-Aouch ! C’est officiel je détestais déjà les limaces en soi, mais alors quand en plus ces saletés crachent du feu c’est le comble, s’exclama Nikolaï de fort méchante humeur en se tenant le bras droit dont la manche était complètement carbonisée.

Il observa l’étendue des dégâts d’un plus près et ne put retenir un sifflement de douleur lorsqu’il voulut décoller les quelques morceaux de tissu brûlé qui étaient restés collés à la peau. Cette salop*** de limace ne l’avait pas raté ! Soi-disant qu’il s’était trop approché au moment de vouloir nourrir l’animal et était rentré dans son espace personnel donc ce dernier s’était senti attaqué et avait répliqué. Mon c** oui ! L’invertébré était juste intrinsèquement vicieux et dès qu’il avait vu le jeune sorcier s’approcher, il l’avait attaqué sans raison. Voilà pourquoi il n’aimait pas les Soins aux Créatures Magiques, c’était dangereux, salissant et rarement gratifiant. Encore s’ils étudiaient des créatures cools style des sphinx ou des hippogriffes, il trouverait ça bien mais non comme ils étaient " trop jeunes", ils devaient se contenter de trucs chiantissimes style des Niffleurs ou des Scroutts à Pétard. En plus c’était d’une hypocrisie totale de considérer qu’ils étaient trop jeunes pour étudier des hippogriffes sous prétexte que c’était trop dangereux, mais de leur faire quand même étudier des limaces qui crachaient du FEU bon sang de bon soir ! C’était pas dangereux ça peut-être ?

Le Serpentard sentit une nouvelle bouffée de colère le submerger et il dut faire un immense effort sur lui-même pour prendre une grande inspiration et tenter de se calmer. Il fallait qu’il s’occupe de son bras et l’option infirmerie n’était pas envisageable. Si jamais il se pointait chez Pomfresh, elle allait lui demander de retirer sa chemise pour avoir une vision complète de son bras, or les vacances n’étaient pas si loin que ça et, par conséquent, les marques laissées sur son dos et son torse par les séances en tête à tête avec son frère, les poings et la baguette de ce dernier étaient loin d’avoir disparues. Il ne pouvait donc pas se permettre d’avoir à répondre aux questions que l’infirmière ne manquerait pas de poser en les voyant : si jamais à cause de cela sa famille se retrouvait dans un scandale politique son père le lui ferait amèrement regretter. De telle manière qu’il en viendrait à repenser aux coups d’Alekseï avec nostalgie … à condition qu’il soit encore en condition de penser après bien entendu, ce qui était loin d’être assuré … Un frisson inconscient lui parcourut l’échine rien que d’imaginer la scène.

Il repoussa donc cette horrible idée dans un coin de son esprit et prit la direction des toilettes des garçons. Avec un peu de chance, il trouverait un coin tranquille pour soigner sa plaie en paix, après tout ce n’était pas comme si les mecs étaient connus pour passer leur vie aux toilettes, contrairement aux filles. Et effectivement ses prédictions s’avérèrent justes, il y avait bien deux-trois types qui étaient là mais ils n’avaient pas l’air d’avoir l’intention de s’attarder. Il se dirigea donc vers un des lavabos du fond et entreprit de déchirer en bonne et due forme ce qu’il restait de la manche de son uniforme, de toute façon il allait devoir le changer et ce n’était pas comme s’il n’en avait pas encore trois neufs dans sa valise. OK, il n’avait pas envisagé d’en bousiller un avant la fin du mois de septembre mais le fait était qu’il avait de quoi faire face à ce genre d’occasions grâce aux prévisions de sa mère que, pour une fois, il ne trouvait pas si excessives que cela.

Il jeta un nouveau regard à la plaie et fit la moue : l’autre invertébré avait sacrément bien visé. Tout son avant-bras avait une couleur rouge anormale qui contrastait affreusement avec la pâleur naturelle de son teint. Heureusement la brûlure avait l’air relativement superficielle, il n’aurait sûrement pas de cloques. Encore heureux ! Par contre, il remarqua soudain avec horreur qu’un peu au-dessus de la brûlure, au niveau de son biceps, une autre marque était visible. Une marque impossible à confondre : une trace violette de doigts on ne peut plus claire. Sh** il l’avait oubliée celle-là ! A force de vivre avec les sautes d'humeur d'Alekseï, il avait appris à ne plus trop faire attention aux marques sur son corps vu qu’il portait toujours des vêtements à manches longues, mais en arrachant l’intégralité de sa manche il avait mis à jour un des petits souvenirs laissés par son frère durant les vacances. Juste ce qu’il avait essayé d’éviter en venant ici au lieu d’aller à l’infirmerie ! Il jeta un regard affolé autour de lui mais constata qu’il était à présent seul. Son cœur reprit peu à peu son rythme normal alors qu’il avait un flash-back de comment il en était venu à avoir cette marque.

C’était la veille de la rentrée. Il venait de sortir de table après un dernier dîner en famille on ne peut plus morose puisque Mikhaïl avait rappelé à son fils aîné que cette année il avait intérêt à faire mieux que l’année précédente s’il ne voulait pas avoir à en subir les fâcheuses conséquences et que ce dernier avait affiché une mine contrite de circonstance tout en ruminant ses idées noires. Et bien évidemment, dès que les parents étaient retournés vaquer à leurs occupations, Alekseï était apparu dans la chambre de son cadet, faisant voler le verrou d’un coup de baguette, avec son air des mauvais jours –parce que oui il en avait des bons. Nikolaï, revigoré par l’approche imminente de la rentrée et la conséquente impossibilité pour son frère de le frapper quand bon lui semblerait, avait alors trouvé intelligent de rétorquer que les verrous étaient là pour que les gens ne rentrent pas. Phrase qui n’avait fait qu’énerver Alekseï encore plus, ce dernier s’étant alors approché de Nikolaï, l’ayant attrapé par le bras de toutes ses forces et envoyé valdinguer contre le mur le plus proche. S’en était suivi des « recommandations de dernière minute » : Alekseï rappelant avecpoings à l’appui à Nikolaï qu’il n’avait pas intérêt à se prendre pour plus que la taffiole qu’il était ou à chercher le secours des profs ou des préfets durant l’année ou bien il le regretterait. Le futur troisième année s’était contenté de laisser passer l’orage sans rien rétorquer, sachant que ce serait le dernier avant les vacances de Noël. N’empêche que la prise de son frère avait laissé des traces durables, traces désormais visibles à tous depuis qu’il avait comme un idiot arraché lui-même sa manche. Enfin, vu qu’il n’y avait personne ce n’était pas grave, il n’avait qu’à rapidement s’occuper de sa brûlure puis à se diriger au plus vite jusqu’à son dortoir où il se changerait et affaire réglée. Il commença alors à se passer le bras sous l’eau lorsque soudain un fracas monstrueux se fit entendre derrière lui, le faisant sursauter. Instinctivement, il retira son bras de l’eau et le cacha derrière son dos, mettant de l’eau un peu partout mais bon vu l’état général des toilettes des mecs ça ne se remarquerait probablement pas. Il jeta ensuite un regard suspicieux sur le responsable de pareil boucan et c’est alors qu’il vit …

Il était poursuivi ! Une immense limace jaunâtre recouverte de sa bave visqueuse venait de sortir d’une des cabines pour finir le travail de sa camarade de taille plus réduite et le carboniser définitivement … ou pas. Il lisait trop de romans d’horreur ces derniers temps, ça ne lui réussissait pas. N’empêche que, pour sa défense, l’élève affalé parterre ressemblait pas mal à une limace vu son état. Nikolaï ne voulait pas savoir ce qu’était la substance visqueuse qui le recouvrait pratiquement de la tête aux pieds mais c’était positivement dégoûtant, sans compter que ça ne sentait franchement pas la rose. Il était heureux de ne pas être à sa place, le gamin n’allait pas s’amuser au moment de nettoyer tout ça.

D’ailleurs, en parlant du gamin, la mélasse ne semblait pas avoir mis sa santé en danger car, à part d’une bonne humiliation dans les règles de l’art, il ne semblait pas souffrir de quoique ce soit lorsqu’il adressa la parole au Serpentard. Nikolaï reconnut d’ailleurs le gosse à sa voix. Etant donné son apparence physique, il n’avait pas immédiatement reconnu le jeune griffon, mais sa voix enfantine dissipa tous les doutes du troisième année. C’était le gamin qui s’en était pris plein la gueule en cours de Duels et qui ne s’était pas inscrit en Potions, un sacré numéro celui-là ! Mais il était plutôt drôle, en tout cas du point de vue du Vert-et-Argent. Ou plutôt il était rafraîchissant, il agissait vraiment comme un gamin immature et pour un gosse obligé à grandir trop vite et à mûrir en quatrième vitesse comme l’était Nikolaï, c’était une véritable qualité. Il n’irait pas jusqu’à dire qu’il était jaloux des enfants comme –c’était quoi son nom déjà ? Ah oui !- Ronan qui, ayant très probablement eu une enfance sans problème, vivaient encore dans un monde en noir et en blanc, mais en tout cas, il les enviait légèrement. Ça devait être vraiment bien de vivre dans une famille normale, avec des parents aimants ayant un job légal et des frères et sœurs qui s’appréciaient.

- Ouah ! Mais il t’est arrivé quoi là ? T’es tombé d’un balai ou quoi ?

‘Tain mais il ne pouvait pas se la fermer celui-là ! Pour une fois qu’il était parti dans une rêverie des plus agréables où il avait une famille comme toutes les autres, il fallait que le Rouge-et-Or le ramène à la réalité en parlant de son bras, ce qui lui rappelait par conséquent Alekseï. Saleté de gosse pourri gâté qui ne connaissait pas sa chance ! Bon OK il était peut-être UN PEU jaloux des gens comme Ronan, mais juste un peu et jamais il ne l’admettrait de toute façon. C’était une preuve de faiblesse et un Dmitriev ne montrait jamais ses faiblesses, on le lui avait suffisamment répété, avec force coups pour le lui rappeler en cas d’erreur. Il répondit donc légèrement irrité et pas d’humeur à inventer un mensonge sur le tas :

-Quelque chose du style. Pas envie d’en parler, donc restes-en là si tu veux que ton petit secret le reste, dit-il en désignant le chaudron renversé. Pas la peine d’être un génie pour deviner que tu n’as pas choisi cet endroit comme salle de potions pour la commodité de l’emplacement. Donc le deal c’est je ne dis rien sur tes petites expérimentations illégales et tu ne poses pas de question sur mon bras, ça te va ?

Dis comme ça, ça sonnait nettement plus comme un ultimatum qu’une simple proposition mais il était trop tendu pour s’en soucier. Il se doutait bien que le Gryffondor l’avait probablement juste interrogé par politesse, voire peut-être même parce qu’il s’inquiétait réellement, mais il venait d’un monde où toute question avait un sens caché et où chaque information donnée pouvait se retourner contre vous au moment où vous vous y attendiez le moins. Certes, après un an à Poudlard, il avait découvert que les gens « normaux » n’agissaient pas comme ça, mais onze ans d’éducation ne s’oubliaient pas si facilement, surtout pas après deux mois d’été où il était retourné dans le monde d’où il venait, monde où chaque personne rencontrée pouvait se révéler être un danger potentiel voire mortel.

Néanmoins, malgré ses paroles, il savait qu’il était au château et qu’ici les règles qu’il suivait chez lui ne s’appliquaient plus, il fallait donc qu’il se calme. Il avait été effrayé que quelqu’un déduise de la trace de doigts sur son bras ce qu’il en était réellement de sa vie familiale mais il était clair que Ronan n’était pas une menace dans ce domaine. Il n’avait donc aucune raison de s’en prendre au lion. Ainsi, il se passa de l’eau sur le visage pour se rafraîchir les idées. Qu’une limace vicieuse l’ait attaqué et que son frère soit un psychopathe frustré de la vie étaient deux choses, certes fort désagréables en elles-mêmes, mais qui n’avaient aucun rapport avec le griffon étalé parterre à quelques mètres de lui, il n’avait donc aucune raison pour s’en prendre au gamin. Il repassa donc son bras sous l’eau pour calmer un peu la douleur, puis se dirigea vers le lionceau et lui tendit son bras valide avec un demi-sourire.

-Allez debout m’sieur le maître des potions. Quoique t’ait été en train d’essayer de concocter, tu vas pas le finir en restant parterre. D’ailleurs, c'est juste mon avis mais on devrait penser à une façon d’empêcher qui que ce soit de rentrer ou alors j’espère que t’es un bon menteur, parce qu’il va falloir inventer une sacrée histoire pour expliquer tout ça, finit-il en désignant le bordel créé par le gosse.

- Houla, c’est pas ton jour on dirait. Ou alors, c’est parce que t’es un Serpentard, c’est ça ? Vous êtes toujours méchants et agressifs, non ?

Ouais et ils avaient des langues fourchues, c’était pourvu dans le pack après la cérémonie de Répartition, on lui avait pas dit ? Non, mais sérieusement, ce gosse était-il en train de chercher à l’énerver encore plus ? C’était quand même pas compliqué de laisser tomber le sujet et de passer à autre chose non ?

- Non ça me va pas. Tiens, je vais même te dire ce que je faisais là. Je faisais une potion, ça tu l’avais compris, pour devenir plus grand et plus fort.

Eh bien apparemment pour le griffon si. Et puis, franchement, il s’en foutait mais alors royalement de sa potion. Il voulait juste ne pas être mêlé aux problèmes du Rouge-et-Or si jamais quelqu’un venait à découvrir le désastre, finir de soigner sa plaie et rentrer tranquillement se changer dans son dortoir pour se détendre. Il avait bien gagné le droit à une soirée de repos après la journée de merde qu’il venait de passer. Sauf, que parler avec ce mioche c’était comme de parler à un mur. Il n’écoutait rien et n’en faisait qu’à sa tête. Voilà pourquoi il trouvait les Gryffondors fatigants, il fallait touuuuuujours qu’ils s’inventent de grandes aventures dans lesquelles ils étaient des héros sans peur et sans reproche, ils ne pouvaient pas aspirer à une petite vie tranquille comme tout le monde ? Oui, Niko était parfois un vieil homme dans l’âme mais, pour sa défense, il avait une vie un peu plus agitée que la normale d’où son désir de calme et de tranquillité. Et puis, il pouvait aussi se montrer d’une immaturité profonde quand il voulait. Juste que ce jour-là, il n’était pas d’humeur à se battre avec Ronan. Il soupira donc et se passa de l’eau sur le visage pour se calmer. Pas la peine de sauter à la gorge du première année, ça ne l’avancerait en rien et l’autre serait fichu de s’agiter encore plus.

Tandis qu’il se passait la brûlure sous l’eau, Ronan reprit la parole –ce gosse ne s’arrêtait jamais de parler, c’était pathologique !- et l’interrogea sur sa blessure. Apparemment dans l’imagination en surchauffe du garçonnet, la marque sur le bras du Serpentard était la preuve d’une bataille épique. S’il savait ! Le Russe faillit d’ailleurs lui dire la vérité juste pour le faire taire, mais il se retint à temps : il ne voulait pas être celui qui détruirait les illusions naïves de Ronan. Il se permit même un demi-sourire en entendant le lion se plaindre du goût atroce de la potion : c’était vraiment une réaction de gamin. Enfin, il l’aida ensuite à se remettre sur ses pieds, ignorant délibérément la question sur l’origine de ses blessures. Heureusement, le gosse, telle la girouette qu’il semblait être, se reconcentra bien vite sur le sujet du nettoyage de la pièce.

Nikolaï observa avec un sourire narquois Ronan lui faire une démonstration du « nettoyage à la Backhouse » comme il l’avait appelé. Au moins, ça avait le mérité d’être expéditif. Il s’apprêtait à en faire la remarque avant que le gamin ne lui demande son avis mais il fut bloqué par la transformation que ledit gamin était en train de subir. Les boucles brunes de Ronan poussaient à vue d’œil, mais pas de façon ordonnée jusqu’à lui donner une chevelure de fille comme elles l’auraient fait avec le sortilège « Cheveux drux », non plutôt de manière totalement chaotique. Certaines poussant vite, d’autres plus lentement, donnant à l’ensemble une incohérence profonde et surtout un manque d’esthétisme flagrant. Niko ne savait pas si exploser de rire ou bien rester digne. Il finit par choisir un entre-deux et, pointant du doigt la chevelure désormais bien fournie du griffon, il déclara :

-Dit je sais pas mais fait c’est bien là la question. Parce que, je ne voudrais pas te paraître désagréable étant un Serpentard et tout, oui il n’avait pas pu s’empêcher de rajouter une petite pique cynique, mais je crois que je ne risque pas grand-chose en disant que t’as dû foirer quelque chose dans la préparation de ta potion. T’es sûr d’avoir suivi le protocole comme il se doit ? Parce que sincèrement, toi qui parlais de bagarres tout à l’heure, on dirait franchement que tu t’es battu avec un coiffeur très TRES en colère et que tu t’es fait joliment humilier.

Oui, c’était exactement ça. L’impression qui se dégageait du capharnaüm qu’était devenue la tête de Ronan semblait le fruit des délires psychédéliques d’un coiffeur new age qui aurait un peu trop abusé du LSD. N’empêche qu’avec tout ça, Niko était assez intrigué : comment le Gryffondor en était-il arrivé à ce résultat ? Il avait bien dit que sa potion était censée le faire grandir non ? Le besoin était compréhensible vu sa taille soi-dit en passant mais la question n’était pas là, lui aussi avait subi les affres de la petitesse, n’ayant fait sa première poussée de croissance que durant l’été précédent son transfert de Durmstrang à Poudlard en deuxième année. Bref, le problème à résoudre était de comprendre comment une potion de grandissement pouvait se transformer en arme de destruction capillaire massive, mais quelque chose disait au Vert-et-Argent que Ronan n’allait pas vraiment être capable de répondre à ses questionnements.

[Hj : Je m'excuse du retard, j'ai une tonne de boulot en ce moment. Sinon, pour faire avancer l'action selon ce que tu décideras, tu peux considérer que Niko lance le sort envisagé à la fin dans ton prochain post ]

Ça y est Ronan était parti en mode panique totale. Plusieurs détails le prouvaient, le principal étant la façon dont sa voix dérapait de temps à autres dans les aigus, preuve qu’il n’avait pas encore mué. Niko aurait pu trouver la situation franchement hilarante si le Rouge-et-Or n’avait pas eu l’air aussi déprimé. Or, certes le Serpentard avait un amour de la race humaine tout limité, mais il n’était pas pour autant complètement aigri et ne jouissait par conséquent pas du malheur des autres. Il se concentra ainsi sur le parchemin que le gosse lui tendit pour tenter de découvrir l’origine de ses mésaventures et à partir de là envisager une solution viable. Et il n’eut pas de grands efforts à faire pour déterminer l’origine du mal dont pâtissait le griffon. En effet, au vu des effets de la potion, la suite des trois premières lettres citées par le lionceau n’était franchement pas difficile à découvrir. Et non ce n’était pas « itaine » comme l’avait hâtivement déduit Ronan, plutôt « illaire ». Nikolaï s’apprêtait donc à annoncer la mauvaise nouvelle à son cadet, mais celui-ci était toujours hautement préoccupé par son apparence physique et continua son monologue à voix haute.

-Purée ! Le massacre… Je peux même pas lancer un nouveau look, c’est trop moche…

Là, il ne pouvait qu’acquiescer mais, par compassion, il garda ses remarques pour lui, Ronan souffrait déjà assez par suite de ses erreurs, pas la peine de remuer le couteau dans la plaie. Néanmoins, les positions pour le moins étranges qu’il se mit ensuite à exécuter [et oui je vous rappelle que Niko a beau avoir une connaissance du monde moldu assez étendue, il n’a jamais entendu parler du body-building donc les simagrées de Ronan le laissent on ne peut plus perplexe] amenèrent une expression pour le moins sceptique sur la faciès du Russe. Non mais sérieusement il foutait quoi là ?

-Nnnnnh ! Bon au moins, est-ce que j’ai un corps d’athlète ? Tu trouves pas que j’ai grandi ? Franchement, je ferais peur sur un terrain de quidditch, non ?

Oh punaise c’était pour tenter de paraitre plus grand et fort qu’il avait fait tout ce cirque ? Et bah il était pas prêt d’atteindre un résultat potable. D’ailleurs, à l’écoute de la dernière question, Niko ne put retenir son ironie naturelle et déclara.

-Faire peur, c’est une certitude mais peut-être pas pour les raisons que tu imagines. C’est plutôt la question capillaire qui causerait des crises cardiaques à tes adversaires. D’ailleurs, « capillaire » c’est justement le fameux mot que t’avais pas réussi à déchiffrer, en tout cas j’en mettrais ma main eu feu.

Il se fit alors une remarque qui n’aidait en rien Ronan, mais qui était néanmoins vraie. A savoir que puisqu’il s’agissait en réalité d’une potion de super-croissance capillaire, le lionceau n’avait pas tellement raté son coup dans le fond. Bon certes, la potion devait, à la base, sûrement avoir un effet bien plus proche d’un sortilège de Cheveux Drux que de l’explosion capillaire actuellement en cours sur la tête du première année, mais n’empêche qu’on ne pouvait décemment pas dire que la partie « croissance » avait échouée. Bref, tout cela mis à part, il était question de mettre un terme au débordement capillaire désormais. Niko reporta donc de nouveau son attention sur le parchemin qu’il avait en main pour lire le protocole de la potion et en particulier les ingrédients utilisés pour voir si quelque chose lui semblait familier et de là s’il ne pouvait envisager un remède quelconque.

Ellébore en poudre, racines de belladonne en rondelles et bave de Scroutt à Pétard étaient les éléments principaux … rien de bien ragoûtant, mais surtout rien qui n’indique comment annuler les effets de la potion. Or évidemment, le Ronan n’avait pas considéré utile de noter les informations concernant l’antidote puisqu’il devait espérer un résultat excellent de sa potion, autant dire qu’ils allaient devoir faire marcher leurs ménages. Au moins ce qui était sûr c’est qu’ils n’allaient pas se lancer dans la concoction d’une contre-potion faite maison. Petit un, ils n’étaient pas assez bons et risquaient d’empirer les choses en voulant au pif imaginer un antidote et, petit deux, ils avaient beau avoir un chaudron, ils n’avaient pas d’ingrédients à leur disposition, ce qui réglait définitivement la question. Ils devraient donc se contenter d’user de leurs baguettes. Niko délaissa immédiatement l’option Finite puisqu’il s’agissait de contrer les effets d’une potion et non d’un sort, et se mit à repasser tous les sorts de sa connaissance.

Entre temps, il semblait que la potion avait atteint le maximum de sa puissance et qu’elle entamait son progressif déclin car les cheveux du Gryffondor avaient l’air de se calmer, mais peut-être n’était-ce qu’une accalmie avant une nouvelle tempête ou pire encore, peut-être que les deux gamins ne voyaient que ce qu’ils désiraient voir. Quoiqu’il en soit, Niko finit par se rappeler d’un sort qui pouvait peut-être s’avérer utile, il exposa donc son plan à un Ronan de plus en plus inquiet.

-Bon on se calme et on réfléchit, j’ai peut-être une idée mais j’ai peur qu’elle ne te plaise pas des masses. Cependant, écoute-moi jusqu’au bout avant de crier au scandale veux-tu ? Rappelle-toi que j’essaye seulement de t’aider.

Ces précautions oratoires prises, le Vert-et-Argent entama son explication.

-Bon, tes cheveux en ont encore apparemment pour un petit bout de temps à pousser, or en attendant qu’ils ne s’arrêtent et que tu puisses régler le problème d’un bon coup de ciseaux, je propose une solution intermédiaire. L’idée c’est de te lancer un sortilège de Calvitie, naan ne gueule pas tout de suite rappelle-toi qu’on a dit que tu me laissais finir d’abord. Je disais donc te lancer un sortilège de Calvitie parce que vu que la potion continuera à te faire pousser les cheveux après, ça supprimera au moins une bonne longueur, le temps que l’effet prenne fin. T’en pense quoi ?

Question stupide certes mais qui nécessitait d’être posée.

[Hj : Malgré l'attitude de Niko l'idée est bien entendu qu'ils se mettent à causer un peu plus, mais vu le caractère de ma p'tite vipère et étant donné la journée qu'il a eu ce ne serait pas crédible qu'il se mette soudain à taper la discut', je te laisse donc le plaisir de relancer la discussion avec Ronan l'infatigable ]

La façon que Ronan eut de se débarrasser du gêneur n’était pas très conventionnelle mais n’empêche que le gosse avait de l’humour. Tirer parti de la situation dans laquelle il était pour se foutre de la gueule de quelqu’un d’autre, Niko ne pouvait qu’approuver le machiavélisme à l’œuvre. Ainsi, un sourire appréciateur vint se peindre sur ses lèvres à la vue de la scène qui se déroulait devant lui. Dommage que le Poufsouffle ait fini par sortir de la pièce sans se rétamer une seule fois, ça aurait été la cerise sur le gâteau. Enfin, finalement mieux valait qu’il ne se soit rien passé, sinon il aurait pu se faire mal et les choses se seraient sérieusement compliquées. Alors que là, le gamin allait juste finir avec une sérieuse frayeur et deviendrait probablement l’attraction de la semaine à force de raconter qu’il avait rencontré un homme de Cro-Magnon dans les toilettes du sixième. Cette pensée agrandit encore un peu le sourire narquois du Serpentard, mais lorsque la porte se fut définitivement refermée sur le dos du blaireau paniqué, il redevint sérieux. Ils avaient un problème à régler.

Il exposa donc son idée à Ronan qui, à sa grande surprise, une fois le premier choc passé, l’accepta sans faire de scène. Courage gryffondorien ou juste acceptation du fait que c’était la seule solution viable ? Une question qui resterait sans réponse. Il la laissa donc de côté et se concentra sur le sort qu’il allait lancer. En effet, il n’en avait jamais vu l’utilité, donc depuis qu’il l’avait appris il ne l’avait plus utilisé et redoutait de faire une erreur. Mais tout se passa correctement et Ronan se retrouva soudain aussi chauve qu’un bonze. Ça lui donnait un style dans un sens, pas spécialement un bon style mais un style tout de même. D’ailleurs, le Rouge-et-Or avait dû se faire la même remarque car il pria à voix haute pour que ses cheveux repoussent vite. Et quelqu’un là-haut dut entendre ses prières car la potion recommença à faire effet la seconde suivante. Néanmoins, comme les garçons avaient déjà pu le remarquer un peu plus tôt, la puissance était nettement amoindrie et, si la pousse ne se faisait pas à la même vitesse selon les zones du crâne du première année, on était loin de la catastrophe précédente. A ce rythme, le lionceau allait juste se retrouver avec une coupe un peu longue et un peu asymétrique, rien qu’un passage chez le coiffeur ne puisse arranger. Nikolaï conclut donc l’affaire sur une touche philosophique.

-Finalement, comme ça ce sera l’occasion de tenter une nouvelle coupe. T’as qu’à essayer un truc qui te fasse paraître plus âgé si tu veux impressionner sur le terrain de Quid’.

Après tout, c’était bien le but de toute cette histoire non ? Quoique, de l’avis de Nikolaï, quoiqu’il fasse, Ronan avait peu de chances de passer pour quelqu’un d’effrayant. Il avait cet air de poupon malicieux qu’ont certains gamins et qui les rend absolument adorables mais dangereux ce n’était clairement pas un adjectif qu’il utiliserait pour décrire le Rouge-et-Or. Enfin, tout ça ce n’était pas vraiment ses affaires. Il avait aidé Ronan quand celui-ci en avait eu besoin parce qu’il était le seul à être là mais il n’avait pas l’intention de s’attarder non plus pour taper la discute. Il devait encore finir de nettoyer sa plaie et ensuite aller se changer. Mais il profita d’abord d’avoir sorti sa baguette pour utiliser le dernier sort qu’il avait appris en cours de Flitwick et sécher l’inondation que Ronan avait causée. Ça faisait tout de suite moins désordre. Content du résultat, il se désintéressa du griffon et se préoccupa de nouveau de sa plaie. Elle était toujours aussi rouge et si, tout à l’heure, trop occupé par le bordel de Ronan, il l’avait un peu oubliée, maintenant que son esprit était de nouveau vide de préoccupations, elle recommençait à lui rappeler sa présence par des élancements douloureux. Il la passa donc de nouveau sous l’eau mais apparemment c’était une mauvaise idée. Car si précédemment, cela avait un peu apaisé la douleur car cela avait refroidi son bras, maintenant que la brûlure avait complètement refroidie, le jet d’eau ne faisait que raviver la douleur. Surpris, il retira son bras brusquement et poussa un juron dans sa langue natale.

-Дepьмo !

C’était définitif au prochain cours de Soins aux Créatures Magiques il allait faire exploser toutes les limaces de feu qui croiseraient son chemin !