Gosh, quelle bonzerie ! Super idée de s'être inscrite à ce genre d'examen, heureusement que Bluenn ne jouait pas son entrée en troisième année, sinon elle était bonne pour moisir chez les minipouces le restant de sa vie. Si seulement elle avait mieux révisé les sortilèges basiques. Quelle cruche. Bravo ! La blondinette était épuisée, littéralement; Son devoir n'était pas concluant du tout, et elle avait mal à la tête. Les symptômes de la perdition.

Elle soupirait incessamment, un peu trop frustrée pour réaliser que rien n'était totalement terminé. Elle pouvait toujours tenter un joli rattrapage durant la partie pratique. Elle s'était énormément entrainée et maîtrisait à la casi perfection tous les sortilèges des 5 premiers chapitres de son manuel. Pour les autres, c'était assez alternatif. Um. Elle avait pourtant dépensée deux semaines de sa vie à débecter cette farandole de sortilèges. Elle espérait donc que cette pratique assidue lui permettrait de réaliser une meilleure performance que pour son travail écrit, sinon, c'est vraiment qu'il y avait anguille sous roche. Blue n'avait jamais autant appris de truc par cœur de sa vie ! Fallait pas pousser.

Pourtant, Merlin n'avait pas de raison de lui jouer des tours. Les motivations de Bluenn étaient louables, et étrangement, le destin ne semblait pas les prendre en compte. C'est bien dommage. Pour une fois, la blondinette avait juré de ne pas tricher à l'examen, alors qu'habituellement, elle gardait quelques antisèches intelligemment dissimulées dans sa manche. Que Salazar la garde, elle ne s'en était pourtant pas toujours servies. Une fois d'ailleurs, elle s'était trompée de papier malin et s'était retrouvée en évaluation d'arithmancie avec des noms de cucurbitacées collées à son bras. Brillant. Il faut dire aussi que notre jeune sorcière n'est pas une adepte du rangement organisée, étend donnée sa passion inconcevable pour Capharnaüm.

Quatre heures à faire travailler incessamment son cerveau mortifié. Elle se sentait aussi desséchée qu'un papyrus défraichi. Bien dommage, car l'heure de sa convocation arrivait à grand pas. Elle préféra ne rien réviser durant le laps de pause qu'elle avait. Pour elle, ce genre d'exercice lui était fatal. Il suffisait qu'elle répète encore juste avant l'ultimatum et son TP serait du caca vert. Shit. Tant pis. Elle céda à la tentation et révisa encore un peu.

Boum badaboum. L'heure était arrivée. THE TP of the month's coming. Wahou, suspens suspens, when you take us ! Bluenn inspira un grand coup, jeta un coup d'œil à ses mains tremblantes et moites, puis les rangeadiscrètement dans ses poches et pour ainsi ne rien traduire de son stress. Pécisément entrainée, la blondinette afficha un sourire brillant avant d'entrer dans la salle : un joli regard et un sourire angélique peuvent faire gagner deux bons points. C'est déjà ça de prit. De plus, Blue était une très bonne actrice : son visage pouvait vous faire croire à une paix sereine alors qu'un baobab lui cognait l'intérieur du crâne.

Elle passa la porte de la salle de classe qui lui parut anormalement grande et effrayante. Son sourire se figea un peu mais son naturel ne broncha pas. Pourtant, elle se sentait comme si un nyctalope était pendu à son estomac. Le regard actif, elle aperçut alors le professeur Flitwick, perché à son bureau comme toujours. Elle le salua avec politesse et attendit sagement qu'il prenne la parole, avec le plus de retenu qu'elle avait. Elle avait l'impression d'être une condamnée à mort et dont Flitwick allait annoncer la manière dont on allait l'achever. Tandis que le petit professeur marmonnait les instructions, Blue trouva que sa moustache ressemblait affreusement à des mandibules prisent de sadisme. La blondinette déglutit avec difficulté. Un étrange goût de mimolette s'installa dans sa gorge.

Le but était le suivant : faire revenir à Flitwick son coktail sans perdre une micro goutte de breuvage. La jeune sorcière eut un moment de silence et de vide intra cranien. Le sujet lui semblait tellement simple ! Elle avait énormément pratiqué les sortilèges d'attraction, mais elle se rendit compte que 'accio' était bien trop brutal pour cette situation. Elle réfléchit un peu, et conclu que le bon vieux 'wingardium leviosa' serait parfait. Seulement, elle ne s'était entrainée qu'avec des coussins, et donc niveau habileté, elle ne connaissait pas du tout son niveau.

Elle cligna des yeux. Tant pis. L'instinct c'est le bon truc parfois. Elle aperçut alors le verre de sirop sur la haute armoire. Elle fronça les sourcils mais ne dit rien. C'était étrange qu'un verre puisse atterrir là-bas, mais soit. Elle brandit sa baguette, visa le verre avec précision et articula avec minutie :

- Wingardium leviooosa ! son poignet fit un joli cercle.

Le verre s'éleva lentement dans les airs, si bien que Blue resta profondément concentrée sur ses gestes. Trop peut-être. Sa main trembla un peu, ce qui eut pour conséquence de faire trembler le verre de la même manière. Horrifiée, elle reposa le verre sur l'armoire avec le plus de douceur possible. Ouf, aucune goutte n'était perdue. Elle soupira et s'épongea le front.

Durant un court instant, elle se ressaisit, et tenta de faire le vide dans son esprit. Elle n'avait qu'être avoir des gestes plus souples et sûrs, et elle réussirait.

- Wingardium leviooosa ! dit-elle à nouveau,

Cette fois, le coktail s'éleva avec moins de cabossages. Avec douceur et minutie, la blondinette le fit léviter vers elle avec des gestes de danseuse. Elle allait lentement, très lentement, mais elle était au moins sûre de ne rien renverser. Son bras, toujours tendu, commençait à lui faire mal. Mais elle y était. la délivrance arrivait. Les derniers centimètres furent les plus longs : son bras menaçaient de s'écrouler à tout moment, réduisant à néant tout ses efforts. Mais le verre arriva jusqu'au bureau. Les yeux brillants, Blue abaissa sa baguette et posa délicatement le breuvage devant son professeur. Fière d'elle, ses muscles se laissèrent retomber et elle soupira de bonheur.

- Piouuu... Voila M'sieur !

Calvin se réveilla tôt, comme tous les jours, et, en ouvrant ses petits yeux bleu et vert, il s'aperçut que la chambre où il dormait était un vrai capharnaüm. D'ailleurs ce n'était plus vraiment une chambre, mais plutôt un coffre de Gringot très mal rangé, on aurait eu autant de mal pour trouver une anguille belge dans une botte de foin. Aujourd'hui avait lieu l'examen de Sortilèges, et le jeune rouge et or voulait réviser un minimum avant de se jeter dans la gueule du loup. Il s'habilla donc rapidement, et fonça vers la Grande Salle où une farandole de plats l'attendaient pour le petit déjeuner. Il courut à toute vitesse pour descendre les escaliers, et... badaboum, la hanse de son sac s'était pris dans les petits pieds agités, et provoqua la chute du garçon. Son contenu s'était un peu renversé sur le sol froid du château, et c'est avec empressement que Calvin rangea l'encre et le papyrus, papier assez gros, mais il n'avait plus de parchemin.

Une fois son la peau du ventre tendue au maximum grâce à des céréales, du jus d'orange et à un peu de mimolette. En se levant pour se rendre à l'examen, il se sentit ballonné, ce qui le fit rougir comme si quelqu'un le remarquerai. Il eût l'impression de s'être transformé en cucurbitacée avec deux pieds. En se rendant dans la salle, il croisa la nouvelle directrice de Gryffondor et sa mandibule resta bloquée sous le choque. Cette femme était vraiment très belle, et avoir cours avec elle était un plaisir intellectuel et visuel. Après toutes ces aventures épiques, ses pieds passèrent le palier, puis devant le professeur d'Enchantement.

Il était seul dans la salle avec Filius Flitwick. Ce dernier prit le temps de lui expliquer ce qu'il attendait de lui. Son sirop de cerise avec boule de glace et ombrelle s'était malencontreusement retrouvé sur une armoire. Quelle blague, comment avait-il fait pour la mettre la bas alors qu'il était tout petit. C'était forcement fait exprès, et s'il n'avait pas utilisé la magie, il avait surement utilisé une échelle, ou confectionné un escalier avec des livres. Le petit vieux était vraiment un mauvais menteur. En plus le gros meuble était au fond de la salle, s'il y tenait vraiment à cette coupe, il s'en rapprocherait pour être sûr que rien ne tombe quand les élèves essayeraient de la récupérer par magie. Car oui, il fallait mobiliser toutes ses connaissances pour savoir qu'elle sortilège utiliser. Ça aussi c'était une grosse blague, tout être humain ayant un minimum d'intelligence et de logique savait qu'il fallait utiliser un sort de lévitation. Mais peut-être que le professeur disait ça à tous les élèves pour leur voler un sourire et pour ne pas trop les stresser. Calvin remarqua que Filius le regardait en attendant qu'il commence.

- Excusez moi professeur, je... j'essayai de me souvenir ce qu'était un nyctalope.

Le Gryffondor brandit sa baguette, et ne put s’empêcher de penser à celle de son tuteur, qui était en bois de baobab, et excellente pour les sortilèges. Il répéta plusieurs fois le mouvement de poignée pour être sûr de ne pas déraper le moment venu. Il se sentait prêt, il réussirait ce petit exercice sans aucune difficulté. Peut-être ferrait il apparaître une seconde boule de glace, mais le professeur risquerait de prendre ça pour de la vantardise digne d'Ange Dawster.

- Wingardium levioOosa, dit-il calmement en accompagnent ses mots d'un magnifique mouvement de poignet.

Après un petit tremblement, la coupe s’élevât dans les airs, et Calvin la dirigea pour qu'elle s'approche de Filius. Le Chemin se fut rapidement sans que rien ne coule ou ne s'écrase sur le sol. La glace entama l’atterrissage vers la table un peu rudement, et l'ombrelle s'envola. La coupe pleine de son sirop de cerise et de sa boule de glace arriva seine et sauve sur le bois. Mais par un miracle inattendu, l'ombrelle vint se planter doucement sur la froide texture. Après un remerciement du professeur d'Enchantement, le garçon sortit de la salle, plutôt fier de lui. L'examen était terminé, et il pouvait maintenant se concentrer à faire autre chose, comme, lire des livres pour apprendre de nouveaux sorts qui pourraient faire venir une coupe de glace instantanément. Il courut donc vers la Bibliothèque où il pourrait assouvir ses désirs de connaissance.

La mandibule crispée, Clarisse sortit de la salle d'examen après avoir rendu son pitoyable essai. La partie théorique avait été une véritable catastrophe et lui laissait un goût amer en bouche. La rousse n'avait jamais aimé les dissertations, ou tout ce qui s'en rapprochait de près ou de loin. Sans doute son aversion était-elle liée à son désintérêt profond pour l'Histoire de la magie, matière par excellence où il fallait pondre dissertation sur dissertation avec des sujets aussi ennuyeux que la dernière guerre des chamans africains qui avaient mis en péril l'existence du baobab, arbre pourtant sacré dans ces contrées inhospitalières. Elle avait beau tenter de faire un effort, cette forme de rédaction ne lui convenait pas du tout. Elle ne savait jamais comment articuler ses idées, à quel moment parler de telle ou telle chose, et le pire de ses maux, mais non le moindre résidait dans la recherche d'une problématique. Par merlin mais pourquoi fallait-il une problématique?! L'intitulé du devoir était toujours suffisamment nébuleux pour promettre un hors-sujet à tous les coups. Comment trouver une problématique intéressante? Parce que non contents de leur demander de faire sortir de leur chapeau une question, il fallait en plus que cette dernière se révèle pertinente et intéressante aux yeux de l'enseignant. Comme si ce n'était pas assez difficile comme ça! Parfois, Clarisse avait des envies de meurtre...

Et à présent elle attendait bêtement d'être appelée pour la suite des opérations. Le tic-tac de l'horloge résonnait encore dans sa tête, se mêlant à tous les sorts qui lui étaient venus pour la rédaction de ce stupide parchemin. Toutes ses idées se télescopaient dans son esprit sans plus aucune logique. C'était devenu un véritable capharnaüm, ce qui n'arrangeait pas sa sensation de malaise. Depuis qu'elle était entrée dans la salle de torture, elle avait sentit son estomac se retourner furieusement, comme pour protester contre le mauvais traitement à venir. En même temps, elle se sentait bête. Bête de ne pas s'être méfiée. Lorsque Flitwick leur avait annoncé l'examen blanc de sortilèges il avait cet air guilleret digne de Dumbledore et de ses idées les plus foireuses. Un peu comme si une partie du regretté directeur s'était réincarnée en Flitwick, lui susurrant à l'oreille les plans de projets farfelus. L'aiglonne s'en voulait de ne pas s'être méfiée. Le petit professeur avait été si content de lui avec ses yeux qui pétillaient d'avance... il ne pouvait y avoir qu'anguille sous roche! Et elle ne l'avait pas décelé. L'Écossaise soupira.

Son tour n'était pas prêt d'arriver. L'enseignant procédait avec rigueur par ordre alphabétique et ils en étaient à la lettre F. Angelina Fowl justement venait d'être appelée. Cette espèce de cucurbitacée se leva de son plus bel air précieux et se dirigea vers la porte. Quelle pimbêche! Clarisse la détestait, et pour un peu, elle lui aurait ouvertement souhaité un échec cuisant, histoire de lui remettre les idées en place. Cette fille avait tout trop facilement, à croire que les sourires hypocrites de cette fausse blonde valaient plus que tout le travail personnel des autres. L'argent de « père » y était sûrement pour beaucoup, mais ce n'était pas une raison pour dire amen à chaque parole de cette insupportable Poufsouffle. Et dire que Prudence était amie avec elle. Elle devait être plus niaise que ne l'avait pensé la sorcière. Décidément, à Poufsouffle, ils avaient tous un sérieux problème et il était bien dommage que le monde ne s'en aperçoive pas. Soudain, il lui sembla entendre un badaboum sonore en provenance de la salle d'examen pratique, signe évident que cette très chère Angelina aurait loupé son coup. L'adolescente n'était pas certaine d'avoir entendu du verre se briser à cause des discussions de ses camarades. Soit disant qu'ils ne devaient parler qu'à voix basse...

Après cet incident plus que réjouissant, Clarisse se laissa porter d'une pensée à l'autre et elle s'éloigna rapidement de cette journée qui avait mal commencé. Il lui revint en tête ses vacances de Noël, sa rencontre avec Flynn, Noël, la fête au village à laquelle sa mère avait voulu participer et la grande farandole qu'ils avaient formé pour l'occasion. Des souvenirs dans lesquels elle se plaisait à replonger. Pourtant...

« McBrien Clarisse. »

C'était l'heure! De nouveau, la jeune fille eut la nausée. Elle savait qu'elle ne rendrait pas son déjeuné, pourtant elle avait cette sensation désagréable qui lui collait à l'estomac. Inspirant lentement pour tenter de chasser ce mal inconnu, Clarisse pénétra dans la salle des tortures. Flitwick l'attendait bien sagement près de son bureau, l'air aussi enthousiaste que quelques heures plus tôt, juste après avoir distribué les sujets. A ce moment-là, il avait dû être fier de son petit effet, le sadique!

«Bonjour Professeur. »

Ton neutre habituel et poli, bien que ce ne soit pas l'envie qui lui manque de l'envoyer promener avec ce mal de ventre qui s'intensifiait. Et ce n'était pas du stress. Le Rouge-Gorge aussi manifestait son mécontentement. Indifférent aux sentiments de son élève, le petit homme lui expliqua de quoi il en retournait avec autant de bonne humeur que si elle avait été la première. Ça devait être fatigant à force. Il était question de faire venir un verre de sirop avec de la glace depuis le haut de l'armoire jusqu'au professeur près du bureau, c'est à dire de faire traverser la pièce à la gourmandise sans en renverser une goutte. L'exercice demandé lors du passage des BUSEs avait été similaire et la rousse l'avait assez bien réussi. Pour l'occasion, elle avait utilisé un « Wingardium Leviosa », ce qui ne l'avait pas empêchée de laisser échapper quelques gouttes. Elle décida donc de changer de méthode, histoire de voir ce qui allait le mieux. La rousse se plaça au milieu de la pièce. Ses faibles talents de nyctalope serviraient à y voir plus clair dans le coin sombre où était cachée l'armoire. D'un geste sûr et d'une voix claire, elle lança:

« Locomotor verre de sirop. »

Le verre s'éleva en tanguant faiblement. Aïe. Deux gouttes de sirop virèrent de bord presque aussitôt. Grimaçant, la Serdaigle tâcha de se concentrer mieux que ça pour la suite. Il était hors de question qu'elle échoue là où elle avait réussi quelques mois plus tôt. Elle bougea sa baguette avec délicatesse, veillant à éviter les gestes brusques et fit traverser la salle à ce verre de sirop tellement important aux yeux de Flitwick. On savait déjà qu'il était gourmand, mais là, ça relevait de la psychanalyse. La traversée se fit à vitesse modérée, toujours à la même hauteur et sembla se dérouler sans heurt. Ne restait plus alors que l'atterrissage, phase autrement plus dangereuse. Redoublant de concentration, la rousse fit descendre lentement le verre jusque sur le bureau, tout à côté de la vieille main du petit homme. Main qu'il avait d'ailleurs fort ridée de part son grand âge et qu'on aurait presque pu croire légèrement granuleuse au touché, un peu comme du papyrus. Probablement un peu trop axée sur la main de l'enseignant, Clarisse fauta et le verre trembla un peu avant de se poser définitivement. Deux gouttes à nouveau s'échappèrent du contenant, tandis que l'ombrelle ne tenait que par le bon vouloir de Merlin. M'enfin elle tenait, c'était tout ce qu'on lui avait demandé.

«Au-revoir Professeur. »

L'épreuve étant officiellement terminée, la jeune fille prit congé. Elle n'avait plus qu'une envie: rejoindre son dortoir et aller se rouler en boule dans son lit pour atténuer ce mal au ventre qui ne passait pas et oublier cette mauvaise journée qui s'achevait enfin. C'est en posant les pieds sur l'escalier qu'elle comprit enfin. Son estomac était décidément contre ce bout de fromage suspect qu'elle avait prit au déjeuné et semblait protester énergiquement contre ce corps étranger qui ne lui plaisait pas: la mimolette!

Fabula avait été l’une des dernières à sortir de la salle d’examen pour la partie théorique, relisant jusqu’au bout du temps qui leur avait été imparti son devoir, s’accrochant à sa copie comme une anguille à sa roche pour s’assurer qu’il n’y avait plus rien à rajouter, enlever ou changer. Le sujet ne l’avait pas vraiment inspirée et elle espérait pouvoir se rattraper avec la partie pratique. Ce fut seulement lorsque Flitwick quitta son bureau pour venir ramasser les derniers devoirs des élèves encore présents que Fabula se décida à déposer les armes et sa copie entre les mains du professeur.

Comme pour l’examen théorique, ils n’avaient pas su à l’avance sur quoi leur sujet pratique allait porter, aussi Fabula avait-elle choisi de tout réviser, juste dans le doute. C’était plus simple que de se perdre dans des spéculations sur de supposés sujets plus farfelus les uns que les autres. Elle avait ainsi ressorti tous ses cours des années passées qu’elle avait conservé bien précieusement, transformant l’une des tables de la bibliothèque en véritable capharnaüm. Certes, il s’agissait seulement d’un examen blanc, sans conséquence autre qu’un certain nombre de points en plus ou en moins pour les différentes maisons. Mais ce ne serait vraiment pas la classe pour Fabula de se louper sur un sujet commun à tout Poudlard. Il ne manquerait plus que Serdaigle se vautre face à Serpentard lors de leur prochain match de Quidditch après ça, et elle n’aurait plus qu’à se reconvertir en tailleuse de cucurbitacées.

Lorsque ce fut enfin à son tour de se présenter devant Flitwick, Fabula ne put retenir une moue de déception en voyant la salle de classe, où devait se dérouler leur examen, tristement ordinaire. Elle connaissait assez leur malicieux professeur pour le savoir capable de toutes les fantaisies en matière de magie, et sans miser sur un sujet particulier, elle s’était au moins attendue à se retrouver face à un décor surprenant : une volière de jobarbilles, un alignement de portes mystérieuses, ou même une forêt de baobabs…

Il n’y avait rien de tout cela. Cependant, la question que posa Flitwick après qu’elle l’eut salué poliment n’en fut que plus surprenante. Le fourbe avait ménagé son effet. La coupe contenant le sirop et la boule de glace semblait minuscule à cette distance, et il fallait presque être nyctalope pour l’apercevoir, cachée dans la pénombre régnant dans ce recoin au sommet de l’armoire. Une farandole d’idées défila alors dans la tête de Fabula. Voyons, quels sortilèges de mouvement connaissait-elle ? Il y avait bien sûr le Wingardium Leviosa qu’ils avaient appris dès leur 1ère année, mais cet enchantement fonctionnait davantage avec les objets plus légers. Elle s’en serait satisfaite si elle n’avait pas eu d’autres choix, mais ce n’était pas le cas. Ils avaient commencé à apprendre le sortilège d’attraction cette année, cependant Fabula ne le maîtrisait pas encore à la perfection, ce qui était d’autant plus gênant que la manœuvre demandait de l’habileté, le contenu du verre pouvant se renverser à tout moment. Il ne lui restait plus alors que le sortilège Locomotor, qui permettait de déplacer un objet.

D’ordinaire, Fabula aurait joué la prudence. Mais le défi d’adresse qui lui été proposé là l’intéressait trop. Il lui rappelait un aspect des cours de Potions qu’elle aimait tant. Chaque préparation demandait minutie, concentration, patience, et parfois même dextérité. Des qualités qu’elle avait appris à maîtriser et qui lui était demandées ici. L’occasion était trop belle pour ne pas s’en servir. Décidée, Fabula pointa sa baguette sans trembler, visant du mieux qu’elle pouvait, et prononça d’un ton posé :

- Accio verre !

Comme elle s’y attendait au vu de ses précédents essais, le démarrage fut un peu trop brutal, et la coupe racla contre le sommet de l’armoire avant de s’avancer dans les airs, laissant s’échapper un peu de sirop qui vint s’écraser sur quelques feuilles de papyrus oubliées sur une table en contrebas. Fabula serra dans un réflexe les mâchoires, sa mandibule se contractant tandis qu’elle se concentrait davantage et que le verre ralentissait doucement. Le sortilège ne permettait pas d’immobiliser totalement l’objet dans sa course, aussi Fabula ne pouvait-elle pas souffler un instant avant que celui-ci ne soit parvenu à destination. Elle se sentait comme hypnotisée par le liquide qui ondulait doucement à l’intérieur du verre. De temps en temps, il épousait son rebord, et Fabula tentait alors d’adapter au mieux le rythme de sa progression.

Finalement, utiliser un Locomotor aurait été bien plus judicieux, ce sortilège permettant sûrement de mieux manier la cible souhaitée. Mais il était trop tard pour regretter son choix. Aucun boum, badaboum, et autres onomatopées déplaisantes du genre ne seraient tolérées. La coupe arriva enfin jusqu’à Fabula et sa main gauche tendue qui la réceptionna sans trop de peine. Elle la tendit à Flitwick, qui hocha simplement la tête en la remerciant, avant de sortir de la salle plus éprouvée qu’elle n’y était entrée. Tandis qu’elle se détendait et laissait derrière elle cet exercice de concentration plus ou moins réussi, une comptine enfantine lui revint en tête, sans véritable raison ni lien de causalité. Son esprit avait ses raisons que la raison ignore… Ça faisait « Il était un petit homme, pirouette, mimolette … » - ou pas.

Le temps imparti pour la partie théorique venait d'arriver à son terme. Ciel fut soulagé, il avait fini depuis un petit moment d'écrire, et il s'ennuyait ferme. Il dessinait des signes bizarres sur sa feuille, un peu comme sur les papyrus égyptiens…Des hiéroglyphes! Voilà, ça ressemblait à des hiéroglyphes. Ses camarades par contre semblaient avoir quelques difficultés à répondre. Le sujet était certes vaste, mais cela permettait au moins de choisir soi même la problématique et donc d'avoir une réponse quelque peu personnelle. Et c'était le genre de sujet qui convenait parfaitement au Préfet : il avait élevé chez les moldus, donc il avait découvert la magie à ses onze ans, et il avait donc un point de vue assez critique sur la magie.

Ciel rendit son parchemin et s'empressa de quitter la salle, sauf qu'il emporta sa chaise dans son élan, dont un pied emporta à son tour sa table! Badaboum! En un instant, tous les regards furent tournés vers lui, qui se répandait déjà en excuses et redressait son mobilier. Rougissant légèrement, il quitta la salle en attendant qu'on l'appelle pour participer à la partie pratique. Il avait beau être Serdaigle, ce qu'il préférait dans les cours de Flitwick, c'était la partie pratique. C'était certes intéressant de savoir comment lancer un sort, c'était génial d'en lancer un. La théorie était faite pour les matières comme l'Histoire de la Magie ou l'Etude des Moldus, pas pour les Sortilèges…

Le soir tombait et il n'était toujours pas passé. Un élève qui sortait dit à haute voix qu'il fallait être nyctalope pour pouvoir rentrer aux dortoires. Nyctalope? Ciel se demandait s'il y avait un rapport avec "antilope", mais il ne voyait pas en quoi être une antilope aidait dans ce genre de situations… Son nom fut finalement prononcé, et il pénétra dans la salle de cours. Là se trouvait le petit enseignant, son directeur de maison. Un homme admirable, qui représentait parfaitement les couleurs de Rowena Serdaigle. Mais à mesure qu'il s'avançait, l'Aiglon remarqua que le professeur avait une étrange ressemblance avec une anguille! Oui! Il avait un visage d'anguille! Ciel fi de son mieux pour ne pas rire devant l'homme-poisson qui devait l'examiner. Chassant de son esprit l'image d'un Flitwick sous marin, il s'arrêta de marcher et prit connaissance du sujet. Pathétique. Vraiment pathétique. Ce qu'on lui demandait n'avait aucun intérêt. Ce n'était en aucun cas fun. Il aurait voulu qu'on lui demande de faire apparaitre des nains de jardins dansant la farandole, ou alors de jouer au Quidditch en remplaçant son balai par un baobab sur lequel on aurait lancé un sort. Enfin un truc drôle! Pas une idiotie comme ça…

De plus, l'énoncé était clair : "un sortilège". Le plan que Ciel était en train d'élaborer ne pouvait donc pas être accepté. Il voulait alléger l'armoire, la faire venir avec un Locomotor, puis tenter un Wingardium Leviosa sur ses chaussures afin d'atteindre le haut de l'armoire. C'était un plan compliqué, utiliser tous ces sorts était inutile, mais au moins c'était plus drôle que ce que le professeur devait attendre d'un troisième année, à savoir un Locomotor. Si seulement Ciel connaissait un sort pour se faire pousser des mandibules comme les fourmis, histoire de faire un peu original en n'attrapant pas le verre avec les mains…Mais non, Ciel était condamné à faire une démonstration classique, aussi ennuyeuse qu'un spectacle de claquettes performé par une mimolette. A moins que… Oui, voilà, Ciel ne pouvait utiliser qu'un sortilège pour déplacer le verre, mais s'il le voulait il pouvait en faire d'autres inutiles, pour le fun! Un sortilège de Peinture Lumineuse pour commencer. Il écrivit "MU" sur son propre front, dans un bleu foncé qui était très Serdaigle.

- Avis! Locomotor table! Immobilus! Wingardium Leviosa…

Des nuées d'oiseaux apparurent de sa baguette, une table au fond de la classe se mit en mouvement, s'approchant dangereusement des oiseaux puis comme par magie ralentit, alors que l'impact avec les volatiles semblait inévitable. Puis suivant l'ordre de Ciel, la table s'éleva et se mit à suivre les indications de Ciel pour éviter les fameux piafs. Puis, avec une succession d'autres Wingardium Leviosa, il empila certaines tables les unes sur les autres, formant des tours de tailles variables et à l'équilibre incertain, la pièce était à présent un véritable capharnaüm. Rassurant alors le Professeur Anguille, il lança un Locomotor sur le verre. La coupe se mit aussitôt en branle, mais Ciel n'avait pas prévu qu'avec un Locomotor, le verre frotterait contre le haut de l'armoire, rendant l'opération beaucoup plus délicate qu'il ne l'avait prévue. Il prit alors son temps, déplaçant le dessert petit à petit afin de ne pas renverser son précieux contenu. Il y parvint finalement, rien n'avait été renversé, mais il avait été particulièrement lent, ça n'allait pas jouer en sa faveur. Il dirigea ensuite la coupe vers lui, mais au dernier moment décida de l'emmener faire un tour vers la cité qu'il venait de former avec les tables. Il fit slalomer précautionneusement la coupe entre les pieds des tables, en faisant bien attention à ne rien renverser. Son idée de départ avait été d'emmener la coupe plus profondément encore mais l'épisode de l'armoire lui avait fait perdre assez de temps comme cela, et il finit par amener la coupe vers le professeur, qui pour le coup en avait eu pour son argent.

- La prochaine fois, faites attention avec vos desserts, je ne serai pas toujours là pour vous les récupérer Professeur.

Il ne savait plus ce qu'il disait, il avait la tête aussi grosse qu'une pastèque. Amusant d'ailleurs que la tête soit souvent comparée à un cucurbitacée, que ce soit le melon, la pastèque… Mais revenons en au préfet, qui pour le coup avait peut être les chevilles qui avaient enflé. Il quittait la salle, fier de son spectacle, mais il n'avait aucune idée de la façon de se débarrasser de la peinture lumineuse, il se dirigea donc en direction de l'infirmerie.