L'Exploration (PV Lucy Ann) [TERMINE]

La veille, Lucy Ann avait laissait la jeune Lalys à la bibliothèque, avec un bisou sur la joue. Cela l’avait légèrement déstabilisée. Elle et sa recherche de prince charmant. Mais finalement, si l’étudiante était venue rechercher son aide, c’était juste parce que Suzie lui paraissait apte à lui en apporter, de l’aide. Voilà tout. Elle se faisait bien trop d’idées. C’est ça, la libido, lorsqu’on ne peut pas la contenter. Mais mine de rien, Suzie avait passé une merveilleuse soirée. A pensée à sa visiteuse du jour. Ca l’avait légèrement perturbée quand même, mais bon. Elle n’allait pas se plaindre de ça, au contraire. C’était presque si elle pouvait se souvenir de l’odeur de la rouquine. Mais non, elle n’avait pas rêvé d’elle ou quelque chose comme ça, ne vous emballez pas.
En tout cas, elle avait bien dormi dans son petit manoir tout propre. Et s’était levée de bonne heure, le lendemain matin.

En cette douce matinée, l’historienne s’était habillée de façon sobre, pour ne pas attirer le regard. Une robe sombre, des bottes à talons aiguilles tout aussi sombres, et un chapeau haute forme. Ses cheveux toujours relevés grâce à une coiffure que seule elle connaissait la recette. Elle s’était alors mise en route pour le ministère, pour au moins arriver tout de même à l’avance. La mangemorte n’était venue que deux ou trois fois dans ce grand établissement. Pourtant, cette fois-ci était bien différente. Elle savait que ça n’allait pas se passer de la même manière. Oui, il était rare qu’elle vienne pour falsifier des documents. Mais bon, il fallait qu’elle se console. Si ça tombe, la famille de Lucy Anne était une très bonne famille de sang pur, et tout allait très bien se passer.
Mais elle avait un mauvais pressentiment. En plus, elle se baladait dans le ministère en tant que mangemorte cachée. Et ça, ça craint.
La demoiselle était arrivée dix minutes à l’avance. Cela se voyait qu’elle avait rendez-vous avec quelqu’un. Puisqu’elle était devant la fontaine depuis quelques instants déjà. Un air neutre flottait sur son visage. Pourtant, à l’intérieur, c’était tout sauf neutre. Elle avait l’impression que son ventre se nouait dangereusement.
L’historienne essayait de s’imaginer un scénario possible. Qu’allait-il arriver dans les heures qui allaient suivre ? Elle était dans les ennuis, et elle le savait plus que jamais, mais le pire, c’est qu’elle aimait cela. Faire l’aventurière pour de simples documents, ça portait son charme.

L’historienne voyait passer des gens, des employés. Des personnes qui ne se doutaient de rien. Comme quoi, c’était facile d’être une méchante cachée, bien trop facile. Elle regarda alors la fontaine. Des pièces trônaient dans celle-ci. Suzie allait-elle en donner ? Non. Quelle question. Elle ne voulait pas se faire remarquer en se montrant gentille. Quoi que, en restant ainsi, telle une statue, elle allait sûrement se faire voir, mais peu importe. Dans quelques minutes elle ne serait plus à cet endroit, trop occupée à faire des choses trop secrètes.
Elle ignorait si l’entrée dans la salle des archives allait être facile. Pour le début, ça devrait. Si la rouquie et Suzie était là comme visiteuses, tout irait bien. C’était la suite qui pourrait bien se dégrader légèrement.

La mangemorte s’appuya alors sur la bordure de la fontaine, le regard rêveur. Cette expédition dans la salle des archives était plus qu’excitante mine de rien.
Elle attendait sa complice.

Lucy Ann n’avait pas fermé l’œil de la nuit, elle avait passé son temps à se tourner, retourner et re-retourner en scrutant le plafond.
Etait-elle sur le point de faire la plus grosse connerie de sa vie ? Allait-elle se sortir de cette histoire en un seul morceau ? N’était-ce pas égoïste de sa part d’entraîner Suzy-Lou là-dedans, qui n’avait rien demandé ? De ne pas en parler à son cher Manu, alors qu’ils s’étaient promis de ne plus se faire de cachotteries ? Non, elle avait décidé de le protéger, afin de ne pas lui causer d’ennuis si quelque chose se passait mal. Et puis, sa camarade lui avait bien dit de n’en parler à personne ! Sa camarade d’ailleurs… Pouvait-on vraiment lui faire confiance ?

Bref, ce fut une nuit déplaisante pleine de sueurs froides qui s’acheva au lever du jour. L’étudiante prit peur en apercevant sa tête dans le miroir, le teint cadavériquement pâle avec d’énormes cernes violacées. Plusieurs tasses de café de la cafet’ et une bonne douche plus tard, elle se retrouva devant le pire ennemi des femmes le matin : l’armoire. Que mettre pour l’occasion ? Quelque chose de sérieux, mais pas trop, de sobre sans être austère, de…
Toute sa garde robe y passa, rien n’allait, rien ne convenait, et ce n’est qu’en entendant le miaulement rageur de Bizarr qui venait de se faire ensevelir sous un énième pull jeté rageusement qu’elle se rendit compte que son comportement frisait la psychose.

Désolée sac à puces… s’excusa-t-elle auprès de son chat en le libérant de sa prison de coton.
Bon.
*Pas le moment de paniquer, si tu flanches en coulisses qu’est ce que ça donnera dans le feu de l’action ? Réfléchis. Tu en as vu passer des tonnes, des pingouins du ministère quand tu distribuais la gazette du sorcier non ? He ben c’est simple : fais comme eux !*

L’étudiante se décida enfin pour un pantalon à pinces noir et un corset violet pâle, qu’elle recouvrit d’une petite veste noire également. Le temps de sauter dans ses escarpins à talons et de discipliner ses cheveux- les faux-plis ça ne faisait pas sérieux- et elle serait prête à partir.

Lucy Ann était une fille impatiente, qui détestait attendre, c’est pourquoi elle avait pris l’habitude de ne jamais arriver en avance. Ni en retard, car c’était un manque de respect. Pile à l’heure, ce n’était pas un exercice facile mais qui pouvait s’avérer très utile.
En effet, elle voulait éviter de penser à tout prix. Ne pas penser, ne pas réfléchir pour ne pas paniquer, se concentrer sur les claquements de ses talons sur le sol, ne pas écouter son cœur qui battait la chamade… Si sa camarade n’avait pas été là et qu’elle avait du l’attendre, elle se serait retrouvée seule et désœuvrée, et se serait immanquablement mise à faire l'inventaire des pires scénarios imaginables. Alors que là, elle retrouvait la présence réconfortante de la jolie brune, qui était diablement sur son trente et un.

*Bon, elle est là, c’est un bon début.*

En effet, si elle ne prenait pas l’historienne pour une dégonflée, la crainte qu’elle aie changé d’avis lui avait tout de même effleuré l’esprit.
La rousse adressa son plus beau sourire légèrement nerveux à Suzy-Lou, évitant un petit signe de la main qui aurait pu être jugé trop puéril en de pareilles circonstances.

Bonjour élégante demoiselle, je vous ferais bien la bise mais je ne sais si de telles pratiques conviennent à un cadre pareil, fit-elle en prenant un petit accent snob. Vous sentez-vous d’attaque pour l’affaire-dont-on-ne-doit-pas-citer-le-nom ? demanda-t-elle sans parvenir à réprimer un petit sourire amusé. Si le moment était relativement solennel, rien ne les obligeait à se conduire comme à un enterrement.

[J'ai un peu fait bouger ton perso, s'il y un problème, j'édite. ]

Plongée dans ses pensées, Suzie ne vit pas arriver son amie. Pourtant, se retournant à temps, elle vit tout de même son sourire. Elle répondit bien gentiment. Pas question d’avoir l’air d’une déterrée. Même si ce qu’elles allaient faire n’était pas si bien que ça. Elle hocha la tête aux paroles de la rouquine. Pas la peine de se faire la bise. Pour la mangemorte, chaque geste était susceptible de surprendre les employés du ministère, et il ne fallait en aucun cas se faire repérer. C’était mauvais. Mais elle aurait bien voulu, lui faire la bise. Soit, ce n’était pas le moment.

Si elle était d’attaque ? Ca ne tiendrait qu’à elle, elle aurait pris ses jambes à son cou. Mais Suzie était bien plus courageuse qu’elle ne pouvait le penser. Malgré son côté Serpentard, elle était prête à tout, même quand ça ne la concernait pas du tout. C’est vrai, si elle était là c’était pour faire plaisir à quelqu’un d’autre qu’elle. Etrange comme comportement. Elle en venait même à se surprendre elle-même maintenant. Bravo. Mais elle était contente et fière d’être présente à cet instant précis. En plus, elle savait qu’elle devait faire un rapport d’éclaireur pour le Lord. C’était le moment où jamais. Il fallait qu’elle se souvienne de tout de la salle des archives, chaque minuscule détail était très important. C’était ça qui allait lui permettre de devenir recruteur. Oui, l’historienne montait les grades bien plus qu’elle ne l’aurait cru. Ca lui paraissait simple et surtout, faisable pour une fille comme elle. Lou, elle, c’était une autre histoire. Elle n’attendait que ça, passer à l’action, torturer, tuer, se battre pour la cause du Maître. Pour se purifier elle-même. Inconsciemment. La brunette serra les poings.

Calme, il fallait rester calme. Rien qu’une pensée pour Lou, et c’était fichu. Elle commencerait à devenir méchante. L’ancienne Serpentard respira un bon coup, et sourit à son ex camarade.

Je suis tout à fait prête. Pas trop stressée toi ? Moi si.

La bibliothécaire regarda autour d’elle. La foule commençait à se dissiper. Tout le monde retournait à ses occupations. Et c’était leur tour aussi, il ne fallait pas trop traîner.
D’un geste vif, Suzie prit la main de Lucy Ann, et commença à marcher d’un pas rapide. Pas question de perdre du temps. Elle jeta un dernier regard dans la fontaine. Y’avait plus qu’à espérait qu’elles repasseraient tout à l’heure saines et sauves. Prions.

La brunette et son amie se dirigèrent alors vers les portes pour accéder aux ascenseurs.

Non, en fait pas par là. Il ne faut pas prendre un ascenseur. Aucun ne passe par le niveau 10, à ce que je sache. On va essayer de trouver des escaliers, un couloir, je ne sais quoi.

Pour éviter que trop de monde se perdre, certainement. Toujours est-il qu’elles n’avaient pas le choix. C’est parti mon kiki.
La brunette marchait toujours d’un pas vif. Ne surtout pas traîner, surtout. Soudain, quelque chose lui attira l’attention. Un tout petit couloir, sombre, à peine voyant. C’était bien fait quand même le ministère. L’historienne sourit et se tourna vers la rouquine. Trouvé. Elle serra plus fort la main de la rouquine, et se dirigea vers le couloir. De minces escaliers. Génial. Il suffisait de faire à un peu de sport.
Ainsi, en quelques minutes elles y étaient. Un homme était devant une petite porte. C’était là, à tous les coups. La mangemorte s’arrêta quelques instants, en regardant le sorcier. Elle chuchota à son amie.

On y est.

[Hrp]Non non, t’inquiètes, c’est parfait ^^

Stressée, moi ? Tu plaisantes, jamais de la vie ! avait-elle répondu d’un ton désinvolte, cachant ses mains aux ongles rongés jusqu’à l’os dans les poches de sa veste, tout en se remémorant le paquet de cigarette entier qu’elle s’était descendu dans la soirée, les grillant les unes après les autres, parfois même allumant la deuxième avant même d’avoir écrasé le mégot de la première. Non, le stress était communicatif, il ne fallait pas en rajouter une couche, surtout si sa camarade l’était déjà. Mieux valait feindre une confiance et un optimisme à toute épreuve, même si elle se sentait complètement terrorisée intérieurement. Heureusement pour elle, ses maigres bases d’Occlumencie lui permettaient de réussir à faire ce genre de choses.

L’historienne lui prit ensuite la main sans plus traîner pour l’emmener à la salle des archives. Lorsqu’elle prononça les mots « niveau 10 » et « escaliers » dans la même phrase, Lucy Ann fit la grimace en regardant ses pieds. Mais qui était l’idiote qui avait eu la brillante idée de mettre des talons hauts ?
Elle soupira, résignée à faire le sacrifice de ses orteils sur l’autel de la réussite, espérant que ses souffrance ajouteraient un point positif à son karma et favoriserait le bon déroulement des évènements. On se raccroche à ce qu’on peut, dans des situations pareilles. Comme la main de son amie par exemple, elle savait qu’elle lui avait prise uniquement pour lui montrer le chemin, mais ce contact avait quelque chose de réconfortant, comme pour lui faire sentir qu’elle n’était pas seule, mais qu’elles étaient bien liées dans cette histoire.

C’est presque à regrets qu’elle lui lâcha pour monter les escaliers, et quelques instants, deux pieds en moins, un florilège de jurons lancés intérieurement et la promesse de sympathiques courbatures aux cuisses plus tard, les deux comparses vinrent à bout des escaliers de la mort pour se trouver dans la porte de la salle aux trésors : les archives.

L’étudiante se retint de faire la blague du « sésame ouvre-toi », de toute façon sa camarade ne l’aurait sans doute pas comprise, les sorciers ayant en général une connaissance très approximative des comptes moldus. Replaçant quelques mèches de cheveux qui avaient été malmenés durant l’ascension pour se rendre présentable, elle réajusta sa veste en regardant l’homme qui montait la garde devant la porte.

Damned, elle n’avait pas songé à ce détail. Un gardien devant la porte, c’était tellement évident qu’elle n’y avait pas pensé de la nuit. Alors que devoir passer devant un dragon sans le réveiller et affronter un tsunami si. Cherchez l’erreur.
A ce moment précis, elle regrettait de ne pas avoir réussi à achever sa formation de Legilimens, elle aurait ainsi pu pénétrer dans l’esprit du gardien, effacer tout souvenir de leur visite, ou métamorphoser les deux jeunes femmes en membres permanents du ministère dans ses souvenirs… Mais non, il allait falloir trouver autre chose. Heureusement, les longues années de cancre attitude à inventer des excuses à tours de bras pour devoirs non rendus avaient encore quelques beaux restes.

Elle se pencha vers sa camarade, pour lui répondre en murmurant :
Va falloir se présenter au gardien non ? Tu n’as qu’à dire que je suis étudiante à l’UMA et que je suis ta stagiaire ou quelque chose comme ça pour expliquer ma présence…

C’était une version tout à fait plausible et qui ne créerait pas de problèmes à l’historienne si jamais l’envie de vérifier les prenait. Elle trouverait toujours un moyen de s’arranger avec l’administration de la fac pour ça.

En tout cas en ce qui me concerne je suis prête, chuchota-t-elle d’un ton qu’elle voulait rassurant. Elle s’en voulait un peu de se sentir inutile, de devoir se cacher derrière sa camarade pour avancer, mais c’était elle l’officielle avec le droit d’entrée, et elle pauvre petite étudiante n’était rien.

Les deux jeunes femmes étaient donc arrivées à destination. C’était le moment. Lucy Ann proposa alors l’idée qu’elle pouvait être stagiaire. C’était parfait. A ces paroles, la mangemorte hocha la tête, un petit sourire aux lèvres. Bien qu'elles étaient proches de passer la première étape. Suzie ne pouvait s'empêcher de penser de comettre une erreur. Bien sûr, il ne fallait pas que ça arrive. Mais sait-on jamais. Pourtant, le stress semblait s'évanouir. Elle ignorait pourquoi. Peut-être parce que quelque part, elle savait qu'elle devrait s'habituer à ce genre de choses, de missions.
Elle savait très bien que le gardien n’allait pas les laisser passer comme ça. C’était pourquoi, elle avait pris ses papiers d’identité avec elle. Sait on jamais. La brune respira un bon coup, si son amie était prête. Alors elle aussi.
Tout se passerait bien. De plus, elle savait très bien manier sa baguette au cas où la situation tournerait mal. Mais il ne fallait pas penser à ça. Et puis, l’échec n’était même pas envisageable, loin de là.

L’historienne lança alors un dernier coup d’œil à son ancienne camarade. Et s’avança d’un pas vif vers le gardien, avec un regard qui se voulait bienveillant. Celui-ci les observa de haut en bas, d’un air légèrement surpris. Oui, la foule n’existait pas par ici. Suzie ne trouva rien d’autre à faire de sourire avant de parler. C’était le stress. Un peu de compréhension.

« Bonjour Monsieur, je suis Suzie-Lou Lalys, historienne et accessoirement bibliothécaire dans la bibliothèque nationale. J’ai besoin de faire une certaine recherche. Une histoire de généalogie sur les grands sorciers de notre temps. Et voici une étudiante qui m’accompagne dans ces recherches pour élargir ses connaissances. J’ai des papiers d’identité si vous le voulez. »

Un léger blanc s’installa. Enfin, l’homme fit un drôle de signe de tête.

« Ca ira. Entrez, vous prendrez la porte qui est juste à côté de l’entrée. C’est la salle où sont les éventuels visiteurs. Quelqu’un vous ramènera vos documents. »

D’un coup, la mangemort eut bien du mal à ne pas montrer son grand enthousiasme. Mais finalement, c’était loin d’être terminé. Tout cela n’était que le début. Le plus gros allait arriver. Elle se tourna un peu vers la rouquine. C’était parti.
Le gardien leur ouvrit la porte, les laissant passer.
Elles pouvaient voir à présent à quoi ressemblait la fameuse salle des archives. Une grande pièce, peu de lumière. Des petites allées serrées, des papiers partout. Et un bureau. Première étape atteinte. Pour le moment, il n'y avait personne en vue, mais ça n'allait pas tarder, forcément. Alors il faudrait faire vite et bien. Lorsque la porte fut fermée derrière elles. Suzie parla.

« Ca y’est. On est entrées. Je te laisse le choix. J’ignore combien de temps on a jusqu’à ce que quelqu’un arrive pour nous demander ce que nous recherchons. Veux-tu entrer dans la ‘salle de lecture’ ou rechercher par toi-même ? Personnellement, j’opte pour la première idée. Ainsi, un homme nous apportera des documents sur ta famille, si quelqu’un avant toi et ton frère était sorcier. Sinon, il n’y aura que des paperasses parlant de toi, peut-être de ta scolarité, ainsi que de ton frère. Et s’il s’avère que tu es une née-moldue… Nous aurons pour mission de te créer un arbre généalogique. De vraies personnes ayant étudié à Poudlard, enfin, tout ça quoi. Alors ? »

Malgré ses longues paroles, Suzie n’avait pas bougé d’un poil. Elle attendait la réponse de l’étudiante. C’était pour elle qu’elle était là après tout, il fallait faire selon ses désirs.
La mangemorte avait les oreilles grandes ouvertes, à vrai dire, elle guettait le moindre bruit. Attention et discrétion était au rendez-vous. Elle regardait la salle spacieuse. Non, il leur était quasiment impossible de trouver les documents seules. Elles auraient besoin d’un monsieur qui les cherche à leur place. Vraiment.

L’étudiante avait rarement eu l’air aussi sérieux de toute sa vie. Se concentrant pour avoir l’air studieux, elle avait en fait l’air légèrement coincée de l’arrière train. Peu importe au final, car sa camarade su employer le ton administratif adéquat pour leur ouvrir les portes de la salle d’archives.
Ouf, c’était bon, elle pouvait respirer. Enfin pas trop fort, l’ambiance qui régnait dans ces lieux était très cérémoniale, à la limite de l’oppressant. Peu de luminosité, des petites allées serpentant entre des masses et des masses de papiers… Elle, qui était déjà intimidée par les grandes bibliothèques ne se sentait pas dans son élément. Elle avait l’impression de déranger par sa seule présence, comme si le simple fait de respirer était un outrage à la postérité de toutes ces archives.

Rapidement, la voix de sa camarade vint la tirer de sa contemplation. L’étudiante écouta chacune de ses paroles avec attention, puis pris quelques secondes pour réfléchir, il n’était pas question de faire n’importe quoi, ou d’agir à la légère.

En fait, je pense qu’il vaudrait mieux rechercher par nous-mêmes, je dois avouer que je n’y connais rien, mais je me dit que ça sera sûrement plus discret, que ça laissera moins de traces, parce que je suppose qu’ils notent toutes les demandes dans un registre… Et imagine, si jamais les résultats ne sont pas bons pour moi, ils m’auront fichée, et il leur suffira de remonter le fil pour mettre la main sur le résultat de nos recherches !
Enfin comme je l’ai dit, je n’y connais pas grand-chose, donc je vais m’en remettre à ta décision, allons-y pour la recherche guidée…

La jeune femme avait changé son discours en cours de route, une autre alternative germant dans son esprit… En effet, qu’est ce qui l’empêcherait d’effacer le registre ainsi que la mémoire de l’archiviste ? Elle avait sa baguette sur elle, qu’est ce qui l’empêcherait de s’en servir ? De plus, lancer un sortilège d’Oubliettes serait un excellent entraînement pour la Legilimencie, car ce sortilège touchait directement à l’esprit, elle ne devrait donc pas avoir trop de mal. Enfin en théorie, parce que c’était loin d’être une science exacte, on avait parfois quelques surprises avec la pratique.
Bref, le temps de sombrer dans des élucubrations visant à utiliser son prochain comme cobaye n’était pas encore venu, maintenant il fallait se concentrer sur les formalités administratives.

Les deux jeunes femmes pénétrèrent alors dans le temple des petits papiers ministériels dans un silence quasi religieux, et se dirigèrent vers le petit bureau. Le temps de s’y installer, un homme s’était approché d’elles. Un grand brun avec des lunettes et un costume, bref, exactement le genre de type que l’on s’attendait à voir dans un endroit pareil.

Lucy Ann décida de prendre les devants, on lui avait toujours dit qu’il valait mieux avoir une attitude dynamique plutôt que passive dans ce genre de situation. Elle se racla donc la gorge, avant d’énoncer :

- Hem… Bonjour monsieur, nous voudrions rechercher des documents, comme vous devez vous en douter…

- Très bien. Que cherchez-vous ? demanda-t-il d'un air inexpressif.

- He bien… J’aurais besoin de tous les documents concernant une famille Donovan localisée en Angleterre, et une famille Daniels qui viendrait d’Irlande, ça serait pour ma généalogie personnelle… Ha, et aussi tout ce que vous pourrez me trouver sur la famille Morden, c’est pour une recherche personnelle.

- Avez-vous une procuration écrite ? continua-t-il avec le même air impeccablement neutre.

- Heu… Non, pourquoi, il en faut une ?

-Oui. fit-il d'un air un peu las, Sans autorisation écrite d'au moins l'une des personnes encore en vie et directement touchées par les récents décès de ces familles, vous ne pourrez rien consulter de très récent.

- Ha bon ? Tels furent les seuls mots qu’elle trouva à répondre en premier lieu. Dans ce cas, je suppose que je n’ai pas le choix, faites-moi consulter ce à quoi j’ai droit, je ferais avec..

- Bien. Et vous, que vous faut-il ? continua-t-il en se tournant vers Suzy-Lou, son expression faciale n'ayant toujours pas bougé d'un cil. Lucy Ann se demanda alors si l'archiviste n'était pas un automate programmé pour trier les documents, tant son visage ne laissait paraître aucune expression.

Suzie était restée droite, tendue malgré tout. Un homme vint alors à leur rencontre. Il semblait d’une taille moyenne, brun. Plutôt mignon mais il dégageait quelque chose d’ennuyeux. Un peu comme Binns. Mais bon, ça c’était juste le point de vue de la bibliothécaire inh, sans vouloir offenser Monsieur l’Archiviste. Que cherchaient-elles ? La mangemorte laissa son amie répondre, puisque après tout c’était pour elle que les deux jeunes femmes étaient là. L’homme restait impassible, c’en était presque inquiétant. Il devait s’ennuyer à mourir dans ce trou à rats.
La brune lança alors un regard autour d’elle. Il fallait qu’elle photographie la pièce, étagère par étagère. Pour son Maître au moins. Et oui, Si Lucy Ann avait une mission, Suzie aussi, aussi importante, mais cela restait secret. Elle entendit au loin les paroles échangées entre son ancienne camarade et l’archiviste. Elle était ailleurs, elle qui n’avait jamais eu une mémoire photographique, elle devait se concentrer. Et elle que lui fallait-il ?

L’historienne ne put s’empêcher d’hausser un sourcil. Le ton qu’il employait le ne lui plaisait pas du tout, mais elle ne releva pas, se contenta de marquer un instant d’hésitation et de plonger son regard dans le sien. Il ne lui fallait rien, mais elle ne pouvait dire ça. Il y avait une chance pour qu’il la fasse sortir des archives pour qu’elle attende son amie dehors. Plutôt mourir. Elle hocha alors la tête, et répondit d’une voix monotone.

« J’ai été adoptée Je l’ai appris hier. J’aimerai avoir mon acte de naissance, la vraie date, la ville. Je suis majeur je précise. Suzie-Lou Lalys. C’est mon nom. »

« Bien. Je vais vous chercher cela. Veuillez passer dans la salle de lecture. »

Une nouvelle fois, Suzie hocha la tête et se retourna vers la rouquine, l’air blasé. Il ne fallait pas que son amie dise quoi que ce soit. Oui, c’était un parfait mensonge, elle ne s’était pas faite adopter, mais fallait savoir gérer de temps à autres. Et elle avait fait ce qu’elle pouvait. Elle prit son ancienne camarade par le bras, se dirigeant vers la salle montrée par l’archiviste.
Une nouvelle fois, elle entendit le doux son de ses talons claquer dans la pièce spacieuse. Pourtant, elle ne sourit pas, elle qui d’habitude adorait ce bruit. Elle s’étai retenue durant tout « l’entretien ». Elle aurait bien aimé lui lancer un stupéfix dans la face et chercher par elle-même. Mais bon, faire ça aurait été suivit d’une mauvaise histoire. Elle aurait du avouer à la rouquine qu’elle était une mangemorte. Et ça, ce n’était pas possible. Bien sûr Lou remuait en elle depuis bien longtemps. S’ennuyant ferme dans l’abîme qui lui servait d’esprit. Il était temps qu’elle sorte, mais pas pour le moment. C’était bien trop dangereux.

La bibliothécaire secoua doucement ses cheveux. Elles entrèrent dans la petite salle de lecture. Faiblement éclairé, vide pour le moment. Les deux jeunes femmes purent voir une table, et des chaises tout simplement. Oui, il ne se cassait pas le cul le ministère. Pour la première fois depuis cinq minutes, Suzie sourit. C’était presque drôle, de se retrouver au ministère en tant que mangemorte. Elle passait incognito partout où elle allait. C’était ça une bonne couverture. La brune tira alors une des chaises et s’assit délicatement. Elle regarda une nouvelle fois autour d’elle avant de parler à son amie :

« Pourvu que tout se passe bien. Tu as une idée de ce qu’y pourrait se passer par la suite ? Enfin, si tu es une sang-pur… ou pas. »

Elle retint sa respiration quelques instants, pour ensuite lâcher un vague soupir. Elle était presque fatiguée. Cet endroit n’était pas fait pour s’éclater, ça, c’était une chose. Mais en plus, l’archiviste était d’un ennui à en faire crever. Elle ferma les yeux. Elle avait menti à un employé du ministère. Est-ce qu’il le découvrirait ? Elle n’en savait trop rien. De toute manière, il n’y avait qu’à avouer la vérité inh. C’était pas si compliqué. Elle n’aura qu’à dire que c’était un mensonge parce qu’elle voulait tout simplement rester avec son ancienne camarade. Voilà tout.

Elle se tourna alors vers la rouquine. Elle semblait soucieuse, en train de réfléchir. Mais Suzie ne dit pas un mot de plus. Ce n’était pas le moment. Elles attendaient avec impatience la venue de l’homme des archives, le ventre serré peut-être, ou pas.

Lucy Ann scrutait l’archiviste d’un air stoïque. Elle se demandait si cet homme avait un compteur de mots dans la tête, et qu’il avait fait vœu d’en utiliser le moins possible. Peut-être recevait-il une prime s'il ne dépassait pas la centaine par jour?
Finalement, ce n’était peut-être pas de sa faute, à force de fréquenter des piles de vieux papiers à longueur de journée le sens du social devait se retrouver fortement affecté, c'est pas comme s'il avait un physique tellement repoussant qu'il avait été contraint et forcé de renoncer aux contacts humains!
Elle regarda alors Suzy-Lou, qui elle aussi travaillait au milieu d’ouvrages mais ne semblait pas affectée par le syndrome d’autisme paperassien, ne restait plus qu’à espérer qu’elle ne change pas avec l’âge, ce qui la ferait passer de la catégorie « charmante jeune femme » à "barbante". Des pensées futiles, uniquement dans le but de ne pas penser aux réels enjeux, ce qui lui mettrait à coup sur la pression. Qui aimerait se dire que son avenir se trouvait entre les mains d’un fonctionnaire robotisé ?

Elle suivit mécaniquement sa camarade dans la salle de lecture, qui était à l’image du reste de la salle des archives et de tout ce qui allait avec : spartiate. De quoi poser les documents et son auguste postérieur, mais rien de plus. Dès fois que ça risquerait de rendre le lieu chaleureux ou accueillant, vous comprenez…
Sa réflexion sur la personnalité des employés du ministère glissa alors vers leur absence de goût en matière de décoration, lorsque la voix de sa camarade la sortit de ses songes, la ramenant brutalement à la réalité de la situation.

Elle n’avait jamais aimé parler de son statut sanguin, et ce depuis toujours, pas qu’elle en avait honte, mais parce que ça pouvait être mal perçu par les autres. Un peu comme les personnes ayant de l’herpes, ça n’est pas forcément de leur faute, ça peut être de naissance, ça n’amoindrit pas leur condition d’être humain, mais c’est quelque chose qu’on ne mentionne pas parce que c’est généralement perçu comme quelque chose de honteux.
Etre né-moldu dans un monde de sorciers, ça avait un peu toujours été ça, comme le mentionnait le terme affectueux « sang de bourbe », qui laissait franchement apparaître ce que les personnes l’utilisant pensaient de la valeur du sang moldu. Avec la situation actuelle, la petite affection bénigne facilement dissimulable s’était transformée en infection honteuse, tellement contagieuse qu’elle devait être signalée à tous. Avec la prise de pouvoir du grand vilain en chef, les sang de bourbe allaient devenir les lépreux nouvelle génération, devant porter une cloche pour avertir de leur présence et ne risquer de souiller personne…

Inutile de préciser pourquoi la jeune femme tenait absolument à dissimuler ses origines : mener une existence décente. Elle savait ce qu’elle risquait si elle se loupait, mais l’étudiante était du genre à jouer quitte ou double : mieux valait à ses yeux vivre pleinement ou pas vivre du tout, qu’être traitée en paria pestiférée tout juste bonne à servir de paillasson.
Elle regarda alors la bibliothécaire avec un petit sourire piteux, ne sachant trop quoi répondre. Elle ne voulait pas spécialement lui mentir à elle, qui prenait des risques pour sa petite personne, mais mathématiquement, moins on perce de trous dans un tuyau, moins il y a de risques de fuite. Enfin, c’est comme ça qu’elle visualisait sa situation.

Une idée de ce qu’il va se passer par la suite ? Honnêtement… Aucune. Je pense franchement que mes chances d’être une sang pure sont quasi nulles, parce que tu connais les sorciers et leur fierté pour la généalogie, si j’étais issue d’une famille de ce genre je l’aurais forcément su ! Alors je miserais plutôt sur sorcier simple, qui est la caste la plus répandue… Enfin du moment qu’on ne m’apprend pas que je suis croisée avec un troll ou un gobelin, ça m’ira ! fit-elle en souriant. Son frère lui avait souvent dit qu’elle tenait plus du troll que de la vélane, mais ça serait un comble en tant que professeur de soins aux créatures magiques, que d’être croisée avec un de ses sujets d’étude…

Et toi alors, tu es vraiment adoptée ou alors c’est une technique pour mettre tes coordonnées entre les mains du petit archiviste ? demanda-t-elle, un sourire moqueur sur les lèvres.

Sa camarade n’eût pas le temps de répondre, le sex symbol en question se dirigeant vers elles.

*Tiens, c’est un rapide celui-là*

Voici ce que j’ai pu trouver en premier lieu, fit-il en déposant un dossier poussiéreux devant Lucy Ann et un autre beaucoup plus fin et récent devant la documentaliste. Pour votre généalogie il va falloir patienter un peu, la recherche va prendre plus de temps.

A peine le temps de souffler un « merci » que l’homme avait déjà disparu, reparti se perdre dans les limbes de ses documents.

La jeune femme ouvrit alors le dossier se trouvant devant elle, et remarqua qu’il s’agissait du dossier concernant la famille Morden. L’épaisseur était assez conséquente, cette famille étant de sang pur et très ancienne, elle allait avoir droit à tout son vieil historique, sans ce qui allait l’intéresser, c'est-à-dire ceux qui restaient encore en vie. Elle soupira, avant de se tourner vers sa camarade :

Alors, c’est intéressant ce que le monsieur t’a ramené ?

Oui, elle allait devoir éplucher ce dossier. Oui elle allait devoir le faire, mais un peu de procrastination pour se donner du courage, ça ne faisait de mal à personne…

Suzie se redressa légèrement. Cet endroit ne l’inspirait guère, elle se sentait observée, enfermée, oppressée. Et en plus de tout ça, sur une chaise peu confortable de bois. Pourtant, la pièce était assez grande, du moins pour des gens qui ne sont là seulement pour lire des documents. L’historienne se demandait comment elle avait pu être si, généreuse quelque part. Elle avait accompagné une ancienne camarade, qu’elle n’avait revu seulement la veille. Oui, la mangemorte s’impressionnait elle-même. Bon, il n’y avait pas à dire, tout s’étai relativement bien passé, à part la gueule affreuse que faisait l’archiviste. Il devait vraiment s’ennuyer à mourir celui-là.
Bien sûr, Suzie avait menti. L’histoire d’adoption, mais elle ne se sentait pas coupable. Après tout, personne n’en saurait rien. L’ancienne Serpentard soupira légèrement, avant d’entendre la voix de Lucy Ann. Elle releva légèrement la tête pour l’observer. Celle-ci avait changé, elle était devenue plus sérieuse, moins tête en l’air peut-être, moins inconsciente. Avec son frère, la mangemorte se souvenait de leurs nombreuses pertes de points, leurs mauvaises notes. Leur réputation. Malgré tout, jamais Suzie ne s’était mise à détester la rouquine. Elle avait plutôt essayé de l’encourager, en vain. Pourtant, aujourd’hui l’historienne ressentait toute la détermination et le sérieux de son ancienne camarade. Comme quoi, tout le monde peut changer un jour. Elle sourit légèrement.

La bibliothécaire faillit même rire à la plaisanterie de son amie. L’archiviste. Jamais. Mais à vrai dire, Suzie du se taire et ne rien dire du tout, l’homme était entré dans la salle d’un pas lourd. Il n’avait pas encore tout trouvé, l’imbécile. Il lui fallait encore un peu de temps. La mangemorte mit une seconde à se dire que c’était tout à fait normal, il devait avoir des tonnes de paperasse par ici. Mais bon quand même.
Une pochette marron clair, peu poussiéreuse vint prendre place juste devant le nez de la brunette. Son acte de naissance seulement, le nom de son père, de sa mère. Quelques dates par-ci par-là, la routine en fait. Malgré tout, Suzie feuilleta les quelques feuilles qu’il y avait dans cette mini pochette. Oui, la mangemorte croyait tout savoir sur elle. Pourtant, elle trouva quelque chose d’étonnant. Il y avait exactement trois feuilles dans le dossier. Son acte de naissance, le contrait de mariage et un papier du ministère de la magie sur une même feuille. Et un rapport psychologique datant d’une dizaine d’années. Le rendez-vous avec le médecin de St-Mangouste lui revint alors soudainement en tête, il avait complètement zappé qu’il pouvait y avoir un rapport écrit « peut peut-être se révéler dangereuse pour elle-même, et les autres. ». Suzie murmura un juron. Elle se doutait bien que certains dossiers restaient dans les archives de l’hôpital, mais pas au ministère.

« Oui intéressant, bien plus que je ne le pensais d’ailleurs. »

Quelqu’un à l’extérieur savait qu’elle était malade donc. Un sorcier, un médicomage d’ailleurs. A cette idée, une vague de colère lui traversa l’estomac, elle failli sursauter mais se retint de justesse. Suzie-Lou resta fixe sur sa chaise de bois minable, scotchée. Il fallait qu’elle fasse quelque chose et vite. Embarquer le papier avec elle. Erreur, l’archiviste le verrait. Faire une photocopie ou la faire en double, parce que la photocopie c’est une chose moldue. Mais l’archiviste ne pourrait se retenir de lire se papier.
Garder son calme était la seule chose à faire. Qui viendrait fouiller ses documents de toute manière ? Personne, ils étaient en toute sécurité dans cette maudite salle des archives. Oui, il n’y avait rien à craindre. Peut-être faudrait-il que Suzie soit plus sur ses gardes lorsqu’elle rencontrerait quelqu’un mais à part ça ?
Quelqu’un entra alors dans la petite pièce. L’homme des archives une nouvelle fois.

« Voici le reste. Je pense n’avoir rien oublié. Si vous désirez autre chose, signalez-le-moi. »

A vrai dire, personne n’eut le temps de dire quelque chose, l’archiviste avait déjà fait demi-tour, direction ses papiers d’amour. Une nouvelle grosse pile venait de se poser devant Lucy-Ann, et une toute petite devant Suzie. La généalogie semblait être lourde du côté de son amie, mais la mangemorte ne dit rien une nouvelle fois. Pourtant, elle était là pour son ancienne camarade, et non pour elle. Elle prit alors un sourire crispé, bien que le mieux possible sincère et dit :

« Et toi ? Quelque chose sur ta famille ? »

Pendant que Suzy se plongeait dans ses petits papiers, Lucy Ann prit son courage, ou plutôt la pile de paperasse à deux mains et se mit à éplucher tous les papiers au nom des Morden. Heureusement pour elle, la maniaquerie ministérielle faisait que toutes ces feuilles étaient classées par ordre chronologique, ne lui restait plus qu’à retourner allègrement le tas pour commencer par la fin, c'est-à-dire les choses les plus récentes.

Alors qu’elle s’attendait à ne trouver que quelques papiers jaunis par le temps (quand on n’a le droit que de consulter les documents concernant des personnes décédées depuis un certain temps, on ne s’attend pas à dégoter des scoops de première fraicheur), elle tomba sur une page n°14 de la gazette du sorcier relativement récente titrant « French drama : une famille de grande lignée périt dans un tragique accident », avec photo de ladite famille à l’appui et tout un pavé de texte. Pas le temps de se pencher dessus, l’archiviste revenait déjà. Elle passa rapidement à la suite de la pile et lorsqu’elle vit que le prochain document concernait une certaine « Elisabeth Morden, 1810-1923 », elle se décida à pousser le tout sur un coin de la table de lecture, gardant l’article sous le coude, bien décidée à l’éplucher en détail un peu plus tard.

*Peut-être que ce taré de Lucius s’en est pris à sa propre famille, il en serait capable l’enfoiré !*

« Voici le reste. Je pense n’avoir rien oublié. Si vous désirez autre chose, signalez-le-moi. »

*Bien. Toujours aussi locace lui.* pensa-t-elle alors qu’il lui déposa ce qui ressemblait à l’encyclopédia universalis des familles sorcières devant elle.

Quelque chose sur ma famille ? J’espère bien, avec tous les arbres qui ont du mourir là-dedans, que leur sacrifice aie servi à quelque chose ! fit-elle en souriant, tapotant le tas de papier devant elle, comme pour se donner du courage, n’ayant pas la moindre motivation pour rechercher une filiation qu’elle savait pertinemment ne pas exister.

*Bon, quand faut y aller, faut y aller* pensa-t-elle en soupirant, séparant son petit dossier en 2 tas : un plutôt mince, rangé dans une chemise « Donovan » et l’autre plus épais, intitulé « Daniels ».
Courageuse mais pas téméraire, elle s’attaqua en premier au tas le plus mince, qui contenait quelques vieux extraits de naissance, quelques contrats de mariage dont un attira plus particulièrement son attention, Lawson/Donovan dont les dates correspondaient à peu près à celles de ses grands parents. Fouillant dans la pile, elle réussit à retrouver une portion d’arbre généalogique correspondante, et regardant dans les grandes largeurs décida que ça lui convenait.

Spoiler:

Cependant, elle ne fit pas tout de suite le rapprochement entre le Mc Lipswitch du document et le grand barbu qui enseignait la magie louche à l’UMA… Tant pis, ça lui apprendrait à lire plus attentivement… Qui n’a jamais rêvé d’avoir un lien de parenté avec le père fouettard ?

Arriva ensuite le moment de s’attaquer à la pile des Daniels, qu’elle fit défiler comme une énorme liasse de billets du bout du pouce. Décidément, elle n’avait pas du tout envie de se farcir la lecture de ces formulaires ennuyeux à mourir. Comme elle venait de trouver un arbre généalogique, elle décida de ne porter son attention que sur les arbres, histoire de faire une paire. Elle sortit un premier exemplaire de la pile, mais non, ça ne collait pas au niveau des dates. Un deuxième, non, ça n’allait pas non plus, la branche qui était restée en Irlande s’était éteinte au profit de la branche écossaise…
Un troisième exemplaire retint son attention

Spoiler:

Voilà, il y avait tout ce qu’il lui fallait, du sang pur, du mêlé, du moldu, bref un joli pot pourri hétéroclite qui correspondait tout à fait à ce qu’elle recherchait : assez « pur » pour ne pas se faire enquiquiner si la manœuvre passait par l’administration, mais assez « impur » pour ne pas paraître suspect.

La jeune femme fit ensuite une pile des documents qui l’intéressaient, article, arbres généalogiques ainsi que quelques extraits de naissance et contrats de mariage reliés qui lui semblaient importants, et tenta de lancer un sort de duplication pour en récupérer un exemplaire, tentative qui se solda par un échec retentissant.

Et m*****, à tous les coups ils y a des sorts de protection… pesta-t-elle en se tournant vers l’historienne. Ils sont complètement paranos ou quoi, ils ont peur qu’on attente à la vertu de leurs papiers ?
Un nouveau soupir, avant de continuer: Bon, je vais aller sonner mister paper, je reviens… Si tu veux des duplicatas, donne-moi tes papiers !

Faisant l’effort surhumain de lever son auguste postérieur de sa chaise, elle alla activer la sonnette à côté de la porte de la salle de lecture, qu’elle supposait servir à cela – et n’ayant aucune envie d’hurler « Monsieur l’archiviste, youhouuuuuuuu » à travers toute la salle.
Quelques instants plus tard, et mister paper était de retour, la regardant en levant un sourcil sans même prendre la peine de demander ce qu’elle voulait.

Je voudrais faire quelques copies de documents, si vous pouviez vous en charger, dit-elle en lui tendant les papiers en question.
Il récupéra alors ses petits protégés, et hocha brièvement la tête avant de disparaître, revenant quelques instants après avec les parfaits jumeaux des papiers originaux, ornés d’un magnifique « DUPLICATA » en filigrane, qu’il lui tendit.

A peine le temps de le remercier qu’il était déjà reparti se perdre dans les limbes de son univers.
Retournant vers la table de lecture, elle sentit une petite pointe de réconfort à s’adresser à une personne relationnellement humaine.

Voilà, en ce qui me concerne c’en est fini de ces réjouissances… Autre chose à voir mam’zelle ou on peut fuir ce temple de l’austérité à toutes jambes ?

Suzie devait avoir treize ans à l’époque du rendez-vous. Son père savait qu’elle avait parfois des absences et avait des sautes d’humeur qui n’avait rien à voir avec son caractère. Naturellement inquiet, Mr Lalys avait foncé vers St-Mangouste bien entendu, Suzie avec. A ce moment-là elle n’avait pas vu le risque qu’elle était pour la population sorcière et même pour les moldus. Mais elle savait encore moins qu’elle pouvait devenir folle à cause de Lou. Ce jour-là l’historienne avait fait une série de test. Une malformation du cerveau, un petit bout grillé quoi, celui qui contrôle les humeurs. Celui qui choisit en fait les humeurs. Du coup elle était plus lunatique que quelqu’un de lunatique. Puisqu’elle c’était une maladie. Pourtant, elle avait toujours vécu avec ça. Cette violence en elle. Puis bien sûr, le dédoublement de personnalité. Fait chier quand même. Comment elle avait pu accepter d’être analyser ainsi ? Quelle connerie. Il ne fallait pas que ça se sache. Sûrement pas. Il fallait que ce dossier reste où il est, et pour toujours. Personne ne devait savoir ce qu’elle était réellement.

C’est alors que Lucy Ann jura et demanda de se faire dupliquer certaines feuilles. A la question pour savoir si Suzie voulait faire de même, la bibliothécaire hocha la tête négativement. Surtout pas. Cette feuille devait pourrir dans ce dossier, tout simplement. Il n’y avait pas meilleure solution.
Tout de même, la mangemorte était surprise. Mais il fallait rester calme. Surtout. Pas faire de conneries. Peu de gens savait pour son état mental, surtout qu’elle allait de mieux en mieux avec ce nouveau traitement. Oui vraiment, il n’y avait pas d’inquiétude à avoir, c’était s’embrouiller l’esprit pour un rien.
La demoiselle lu alors le dos de la feuille médicale. Tout y était. Les sautes d’humeur, la violence, la seconde personne dans sa tête, sa folie en fait. Le médecin lui avait prescrit un traitement, et puis voilà. Si ça tombe il était déjà mort à l’heure qu’il était. Enfin il y avait quelque chose les réactions de Suzie à l’égard de sa maladie : « une indifférence bouleversante ». Oui, cela était la pure vérité. Mais c’était juste un maque, elle faisait semblant de se foutre de tout, c’était dans sa nature.

« Je préfère fuir aussi. »

Elle sourit à son amie avant de ranger délicatement les feuilles. Il ne fallait plus qu’elle pense à ça. Plus jamais. Qu’elle oublie cette feuille à jamais. Qui irait donc fouiller son dossier inh ? Personne, absolument personne. Personne ne savait qu’elle était « folle » à part ses parents, et c’était une très bonne chose.
Suzie se leva alors le dossier entre les mains. Elle sortit de la salle avec Lucy Ann sur ses talons. L’archiviste avait l’air de les attendre légèrement. L’historienne lui remit son dossier entre les mains avec un vague salut. C’était fini pour aujourd’hui. Peut-être que dans un de ses jours de folie elle reviendrait brûler tout ça. La mangemorte se dirigea alors vers la porte de sortie, qui était la même que pour l’entrée d’ailleurs et respira un bon coup. Les deux jeunes femmes marchèrent quelques minutes avant de se retrouver à nouveau dans le vaste hall du ministère de la magie. Là, Suzie se stoppa et lança un regard vers son ancienne camarade.

« Et bien, il est temps de nous séparer. J’espère qu’on se reverra prochainement. A bientôt. »

La brune accompagna un petit geste de la main à ses paroles, ainsi qu’un petit sourire d’au revoir. Elle avait un peu aidé Lucy Ann, c’est tout et finalement, elle était repartie complètement surprise par ses propres découvertes. Suzie s’éloigna alors d’un pas lent, léger. Le regard perdu au loin.

[HJ: Terminé pour moi I love you

]

La demoiselle se sentit un peu perplexe devant la mine renfrognée que prenait sa camarade devant ses propres papiers. A priori, Miss Lalys était une sorcière d’origine tout à fait honorable… Se pourrait-il qu’elle aussi ait un secret honteux à cacher ?

Elle en doutait fort, c’est pourquoi elle ne s’attarda pas sur la question et prit la direction de la sortie, liasse sous le bras emboîtant le pas de sa camarade de lecture, se réjouissant de quitter cette pièce qu’elle trouvait angoissante. Sans doute son atmosphère peu festive lui semblait être un avant-goût de ce qui l’attendait à Azkaban si elle échouait dans ses bouturages d’arbre généalogique ?
Toujours est-il qu’elle ne put réprimer un soupir de soulagement en respirant à nouveau un air ne sentant pas le vieux papier. Ce hall du ministère, qu’elle avait tant détesté lors de ses années de distribution de la gazette à cause de tous les employés pédants lui semblait désormais presque amical.

Elle s’apprêtait alors à inviter son amie à aller prendre un bon firewhiskey ou une glace triple chocolat pour se remettre de leur virée lorsque cette dernière décida de prendre congé. Ne voulant pas l’empêcher de vaquer à ses occupations, elle reporta donc son invitation pour plus tard.

Merci pour tout Miss, il y a intérêt à ce qu’on se revoie bientôt, que je puisse te montrer l’étendue de ma gratitude qui s’étendra sur tes trois prochaines générations ! fit-elle en souriant, avant de prendre la direction du chemin de traverse. Si sa camarade semblait pressée d’aller Dieu-sait-où, elle avait en revanche tout son temps, et avait bien besoin de décompresser un peu. Si ses finances ne lui permettaient pas d’aller faire des folies de son porte-monnaie, elle avait bien assez sur elle pour se payer le luxe d’un cornet choco-pistache avant de retourner dans sa chambre s’épuiser les yeux en les plissant sur des badinages administratifs.

Avant de s’envoler dans un nuage de crème glacée, elle décida quand même, par curiosité, de jeter un œil au fameux article sur les Morden, et remarqua quelque chose qui lui fit lâcher un mot fort peu élégant en plein milieu du hall du ministère. Le titre qu’elle avait vu n’appartenait en fait qu’à un mince en-quart de la gazette du sorcier, la photo et tout le descriptif étant sur une feuille jointe provenant d’un journal étranger, français selon toute vraisemblance. Les deux avaient été collés par le temps et elle n’avait pas remarqué ce détail en feuilletant à la va-vite.
Damned, il allait falloir qu’elle aille quérir les services d’un traducteur autrement plus habile que ses maigres « voulez-vous coucher avec moi ce soir », même aidés d’un dictionnaire bilingue…

C’est donc un brin découragée qu’elle opta pour un cornet choco-pistache-rhum raisin sur le chemin du glacier le plus proche.