trouver un moyen d'extraire l'élixir de shungite d'une façon plus efficace que celle qui remontait, ni plus ni moins, à Roger Bacon, au XIIe siècle, il était assuré de voir son nom en première page des journaux scientifiques les plus prestigieux. Que McGregor ne désir un élixir que pour son usage personnel n'était pas un problème. S'il avait la possibilité de mettre la main sur un minerai de shungite, Aïlin n'en resterait pas à ce simple travail. Mais avant de rêver qu'il touchait la lune, l'alchimiste devait penser à un arrangement qui lui serait en tout point profitable. Il se pencha légèrement vers James, tout à fait sérieux, cette fois.

« Mes derniers contrats vont arriver à leur terme d'ici la fin du mois de Février pour l'un, et le mois de Mars ou Avril pour le second. Avant cela, je ne peux commencer les premières opérations sur les pierres qu'il me fournira, car ce travail demande d'être exclusivement réservé à cette tâche. Néanmoins, ce laps de temps me permettrait d'entamer des recherches qui sauraient mettre à jour mes connaissances en la matière. Voici mes disponibilités, que vous pourrez transmettre à votre employeur. Quant aux conditions... Ma foi, j'accepterais volontiers de me mettre à votre service si Monsieur McGregor accepte de me fournir les adresses où il se procure la shungite, et de me laisser disposer des minerais dans lesquels elle est extraite. La conception de l'élixir, qui comprend environ cinq ou six mois de travail, revient en général à 1200 gallions mensuels auprès d'un alchimiste, mais si M. McGregor souhaite des travaux plus poussés afin de faciliter l'extraction du produit, cela risque de me prendre plus de temps et d'implication encore, ce qui, inévitablement, engendrera une hausse des frais à sa charge. J'imagine que ce n'est pas un problème pour un tel homme, mais j'accepterais de rester à ce prix s'il accepte ma première condition. »

Après ce long discours, Aïlin se réinstalla confortablement et bu une gorgée de whiskey, sans quitter James du regard. Il était curieux de connaître sa réaction. Bien que James ne lui avait encore rien dit, Aïlin ne parvenait pas à imaginer qu'il ne s'agisse d'autre chose que de lancer l'élixir sur le marché. C'était l'occasion rêvée pour Aïlin de se distinguer.

« Qu'en pensez-vous ? Bien sûr, avant de s'aventurer plus loin dans cette discussion, je pense qu'il convient de mettre au clair les attentes réelles de votre patron. »
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  • James Kirkby
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MessageSujet: Re: [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James]   [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James] EmptyJeu 10 Mai - 21:11:40



Aussi loin que remontaient ses souvenirs, James avait toujours connu cette expression si typique sur le visage d'Aïlin – un air de grande patience que ne démentait qu'une lueur dans son regard. Lorsqu'ils complotaient ensemble contre leurs aînés, le jeune Bower avait cette même façon de le regarder s'il tardait un peu à révéler ses plans. Avide de savoir, mais rétif à poser des questions, puisque – ils en étaient d'accord – avouer son ignorance, c'était se reconnaître inférieur. Leurs petits jeux étaient autant de compétitions implicites, aucun des deux garçons n'acceptant que l'autre puisse prendre l'ascendant plus de quelques instants. Il n'y avait jamais eu de chef dans leur binôme, sinon ponctuellement, lorsqu'une mission anti-grands exigeait une plus grande discipline. Le reste du temps, ils veillaient à rester rigoureusement égaux, et cela passait par certains codes qui leur revenaient naturellement aujourd'hui. Ils étaient passés experts dans l'art de feindre l'indifférence ou de distiller les informations au compte-goutte, simplement pour se jouer de la patience de l'autre. Aucune de leurs conversations n'avait l'air sérieuse, tant ils mettaient de soin à donner le change. Leurs pères n'avaient d'ailleurs probablement jamais soupçonné leur complicité : lorsqu'on les observait, ils semblaient distants, presque méfiants. Ils avaient, du reste, longtemps jugé préférable de laisser leurs pères croire qu'ils ne faisaient que se tolérer ; avec Devin et Thomas plus qu'avec quiconque, pour vivre heureux, mieux valait vivre caché.

Il était amusant de voir comme, des années après leur dernier complot, les réflexes de leur enfance leur revenaient. Sans le verre de whisky qu'il tenait à la main, James aurait presque pu se croire ramené dix ans auparavant. Son ami jouait à merveille le rôle de l'homme qui ne s'intéresse à la conversation que par pure politesse, mais qui ne vous fera pas l'aumône d'une question. Son regard brillait, pourtant, et il brilla encore plus lorsque l'écrin parut. James le lui donna négligemment, avec l'indolence d'un joueur de poker certain de son effet abattant une carte maîtresse ; la shungite était une pierre assez précieuse pour intriguer Aïlin, et alchimiste surpris est à moitié dans ton lit. Comme prévu, il reconnut la pierre – le contraire eût été décevant, mortellement décevant – et se lança dans quelques explications. James, qui avait été informé des particularités de la shungite, il suivit les propos de son ami en hochant la tête ; oui, il savait tout cela, et ce n'était pas ce qui l'intéressait. Qu'on en vienne au fait... Mais maintenant qu'il avait la pierre en main et qu'il entrevoyait le fin mot de l'histoire, Aïlin était bien moins curieux. Il examinait la pierre, faisait miroiter ses reflets à la lueur du feu, avec toute la passion d'un connaisseur tombé sur un objet rare.

Enfin, il exposa ses conditions. Exorbitantes, comme prévu – Xenophius en était conscient, les alchimistes étaient rares et facturaient leurs prestations au prix fort. Mais quand on possédait un compte aussi bien rempli, on n'était pas à quelques poignées de Gallions près... d'autant que ce serait certainement un investissement très juteux. Le jeune homme s'attendait à des exigences astronomiques, maisil s'accorda tout de même quelques instants de réflexion avant de répondre, lentement :

-Il se trouve qu'un gisement de shungite a été découvert sur l'un des domaines de monsieur McGregor. L'endroit, vous vous en doutez, est désormais hautement sécurisé, mais vous pourrez y pénétrer. À une condition : vous devrez signer un document par lequel vous vous engagerez à respecter un certain délai avant de publier quoi que ce soit concernant vos recherches. Car c'est bien de recherches qu'il s'agit. Monsieur McGregor aimerait que vous parveniez à améliorer l'extraction de l'élixir. Il est conscient du temps que cela prendra, et il est prêt à souscrire à vos conditions, à condition que vous souscriviez aux siennes. Vous comprendrez qu'il désire rentabiliser son investissement avant de vous permettre de publier vos recherches... Voyons, six mois après la fin du contrat, cela vous paraît-il honnête ?

Six mois, ce n'était même pas le temps qu'il fallait pour achever un travail scientifique d'envergure – et Aïlin devrait rédiger une véritable thèse, s'il parvenait à trouver une nouvelle méthode d'extraction de l'élixir ; un simple article ne suffirait pas, sous peine de voir un autre alchimiste s'engouffrer dans la brèche et s'approprier la découverte. En revanche, en six mois, Xenophius aurait largement le temps d'inonder le marché, et d'amortir le coût de l'opération... McGregor était même prêt à financer les six mois de délai, tant le silence d'Aïlin revêtait d'importance à ses yeux – et comme rien ne se perdait, il pourrait ainsi s'honorer du titre de mécène d'un jeune chercheur en vue. Le gain symbolique valait bien la peine de lâcher quelques Gallions de plus.
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MessageSujet: Re: [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James]   [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James] EmptyJeu 14 Juin - 14:01:49

Un silence suivit les conditions qu'avait exposé James. Aïlin demeurait confortablement installé contre le dossier de son fauteuil, imperturbable, mais en réalité, il bouillonnait intérieurement. On lui proposait enfin un travail honnête et véritablement enrichissant intellectuellement. La chance, personnifiée en cet intermédiaire qu'était James, lui souriait. Il ne fallait surtout pas louper l'occasion. Les conditions lui semblaient honnêtes, il se doutait bien qu'une clause de confidentialité devrait être signée. Pure stratégie économique. Néanmoins, il devait profiter de toutes les brèches, afin que le contrat lui soit au mieux profitable. Il risquait de travailler sur l'élixir le reste de l'année si ce n'était plus, et mettre certainement de côté sa thèse sur la panacée. Il était déjà assuré d'avoir une contribution de mille deux cents gallions par mois, ce qui était déjà beaucoup. Bien sûr, il aurait pu demander plus, mais ce qui l'intéressait étaient les gisements de McGregor plus que son argent. Un alchimiste plus cupide, comme l'était ce Norvégien, Jakobsen, aurait demandé une somme proprement astronomique pour s'occuper exclusivement de ce genre de recherches. Aïlin pouvait profiter de sa richesse pour baisser, en apparence, le prix de ses services. Trouver une autre monnaie d'échange était plus intéressant. Quelle marge de manœuvre lui restait-il face aux conditions de Xenophius McGregor ? Six mois serait une éternité lorsque l'élixir s'écoulera en grande quantité sur le marché. Le petit monde scientifique bouillonnera et tentera à tout prix d'en savoir davantage sur cette nouvelle méthode d'extraction qui permettait tant de bénéfices. Les hôpitaux seront les premiers demandeurs et ils chercheront à s'emparer de la formule afin de produire leur propre élixir dans leurs locaux destinés aux recherches. Une véritable marée de curieux allaient lui tomber dessus.

« Hm... » Marmonna Aïlin, en laissant délibérément traîner le suspens.
Il but une nouvelle gorgée d'alcool et reposa son verre, puis sortit sa baguette magique, sans toutefois s'en servir.

« Je comprend les conditions de Monsieur McGregor, elles sont avisées. Passé ce délai, il me faudra déposer un brevet avant de publier une partie de mes recherches, et à ce moment, beaucoup d'intéressés s'immisceront dans la brèche pour le racheter et produire leur propre élixir... Il me vient une proposition que votre patron jugera peut-être plus judicieuse, car elle servira bien mieux ses intérêts... »

Comme lorsqu'ils n'étaient que des enfants, Aïlin laissa encore passer un instant de silence en réprimant un sourire amusé. L'éclat impatient dans les yeux de son ami était quelque chose qu'il avait toujours aimé attiser. Il était sûr, dans ces moments là, qu'il avait la pleine attention de l'ancien Serdaigle et que sa réaction serait à la mesure de la proposition qu'il allait lui faire. Il ne résista pas à l'idée de faire attendre davantage son interlocuteur.

« Savez-vous pourquoi aucun alchimiste n'a encore su composer une pierre philosophale, malgré la réussite avérée de Nicolas Flamel ? En vérité, Monsieur Flamel avait déposé un brevet sur la conception de sa pierre philosophale. Un brevet demeuré secret, et bien qu'il fut déposé en étant seulement partiellement complet, aurait fait engager de lourdes peines à celui qui tenterait de s'en servir. Quant à la formule, elle est demeurée cachée pendant près de six cents ans et a été détruite à sa mort. Dans son testament, qui avait été rendu public en partie, si vous vous en souvenez, Flamel écrivait qu'il estimait que la recherche et l'acquisition de la pierre philosophale était une voie unique, personnelle à chaque individu et qu'un véritable alchimiste ne se baserait jamais sur les travaux des autres plutôt que sur sa propre intelligence. Peu importe ceci, néanmoins, cette pensée m'inspire l'idée que Monsieur McGregor verra son mécénat bien plus fructueux s'il consent à donner son accord sur un dernier point de détail.
Admettons que je m'engage à tenir le secret de la formule pour au moins six mois après l'achèvement du contrat. Au terme de ces six mois, le brevet m'appartiendra et Monsieur McGregor n'aura plus aucun droit sur la formule.
Je vois les choses autrement. Je propose de déposer le brevet aussitôt, mais signé également par Monsieur McGregor, qui en sera, de fait, le second titulaire. Il sera libre, ensuite, de le revendre aux entreprises intéressées, sans que je n'ai à m'en mêler si ce n'est pour apposer une simple paraphe sur le contrat. En retour, j'attends, disons... dix pour cent des bénéfices engendrés sur les ventes et je compte à ce que Monsieur McGregor, s'il choisit de partager le brevet à moyen-terme, privilégie les centres de recherches sérieux et les hôpitaux. Il ne faut pas oublier qu'un tel élixir, mieux diffusé, pourra soigner des malédictions contre lesquelles nous sommes aujourd'hui sans ressources, et je tiens à ce que la formule puisse profiter à la société. »


Aïlin ne jouait le bon samaritain, soucieux des bénéfices de son commanditaire, que par intérêt. Il n'y avait là aucune candeur, ni aucun souci pour les affaires de McGregor. Néanmoins, cette proposition, qui lui semblait particulièrement honnête, lui permettrait non seulement de s'attirer les bonnes grâces de ce puissant sorcier, mais il était par la même occasion débarrassé des déboires auquel il pensait en grimaçant, un peu plus tôt. Si Xenophius partageait officiellement la paternité de la formule, on se tournerait vers lui plutôt que vers Aïlin pour en obtenir l'usage, et McGregor agirait au mieux. Il était assuré d'écoper de bons bénéfices sur les rentes engendrées par les achats, sans avoir à jouer l'homme d'affaire. Rôle qui l'ennuierait passablement sur le moyen terme. Ainsi, l'alchimiste pourrait se consacrer à de toutes autres recherches lorsque le contrat serait échu, sans se soucier de ce que deviendrait le brevet. Il reconnaissait volontiers que McGregor se montrerait bien plus brillant dans ces sortes de négociations que lui, et il lui cédait ce rôle de bon gré.

« Si tout cela vous semble honnête, permettez-moi de le poser sur le papier afin que votre patron puisse lire ces conditions à son gré, et signer en ayant bonne conscience de mes attentes. »

Sur ces mots, le jeune lord agita sa baguette magique pour faire apparaître sur la table basse un rouleau neuf de parchemin, une plume et un encrier. Il récita alors l'incantation qui permettait de rédiger magiquement un contrat, sans que les termes ne puissent être effacés ou modifiés, le relu à haute voix et le signa, avant de le tendre à James.

« Je crois que c'est la meilleure offre à laquelle nous puissions aboutir, n'est-ce pas ? À présent, si vous ne voyez pas d'autres ombres sur notre arrangement, je vous propose de passer à table. Je regretterais de vous servir un dîner froid. »

Un sourire charmant flotta sur ses lèvres, bien que l'étincelle malicieuse qui éclairait son regard ne s'était pas éteinte. Aïlin était plutôt fier de cette négociation, et il était heureux qu'elle se soit déroulée avec son vieil ami, dont la présence, apparemment, l'inspirait pour concevoir toutes sortes de projets. Aujourd'hui, les contrats juteux remplaçaient leurs jeux d'enfants. C'était là l'unique différence qui les séparait des années qu'ils avaient passé à se côtoyer à l'ombre des arbres du jardin des Bower.
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MessageSujet: Re: [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James]   [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James] EmptyMer 27 Juin - 21:41:03

Que pouvait bien penser Aïlin ? Son verre de whisky au bord des lèvres, parfaitement immobile, James scrutait son ami pour essayer de déceler quelque indice, mais l'Irlandais savait désormais conserver un visage lisse... Pas comment quand ils étaient enfants, et que la moindre de leurs impatiences ou de leurs pensées se lisait sur leurs traits. Tous deux avaient appris, les années passant, à s'abriter derrière un visage impassible ; nécessité fait loi, et lorsqu'un simple battement de cils peut valoir une volée, la dissimulation devient vite un impératif...Ils avaient grandi dans des familles étrangement similaires sur ce plan, dans l'ombre de pères volontiers tyranniques, et prompts à châtier tout écart de leur progéniture... James se rappelait encore sa terreur lorsqu'il comprenait que son visage l'avait trahi, avait laissé entrevoir quelque insolence pourtant soigneusement tue, et que son père débouclait son ceinturon pour « lui apprendre »... Il ne servait à rien, alors, de se terrer dans un angle, de se faire aussi minuscule que possible ; rien n'empêchait les coups de tomber dru sur le fautif ; alors que la parfaite maîtrise de ses expressions permettait de se payer le luxe d'échapper à toute punition en pensant les pires horreurs, les yeux dans les yeux de son bien-aimé géniteur. Du jour où il avait su se composer un visage neutre, James n'avait quasiment plus reçu de correction de la part de Thomas, qui s'était félicité d'avoir si bien su plier son fils à ses volontés, sans imaginer un instant qu'il en avait simplement fait un dissimulateur. Aïlin avait probablement suivi le même chemin, à quelques variations près – Devin était plus amateur de Doloris que de coups de ceinturon, c'était la principale divergence pédagogique entre les deux hommes, mais le résultat était là : leurs fils étaient désormais maîtres dans l'art de passer sous silence leurs émotions, et, à cet instant, James le regrettait un peu. Bien sûr, il n'allait pas tarder à savoir ce qu'Aïlin pensait de sa proposition ; mais il était tellement plus amusant de tenter de déceler sa réponse avant qu'il ne la formule, en observant son visage...

Enfin, le jeune Lord Bower parla. Si l'on pouvait appeler cela parler : il émit un simple monosyllabe, juste pour montrer qu'il était toujours dans la conversation, mais il attendit encore un peu avant de répondre réellement. James ne l'avait pas vu depuis longtemps, mais il ne connaissait assez pour savoir qu'il devait s'amuser de son impatience ; il suffisait de le voir guetter chaque réaction de son invité, faire traîner délibérément sa réponse, pour s'en convaincre. James se décida enfin à boire une gorgée de son whisky : puisque Bower avait l'intention de le faire attendre, autant en prendre son parti, et patienter à l'aise. La digression sur Flamel l'agaça un peu, mais c'était bien dans les façons de son ami, et il écouta sagement la petite mise au point historique. Puis, ne trouvant plus d'autres chemins sinueux à emprunter, l'alchimiste se décida à cracher le morceau. James se redressa, les coudes posés sur les genoux, très attentif àsa proposition. Il y avait toutes les chances pour que Xenophius soit intéressé par cet arrangement – même si cela impliquait de poursuivre la négociation, et donc de perdre quelques jours.

-Je soumettrai votre proposition à mon patron, Aïlin... C'est tout à fait honnête, je pense que cela peut lui plaire.

Aïlin entreprit de rédiger l'accord qu'il venait d'exposer ; il y eut quelques instants de silence, à peine troublés par le grattement de la plume sur le parchemin, que James mit à profit pour vider son verre de whisky. Il se sentait plutôt satisfait : les choses avaient bien avancé, et il avait eu le plaisir de renouer avec ce vieux filou de Bower : d'une pierre deux coups. La pensée le fit sourire, et il referma d'un geste doux l'écrin de la shungite qui se trouvait toujours sur la table ; les ordres de Xenophius étaient clairs, l'alchimiste ne devrait avoir la pierre en sa possession qu'une fois le contrat signé. Il remisa la petite boîte dans la poche intérieure de sa veste, tandis que son ami paraphait le contrat ; il en écouta la lecture, puis empocha la feuille en souriant.

-Je crois que nous allons faire de fructueuses affaires ensemble, Aïlin. Je vous transmettrai la réponse de Monsieur McGregor au plus vite, pour que vous puissiez commencer votre travail, mais pour moi, sa décision ne fait aucun doute. Votre proposition l'intéressera sans doute.

Il tapota sa veste à l'endroit où se trouvait le parchemin, et hocha la tête, l'air sûr de lui, avant de se lever à la suite de son ami :

-Les affaires étant désormais réglées, il ne nous reste donc plus qu'à profiter de cette soirée de retrouvailles entre amis, Aïlin... Je vous remercie encore pour votre invitation, d'ailleurs. C'est un vrai plaisir de revenir ici, tant d'années après nos premiers forfaits ensemble.

Une odeur délicieuse flottait dans l'air depuis un petit moment. Certainement quelque chose qui saurait faire oublier le froid de l'hiver irlandais, songea James avec un sourire.
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  • Aïlin Bower
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MessageSujet: Re: [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James]   [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James] EmptyVen 13 Juil - 20:21:35

L'agacement qu'avait suscité à dessein Aïlin en James s'évapora aussi vite que la surface des eaux du Lac qui bordait le Manoir, lorsqu'un de ces rares jours de soleil éclatant illuminait le ciel. Sa proposition, particulièrement intéressante pour tous les partis concernés, valait bien les détours empruntés et les longues secondes d'attente impatiente. Aïlin se plaisait à tourner gentiment en bourrique son ami d'enfance, parce qu'il savait que ce qu'il avait eu à dire valait largement une minute de peine, mais pas seulement. C'était, en quelques sortes, sa façon de montrer à James son meilleur profil, celui qu'il n'avait pu laisser entrevoir que trop rarement, alors qu'ils étaient jeunes. Autrefois secret, réservé et incertain, le jeune lord était devenu ce qu'il avait toujours rêvé de devenir, ceci à quelques détails près. Il n'aurait imaginé, lorsqu'il n'avait que treize ans et rêvait d'une vie meilleure, qu'il devrait pour cela devenir un assassin, qu'il sombrerait dans les affres de paradis toxiques, et qu'il projetterait de sang-froid de tuer encore une fois, sans l'ombre d'un regret ni d'un scrupule. Il ne s'était pas imaginé, non plus, se transformer en un parfait dissimulateur, prêt à manipuler et à mentir pour conserver sa tranquillité ou parvenir à ses fins. Ces défauts, il les avait toujours réservé à ses frères, bien à tort. Il avait toujours été un jeune homme qui, sous couvert d'honnêteté, terrible paradoxe, passait son temps à cacher ce qui vraiment valait la peine d'être dit. Il devait bien l'avouer, si Clarisse en avait fait les frais, la relation qu'il entretenait avec sa sœur n'avait pas non plus été épargnée par cette tendance particulièrement désagréable pour qui en était la victime. Palabrer, perdre son interlocuteur dans des sujets sans véritable rapport pour mieux le ramener à ce qu'il désirait entendre ou obtenir, étaient devenus des qualités nécessaires pour le bien de sa carrière et de sa réputation. Aïlin avait transformé ses défauts en force. Bien sûr, face à James, cela n'était qu'un simple jeu. Il savait que de toutes façons, l'intermédiaire que Kirkby était s'avérait ravi de la tournure de la négociation.

Bien évidemment, James répondit avec enthousiasme, et Aïlin acquiesça avec un air relativement satisfait. Son sens de la mesure l'empêchait de se montrer davantage enthousiaste. L'exubérance n'était pas dans son registre, et aurait d'ailleurs été malvenue. Il allait sans dire, cependant, qu'il jubilait intérieurement, heureux de trouver enfin une étude à la mesure de ses compétences, et qui reflétait tout ce qu'il avait toujours désiré entreprendre avec l'alchimie. C'était une belle victoire qu'Aïlin n'avait pas osé se promettre avant bien longtemps, et le fait qu'un homme comme McGregor s'intéresse à ses travaux aussi vite était le meilleur présage qu'il puisse avoir pour son avenir. Ce simple nom ne manquerait pas de lui faire la plus belle publicité.
Heureux pour lui-même, l'alchimiste se leva souplement de son fauteuil et laissa James en faire de même. Un sourire chaleureux lui échappa sans qu'il n'y prête attention, à la remarque que lui fit son ami d'enfance.


« Je vous en prie, James. C'est le moins que je puisse vous proposer. Je suis heureux de pouvoir vous inviter à ma table sans que nous nous trouvions, cette fois, dans l'obligation de dîner dans la neige. »

Rétorqua-t-il avec un humour à froid. Son regard glissa une courte seconde sur James pour s'assurer que sa remarque sur le passé et les circonstances qui les réunissaient n'assombrissent pas l'humeur de son hôte, puis il lui fit signe d'avancer dans le couloir, plutôt que d'entrer dans la vaste salle à manger du manoir.

« Je vous propose de dîner dans le salon privé, cela sera plus agréable. Il n'y a rien de plus informel que les grandes tablées vides. »

Le jeune lord ouvrit une porte au fond du couloir, passant à côté d'une immense peinture moderne qui recouvrait le mur du fond de sa toile. Cette peinture, d'un grand artiste sorcier, constituait aux yeux des radicaux le comble du mauvais goût. L'artiste s'était inspiré de l'art moldu pour concevoir son œuvre, et ni les couleurs savamment dosées, ni la profondeur du relief, ni la subtilité du tracé n'auraient grâce aux yeux d'un sang-pur intégriste. Aïlin n'en avait cure. C'était l'une des premières décorations qu'il avait fait installer au manoir, et en plus d'orner magnifiquement le haut mur qui courait jusqu'au plafond, elle était une ultime provocation adressée à la mémoire des derniers héritiers du manoir.
Aïlin et James entrèrent dans une pièce qui se trouvait derrière le salon principal, et qui n'était rien d'autre qu'une sale d'étude, dans laquelle séjournait un vieux pupitre usé par les âges, quelques bibliothèques remplies de cours notés sur parchemins, de manuels scolaires plus ou moins vieux, ainsi que des livres d'Histoire et de théorie sur les différentes branches de la magie. C'était la pièce, avec sa chambre, qu'Aïlin avait le plus côtoyé dans son enfance, et dans laquelle il s'était souvent réfugié en compagnie de James, lorsque leurs pères leur permettaient de rester à l'intérieur du manoir. Depuis, rien ou presque n'avait changé. Le souvenir lointain de Jenny leur apportant à tous deux un plateau de biscuits effleura sa mémoire, mais il disparut bien vite, trop lointain, trop fragile. Aïlin ne faisait d'ailleurs que passer par ici, et s'arrêta seulement pour ouvrir la porte au fond de la salle. Il laissa James entrer, puis le suivit en fermant derrière lui.
Ici, James n'était jamais venu par le passé. Cela n'avait été autrefois qu'un débarras dans lequel traînaient des artefacts de magie noire appartenant à Devin où à quelques-uns de ses amis, désireux de s'en séparer le temps d'une inspection. Aujourd'hui purifiée, la pièce était un salon coquet, dans lequel on pouvait prendre un repas dans une atmosphère plus chaleureuse que dans l'immense salle à manger. Le papier peint avait été refait, tout était neuf, mais semblait avoir toujours fait parti du décor. Le soleil pénétrait plus difficilement dans cette pièce mal orientée, mais de petits globes magiques, suspendus dans les airs, permettaient d'y voir clair sans se sentir agressé par une lumière trop éclatante, ou trop tamisée. D'un coup de baguette, Aïlin les alluma, et ils se mirent à brûler en tremblotant, semblables à un feu blanc, liquide. Le parquet rougeoyant était tapissé, le papier peint ocre, liseré de motifs jaunes pâles, conférait toute sa chaleur au salon privé. Des rideaux bruns, au drapé lourd, majestueux, tombaient de part et d'autre de l'unique fenêtre, et près d'elle, un canapé et une table basse ouvragée attendaient que l'on vienne s'y détendre, ou s'y reposer. Le jeune lord invita plutôt son ami à s'installer à la table carrée, aux pieds imitant les serres d'un aigle. Là les attendaient une des meilleures bouteilles de vin de la cave, un pichet d'eau ainsi qu'un verre à vin et à eau pour chacun. Aïlin fit se balancer la cloche de verre suspendue près de l'entrée, sans que celle-ci ne libère le moindre son. En revanche, il savait que les tintements de la cloche se propageaient dans la cuisine où Jenny attendait de se mettre au travail.
Le propriétaire des lieux s'installa face à son invité, et la vieille servante ne tarda pas à paraître avec quelques amuses bouches – canapés de saumon fumé, petits pains aux diverses saveurs et crab cakes dans lesquels ils pouvaient picorer à leur guise – qu'elle disposa devant les deux jeunes hommes. Elle agita sa baguette et la table se mit d'elle-même, puis elle servit le vin.


« Bon appétit, Messieurs. »
Sourit la vieille Jenny avant de repartir aussi discrètement qu'elle était venue, mais non sans adresser un rapide regard, chaleureux, à l'enfant qu'elle reconnaissait en James Kirkby. Un large sourire fendait son visage ridé lorsqu'elle referma la porte.

« Je crois que Jenny est heureuse de vous revoir. » commenta Aïlin avec un soupçon d'amusement. Il laissa deux courtes secondes de silence s'installer, avant de reprendre la conversation, sur une note plus personnelle.
« Ainsi, vous êtes maintenant au service de Monsieur McGregor. Je suppose que c'est une grande chance que de servir les affaires d'un tel homme ? »

Si James savait clairement ce que son ami d'enfance faisait maintenant de sa vie, il n'en était pas de même pour Bower. C'était, ni plus ni moins, une invitation qu'il adressait à James, afin que celui-ci lui raconte un peu ce qu'il était devenu. Une façon de renouer en s'intéressant à ce qu'était devenu l'ancien Serdaigle qu'il avait si bien connu autrefois. Bien qu'il abordait le sujet avec une certaine pudeur, Aïlin était curieux de savoir ce que faisait James, et s'il était satisfait de sa situation. C'était ce que lui souhaitait sincèrement Aïlin, après tous les évènements noirs que son compagnon d'autrefois avait traversé, autant dans son enfance que plus récemment, au vu des faits relayés par la presse quelques mois plus tôt.
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  • James Kirkby
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MessageSujet: Re: [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James]   [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James] EmptyDim 5 Aoû - 17:31:42

Marché conclu, place, désormais, à une bonne soirée entre amis. James suivit son hôte en se demandant depuis combien de temps il n'était plus venu au manoir Bower... Des années, à n'en pas douter. S'il avait suivi les visites de son père chez Devin dans son enfance, il était arrivé un moment où les deux hommes avaient jugé préférable de ne pas laisser leurs deux benjamins désormais adolescents se côtoyer de trop près. Ces deux mauvais sujets se voyaient déjà suffisamment à l'école, inutile de leur donner d'autres occasions de comploter ensemble. À vrai dire, Devin et Thomas soupçonnaient chacun le rejeton de l'autre d'avoir une mauvaise influence ; lorsqu'ils rentraient d'une journée au manoir Bower, Mr Kirkby senior trouvait son fils plus indiscipliné, plus enclin à répliquer, et, pire que tout, il voyait dans son regard plus de révolte contenue à grand-peine. Les heures passées à bavarder avec Aïlin, dans le calme du fond du parc, y étaient pour beaucoup ; lorsqu'ils étaient certains de ne pas pouvoir être entendus, ils pouvaient parler à cœur ouvert, et James laissait libre cours à ses sentiments. Il tremblait devant son père, et éprouvait à son égard un curieux mélange de haine et de ferveur. Il aurait tant aimé mériter ses compliments qu'il en venait à le détester, à force de ne recevoir de sa part que des réprimandes. Thomas était avare de félicitations, mais pointait au contraire chaque imperfection dans le comportement de ses fils ; non qu'il fût un mauvais père, mais lui-même avait été élevé de cette manière et il estimait que c'était la meilleure façon de faire de ses garçons des hommes dignes de ce nom. Il ne se rendait probablement pas compte que son plus jeune fils, sans oser se rebeller ouvertement, le haïssait de plus au plus au fil des ans, au point de fuir la maison dès qu'il l'avait pu... Il avait clairement compris, en revanche, qu'il était urgent de l'éloigner d'un ami aussi dangereux qu'Aïlin Bower. Lorsque deux gamins opprimés se trouvaient ensemble, on ne savait que trop bien ce que cela donnait... Les visites au Manoir s'étaient alors faites plus rares pour James, puis avaient complètement cessé alors qu'il devait avoir dans les treize ou quatorze ans.

Le jeune homme sourit lorsque son hôte parla de dîner dans la neige. Ce n'étaient que quelques mots anodins, mais pour eux, c'était surtout le rappel de ce samedi de décembre où leurs familles les avaient « oubliés » dans le parc. On avait constaté leur absence à la table du dîner, mais personne ne s'était affolé pour autant... C'était la servante Jenny qui avait fini par les récupérer, transis de froid, et qui les avait remis sur pied en leur servant une soupe brûlante, à la longue table de la cuisine. James avait toujours soupçonné les aînés, jamais en retard d'un mauvais coup, d'avoir verrouillé la porte d'entrée du Manoir exprès, mais les pères avaient simplement ri de la mésaventure des deux gamins. Eux-mêmes, avec le temps, avaient fini par en plaisanter, une fois la peur digérée... James ne releva pas la boutade, et il suivit, interloqué, Aïlin qui prenait la direction de la salle d'étude. Un salon privé ? Il n'y avait jamais mis les pieds... Le jeune Lord ouvrit une porte au fond de la salle d'étude, et laissa son invité découvrir une pièce de petites dimensions, mais accueillante et chaleureuse. Il prit place à la petite table, et approuva la sage décision de son hôte :


-Vous avez raison, nous serons mieux ici que dans une trop grande pièce où nos paroles résonneraient. Ce salon convient bien mieux aux retrouvailles de deux vieux amis.

La servante Jenny ne tarda pas à paraître, et James lui adressa un sourire sincère. Bien sûr, on lui avait toujours appris à ignorer royalement les domestiques, mais il était désormais libre de s'asseoir sur ces principes idiots, et Jenny méritait bien quelques égards. Elle les avait si souvent accueillis dans sa cuisine où elle les laissait se gaver à leur guise – ou, encore pire, l'aider à cuisiner ! Heureusement pour elle, leurs velléités culinaires ne duraient jamais bien longtemps, et ils repartaient très vite, les poches pleines de biscuits...

La vieille servante disposa quelques fins amuse-bouches devant les deux jeunes hommes, et on sentait qu'elle se retenait, comme au bon vieux temps où elle les faisait déjeuner à l'écart des adultes, de vérifier que leurs serviettes étaient bien en place. Elle leur souhaita bon appétit, et s'éclipsa ; James piqua un crab cake, et hocha la tête lorsqu'Aïlin lui dit que Jenny était contente de le revoir. Lui aussi avait plaisir à retrouver cette figure de son enfance, et à constater qu'elle était toujours aussi alerte et serviable. Il dégusta son crab cake, tandis qu'Aïlin l'interrogeait sur ses activités au service de Xenophius. Il prit le temps d'avaler une gorgée de vin rouge avant de répondre :

-Oui, je suis au service de Xenophius McGregor... Il est mon parrain, et me trouve quelque talent pour les affaires, précisa-t-il d'un air modeste. Je travaille pour lui depuis plusieurs mois à présent, et je dois vous avouer que c'est une bonne place. Monsieur McGregor m'apprend énormément de choses, en matière d'affaires comme de magie. À vrai dire, il a été un second père pour moi, et je suis d'autant plus satisfait de ma situation actuelle qu'elle me permet de travailler pour un sorcier que j'estime beaucoup.

Il avait eu une expression furtive d'amertume en répondant, mais ses derniers mots n'en portaient plus trace ; au contraire, il avait parlé avec la satisfaction de celui qui a enfin trouvé une stabilité longtemps recherchée. Il piocha encore un canapé au saumon dans le plat avant de reprendre :

-Je pense avoir trouvé une situation qui me convient, mais j'ai beaucoup erré avant... J'ai été coursier au Ministère de la Magie, puis mon père m'a fait entreprendre des études à l'université... j'ai abandonné ces études à sa mort et je suis entré comme apprenti chez Ollivander, que je viens de quitter... Et maintenant, je suis dans les affaires. Enfin, vous voyez, j'ai touché à tout, conclut-il en souriant.
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MessageSujet: Re: [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James]   [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James] EmptySam 18 Aoû - 14:32:47

Pendant une fraction de seconde, Aïlin devina sur le visage de son ami une amertume qui semblait contredire les propos plutôt positifs que James lui tenait. Comme autrefois, Kirkby ne révélait jamais qu'une partie de ce qu'il pensait et, comme autrefois, Aïlin s'en trouvait intrigué. Il ignorait dans quelle mesure James était honnête avec lui, et il savait que ses spéculations ne le mèneraient pas à la vérité. Son ami d'enfance était aussi bon dissimulateur que lui, il était inutile de chercher à en savoir plus que ce qu'il voulait bien lui révéler. De toute façon, le récit de ses déambulations professionnelles détourna bien vite Aïlin de ses interrogations. Lorsque le nom d'Ollivander fut prononcé, les yeux de Bower s'agrandirent d'intérêt, un court instant seulement. Ainsi, James avait été initié à l'art de la conception des baguettes. Cette opportunité semblait tomber du ciel, alors qu'Aïlin cherchait depuis des jours un moyen de ne pas laisser de traces du meurtre de Carpenter sur son arme. Si les aurors remontaient d'une façon ou d'une autre à lui, sa baguette le trahirait. Mais une seconde, dont il se débarrasserait ensuite... Une réplique exacte de celle qu'il possédait déjà, confectionnée pour un unique usage... Il ne pouvait pas laisser passer cette chance. Néanmoins, il ne pouvait décemment pas révéler à James l'usage qu'il en ferait. C'était trop risqué.

« En effet, je vois que vous avez su diversifier les expériences... »

Sourit Aïlin en oubliant le petit pain qu'il avait attrapé entre ses doigts en écoutant son ami, seul signe que quelque chose dans le discours du jeune homme avait particulièrement retenu son attention.

« Je n'ai pas été si mobile, pour ma part. Père souhaitait me voir suivre ses pas à l'ambassade, autrefois, mais cette carrière ne m'a jamais intéressé. Je n'aurais d'ailleurs pas supporté une année d'étude de plus. On s'y ennuie et s'y encombre l'esprit de trop d'informations futiles. »

Bower croqua finalement dans l'amuse bouche et s'essuya distraitement les doigts sur le bord de sa serviette, sans se soucier de la marque de mépris ouvert, peut-être surprenant, dont il avait fait montre.
Malgré sa réputation plus qu'honorable, Aïlin n'avait envisagé qu'avec répugnance l'idée de suivre une filière à l'UMA. Dès sa sixième année, le cursus scolaire avait fini par l'ennuyer, le trouvant trop surfait, chargé de matières et de programmes dépourvus de véritable intérêt intellectuel ou pratique. Puis l'ennui s'était transformé en aversion et en dégoût, renforcés par l'enrichissement philosophique et culturel qu'il découvrait dans l'art alchimique. C'était vite devenu pour Aïlin une branche reine de la magie, bien plus passionnante que toutes les autres voies auxquelles il s'était intéressé. Ici, la science se mêlait à un cheminement moral et intellectuel, les différentes composantes de la personnalité du chercheur avaient chacune leur importance. La magie revêtait une forme de spiritualité qui ne pouvait grandir qu'avec la maturité acquise dans les autres facettes de l'entendement humain. Tout était lié, et si le chemin était plus long, il était aussi plus équilibré que dans toutes autres formes de magie. Face à ces considérations, Aïlin estimait comme absurde que cette voie n'ait jamais été enseignée à Poudlard, faute d'élèves véritablement intéressés à cause de préjugés qui l'assimilaient à la magie noire. Raison de plus pour conclure que les études n'étaient source d'aucune élévation morale. Cela dit, Aïlin but une gorgée de vin et se tourna vers le sujet qui l'intéressait maintenant le plus.


« Vous avez été chanceux d'apprendre l'art des baguettes auprès d'Ollivander. C'est un sorcier des plus talentueux dans son domaine, son enseignement a dû être passionnant, même si cela n'a pas été une révélation pour vous. C'est un domaine qui m'a toujours fasciné, tant nos baguettes sont capables de nous réserver des surprises. »

Aïlin avait parlé sur un ton presque badin et adressait à présent un sourire enthousiaste à son interlocuteur, comme s'il venait soudain de lui venir une réflexion.

« D'ailleurs, c'est un drôle de hasard, je m'interrogeai justement, il y a quelques jours, au sujet de ma baguette... Peut-être sauriez-vous me répondre. Je me demandais si la réplique exacte d'une baguette pouvait s'approprier le même sorcier que l'originale. On dit que chaque baguette a son caractère propre, mais celui-ci est influencé par les matériaux qui la compose. »

Le lord rajusta le niveau de leur verre afin de ne laisser transparaître rien d'autre sur son visage qu'une interrogation curieuse, dépourvue d'objectif particulier. Il ne porta à nouveau son attention sur James que lorsqu'il leva son verre, pour faire tourner doucement le vin, dont la robe chatoyait lorsqu'elle rencontrait une parcelle de lumière. Il attendit que James porte son vin à ses lèvres pour en faire de même, mais il n'apprécia pas l'alcool qui courait sur son palais, trop absorbé par ses réflexions, s'interrogeant sur la façon d'obtenir les services de James sans trop éveiller sa curiosité. Bien sûr, il faisait confiance à son ami pour ne pas se montrer trop regardant quant au but qui se cacherait derrière sa demande, et respecterait certainement le silence de son hôte, mais par égard envers lui, il préférait éviter de montrer qu'il le laissait délibérément dans l'ombre.
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  • James Kirkby
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MessageSujet: Re: [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James]   [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James] EmptyDim 26 Aoû - 9:23:42

Il était particulièrement étrange de résumer en quelques phrases banales plusieurs années assez mouvementées. James trouva les mots incongrus lorsqu'il le prononça, mais il espéra qu'Aïlin ne s'en rendrait pas compte. Après tout, il ignorait les points les plus sombres du curriculum de son ami, l'engagement chez les Mangemorts, la désertion, les représailles diverses qu'il avait subies, et même la façon pour le moins brutale dont Xenophius l'avait contraint à travailler pour lui. Depuis quelques années, en réalité, toute la vie de James s'était déroulée sous quelque menace, et il commençait seulement à présent à trouver la paix ; les choses avaient fini par s'apaiser avec Xenophius, et ce n'était plus la crainte qui le retenait au service du chef de clan, mais surtout la certitude de bénéficier de sa protection. De fait, il vouait désormais une affection réelle à McGregor, mais il n'oubliait pas de quelle violence physique et morale il pouvait être capable pour se faire obéir. Aïlin, bien sûr, n'avait pas besoin de connaître tous ces détails, de même qu'il n'avait pas besoin de savoir d'où venait la légère boiterie dans la démarche de son vieil ami. Pour l'heure, on en resterait aux informations essentielles, et certains points seraient pour toujours passés sous silence. Seul un infime changement dans la physionomie, au détour d'une phrase, seul un ton un peu plus amer pourrait indiquer que les mots cachaient une réalité plus douloureuse. Aïlin eut d'ailleurs le bon goût de ne pas questionner son ami, et se contenta d'une brève remarque qui ne mangeait pas de pain avant de résumer, très brièvement, son propre parcours. James l'approuva, la mine sombre :

-Je vous comprends. Étudier à l'université m'a semblé une perte de temps insupportable. Mais mon père y tenait, et vous savez qu'il n'était pas le genre d'homme auquel on peut dire non...

Il essaya de sourire, mais le cœur n'y était pas. Parler de son père lui était pénible, tant Thomas avait peuplé ses cauchemars après avoir tyrannisé son enfance. Il avait été, lui aussi, l'une des menaces qui avaient plané sur James ces dernières années, et pas la moindre ; le jeune homme savait que si son père avait pu lui mettre la main dessus, rien n'aurait été assez cruel pour lui faire payer le double crime d'être un traître à son sang et un efféminé...

Lord Bower, en hôte prévenant, ne laissa pas son invité se morfondre dans des pensées sinistres. Très vite, il lui donna une excellente occasion de se changer les idées, en revenant sur son expérience auprès d'Ollivander. James sourit, très sincèrement cette fois, et approuva chaudement :

-Oui, Monsieur Ollivander est un sorcier hors du commun... Il m'a beaucoup appris, et je regrette un peu de devoir le quitter. L'art des baguettes m'a toujours fasciné, et mon apprentissage auprès de ce grand maître a été passionnant.

Il prit une gorgée de vin, le regard pétillant. Ollivander avait été un véritable bienfaiteur pour lui, il l'avait accueilli et formé tout en étant parfaitement au courant de son passé trouble... Pour cela, il méritait une reconnaissance éternelle, même si, parfois, il avait été un patron sans scrupules.

Aïlin poursuivit, interrogeant son ami sur les baguettes et leur composition. C'était un sujet mystérieux pour beaucoup de sorciers, et même pour les fabricants de baguette eux-mêmes... Il était assez difficile d'expliquer les réactions des baguettes et leur attirance pour certains sorciers. James réfléchit un instant, puis se lança en essayant d'être clair :

-C'est une question assez complexe, Aïlin. Bien sûr, la réplique exacte d'une baguette peut choisir le même sorcier que l'originale. Mais ce n'est pas automatique. Les baguettes ont chacune leur personnalité. Si je voulais refaire la même baguette que la mienne, je pourrais, bien sûr, prendre du bois de noyer, du crin de licorne et conserver les mêmes caractéristiques apparentes. Mais je n'aurais ni le même arbre, ni la même licorne, ni, surtout, le même travail sur les composants. La personnalité du fabricant et son rapport aux baguettes sont essentiels. Ne dit-on pas que les baguettes ont un caractère ? Eh bien, il provient en grande partie du sorcier qui les a créées.

Il marqua une brève pause, le temps d'avaler une gorgée de vin, et reprit, très sérieux :

-Les composants d'une baguette sont des éléments importants dans le choix du sorcier. Chaque bois, chaque cœur de baguette a sa propre personnalité, et leur association produit une résonance particulière. Si votre baguette vous a choisi, c'est qu'elle s'est, en quelque sorte, reconnue en vous, et cela tient en grande partie aux éléments qui la composent. Mais elle tire aussi une partie de sa personnalité de sa propre histoire... Si je vous fabriquais une réplique exacte de votre baguette, il y aurait de grandes chances pour qu'elle vous obéisse, mais, comme je vous l'ai dit, ce ne serait pas automatique. Ces deux baguettes seraient comme deux sœurs ; et vous savez que même si nous partageons le même sang, nous ne sommes pas l'exacte réplique de nos frères. Nous partageons beaucoup avec eux, mais sans être strictement identiques...

L'image devrait parler à Aïlin. Les deux garçons avaient toujours mis un point d'honneur à affirmer leur différence avec leurs aînés, mais ils ne pouvaient nier que de fortes similitudes les liaient à eux. Les trois frères Kirkby se ressemblaient physiquement, et ils partageaient les mêmes expressions, les mêmes gestes, les mêmes réactions. Pour autant, leurs caractères étaient assez différents... James adressa un sourire à son hôte, et demanda :

-Pourquoi cette question, Aïlin ? Simple curiosité, ou préparez-vous un futur achat ?

Question tout à fait innocente de sa part. Il n'imaginait pas que son ami puisse nourrir de noirs desseins, et aurait plutôt vu dans l'acquisition d'une seconde baguette une précaution assez anodine. Après tout, un alchimiste pouvait tout à fait avoir l'utilité de deux baguettes magiques !
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MessageSujet: Re: [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James]   [1999-2000] Il n'y a pas que les anglais qui savent recevoir [pv James] EmptyMar 18 Sep - 12:41:25

Si James avait été chanceux de suivre un enseignement si prestigieux avec l'un des meilleurs confectionneurs de baguette du monde sorcier, Aïlin l'était tout autant pour avoir cet homme, qui avait suivi cet enseignement prestigieux, juste devant les yeux. Et qui n'était autre qu'un ancien ami. Alors qu'il cherchait un moyen, n'importe lequel, de s'assurer qu'aucune preuve vérifiable ne permettrait de remonter jusqu'à lui lorsqu'il aurait attrapé Carpenter. Sa baguette, dans l'oeuvre funeste qu'il projetait de faire, était autant sa meilleure alliée que sa pire ennemie. Si par un malheureux coup du sort, la Justice venait à les soupçonner lui et sa sœur, il aurait été facile de prendre sa baguette et d'en vérifier la mémoire. Il était bien plus difficile, à ses yeux, d'altérer ou effacer les souvenirs de sa baguette – au risque, qui plus était, de l'endommager – que de s'en procurer une nouvelle, une réplique qui lui permettrait d'exécuter Carpenter sans la moindre difficulté, et de la détruire ensuite.
Mais voilà, la réplique d'une baguette équivalait-elle à l'originale ? C'était une question fondamentale pour son plan, et Aïlin désirait s'en assurer. Aussi questionna-t-il innocemment James, l'éloignant, par la même occasion, des pensées sombres qui l'avaient assaillit après qu'il ait évoqué le souvenir de son père. Tandis que James réfléchissait à la question que l'irlandais venait de lui poser, l'autre sirota son verre de vin pour cacher son impatience ou, plutôt, l'enjeu véritable qui dépendait de la réponse qu'on lui ferait.

Comme il l'avait envisagé, la réponse n'était pas aussi simple. Si Aïlin voulait être certain d'avoir une réplique quasiment exacte de sa baguette, il aurait dû connaître l'arbre avec lequel on avait façonné son corps, quel cœur de dragon avait servi (mais on se doutait bien, là, qu'il était décomposé depuis longtemps, ou avait servit à bien d'autres usages), où l'ambre, qui avait servit à orner le manche et qui montait en spirale autour du bois sur plusieurs centimètres, avait été trouvée. Et, enfin, il aurait fallut qu'Aïlin s'adresse à Ollivander. Ce n'était pas aussi simple qu'il avait bien voulu se le faire croire, pensa-t-il en retenant un soupir. S'il s'en était douté, il aurait cependant souhaité que la théorie fût moins complexe que cela.
Aïlin réfléchissait à l'exposé que lui faisait James, la mine légèrement assombrie tandis qu'il analysait les propos de son ami, et son verre de vin suspendu à hauteur de ses lèvres sans qu'il n'y touche. Ce n'est que lorsque James le questionna à son tour qu'il reposa son verre de vin et sembla revenir sur la terre ferme.


« Non, à vrai dire, j'escompte commettre un horrible crime et je comptais dissimuler les preuves. » rétorqua-t-il sur le ton de l'humour, le regard aussi impassible que si cela n'avait été qu'une boutade d'un humour certes plutôt noir.
« C'est un peu des deux, à dire vrai. Ma sœur a eut un accident avec sa baguette récemment, et elle ne fonctionne plus de la même manière. Malheureusement, elle ne peut pas se rendre sur le Chemin de Traverse, compte tenu qu'elle est encore enfermée à Poudlard, mais la situation devient urgente. Puis, elle est très peinée à l'idée d'avoir une baguette différente de celle qu'elle a toujours possédé. C'est pourquoi j'ai pensé à cette hypothèse. Par la même occasion, j'ai envisagé de commander une réplique de ma propre baguette. Avec mes travaux, je ne suis jamais à l'abri d'altérer son bois, ou pire encore, son cœur. Je me suis déjà fait quelques frayeurs au détour d'une expérience qui n'a pas aboutit à ce que je projetais. »

Mentit Aïlin avec une parfaite aisance. Ses arguments lui étaient venu sans même qu'il n'y réfléchisse vraiment, résurgence certaine de tous les mensonges qu'il avait pu proférer dans sa jeunesse pour avoir la paix avec ses frères et son père.

« Cela vaut certainement l'essai. Après tout, même si les répliques n'ont pas les mêmes réactions, les mêmes résonances que les originales, elles pourront nous dépanner le temps de s'en procurer une nouvelle. Elles seront toujours plus efficaces, je suppose, qu'une baguette endommagée, même si elles montrent un peu de résistance. Et Lynn pourrait continuer ses études jusqu'aux prochaines vacances sans craindre un malheureux retour de sort au beau milieu d'un cours. Vous ne pensez pas ? »

À présent, Aïlin espérait que James ait la bonté de se proposer pour le travail. Il ne voulait pas paraître intéressé aux yeux de son ami, et même s'il savait quels arguments lui servir si le jeune homme ne proposait rien, il était bien plus simple d'accepter son aide et de l'en remercier, à charge de revanche.
Aussi laissa-t-il la demande s'immiscer implicitement entre eux tandis qu'il s'occupait de la suite du repas. James ne s'intéressant manifestement plus aux amuses-bouches, l'alchimiste sortit sa baguette magique pour agiter la clochette accrochée près de la porte du petit salon, afin que Jenny débarrasse et s'occupe d'apporter la suite des victuailles.
Celle-ci ne tarda pas à apparaître sur le pas de la porte et, aussi discrètement qu'une vieille sorcière qui avait joué le rôle de mère poule avec ces deux garçons-là en était capable, elle débarrassa les plats à moitié vide et retira leur assiette. Puis, d'un sort, elle fit apparaître le plat de résistance joliment présenté dans une nouvelle assiette. Jenny avait un don pour faire des plats irlandais, d'apparence souvent grossière, quelque chose d'excitant pour les yeux tout en demeurant aussi ravissants pour le palais. Il s'agissait ce soir d'une traditionnelle estouffade, avec ce qu'il fallait de sauce pour que cela ne dégouline pas, et chaque ingrédient dosé avec une main de maître, de sorte à ce qu'aucune saveur ne prenne l'ascendant sur les autres et fasse courir le risque d'écoeurer rapidement. C'était un plat simple, mais qui réchauffait. Parfait pour des retrouvailles entre amis d'enfance.
Consciemment ou non, on jugeait toujours son hôte par ce qu'il mettait dans votre assiette, car il était un indicateur assez fiable sur les intentions et l'état d'esprit de celui qui invitait. Aussi savoureux aurait-il été, un plat plus sophistiqué aurait eu quelque chose d'impersonnel pour un repas entre Aïlin et James. Cela aurait eu le goût de l’esbroufe ou, au pire, aurait pu insinuer un désir chez Aïlin de prendre l'ascendant sur James. De toute façon, un retour à la simplicité était plus que bienvenu lorsqu'à dix-neuf ans, on était l'unique propriétaire d'un magnifique manoir et que l'on était à la tête d'une fortune plus que confortable.
Jenny changea le vin et disparut en souriant tendrement à James – elle ne pouvait manifestement pas s'en empêcher. Plutôt que de ranger sa baguette, Aïlin l'avait laissée posée sur un coin de la table.


« Bain sult as do chuid, James ! Bon appétit. »

Sourit Aïlin, en trinquant une nouvelle fois avec son ami.
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