Aely remonta l’allée de graviers du Château en courant, son livre caché sous sa cape pour ne pas qu’il soit mouillé par la pluie fine qui tombait. Arrivée en haut des marches, elle poussa la grande porte en soupirant de soulagement et regarda ses chaussures à talons d’un œil mauvais.

Pourquoi donc avait-elle écouté Ange déjà ? Bonne question ! Soit, son rendez-vous c’était plutôt bien passé mais la petite n’était pas certaine que ce soit du à sa tenue vestimentaire. Elle avait reçu une lettre, la semaine d’avant, lui indiquant qu’elle devait aller à Londres pour signer les papiers de sa maison. Lorsqu’elle avait dit qu’il serait mieux de s’adresser directement aux propriétaires de la demeure, ses parents, on lui avait répondu que la maison avait été mise à son nom le jour de son anniversaire, deux jour auparavant. Voilà donc pourquoi elle s’était retrouvée à Pré-Au-Lard, en ce dimanche de mars, signant comme une adulte le titre de propriété.

Rien à voir avec les talons de ses chaussures en fait, jusqu’à ce qu’elle parle avec Ange qui l’avait obligé à porter une tenue spéciale pour faire bonne impression. Aely avait passé une heure dans son dortoir à marcher de long en large sous l’œil vigilant de Miss Dawster, pour apprivoiser les escarpins. Et lorsqu’elle était sortie du Château, la Serpentarde avait l’air d’une petite noble, dans sa grande cape noire, dix centimètres de plus à son actif et ses cheveux roux coiffés en un chignon bien serré.

Dans le couloir, la petite sortit le livre qu’elle avait été acheter par la même occasion. Une sorte de relique des Potions supérieures en cuir noir, relié de fils doré. Elle avait du courir pour le protéger des gouttes d’eau, et même si à présent, quelques mèches folles s’échappaient de sa coiffure, elle était plutôt satisfaite de son affaire.

Ses pensées dérivants, la petite Strange songea à la demeure dont elle était maintenant la propriétaire. Rien à voir avec le petit appartement auquel elle pensait ! Ses parents avaient en fait acheté un vieil hôtel particulier de trois étages, avec une cour qui tenait plus du petit parc que du jardin, et même, un elfe de maison à son service ! Ce dernier point l’avait beaucoup perturbé et elle le réglerait une fois sur place. Elle était consciente qu’elle aurait du aller visiter sa maison dès le départ de ses parents, mais elle était bien trop en colère et déçu pour y avoir penser.

Aely marchait en feuilletant son livre et en essayant de ne pas tomber de ses échasses lorsqu’elle se cogna contre quelqu’un qui, comme elle, ne devait pas faire très attention. En règle générale, la petite aurait prit son ton le plus cinglant pour congédier celui qui l’avait bousculé, mais cela ne se fit pas. Premièrement, parce qu’elle avait d’abord pensé à s’assurer de l’état de son grimoire de Potion et que, deuxièmement, le garçon dans lequel elle s’était cognée était incroyablement beau d’après ses critères de sélection personnels et qu'elle n'eu donc pas le courage de s'énerver.

Son uniforme indiquait qu’il était à Serpentard, et Aely se demanda comment il était possible qu’elle ne l’ait jamais remarqué. Il était plus grand qu’elle, même juchée sur ses talons, avait des yeux d’un vert plus foncé que les siens et se tenait bien droit en la regardant d’un air mi-gêné mi-dédaigneux, à croire qu’il ne savait que choisir entre les deux.

La jeune fille se reprit et, se redressant un peu, elle lui tandis la main en souriant, de façon assez bizarre pour quelqu'un qui vient quasiment de se faire marcher dessus.

« Excuse-moi. Je ne faisais pas vraiment attention. Aely Strange. Enchantée. »

En temps normal, le fait qu'un garçon ne réponde pas à sa présentation n'aurait fait qu'énerver partiellement Aely Strange, qui se serait contentée de hausser les épaules et de passer son chemin, pour se rendre à la bibliothèque ou dans un autre endroit où elle aurait pu lire tranquillement, et sans être dérangée par une bande de filles en pleine crise de gloussements ou par quelques garçons en manque de mauvais tours idiots à jouer. Mais voilà. Nous n'étions pas "en temps normal". Et ce n'était pas "un" garçon, mais LE garçon.

En cette circonstance tout à fait exceptionnelle, le fait que LE garçon, ce grand brun ténébreux à l'allure fière ne lui réponde pas énerva extrêmement Aely. C'était très bête, évidemment. Mais la Serpentarde ne pouvait, à cet instant, tolérer d'être ignorée de la sorte. Elle n'avait rien fait de mal. Elle s'était simplement excusée alors que c'était l'autre très beau imbécile qui lui avait marché dessus. Si elle avait été affreusement laide, elle aurait comprit qu'il s'enfuit ainsi, mais ce n'était pas le cas puisqu'elle qu'elle était, au contraire, sur son trente-et-un. De plus, le regard qu'il lui avait jeté ne lui plaisait pas du tout, du tout.

On pourrait penser que, étant donné que la fillette trouvait le garçon tout à fait à son goût - bien qu'un peu vieux -, elle aurait décidée d'entrer dans ces bonnes grâces. Aurait essayé de se faire bien voir. L'aurait épié. Aurait essayé de récolter un maximum d'informations sur lui. On pourrait le penser. Mais non. Aely n'était pas de ces filles qui attendaient, toutes larmoyantes, de se faire remarquer. Et tant qu'à faire, si elle se faisait remarquer, autant que se soit en étant elle-même plutôt qu'en pleurnichant, se qui n'était pas du tout son genre.

C'est donc avec mauvaise humeur que la jeune fille se dirigea vers LE garçon qui agissait, il faut le préciser, avec autant de bizarrerie qu'elle. Il avait continué dans le couloir puis s'était finalement retourné pour marcher à grands pas vers l'autre côté, en repassant par conséquent, devant la petite rousse, qui livre à la main et talons aiguilles aux pieds, marcha vers son but.

Ses yeux verts brillant de colère, Aely rattrapa l'impoli et lui flanqua un grand coup de son manuel de Potions Avancées sur le bras, ce qui eu le don d'attirer son attention et de le faire se retourner.

<< Excuse moi, mais quand on essaye de se donner de l'allure en marchant comme tu le fait, on essaye au moins d'être poli avec les gens qui viennent s'excuser alors que ce sont eux qui se sont quasiment fait marcher dessus ! Et elle tandis la main vers lui, toujours énervée. Je recommence. Aely Strange, de Serpentard. Pas du tout enchantée. >>

Gabriel écarquilla les yeux plus qu'étonné. Tiens, il avait mal ? Se tournant vers la source de sa douleur il croisa une jeune fille rousse. Elle lui rappelait quelqu'un... Ne venait-il pas de la croiser quelques minutes auparavant ? Baissant les yeux vers le manuel, il ne put empêcher un sourir plutôt amusé de venir fleurir sur son visage. Bien qu'ayant l'air d'une sang-pur plus qu'agaçante, il l'aimait bien. Plissant les yeux il tenta de faire abstraction de ce qu'il avait remarqué d'elle au premier abord. Aevc ses yeux verts brillant de colère contenue et ses cheveux roux emmêlés elle était plutôt mignonne bien qu'un peu jeune. Son sourire ne fit que s'agrandire, une jeune qui s'attaquait à son aîné de cette manière, c'était plutôt rare. C'était un point en plus pour elle. Se massant le bras d'un air innocent, il se décida finalement à la considérer comme étant supérieure à la masse inculte grouillant dans cette école de magie.

- Gabriel Schwarz, enchanté pour ma part. Fit-il en lui serrant la main.

Il lui aurait bien fait le baise-main mais elle semblait si en colère qu'il préférait ne rien tenter. Apparemment, elle avait tenté de s'excuser plus tôt mais faisant très rarement attention à ce qui l'entourait, il le découvrait avec un certain amusement. D'ailleurs que s'était-il passé un peu plus tôt ? Hum... Il croyait se souvenir qu'ils s'étaient percutés. Se connaissant il était prêt à parier que cela l'avait mis de plus mauvaise humeur encore. Enfin, elle faisait partie de sa maison et vu qu'il portait son uniforme et bien pas la peine de préciser qu'il était un Serpentard, cela aurait été des plus ridicules...

Penchant la tête sur le côté il demanda innocemment :

- Puis-je faire quelque chose pour toi ?

La jeune fille savait bien viser, fallait pas croire !! Et Gabriel ne tenait pas spécialement à se retrouver avec un bleu ou un vêtement froissé. Le genre de sorts à utiliser dans ces deux cas ne faisait pas vraiment partie de ses préférés. Et puis, il pouvait faire un effort pour un membre de sa maison. D'ailleurs il ne savait plus vraiment où il voulait aller au début mais il lui semblait logique de maintenant se diriger avec elle vers la salle commune. Se tournant vers elle semblant l'attendre il repencha la tête sur le côté.

- Il y a un problème ? Demanda-t-il tout haut.

Gaspillant rarement son temps avec les autres, étant légèrement lunatique et souvent dédaigneux, il n'était pas sûr de suivre le raisonnement de sa vis-à-vis. Il pouvait toujours lui dire que non il n'était pas un violeur en série mais de toute manière elle ne semblait pas avoir peur de lui. Pour un peu, elle semblerait presque... Curieuse. Il la regarda d'un air neutre. Eh bien ? Que lui arrivait-il ? En tout cas, il n'avait pas l'habitude qu'on le regarde comme ça aussi se sentait-il un peu destabilisé. Ce qui était ridicule, après tout il était plus âgé qu'elle si l'un devait destabiliser l'autre c'était bien lui. Mais après tout elle était intéressante donc il ne réagirait pas comme la première fois.

Aussi attendit-il tranquillement l'air rêveur la suite des évênements.

Le garçon se retourna, les yeux écarquillés d'étonnement. Pour un peu, Aely aurait eu honte de l'avoir frappé, mais le mal était fait. Et elle était encore un légèrement en colère. Un tout petit peu. Le brun la regarda, elle puis son livre et sourit. La rouquine se demanda s'il se moquait de ses lectures, ou s'il la croyait incapable de lire un tel livre.

- Gabriel Schwarz, enchanté pour ma part.

La jeune fille ne s'attendait absolument pas à ce revirement de situation. Gabriel – *un prénom tout à fait exquis, si vous voulez mon avis* – Schwarz – *Aely Schwarz, ça sonne bien, non ?* - lui serra la main en souriant toujours et la rouquine eu la soudaine impression que quelque chose clochait. Allez savoir.

- Puis-je faire quelque chose pour toi ? Demanda Gabriel en penchant la tête sur le côté.

Aely étouffa un rire. On aurait dit Salazar, son chaton après avoir fait une bêtise ! Même air innocent de celui qui sait que, de toute façon, il a déjà gagné. En général, Sal' s'en tirait avec un soupir désabusé et une grattouille derrière l'oreille. Comme elle se voyait très mal grattouiller amicalement l'oreille de son interlocuteur, elle se contenta d'esquisser un sourire.

- Mis à part éviter, à l'avenir, de me marcher dessus, je ne vois pas grand chose !

''A l'avenir''... Y en aurait-il un ? Bonne question ! La jeune fille retourna quelques instant son livre entre ses mains en se mordillant nerveusement la lèvre. Il ne fallait surtout pas qu'elle se mette à penser des choses pareils ! Elle n'allait quand même pas tomber amoureuse ! Si ?
Elle allait entreprendre un long discourt intérieur lorsqu'elle se rendit compte que Gabriel, la tête une nouvelle fois penchée sur le côté, semblait l'attendre.

- Il y a un problème ?

La demoiselle Strange rougit en grommelant un ''non'' et se mit en route, lui à ses côté, vers leur Salle Commune – où aller sinon ? Malheureusement pour elle, au bout de quelques mètres, il lui fallut se rendre à l'évidence. Elle ne pourrait pas faire un pas de plus avec ses satanées chaussures. Elle se tourna vers son prince qui la prit dans ses bras pour l'emmener sur son cheval blanc. Aely poussa un soupir à fendre l'âme et enleva les talons hauts. Une chance, ses pieds n'étaient ni noirs de crasse ni cornus ou difformes et il ne s'échappait pas d'eux une fumée verte accompagnée d'une odeur de troll. Et elle adorait marcher pieds nus. Même si, remarqua-t-elle avec dépit, maintenant, elle ne dépassait plus l'épaule du garçon.

- On y va, on ne perd pas de temps ! Lança-t-elle à son compagnon qui s'était arrêté à ses côtés, histoire de se redonner une contenance.

Ils continuèrent jusqu'à l'escalier le plus proche qui descendait vers les cachots, mais évidemment, à peine engagés sur les premières marches, celui-ci se mit à trembler et se dirigea pour se raccrocher à un autre escalier, qui montait. Ces maudits machins avaient le don de faire n'importe quoi dans les situation les plus critiques. Quand on avait une envie pressante d'aller aux toilettes, par exemple. Ou qu'on avait très mal aux pieds.
Soupirant de nouveau – elle passait son temps à ça ce soir ! - Aely se tourna vers Gabriel.

- Mauvaise pioche. Qu'est-ce qu'on fait ?

Oh ? À l'avenir ? Elle prévoyait déjà leur prochaine rencontre ou était-elle une voyante ? Gabriel sourit amusé par la tournure des évènements. Et puis elle était mignonne lorsqu'elle rougissait, il avait presque envie de lui tapoter la tête et d voir si elle pouvait ronronner. Par contre si il lui sortait quelque chose comme "Allez, fais miaou..." il était certain qu'il se prendrait plus qu'un livre. Pourtant ce n'était pas méchant.

Lorsque la rousse enleva ses talons, il dut retenir un léger rire. Effectivement de suite elle faisait plus son âge. Quelque part il était dommage qu'ell porte des vêtements d'un style mature. Pas qu'il soit un lolicon, si il avait bien retenu le terme, mais il y avait un style de vêtements intermédiaires qui iraient certainement très bien à sa camarade.

- Oui je pense que ça peut se faire mais à une condition. À l'avenir évite les coup de livres. La connaissance peut faire mal. Souffla-t-il avec un sourire en coin.

Ils reprirent leur marche jusqu'au escaliers. Et comme l'avait si bien fait remarquer Aely, c'était une mauvaise pioche. Il ne comprendrait jamais vraiment comment ceux-ci décidaient de bouger. Seul, il aurait bien tenter de parlementer avec l'escalier, voir même de faire un câlin au tapis et de caresser la ramps, car oui des fois ça marchait, mais accompagné... Il tenait à son image quand même, il ne pourrait jamais laisser quelqu'un voir ce côté là de lui.Il décida donc de s'installer le plus confortablement possible sur une marche.

- On a plusieurs solutions mais connaissant ces escaliers, ils peuvent nous coincer pendant des heures en nous déposant d'étages en étages mais jamais à celui que l'on souhaite... Donc soit on tente notre chance et on descend au prochain arrêt avec le risque que le prochain escalier nous mène complètement ailleurs... Soit on s'assoit et on discute en attendant qu'il nous dépose là où nous voulon aller. Lâcha-t-il sur un ton presque blasé.

Oh ça ne le dérangeait pas d'attendre en discutant mais il ne savait pas si sa compatriote Serpentarde pensait la même chose... Attendant qu'elle s'installe il lança la série de question.

- Par contre tu risques d'avoir froid comme ça donc je comprendrais que tu veuilles descendre au prochain arrêt. Sinon vu ta tenue tu étais sortie, il y avait une sortie aujourd'hui ? Je crois que j'ai oublié d'y aller... Fit-il en glissant la question tranquillement entre deux phrases.

En fonction de la réponse qu'il obtiendrait il en apprendrait bien plus sur la rousse que ce que les gens pouvaient penser. Déjà la tournure de la réponse, la réponse en elle-même lui apprendraient comment la jeune fille pensait. Un instant il eut un doute cependant. Et si il y avait réellement eut une sortie à Pré-au-Lard ? Après tout, il était si peu intéressé par le genre humain qu'il aurait parfaitement pu râter une sortie. En réalité, cela lui était déjà arrivé et ça ne le dérangeait pas plus que ça. Cependant pour une fois c'était important. En fonction de cette information, il n'interpréterait pas de la même façon la réponse...

Il pencha une nouvelle fois la tête sur le côté.

- Je crois que je suis un peu lunatique... Dit-il d'un air tranquille.

Oui le brun avait aussi le don de constater les évidences. Généralement cela faisait rire autour de lui. Il se demandait comment elle riait. Il y avait tant de manières de rire...
Il posa son coude sur son genoux et se pencha en avant pour mettre le bas de son visage dans le creu de sa main. Gabriel se contenta de l'observer et d'attendre sa réponse. C'était étonnant, elle lui rappelait quelqu'un mais il ne savait pas qui...

Si Gabriel n'avait pas été là, Aely aurait sûrement tempêté, trépigné, donné des coups de pieds dans l'escalier et l'aurait insulté. Se serait énervée, arrachée les cheveux puis finalement, se serait fatiguée et aurait tenté de prendre un autre chemin en déjouant les pièges des marches rancunières. Mais comme il était là et qu'elle tenait à garder un minimum de dignité – n'oublions pas que la fillette était déjà pieds-nus – elle se contenta de s'asseoir à côté et de lui en pensant que cette situation valait le coup de donner des coups de livre comme une psychopathe. Ah non ! C'est vrai, elle avait promis au garçon de ne plus l'attaquer à l'aide de son manuel de potion. Manuel qu'elle posa d'ailleurs délicatement sur la marche qui était devant elle. Ce livre, elle se l'était fait envoyer de Londres par un vieux marquis endetté qui vendait sa bibliothèque aux enchères. Autant dire qu'elle y tenant et ne voulait surtout pas l’abîmer. Surtout qu'elle n'avait même pas encore eu le temps de jeter un coup d’œil à son contenu ! Elle savait bien que se balader avec un livre pareil attirerait les regards septiques de nombres de ses camarades – des jaloux ! -, mais ne pourrait sûrement pas s'empêcher de le lire même aux toilettes, jusqu'à se qu'elle l'ai fini. Puis le reprendrait depuis le début, re déchiffrerait chaque page une par une, minutieusement, s'imaginerait préparant chacune des potion et vivant des choses incroyables sous leur emprise ou faire des choses terribles avec les plus dangereuses ! Elle salivait à l'avance.

- On a plusieurs solutions mais connaissant ces escaliers, ils peuvent nous coincer pendant des heures en nous déposant d'étages en étages mais jamais à celui que l'on souhaite... Donc soit on tente notre chance et on descend au prochain arrêt avec le risque que le prochain escalier nous mène complètement ailleurs... Soit on s'assoit et on discute en attendant qu'il nous dépose là où nous voulons aller.

Ah oui. Pendant qu'Aely fantasmait sur un manuel – aussi précieux soit-il – elle en avait presque oublié Gabriel. Presque. La jeune fille le regarda s'asseoir sur l'escalier et elle sourit en s'asseyant une marche au dessus de lui – histoire de gommer un peu la différence de taille. La petite rouquine trouvait son interlocuteur extraordinaire. Il lui semblait être hors du temps. Ou complètement à côté de la plaque peut-être. Il avait l'air un peu perdu, comme s'il se réveillait à chaque seconde ! Il s’inquiéta de savoir si elle avait froid et Aely secoua la tête négativement. Elle avait même plutôt chaud, en fait...

- ...Sinon vu ta tenue tu étais sortie, il y avait une sortie aujourd'hui ? Je crois que j'ai oublié d'y aller...

La petite Strange étouffa un rire. Complètement à côté de la plaque ! Elle se moquait gentiment mais, il aurait dû essayer de faire plus attention à ceux qui l'entouraient. Des personnes mal intentionnées auraient pu profiter de son égarement. La rousse, qui avait vraiment très très chaud, enleva la grande cape noire et argent prêtée par Ange et agita sa baguette pour la faire disparaître. Ça, et les chaussures. Elle ne les remettrait jamais, c'était sûr ! Pour une fois, il ne lui fallut que trois essais pour faire disparaître les objets visés. La dernière fois qu'elle avait utilisé ce sort, elle avait dû découper en cinq partis un vulgaire sac en plastique avant qu'il ne veuille bien se volatiliser.
Elle regarda sa tenue et fut heureuse de ne pas avoir cédé à la vue de la robe rouge extrêmement décolletée qu'avait essayé de lui refiler la préfète des Serpentards. Au moins, ses vêtements étaient de ceux qu'elle aimait ! Aely portait une veste noire de costume trois pièces moldu sur un chemisier blanc et un jean artistiquement délavé. En temps normal, elle aurait aussi eut ses converses toutes destroy mais tant pis !

- Non, pas de sortie aujourd'hui ! J'étais partie à Pré-Au-Lard pour signer le titre de propriété de la maison que mes parents ont achetés avant de partir en..., la petite s’arrêta net en sentant ses yeux se remplir des larmes. Enfin ! Ce n'est pas important !, ajouta-t-elle en riant d'un rire si faux et si douloureux qu'elle se tût.

La jeune fille secoua ses cheveux le temps de retrouver contenance. Elle releva les yeux vers Gabriel qui penchait de nouveau la tête sur le côté.

- Je crois que je suis un peu lunatique..., déclara-t-il.

Le don d'exprimer les évidences ! Aely éclata de rire en levant son visage vers le plafond, soulagée que son brusque silence ne plombe pas la conversation. Elle regarda le garçon les yeux brillant.

- Je crois aussi. Mais dis moi, pourquoi étais-tu si énervé tout à l'heure ?

OOoh, finalement Gabriel devait laisser tomber ses préjugés. Il s'était attendu à ce que la petite rousse fasse un scandale mais la mâturité de ses actions était tout à son honneur. Un léger sourire vint fleurir sur ses lèvres. La jeune fille était de plus en plus intéressante. Il n'arrivait pas du tout à prévoir ses actions. Peut-être avait-il passé trop de temps à ignorer la masse autour de lui mais bon... Il était évident que la Serpentarde était au-dessus de toute cette populace.

Et puis, il était toujours intéressé par le livre qu'elle trimbalait avec elle et qui avait failli lui faire perdre un membre. Bon il exagérait peut-être un peu mais juste un peu alors. Automatiquement il se frotta d'un air pensif l'endroit où la guerre avait eu lieu. Puis dans la minute suivante pris le manuel que la jeune fille avait posé sur une des marches et entreprit de le feuilleter négligemment. Il était évident qu'il devait coûter une petite fortune. mais certaines pages étaient arrachées. Y avait eu arnaque sur la marchandise, non ?

Mais il fut sorti de ses pensées par la voix d'Aely...

Ainsi donc elle avait eu l'autorisation pour une sortie exceptionnelle de nature administrative. Intéressant, surtout vu son âge. Acte de propriété ? Déjà une maison à elle ? Gabriel admettait aisément qu'il apprécierait avoir un endroit pour lui tout seul. Mais la phrase sur ses parents le fit lever un sourcil. Partis en voyage ? Alors pour que la rouquine ait un acte d epropriété à signer soit ils étaient morts, soit ils l'avaient laissée derrière eux pour faire joujou. Mouai, plutôt classique dans les familles de sang-pur en général.

Arg, elle avait les larmes aux yeux, enfin heureusement son don d'énoncer les évidences le sortit de ce faux pas. Elle avait un joli, rire, plutôt joyeux. Rien à voir avec celui qu'il avait entendu quelques secondes plus tôt lorsqu'elle expliquait la raison de sa sortie authorisée.

Amusé à son tour, il sourit. Il était lunatique, bien sûr mais il était loin d'être une proie facile. Si jamais quelqu'un l'avait attaqué, il l'aurait balancé par une fenêtre du château sans vraiment hésiter. Avoir vécu dans l'Allée des Embrumes depuis sa venue en Angleterre l'avait au moins rendu confiant concernant ses propres capacités. Vraiment, il ne fallait pas se fier aux apparences... C'est ce que certaines personnes avaient oublié de se rappeler lors de sa dernière sortie pour faire les courses.

Le gouvernement actuel était plutôt drôle à dire à tous que les étudiants n'ayant pas 17 ans ne pouvaient pas faire de magie sans se faire repérer. Il y avait tant de manière de contourner la loi. On pouvait emprunter la baguette d'un adulte ou tout simplement aller lancer des sorts dans l'Allée des Embrumes. Il semblerait que la magie noire et le peu d'effectif des aurors ne permettaient pas de vérifier qui avait lancé quel sort et si la loi était brisée. Enfin la loi au sens général vu tout ce qu'il se passait en ce lieu.

La question de la Serpentarde l'étonna. Maintenant qu'il essayait de se souvenir, il lui semblait bien qu'il était énervé un peu plus tôt. Mais pourquoi ? Le brun se voyait mal dire à la plus jeune qu'il avait complètement oublié la raison de sa mauvaise humeur quelques instants plus tôt. Ce qui était sûr c'est que c'était à cause d'imbéciles. Mais cette école en regorgeait en réalité... Le Serpentard opta donc pour la réponse la plus plausible.

- À cause des imbéciles qui composent cette école, ils sont incapables de réfléchir par eux-mêmes et par conséquent les conséquences de leurs actions ne les marquent pas. Fit-il d'une voix légèrement grinçante.

Enfin, à dire ça assis sur un escalier qui voletait tranquillement sans s'arrêter au bon endroit avec toujours le livre d'Arely à la main... Il se demandait à quoi il pouvait bien ressembler. Sans doute l'incarnation parfaite du Serpentard blasé. Cette réflexion lui tira un sourire sarcastique tandis qu'il reposait le manuel là où Aely l'avait posé un peu avant.

Aaah ! Aely faillit s'étouffer, s'évanouir, mourir d'un infarctus, d'une crise cardiaque aiguë. Quoi ? Tout Gabriel Schwarz qu'il était, le garçon n'était pas censé poser ses mains pleines de doigts sur son livre. C'était un manuel de Potions Avancées ! Il allait l’abîmer, le déchiqueter, le dégrader ! Et alors, c'est elle qui le déchiquetterait ! La fillette poussa un soupir pour s'astreindre au plus grand calme et le regarda tourner les pages d'un air nonchalant en s'attardant sur celles qu'il manquaient. Évidemment, avec un livre aussi vieux, il ne fallait pas s'attendre à avoir toutes les pages ! La petite le regarda encore un peu, puis jugeant qu'il n'avait pas l'intention de lui bousiller sen trésor, essaya de penser à autre chose. Elle murmura quand même, un peu nerveuse.

- Attention, hein ? Il est vieux, tu sais...

Elle ne voulait pas passer pour une illuminée... Aely se mit à sourire et pouffa un peu. Elle racontait n'importe quoi ! C'était bien elle qui avait couru sous la pluie avec ce manuel, non ? Et qui l'avait utilisé comme une arme pour frapper Gabriel ? Et c'était toujours elle qui donnait des conseils au garçon qui souhaitait simplement jeter un coup d’œil ? Elle devenait incroyablement égocentrique, il faudrait qu'elle remédie à ça.

Elle écouta le brun lui expliquer pourquoi il était énervé quelques instants auparavant. Et réfléchit. Elle pensait qu'il avait tord. Aely lui expliqua le fond de sa pensée. Elle n'était pas de ceux qui gardaient leur avis pour eux, et ne se gênait absolument pas pour s'exprimer.

- Je pense que c'est faux. Tu mets tout le monde dans le même panier, même les personnes que tu ne connais pas. Tu devrais essayer d'apprendre à mieux les connaître, avant de les juger. De plus, n'importe quel acte, même le plus anodin, à son lot de conséquences, mais on n'y fait pas toujours attention. Regardes, si je te t'avais pas frappé, où serais-je maintenant ? Et toi ? Nous serions nous un jour rencontré ? On n'y pense pas forcément, sur le moment... Tu es peu être un peu prétentieux.

Aely le regarda, assit sur les marches, avec son uniforme et son livre à la main. Son visage figé dans une grimace de dédain et lui trouva soudain un air atrocement blasé. Le cliché même du Serpentard dans toute sa splendeur. Elle préférait quand il penchait la tête sur le côté. Puis, son expression changea, et la rouquine se rendit compte de ce qu'elle venait de dire. Ses joues s'empourprèrent, et elle bredouilla.

- Excuses moi. Je suis désolée d'avoir dit ce que je pensais. D'avoir dit ça. Je n'ai aucun droit de te juger, et je fais justement ce que je viens de te reprocher. Je ne te connais pas plus que tu ne les connais eux.

La jeune fille se mordilla la lèvre et baissa la tête. Elle observa les changements sur son visage à travers ses longs cheveux. Aely espérait sincèrement qu'il ne serait pas fâché. Ses paroles allaient parfois plus vite que sa pensée, et elle s'en voulait souvent après. C'était difficile, surtout pour une enfant de douze ans, de mesurer les conséquences de ses paroles. Comme de ses actes. Cela revenait à ce que Gabriel avait dit. Il y avait peut-être un juste milieu entre leurs deux arguments ? Entre eux deux ?