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 [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]
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  • Isaac Deniel
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    Isaac Deniel
MessageSujet: [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]   [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini] EmptyLun 13 Juil - 16:53:24

Que faire un jeudi après midi d’ennui ? Les parents travaillaient, sur le pavé, le soleil de juillet brillait, les touristes envahissaient la capitale, et s’étonnaient, dans des langues variées, à chaque coin de rue. Armés de leurs appareils photo, ils mitraillaient les avenues, se perdaient malgré leurs plans, se promenaient en sandales et en bermuda pour rappeler leur statut de vacanciers. En bon londonien blasé, Isaac les suivait d’un regard exaspéré sans comprendre leur enthousiasme, leur fascination idiote devant Big Ben, le Brittish Museum ou le Nottingham Palace. Que d’émotion pour des vieilles pierres ! A Kensington, on les repérait à des lieux à la ronde. Ils marchaient d’un pas lents, les yeux levés vers les hôtels particuliers. Un couple s’arrêta même lorsqu’il franchit le seuil de son immeuble. Oui, ce n’était pas un mythe, des gens vivaient ici, des anglais habitaient à Londres, refermez donc vous bouches béantes, c’était la triste réalité, pour le parc d’attraction voyez avec Disney, ou préférez le Pays de Galles, une contrée moins civilisée. Un vague soupire lui échappa. Il réajusta ses lunettes de soleil mangeuses de visage sur son nez et fit signe au premier taxi qu’il vit. La station de métro ne lui disait rien, il l’évitait la plupart du temps et son père avait bien voulu lui donner mille livres d’argent de poche (et pas une de plus c’est compris) pour la journée. C’était un minimum vital pour une journée shopping. Les beaux vêtements coûtaient cher, et ses caprices du moment aussi. Il voulait des jeux, des albums, des vidéos ainsi qu’un nouveau sac. L’actuel ne lui plaisait plus. Il défilait avec depuis le début de l’année ! Ses goûts avaient changé depuis, comme la mode.
Une voiture noire lustrée s’arrêta devant lui, et la vitre électrique se baissa. Il se pencha, en appuyant sur la portière une main aux ongles noirs. Un bracelet à pics cerclait son poignet.

- Je vais à Soho, dit-il simplement.
Le conducteur, un homme gros et gras avec le sourire en option lui dit signe de monter. Il ouvrit et s’installa sur la banquette de cuir. Sombre, elle offrait un contraste parfait avec son pantalon blanc serré.

D’un œil morne, Isaac regarda le paysage gris défiler en posant les écouteurs de son baladeur sur ses oreilles. Les feux rouges et verts se succédaient, les gens se pressaient au rythme des notes énergiques d’un groupe de punk anglais, Wire. Il n’était pas sorti dans la ville moldue depuis sa dernière virée au Chemin de Traverse, au début de la semaine. Là, John, le styliste de Tissard et Brodette avait pour la première fois quitté son exubérance insouciante de grande folle pour lui conseiller, avec gravité, de ne plus remettre les pieds sur le passage. Le monde magique vivait une heure critique. Tout le monde tremblait, des gens mourraient, assassinés, le ministre lui-même avait succombé. Il fallait s’éloigner de ce chaos. Tuer les nés moldus n’était plus un crime, il risquait sa tête en s’aventurant seul parmi les siens. Evidemment, Isaac refusait le discours. Comment ? Parce qu’une bande de conservateur imposait ses idées limitées, il était obligé de se cacher ? Mais il n’en avait aucune envie ! Face à son esprit buté, John lui avait parlé d’un lieu bien protégé, où il pourrait s’abriter en toute sécurité en cas de besoin. Car les gays sorciers avaient aussi leur village secret, protégé des curieux par un serment magique. Seuls quelques élus, des personnes de confiance, avaient le pouvoir de révéler l’emplacement du lieu. Isaac était fier d’entrer si jeune dans la communauté. En théorie, il n’avait pas le droit d’y accéder avant ses seize ans, mais, en ces temps difficiles, les considérations d’âge tombaient. L’endroit, inconnu du Lord et des fanatiques au Sang Purs, premier danger de ce petit monde bien caché, n’était pas menacé. On le trouvait derrière un petit bar aux vitres noires, du genre club très privé, dans lequel seuls les initiés osaient s’aventurer. Cela l’intriguait beaucoup. Il n’avait pas de prétexte sérieux pour y entrer mais voulait voir, au moins, à quoi ressemblait la devanture, et en profiter pour dépenser son argent et explorer le quartier de Soho, que ses parents avaient toujours violemment critiqué.

Les guitares se déchainèrent, et la chanson se coupa brutalement, comme ça, sur une dernière montée de folie. Il était arrivé. Une autre chanson commençait, plus tranquille cette fois. Pink flag était un album irrégulier, ponctué de titres courts, énervés, et de quelques chansons plus posées. Il quitta la voiture, après avoir versé la bonne somme en liquide au chauffeur, et s’avança sur Canarby street sous les riffs tournants de Lowdown. Le quartier, plus authentique que certains coins touristiques, lui arracha un sourire. Pour faire les boutiques, la rue était un paradis. L’originalité des styles ne manquaient pas. Comment résister à l’attrait des vitrines ? Léger, il poussait chaque porte, essayait tout ce qui arrêtait son regard en monopolisant odieusement les vendeurs, plus à l’aise que n’importe quel habitué de l’enseigne. Les sacs se gonflaient, se multipliaient sur son bras. Il cédait à toutes ses envies. Et pourquoi ne pas se faire percer l’oreille tant qu’à faire ? A droite oui, parfait, au cas ou personne n’aurait remarqué son homosexualité. Cette histoire de signes extérieurs l’amusait beaucoup. Et à quatorze ans, surtout lorsqu’on s’appelait Isaac Deniel, on rêvait de se montrer, on voulait se sentir regardé, important. Il acheta au passage toutes les boucles d’oreilles qui lui plaisaient, et d’autres bijoux qu’il n’était même pas certain de mettre. Les prix ne montaient pas haut, il n’était pas devant des articles de luxes, mais ces accessoires de pacotilles avaient une allure plus rebelle. Tant pis si la musique qui pulsait contre ses tympans l’influençait. Sur ses billets, les chiffres se réduisaient, la liasse s’épaississait. Dehors, des adolescents branchés se baladaient en groupe, des hommes aux t-shirt moulants se prélassaient aux terrasses des cafés, ou traversaient l’allée bras dessus bras dessous.

Tout était beau, magnifique, éclatant, quand une vision d’extase le frappa. Il posa une main devant sa bouche pour retenir un cri d’orgasme. Dieu existait ! Il avait créé LE sac à main de ses rêves. Une merveille de l’artisanat humain, coupé dans le cuir le plus pur, ses motifs étaient à se pâmer. Il le lui fallait, absolument, tout de suite, question de vie ou de mort. Mais une telle merveille ne se donnait pas contre quelques dollards. Il avait déjà bien dépensé. Quand vous disait que mille livres n’était qu’un minimum vital ! Il manquait 200 livres à son porte-feuilles. Ses parents les lui donneraient s’il insistait un peu, et promettait avec un grand sourire de ne plus rien leur réclamer jusqu’à la fin du mois. Il fallait les contacter rapidement. Seulement, il n’avait pas de carte téléphonique sous la main, n’avait pas envie de faire les cent pas avant de trouver une boutique qui en vendait, et l’industrie des portables n’en était qu’à ses balbutiements. Ses parents en possédaient deux, bien évidemment, mais, puisqu’il n’était pas souvent chez lui et gardait peu de contacts avec ses connaissances moldues, il ne voyait pas l’intérêt d’en prendre un. Grossière erreur ! Perdu, il évalua la foule, raya d’emblée les vieux, les jeunes en bande, et chercha désespérément une personne seule, à l’air un minimum sérieux. Il n’y avait rien à tirer du premier plouc du quartier, et, même si c’était le cas, sa fierté lui interdirait de s’adresser à un individu trop douteux. Son champ de possibilités se réduisait. Il opta assez vite pour un jeune homme qui détonnait étrangement dans le décor. Il ne semblait pas du tout dans l’esprit du quartier, ce qui le rendait tout de suite plus facile d’accès. Et il avait l’avantage d’être assez mignon. D’un pas vif, Isaac fondit sur lui avant qu’il ne lui échappe et posa une main sur son bras pour l’inciter à se retourner.

- S’il te plait ? Il faut absolument que j’appelle mes parents, mais je n’ai pas de carte ni de portable sur moi. Est-ce que tu peux me dépanner ? J’en ai pour deux secondes, c’est important…


Il leva vers lui son plus beau sourire, et détailla sans vergogne le visage de l’inconnu. Il ne s’y était pas trompé de loin, le jeune homme n’était pas mal. Un brin de virilité en plus ne serait pas trop, mais, en attendant, il tirait une assez bonne pioche.


Dernière édition par Isaac Deniel le Lun 12 Oct - 22:50:33, édité 1 fois
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  • James Kirkby
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MessageSujet: Re: [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]   [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini] EmptyMar 14 Juil - 21:48:19

La porte se bloqua dans un petit cliquetis, et James murmura l'enchantement qui réactivait les sortilèges de protection de sa demeure. Baguette en main, il s'apprêta à transplaner, mais décida soudain qu'il serait sans doute agréable de descendre l'escalier à pied, contrairement à son habitude. Une fois en bas, le jeune sorcier s'arrêta un instant à la porte de son immeuble, le temps de s'allumer une cigarette, et s'engagea dans la rue, vers la gauche. Tout en marchant, il se mit à réfléchir : il avait dîné la veille à Wolf's Den, et son père lui avait demandé de passer dans son bureau. Le benjamin des Kirkby éprouva une légère appréhension à l'idée de cette entrevue, mais la suite le rassura quelque peu : l'auteur de ses jours voulait simplement lui parler mariage. À son âge, déclarait Thomas, il était temps d'y penser... D'ailleurs, le dimanche suivant, les Kirkby recevaient la famille Machinchouette à déjeuner, des sorciers de sang pur et de haut rang, dont la fille cadette...

James se rappelait parfaitement cette fille : elle avait été élève à Poudlard en même temps que lui, chez les Serdaigle elle aussi. Une petite blonde gentille, mais assez insignifiante. Sept ans durant, James et elle avaient été dans la même classe, et l'on prétendait désormais les marier... Le père de la demoiselle, indiqua Thomas, était issu d'une très grande famille, riche et reconnue... Il avait des relations à ne plus savoir qu'en faire, et une alliance avec cette famille serait très avantageuse pour les Kirkby.

James avait toujours su que cela se terminerait ainsi ; comme dans les familles royales de jadis, le mariage des enfants était surtout un moyen de s'assurer des alliances, et le choix appartenait au père. Timidement, il éleva quelques protestations, que son père balaya facilement : habitué à obéir, le jeune homme n'avait pas le cran de s'opposer à son père, et il finit par promettre d'assister au déjeuner du dimanche, avec la famille Trucmuche.

Depuis la fameuse entrevue avec son père, James ne cessait de repenser à ces projets de mariage. Il s'étonnait un peu que l'on veuille marier le benjamin avant ses aînés- encore qu'il ne faisait guère de doute que Thomas eût des projets pour les deux autres ; mais, surtout, il se demandait comment éviter ce mariage... Car il ne souhaitait ni perdre son indépendance, ni être obligé de quitter Grim... Et la petite blonde qu'on voulait lui fourguer n'avait rien pour susciter sa passion : dans ses souvenirs, elle était discrète jusqu'à la transparence, un peu grassouillette, et nourrissait une passion dévorante pour les batraciens. Rien de bien sexy comparé au Russe athlétique qui savait si bien mener le brun d'une main ferme, et lui apprendre des choses si intéressantes...

-Tu as du feu, mon beau brun ?

James leva la tête, pour s'apercevoir que tout en réfléchissant, il avait parcouru une bonne distance. Il se trouvait désormais du côté de Soho, et une espèce de virago venait de l'aborder avec un sourire incendiaire qui indiquait clairement que le feu n'était pas son but premier. Le jeune homme eut un mouvement de recul en voyant la femme (était-ce d'ailleurs encore une femme, avec ces poils de barbe perçant sous le fond de teint ?) lui tendre la main, et répondit tout à trac :

-Non... non, désolé, madame.

La folle éclata d'un rire un peu trop rauque pour être celui d'une femme, et s'en alla aborder un autre jeune homme ; le sorcier, quant à lui, enfonça une main dans la poche de son blouson pour y serrer sa baguette, prêt à ravager ce quartier de débauche. Partout où il regardait, il ne voyait que du vice, de la dépravation, des gens contre nature. Était-il ainsi avec Grim, à l'image de ces deux lascars en terrasse, un moustachu baraqué serrant fermement la cuisse d'un petit jeune homme à l'air timide ? Ces gens étaient méprisables, à trahir ainsi leur condition... Grim et lui, c'était différent, ils ne s'affichaient pas. Ou pas autant.

L'estomac de James se noua lorsqu'il repensa au Seigneur des Ténèbres et à Sa réaction, sévère mais justifiée, lorsqu'Il avait découvert à quels penchants bestiaux Son serviteur se laissait aller. Indigne d'un homme, indigne d'un sorcier, indigne d'un Mangemort... Il fallait anéantir cette débauche, Son Excellence avait raison, ou la laisser aux inférieurs- mais en aucun cas elle ne devait pervertir les purs...

Les doigts de James se crispèrent sur sa baguette magique tandis qu'il observait un couple homosexuel s'embrassant sans retenue. Un sortilège, un seul, et ces êtres abjects seraient punis...

Une voix d'adolescent vint freiner les pulsions meutrières du Mangemort. Un garçon jeune, mais déjà atteint par cette peste de dépravation, venait de lui adresser la parole et lui posait une question totalement incompréhensible. James posa sur l'adolescent un regard interloqué, et répliqua un peu sèchement :

-Qu'est-ce que tu me racontes avec tes histoires de carte, toi ?

Saleté de Moldus... Ils avaient besoin d'émailler leurs propos de mots obscurs pour le simple plaisir de ne pas être compris... Pour un peu, le Mangemort aurait tiré sa baguette contre l'ado, pour lui apprendre. Mais ses réflexions matrimoniales avaient un peu émoussé sa violence, et il se contentait de regarder le gigolo avec une expression mêlée d'incompréhension et de dédain.
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  • Isaac Deniel
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MessageSujet: Re: [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]   [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini] EmptyVen 31 Juil - 17:29:02

Une expression étrange, inattendue, se peignit sur le visage de l’inconnu. Isaac s’attendait à de la colère, à de la surprise, à un sourire aimable, avec un peu de chance, mais certainement pas à cet air totalement ébahi. Il ne lui ne lui avait pas parlé en yougoslave pourtant. Etait-il tombé sur un touriste inculte qui venait à Londres sans maîtriser un mot d’anglais ? Il se préparait à entendre un fort accent français, allemand ou non identifié lorsque le jeune homme lui fit comprendre, dans un langage parfaitement intelligible, qu’il dérangeait. Eh ! La gravité de sa situation venait de lui faire commettre un acte de politesse. Il avait même réussi à sourire comme un imbécile heureux pour attirer la grâce du passant. Que lui prenait-il de le rabrouer de cette façon ? Un pli boudeur tira ses lèvres. Isaac n’avait pas l’habitude de se faire rejeter. Le rôle de l’importun ne lui convenait pas du tout. En général, les adultes réagissaient bien face à lui. Il était jeune, mignon, adorable, quand il le voulait bien, et cela justifiait les réponses civilisées. L’idée que le garçon pût être pris de court par son intervention inopinée ne lui vint pas tout de suite. L’orgueil de l’enfant favorisé était fragile. Les jolis minois au teint d’albâtre s’abîmaient d’un rien. Tous les affronts appelaient la querelle lorsqu’on connaissait la valeur de son rang. Beaucoup moins avenant, il renvoya de la même façon :

- Rien de fabuleux, j’ai besoin d’une carte téléphonique pour passer un coup de fil rapide à mes parents. Ça va, pas trop compliqué ?


Mais le jeune homme semblait encore loin de l’illumination. Il ne fuyait pas, comme un badaud pressé, et le considérait avec mépris, d’un regard bleu glacé. Si son intention avait été de le repousser ne lui aurait-il pas plutôt tourné un « non non je n’ai rien. » distrait ? Les sourcils de l’adolescent se froncèrent doucement. La question, quoiqu’absurde, engageait la conversation. Pourtant, l’inconnu n’était manifestement pas prêt à lui faire du charme. Dommage, c’eut pût être drôle. Une pensée crispée lui souffla qu’il s’agissait peut-être d’un straight guy plongé malgré lui dans le quartier de Soho et assez curieux ou idiot pour guetter les réactions de l’espèce aberrante qui osait s’approcher de lui. Les intolérants de ce genre étaient nombreux. Quand l’attrait de l’exotisme s’alliait à un esprit limité, ils cherchaient à établir un contact qui devait leur rappeler à quel point ils avaient raison de condamner les mœurs dépravées de l’autre rive.

Sur ses gardes, Isaac évaluait sa proie. Il regrettait de ne pas avoir jeté son dévolu sur un personnage plus cliché, plus proche de lui. Son regard s’attarda, envieux, sur les pédales branchées de la rue. Il était à peu près certain de rencontrer du succès avec eux. Entre gay, on se soutenait. Et cette pensée le rassurait de plus en plus. L’âge de l’enfance s’étirait derrière lui. Dans la rue, les gens lui lançaient des regards plus critiques depuis le début des vacances. Il avait grandi, la maturité sexuelle approchait et, soudain, l’intimité qu’on lui supposait ne plaisait pas. Une hostilité similaire se lisait dans les prunelles de son sauveur potentiel. Et l’impression désagréable d’être jugé évinçait sa deuxième interprétation. Il n’avait pas l’air de guetter le prochain coup de sa soirée. Ou il se fichait simplement des petits jeunes dans son genre. Que savait-il de lui après tout ? Un sourire en coin glissa sur les lèvres d’Isaac. Il murmura d’une voix plus douce et provocante :


- Désolé si je viens de te détourner d’un spectacle plus intéressant… Enfin, ils sont là tous les jours de toute façon…


Tous les jours, toutes les nuits, la ronde folle tournait à Soho. Il se sentait complet ici, comme s’il venait de retrouver un morceau d’identité égaré. Entre les pavés, son adolescence saccagée se recomposait. Une chaleur apaisante se diffusait en lui. Tout ce qu’il voyait l’enchantait. Il voulait vivre cette vie, s’y fondre, s’y perdre. Après sa tournée des magasins, il avait envie d’essayer tous les bars, d’enchaîner les rencontres, juste pour parler, et se familiariser avec un monde qu’il connaissait encore trop peu. A Poudlard, il n’avait trouvé qu’Alix. Les autres garçons ne s’assumaient pas ou préféraient la discrétion. Ceux là étaient capables de lui reprocher son exubérance. Ils pensaient à leur image, et craignaient, malgré leur grande sobriété, de finir dans le camp des grandes folles. Quelle importance ? Pourquoi fallait-il toujours se soucier de l’opinion d’une masse imbécile ? Il voulait vivre à fond, sans barrières ni demie mesure. Sa ballade le confirmait. Elle le poussait à nouveau vers le monde moldu. Ici, il pouvait encore les comprendre. La rue l’accueillait, il était chez lui, enfin. Personne pour lui reprocher ses origines ou ses goûts, à part l’inconnu peut être. Mais le jeune homme isolé n’appartenait pas au quartier. Il ne suivait pas l’animation effrénée de sa petite communauté. Autour d’eux, les visages, les rires, les mots se succédaient. Tous semblaient liés par le bonheur, la joie d’être en vie. Les cœurs battaient entiers, à un rythme effréné. Au creux de sa poitrine, il semblait que le sien s’agitait pour mille. La conscience de toutes ces âmes était effrayante mais délicieuse. L’intangible devenait palpable. Ce qu’il voyait et ressentait depuis le début de la journée le fascinait, l’égarait. Spectateur et figurant, aspirant acteur, il était bien, en paix, une chose qui lui arrivait rarement. Des scènes éclataient à chaque seconde. Elles étaient souvent ridicules, mais n’arrivaient plus à attirer ses moqueries. Elles l’amusaient.

Alors qu’il surveillait la réaction de son interlocuteur, un soupir exubérant gifla son dos, et un garçon, aux jambes terriblement fines, exécuta trois vives enjambées. « J’en ai trop maaaaaarre ! » s’exclama-t-il en se retournant brusquement, les bras croisés, un air furibond imprimé sur son petit visage chafouin. Quelques personnes se retournèrent, mais son compagnon le dépassa d’un pas tranquille. La tapette bouda un instant, à côté d’eux, plantée sur le trottoir, au beau milieu du passage, puis s’élança à la poursuite de son amant après une expiration d’abandon. Isaac pouffa. Le garçon anorexique ressemblait à un gamin, prompt à la colère mais incapable de s’opposer à l’autorité. A sa place, il aurait fait marche arrière, sans hésiter. Celui là n’avait aucune fierté. Pourtant, il souriait, gardait ses railleries. Cette crise n’était pas réelle. Elle appartenait au spectacle, et la tapette oxydée était la première à le savoir.


- Qu’il est chou…
, souffla-t-il, ironique.

Une pensée le tira vers Alix. Ils avaient vécu des moments similaires, de façon beaucoup plus pénible. Son ex copain l’énervait lorsqu’il jouait les princesses offensées. Mais, entre les deux hommes, une belle légèreté régnait. A nouveau enlacés, ils poursuivaient leur chemin, comme si rien ne devait changer.
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  • James Kirkby
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MessageSujet: Re: [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]   [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini] EmptyMer 5 Aoû - 12:24:00

Sourcils froncés, James observa le gamin, et, comme souvent lorsqu'il était perplexe, passa une main dans ses cheveux, soulevant quelques mèches. Pourquoi, lorsqu'il avait vu que le passant ne comprenait pas un traître mot de ce qu'il racontait, l'adolescent n'avait-il pas lâché l'affaire et renouvelé sa tentative auprès d'un autre ? Non, c'eût été trop simple, trop logique, et les Moldus n'étaient ni simples, ni logiques. Au lieu de cela, le garçon regardait le Mangemort d'un air boudeur, comme un enfant à qui on refuse de lui acheter des bonbons, et réitérait sa demande sur un ton plus sec. Cet adolescent devait avoir l'habitude de commander, d'être servi, sans doute ses parents faisaient-ils montre d'une veulerie hors normes à son endroit... Tout dans son attitude puait l'enfant gâté, le tyran domestique doublé- chose troublante- d'une petite garce étonnamment précoce. Quel âge pouvait-il bien avoir ?... Quinze ans peut-être, sans doute moins ; et déjà son regard hardi avait l'insolence d'un dragueur professionnel, sûr de lui et de son succès. À cet âge, James n'avait ni cette aisance, ni cette démarche impérieuse- et même à l'âge adulte, il ne se sentait pas capable de se montrer aussi assuré en présence d'hommes. Le ton moqueur du gamin venait inverser les rôles, le cadet se gaussait de l'aîné, et James eut envie de lui claquer le beignet pour le ramener un peu à la réalité. Qui était-il pour parler ainsi à un adulte ? Avec ses valeurs un peu dépassées, le jeune Mangemort trouvait que le monde courait à sa perte si les mioches se mettaient à se comporter comme des filles de joie...

Non loin d'eux, des hommes passaient, main dans la main, et certains s'embrassaient. Le quartier était dévolu aux amours homosexuelles (le Mangemort devait être le dernier, dans tout Londres, à l'ignorer), et le rigide James sentit le rouge lui monter aux joues en se rendant compte qu'il devait avoir l'air de draguer un gamin. Quelle horreur... il jeta un regard furtif autour de lui, dégoûté de voir ces types vivre si naturellement leur bestialité, sans songer un instant que lui-même et Grim... Non, Grim et lui, ce n'était pas pareil. Ils ne portaient ni casquettes de cuir, ni bracelets de force, ils savaient conserver la discrétion... Un type bedonnant passant près d'eux regarda les deux bruns d'un air de connaisseur, ses yeux s'attardant sur l'adolescent, et il murmura, en passant près de James : « Veinard ». C'était officiel, non seulement on le prenait pour l'un de ces désaxés, mais en plus on supposait qu'il prenait ses conquêtes au berceau. Par réflexe, le jeune homme plongea la main dans sa poche pour y prendre sa baguette magique, mais le spectacle changeait vite à Soho, et le gros type avait laissé la place à une espèce de petit androgyne peroxydé, en plein caprice, sa voix exagérément aigue retentissant à la ronde. James retira lentement la main de sa poche, complètement désorienté, et murmura :


-Par Merlin...

À nouveau, il passa une main dans ses cheveux, et posa un regard déconcerté sur l'adolescent. Chou ? Ce n'était pas vraiment le mot que James aurait employé pour désigner ce spécimen, mais l'heure n'était pas aux discussions philologiques ou aux hypéronymes*. L'urgence était de se débarrasser de ce garçon, et de quitter au plus vite ce quartier de perdition. James blêmit en repensant à l'entrevue douloureuse accordée par le Seigneur des Ténèbres peu avant ; ce n'était pas en déambulant dans les quartiers gays qu'il prouverait sa bonne volonté. Passant sans s'en rendre compte au vouvoiement, le jeune Mangemort interrogea l'adolescent, d'une voix pressante :

-Bon, que voulez-vous de moi au juste ? Je ne comprends rien à vos histoires de carte félé... téfélonique. Alors soit vous vous expliquez correctement, soit vous allez raconter vos sornettes à quelqu'un d'autre, je n'ai pas que ça à faire !

Prière de choisir la deuxième option, merci. Ainsi, James pourrait transplaner au plus vite et gagner des quartiers plus sobres. Mais le gamin ne semblait pas l'entendre de cette oreille ; il regardait le jeune homme avec un intérêt renouvelé, comme s'il venait soudain de découvrir quelque chose d'essentiel. L'intensité de ce regard accrut la perplexité de James, qui se demanda un instant s'il avait un truc dans les dents ou une mouche en train de pondre sur son nez.



*Désolé, ça n'a strictement rien à voir, mais j'ai pas pu résister...
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  • Isaac Deniel
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MessageSujet: Re: [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]   [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini] EmptyVen 7 Aoû - 21:43:14

Non, ce n’était pas un plan drague mal inspiré. A voir le regard du jeune homme, Isaac avait l’impression de passer pour un séducteur de seconde zone. L’inconnu se méfiait, il attendait, semblait-il, une suite plus déplacée. Certains hétéro avaient l’impression que les gays voulaient coucher avec tous les garçons qu’ils rencontraient. Même les gros porcs huileux se sentaient menacés. Sa proie avait plus de soucis à se faire, évidemment. Isaac n’adressait jamais la parole aux individus qui insultaient la beauté, c’était indécent, mais, sa perversité appartenait encore à la théorie. L’innocence ne se devinait-elle pas sur son adorable frimousse ? Visiblement, les passants n’y croyaient pas. C’était rassurant. La vertu lui pesait. Elle n’était qu’une valeur fausse, un défaut de l’enfance, un carcan de frustration à briser au plus vite. Ses idées changeaient nettement depuis quelques mois. Aujourd’hui, elles le guidaient en partie à Soho, et les arrières pensées, non avouées, frôlaient son allure, encourageaient son insolence. Il n’avait pas envie de passer pour un gamin curieux. Il fallait que ces hommes le trouvent désirable. Des regards qui ne trompaient pas glissaient sur lui. Ils le reliaient à la catégorie des trentenaires et plus en général. Il les observait derrière les verres sombres de ses lunettes. Aucun ne méritait un arrêt sur image. Il assistait au défilé lamentable d’une bande de faunes lubriques qui rêvaient de mettre un minet prépubère dans leurs lits. La jeunesse les fuyait, leur hypothétique splendeur passée n’était plus, et certains débordaient de graisse. En particulier celui qui jugea bon de faire un commentaire à l’oreille de son interlocuteur. Dégouté, Isaac tourna une moue dédaigneuse vers le bear. Ça, il pouvait l’admirer comme un article de luxe en vitrine. Une chose aussi ignoble n’attirait pas les garçons de son genre. Pourtant, certains aimaient le style flasque et poilu. Ces erreurs de la création trouvaient des acheteurs, parfois moins laids qu’eux. C’était incompréhensible.

Heureusement, ces monstruosités n’étaient pas majoritaires. Les tapettes branchées frétillaient sur le pavé entre des hommes plus sobres et plutôt bien faits. Le couple en crise réunissait ces deux charmantes extrémités. Et si le petit éclat de rue amusa Isaac, le jeune homme aux yeux bleus semblait soudain perdu au milieu d’une population extraterrestre. On aurait dit qu’il doutait de ce qu’il voyait. Trop égaré pour relever ses insinuations, il marmonna un juron incompréhensible. C’était drôle. Avec le brouhaha ambiant Isaac avait l’impression de distinguer le prénom de Merlin. Un moldu sain d’esprit ne prononcerait jamais ce mot, et ne buterait pas non plus sur « téléphonique ». Le changement de ton le déconcerta. Surpris, le jeune garçon constata qu’il venait d’arrêter un sorcier. Comment était-ce possible ? La rue grouillait de moldus, et il fallait qu’il se jette sur le seul sorcier des environs. Avec une telle sélection, il n’était pas prêt de trouver un moyen d’appeler ses parents. Son regard s’intensifia. Il dévisagea le jeune homme avec un intérêt renouvelé. Tout s’expliquait. Ils tenaient un véritable dialogue de sourds. Et, à en croire ses phrases empesées et ses airs perdus, il devait descendre d’une de ces familles Sang Pur un peu arriérées. Mais que faisait-il ici alors ? La communauté homosexuelle sorcière tenait aussi ses quartiers ici. En faisait-il parti ? Essayait-il de se lancer ? Il n’était pas très âgé après tout… Il fallait qu’il sache… Trop heureux de découvrir un sorcier au milieu des moldus, alors que la situation politique le tenait à l’écart du monde magique, Isaac remonta ses lunettes de soleil et éclata de rire, amusé par la mine toute stupéfiée de son compagnon et le malentendu qui les avait réunis.


- Ce que je veux de toi ?
dit-il malicieux en retrouvant un sérieux très relatif. Ses yeux d’ébène vrillèrent les prunelles claires de l’inconnu. Il était vraiment mignon ce garçon. Oh je crois que je pourrais vouloir beaucoup de toi, souffla-t-il provocant. Mais pour ma carte, je crois en effet qu’il vaudrait mieux que je m’adresse à un vrai moldu.

Il sourit espiègle, soudain plus disposé à se montrer aimable. Il mourrait d’envie de lui demander s’il connaissait le passage sorcier du quartier, mais, s’il faisait une erreur, la maladresse serait grossière. Le styliste de Tissard et Brodette lui faisait confiance. Il ne devait pas donner l’information à n’importe qui. L’hésitation passa sur son visage. Puis, il observa le jeune homme d’un air soupçonneux et lui lança d’un air confidentiel soutenu par un regard entendu.


- Est-ce que, par hasard, tu irais au même endroit que moi ?


Voilà, il suffisait de guetter l’expression du sorcier pour savoir s’il comprenait la même chose que lui. Malgré ses réserves, il ne semblait pas tellement hétéro après tout. Bien sûr, s’il ne saisissait pas le message, il risquait de lui trouver une signification douteuse. Mais sur le coup, Isaac n’y avait pas vraiment pensé.


Dernière édition par Isaac Deniel le Mar 11 Aoû - 11:49:27, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]   [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini] EmptyDim 9 Aoû - 21:00:15

Était-il encore à Londres, ou avait-il été transporté à son insu sur une autre planète ? Telle était désormais la question que James se posait, son regard passant d'un petit groupe de tapettes surexcitées à un couple de lesbiennes tendrement enlacé. Jamais encore il ne s'était trouvé dans un tel milieu, et son éducation guindée lui interdisait d'imaginer ne serait-ce que le quart de ce qu'il voyait. L'homosexualité était pour lui une tare honteuse, la preuve d'une telle infériorité qu'il convenait de s'en cacher, lorsqu'on avait l'infortune d'être frappé de ce malheur... Lui-même, quel que soit son bien-être lorsqu'il se trouvait avec Grim, n'aurait jamais imaginé s'exposer ainsi à tous les regards. D'ailleurs, lui n'était pas homosexuel, oh que non ! Il n'avait rien de commun avec ces déchets d'humanité... absolument rien ! Il lui arrivait fréquemment de se retrouver dans le même lit qu'un autre homme, mais est-ce que ça faisait de lui un gay, comme tous ceux qui l'entouraient ? Non, résolument non... Son esprit se refusait obstinément à accoler le mot gay à son nom. Impossible, vous comprenez ? Il était rigoureusement impossible qu'un fils Kirkby soit homosexuel, y compris lui dont le seul partenaire régulier était pourtant du même sexe... Mais ça n'avait rien à voir avec de l'homosexualité ! Vous saisissez la nuance ? Non ? Lui oui, même s'il doutait qu'il aurait été bien en peine de l'expliquer à sa famille...

Et tous ces gens qui vivaient au grand jour, qui ne se cachaient même pas, alors qu'ils appartenaient à deux des races les plus lamentables du monde : gays et moldus, deux bonnes raisons de se suicider... Heureusement pour James, lui n'était ni l'un ni l'autre... mais non, puisqu'on vous dit qu'il n'était pas homosexuel, enfin...
L'adolescent qui l'avait arrêté était, lui, un des exemples les plus spectaculaires de cette homosexualité assumée ; les ongles peints en noir, la pose provocante, une façon presque magnétique d'attirer les regards...C'est avec une insolence aguicheuse qu'il fixait James, et ces yeux brûlants posés sur lui ajoutaient encore à l'embarras du jeune homme, qui se demanda s'il n'allait pas transplaner directement. D'autant plus que le garçon, d'une voix mourante, se mettait à lui faire des avances... Le Mangemort rougit jusqu'à la racine des cheveux en entendant que ce mioche pourrait « vouloir beaucoup » de lui... Il appréhendait la suite, car le sale gosse n'en avait visiblement pas fini avec lui, mais la phrase suivante ne fut pas, comme il l'avait craint, pour une proposition indécente, mais pour reconnaître en lui un sorcier. Sa rougeur laissa place à un blêmissement radical, et il murmura :


-À un moldu, oui... Très bonne idée...

À son tour, il contempla le garçon d'un autre oeil, en se demandant quelle était la probabilité pour que deux sorciers se rencontrent en plein Londres. Il y avait quelques millions de pèlerins dans cette ville, et seulement quelques milliers de sorciers... Ou alors, comme on le disait, les sorciers étaient attirés par leurs semblables, sans même s'en rendre compte... Pour la première fois depuis son arrivée dans cette rue, James sourit : rencontrer un sorcier, fût-il un inverti, était en soi un soulagement. L'adolescent posa une question que James jugea obscure, et à laquelle il répondit d'une voix blanche :

-Euh... Je ne sais pas où tu vas... Mais moi je ne vais pas... je ne vais nulle part en particulier... Je... euh... Je me promène, conclut-il en désignant d'un geste vague les badauds pittoresques de la rue.Les Moldus sont tellement... étranges...

Surtout dans ce quartier, d'ailleurs, mais le jeune Mangemort estima préférable de garder cette réflexion pour lui ; l'adolescent faisait tellement couleur locale qu'une telle remarque risquait fort de le vexer, et James s'en serait voulu d'offenser un jeune sorcier. Avec intérêt, le jeune homme détaillait le garçon. Il pouvait être en quatrième ou cinquième année à Poudlard, et l'étudiant s'amusa un instant à l'imaginer en uniforme scolaire, cravate nouée, sans vernis aux ongles. À quelle maison pouvait-il appartenir ? Impossible de le deviner... Un Serpentard ne se baladerait pas dans cet accoutrement. Un Serdaigle ne se baladerait pas sans une énorme pile de bouquins. Ce garçon était donc un Poufsouffle ou un Gryffondor... Reprenant quelque assurance, James demanda :

-Tu es à Poudlard ? Moi, j'étais à Serdaigle... Je m'appelle James, acheva-t-il en tendant machinalement la main à l'adolescent.
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  • Isaac Deniel
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MessageSujet: Re: [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]   [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini] EmptyMar 11 Aoû - 11:48:19

Entre sorcier comme entre gay, on se reconnaissait, parfois bien malgré soi. Les regards se croisaient et un lien invisible rendait familier un visage totalement inconnu. Pourquoi ce garçon ? La rue débordait de gens plus disposés à l’aider. Leurs rires se morcelaient, les plaisanteries fusaient, les clins d’œil s’échangeaient. Il lui suffisait de rencontrer l’attention d’un garçon ou d’une fille pour recevoir un sourire avenant. C’était étrange, cette impression de partager une sorte de complicité commune. Toutes les retenues sociales tombaient. Des groupes pouvaient s’arrêter, crier quelque chose de stupide, et recevoir les rires amusés des passants. Les regards mauvais ne rôdaient pas au milieu de la foule. Il ne risquait rien. Pourtant, il choisissait un individu mal adapté. Sa solitude ne rendait plus abordable, sa tranquillité l’impressionnait moins. En vérité, Isaac cherchait encore un repère auquel s’accrocher. La communauté homosexuelle de Soho était une nouveauté, un univers qui lui correspondait, mais auquel il n’était pas intégré. Cette barrière contradictoire était plus gênante qu’on pouvait le croire. Il se sentait comme un pion de trop sur un échiquier. Il était à sa place sans y être, seul, sur une ligne parallèle. S’adresser à une folle délurée, à une butch au crane rasé ou à un bear fan de Kilie Minogue ne lui disait rien. Une force inconnue, la même qui l’avait poussé vers le jeune adulte, le retenait. Il réalisait à présent que le pas n’était pas tout à fait franchi. S’il ressemblait aux petites allumeuses qui roulaient des hanches en parsemant leurs discours de tonalités à la fois incisives et délicates, il voyait bien qu’il ne les connaissait pas. Leurs similitudes ne signifiaient rien. A l’intérieur, tout un monde les séparait. C’était ce monde qu’il retrouvait en tirant à lui un autre sorcier. La pioche n’était pas maladroite finalement. Elle ne l’aiderait peut-être pas à explorer le quartier, mais elle l’apaisait. La magie lui manquait. Ses amis de Poudlard devaient garder leurs distances à cause de la ségrégation des né-moldus, le Chemin de Traverse l’excluait. Seul Grim lui restait fidèle, mais il ne pouvait pas lui rendre visite tous les jours. Il fallait attendre la semaine prochaine, piégé au milieu des technologies moldues. Les heures duraient des siècles ici.

Son bel interlocuteur semblait toujours aussi déstabilisé, et ses insinuations provocantes piquèrent ses joues d’un vif incarnat. Isaac avait pris l’habitude de jouer sur l’ambigüité avec les garçons en cours d’année. Ce réflexe accompagnait la découverte assumée de sa sexualité. Les mots le rendaient plus fort. Ils donnaient l’illusion de l’assurance, dressaient une défense efficace face aux détracteurs. Mais les paroles, pour osées qu’elles soient, n’avaient jamais dépassées leur fonctions protectrices. Il ne pensait pas au-delà en les susurrant au sorcier. Pourtant, son malaise le surprît. Qu’il pût troubler un adolescent de son âge était normal, il s’en amusait toujours beaucoup, mais, de la part d’un jeune homme plus expérimenté, en toute logique, la réaction était assez inattendue. Elle le rapprochait d’Orion, son refoulé préféré. Présentait-il les mêmes symptômes ? Isaac fronça légèrement les sourcils en l’entendant répéter ses derniers mots d’une voix distraite. Il était trop gêné pour accepter une réalité homosexuelle et trop troublé pour la rejeter. Si ses avances aguicheuses touchaient son intégrité, comme l’imaginait ces imbéciles fermés d’esprits, il l’aurait sans doute insulté ou calmé d’une voix raide. La suite le conforta dans ce raisonnement. Le pauvre était complètement déboussolé. Il bafouillait, butait sur tous les mots, commençait des phrases sans les finir. Avait-il compris ? Difficile à dire hélas. S’il se sentait démasqué, menacé, il ne dirait rien de plus pour l’instant. Il se promenait, du côté des moldus, à Soho. Bien sûr. Isaac lui lança un regard franchement sceptique.


- Ah oui je vois, tu visites… Evidemment, pour les ballades, c’est un quartier parfaitement indiqué… N’est ce pas ?
– Un petit sourire glissa sur ses lèvres. – Et les moldus… ne sont pas plus étranges que les sorciers en fait. Avant de les connaître, j’aurais juré que les sorciers étaient fous. Maintenant, je me demande quel peuple l’est le plus…

Il observa les badauds colorés d’un regard égal. Si aujourd’hui il préférait les sorciers, ce n’était certainement pas parce qu’il les trouvait plus censés. Il s’était simplement adapté à leur univers, et avait construit ses dernières années avec eux. Et, avec toutes les horreurs qui secouaient la communauté magique depuis près de deux ans, sans parler des années qu’il n’avait pas connues, il était difficile d’accorder plus de mérite aux uns qu’aux autres. Le sujet était dangereux cependant. Certains sorciers ne pardonnaient pas ce type d’analogie. Mais, Isaac estimait qu’un sorcier perdu au milieu des moldus n’était pas un fanatique du sang pur. D’ailleurs, le jeune homme n’avait pas montré de signes d’hostilités réalisant qu’il connaissait la magie, malgré sa tenue et son vocabulaire on ne peut plus moldu. Il souriait, et n’essayait pas de se débarrasser de lui, bien au contraire.
Sur le ton de la conversation, le garçon lui demanda soudain s’il était à Poudlard en lui précisant sa maison. Une lueur insondable étincela dans les yeux sombres d’Isaac. Aimait-il ou haïssait-il les Serdaigle ? Les Poufsouffle le laissait indifférent, les Gryffondor l’agaçaient en général, mais, à côté de ces deux masses stupides et vaines, se tenait le blason ambigu des bleus et bronze. A l’école, il était de notoriété publique que le préfet des Serpentard aimait se quereller avec les héritiers de Rowena. Tout avait commencé avec la détestable Lucy Duncan, puis, il avait appris à détester Neoki. Il partageait une aimable rivalité, ponctuée de sarcasmes avec Fabula, avait jeté Calypso Tealsdale dans les griffes de Rusard en suivant les idées tordues de Damien un soir de janvier, gardait encore à l’esprit la brutalité du sort que Stephen Cornfoot avait lancé, bien malgré lui disait-il, quelques semaines plus tôt au fight club et filait un jeu étrange où se mêlaient désir et mépris avec Orion O’Neill. Beaucoup de Serpentard s’acharnaient sur les Gryffondor, mais, sans hésiter, il préférait les Serdaigle. Comment pourrait-il se passer de toutes les drôles d’histoires qui les liait ? Il était amusant que le dénommé James fut de cette maison, il l’avait justement rapproché d’Orion quelques secondes plus tôt.

- Un Serdaigle, tiens donc…
, souffla-t-il, espiègle. Ça tombe bien, tu me faisais penser à leur préfet… - Il prit sa main et la serra sans la secouer. Ses derniers mots ne l’aidaient pas à sortir de ses réflexes séducteurs. Les doigts fins glissèrent doucement sur la paume du jeune homme en se retirant. – Isaac, préfet de Serpentard… Du moins, je l’étais cette année.

Et il l’était toujours officiellement. Mais un doute le prenait dès qu’il y pensait. Si les nés-moldus devenaient les ennemis publics numéro un, il y avait peu de chances qu’il garde sa place. Il savait que Rogue ne l’aurait pas nommé sans Dumbledore et sa volonté d’ouverture.


- Et… Même si tu ne vas nulle part, tu ne connaitrais pas un bon endroit ici ? Comme un bar où se poser un peu ? Un ami m’a donné quelques noms, mais je n’étais encore jamais venu… Enfin, à part pour faire les magasins.


Un sourire aguicheur sur les lèvres, il tentait une dernière fois sa chance. Si l’éclaire de compréhension ne passait pas dans le regard de James, ou s’il feignait de ne pas savoir où il voulait en venir, il abandonnerait la partie. Au pire, il avait aussi pris le nom des cafés les plus intéressants du quartier, et il n’était jamais contre une nouvelle rencontre. Sa curiosité lui avait permis de se lier d’amitié avec Grim. Il ne pensait pas faire une rencontre aussi exceptionnelle, mais pour une fois qu’il trouvait un sorcier, attirant qui plus est, au beau milieu du Londres moldus, et, surtout, du cercle gay, il serait dommage de le laisser partir après quelques mots échangés sur le pavé.
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MessageSujet: Re: [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]   [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini] EmptyMar 11 Aoû - 21:30:28

L'adolescent n'avait pas l'air convaincu, lorsque James disait qu'il se promenait. C'était pourtant le cas ; il n'avait rien de précis à faire à Soho, et ses pas l'avaient mené là par le plus grand des hasards. Dire qu'il méditait sur le sombre destin conjugal que lui réservait son père lorsqu'il s'était retrouvé là, dans ce temple de la débauche... Un mariage avec une pimbêche de sang pur, probablement plus laide qu'un cul de singe, mais avec un arbre généalogique à faire pâlir une famille royale... Rien de commun avec les spécimens présents dans cette rue : eux n'avaient aucune lettre de noblesse, aucune ascendance prestigieuse, mais James devait bien s'avouer qu'ils étaient plus drôles que la mijaurée qu'on lui réservait. Et, quoi qu'en dise l'adolescent, les Moldus étaient étranges, particulièrement celui qui, là-bas, s'acharnait à tapoter un drôle de petit appareil relié à deux espèces d'écouteurs posés sur ses oreilles... Forcément, le gamin avait dû penser que James était méprisant lorsqu'il parlait de l'étrangeté des Moldus, mais il ne faisait que relever un fait, comme on dit, lorsqu'on est en safari, que le rhinocéros est un curieux animal ; aucun jugement de valeur dans ce discours, simplement une constatation... James n'était pas un admirateur des Moldus, loin de là ; mais il préférait ne pas laisser transparaître le dédain que lui inspirait cette populace vaine et gesticulante, dans laquelle le garçon se fondait si bien ; en outre, depuis que son interlocuteur l'avait arrêté, le jeune Mangemort avait vu plusieurs objets qui avaient attiré son attention : outre le baladeur précédemment cité, plusieurs bicyclettes, un scooter, un téléphone portable, un briquet et un pistolet à eau manié par un adolescent malingre avaient successivement éveillé son intérêt. S'arrachant enfin à la contemplation de la devanture clignotante d'un magasin, James répondit à mi-voix :

-Je ne dis pas qu'ils sont fous... Je dis qu'ils sont étranges... Regarde tous ces objets... C'est incroyable, non ? Comment ont-ils pu imaginer tout ça ?

C'était la première fois que le jeune homme prenait la peine d'observer attentivement les Moldus et leur technologie, et, comme nombre de sorciers, il se demandait comment ces gens avaient pu inventer tout cela... Il avait suivi l'option d'étude des Moldus à Poudlard, contre l'avis de sa famille (« à quoi bon étudier ces animaux ? ») mais n'avait pas brillé dans cette matière ; son BUSE lui avait valu un T en raison d'un hors-sujet monumental... Mauvais souvenir, pour un Serdaigle, qu'une aussi mauvaise note, la plus mauvaise de sa scolarité ; cela avait écourté sa fréquentation de la classe d'étude des Moldus, et peut-être renforcé son hostilité pour les populations non magiques...

Tiens, en parlant de Poudlard. Le gamin s'appelait Isaac, et s'annonçait préfet de Serpentard. Ignorant la nouvelle politique de la direction à l'égard des nés-moldus, James ne releva pas le « du moins je l'étais cette année ». Il n'y avait d'ailleurs pas fait spécialement attention, tout à sa stupéfaction... Un Serpentard ! Le jeune homme avait toujours jugé les membres de cette maison à l'aune de son frère Edward, et c'est pourquoi il pensait qu'un Serpentard ne pouvait pas se balader dans cette tenue... Jamais Edward n'aurait pu se peindre les ongles, ou arborer une telle coiffure, mais finalement, cela ne signifiait pas que tout Serpentard était sur la même longueur d'ondes... L'appartenance de James à la maison Serdaigle semblait inspirer Isaac, qui le compara au préfet de cette maison. Qui était ce préfet ? Le jeune Mangemort l'ignorait, et il ne pouvait donc déceler tout le contenu caché de cette comparaison. Un sourire aux lèvres, il répondit :


-Préfet de Serpentard... Une sommité, donc. Je n'ai jamais été préfet, moi... Mes compliments, Isaac...

Sa voix ne contenait aucune hostilité envers les Serpentard, comme c'était souvent le cas entre les Verts et les élèves des autres maisons ; les membres de la famille Kirkby se partageaient traditionnellement entre Serpentard et Serdaigle, mais les Verts jouissaient d'un prestige que n'avaient pas les Bleus : pour Lord Kirkby, lui-même ancien disciple de Salazar, allaient à Serdaigle ceux qui n'avaient pas les qualités pour être admis à Serpentard, et non l'inverse. Enfant, James avait un peu regretté de ne pas revêtir les couleurs vert et argent, mais avec le recul, il devait avouer que Serdaigle lui convenait mieux ; s'il partageait l'ambition chère aux Serpentard, il n'en avait ni la ruse, ni la fermeté de décision, et le rôle de rat de bibliothèque lui allait comme un gant. Avec un soupir, le jeune Mangemort repensa à la rivalité entre Edward d'un côté et George et lui de l'autre ; deux Serdaigle, un Serpentard, les discussions étaient âpres à la maison, chacun tenant pour les valeurs de sa maison... Finalement, c'était lui, le benjamin, celui qu'on jugeait timoré, qui avait le premier franchi le pas et reçu la Marque.

Peu respectueux de ses souvenirs, Isaac embrayait, parlant d'aller boire un verre – avec un sous-entendu trop clair pour James, qui rougit à nouveau mais répondit d'une voix qui ne tremblait pas :


-Oh, je ne connais pas le quartier, mais si tu as des noms de bars... Un verre ne serait pas de refus... Nous serons plus à l'aise pour parler...

Nerveusement, il tira son paquet de cigarettes, en cala une entre ses lèvres, tendit le paquet à Isaac, avant de se rendre compte que son seul moyen d'allumer sa clope était qa baguette magique – mauvaise idée dans cette rue. À moins d'aborder un Moldu pour lui demander du feu. Un peu gêné, l'étudiant demanda au Serpentard :

-Euh... excuse-moi... tu n'aurais pas du feu ?
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  • Isaac Deniel
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MessageSujet: Re: [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]   [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini] EmptyMar 18 Aoû - 22:14:35

Les voitures vrombissaient sur la route, des appareils minuscules diffusaient de la musique, ça et là, quelques téléphones portables sonnaient, des panneaux publicitaires sous verre changeaient tous seuls leurs affiches, derrière les vitrines, des écrans de télévision colorés s’animaient, la magie de la technologie était partout, à chaque coin de rue. Les moldus n’avaient pas besoin de baguette, ils se contentaient de fils électriques, de piles et d’essence. Comment en étaient-ils arrivés là ? C’était incroyable en effet. Isaac essayait d’imaginer Soho quelque cent ans plus tôt. Le pavé devenait irrégulier, les automobiles se transformaient en calèches, plus rien ne clignotait sur les devantures des boutiques, mais l’ère industrielle était déjà bien installée. On perfectionnait déjà les premiers téléphones, la radio, les gramophones, le cinéma, la photographie entraient dans le quotidien. Les moldues avaient sommeillés longtemps avant de découvrir les possibilités infinies de la science. Ils s’étaient détachés des sorciers en les exploitants. Si la magie fascinait toujours, le rêve d’une avancée technique qui devait les mener jusqu’aux étoiles égarait les esprits. Isaac l’avait partagé avec ses camarades. Les univers futuristes, les histoires de vaisseaux spatiaux, de téléportassions et de sabres lasers revenaient souvent dans leurs jeu, ou dans les séries qu’il aimait suivre à la télévision. D’un autre côté, les mythes anciens restaient très présents, mais ils gardaient une saveur plus poussiéreuse, moins originale. Autour de lui, rien ne l’étonnait. Tout était normal. Pourtant, la question du « comment ça marche ? » revenait souvent dans sa tête d’enfant. Si suffisait d’appuyer sur un bouton pour voir des images en direct, à l’autre bout du monde. Et une nouvelle invention démentielle faisait de plus en plus parler d’elle, internet et sa base de donnée sans limites ni frontières. Par bien des aspects, les moldus arrivaient à dépasser les possibilités de la magie. En adoptant la radio, les appareils photo, les locomotives et, plus récemment, les bus, les sorciers avaient salué leur géni créatif. C’était peut-être pour cette raison qu’ils n’avaient pas recyclés d’autres appareils utiles au quotidien. Il ne fallait pas honorer trop vivement l’autre monde. C’était dommage au fond.
Les remarques naïves de James lui arrachèrent un sourire amusé. Il tira son lecteur cd de son sac à main et le regarda un instant.

- J’imagine que ça suit l’évolution d’un sortilège ou d’une potion, dit-il d’une voix posée. Avant ce baladeur, on a commencé à se dire qu’il était sans doute possible de garder la musique que l’on jouait pour l’écouter à l’infini. Et à force d’expériences, les premiers gramophones sont arrivés. Les sorciers en ont gardé quelques uns je crois. Et comme il est toujours possible de faire mieux tu peux voir par toi-même la taille des derniers lecteurs. Il faut bien compenser l’absence de magie, même si les découvertes auront été plus longues.


Pourquoi prenait-il le temps d’expliquer ? Il n’en savait rien, mais ces pensées pour la technologie moldue le réconfortait. Puisque son avenir sorcier semblait compromis, il se réfugiait dans la douceur d’un passé moldu. Tous ces gens menaient une vie qui aurait pu être la sienne. Il ne la regrettait pas, mais se promettait de ne jamais l’oublier. Ce monde garderait toujours une infime partie de lui. Et il la retrouvait tous les étés. Même si son enthousiasme s’atténuait d’années en années, sa famille suivait toujours ce quotidien.
A Poudlard, il avait découvert un autre mode de vie, une nouvelle philosophie. La pensée sorcière l’avait d’abord déconcertée tant elle semblait tirée d’une autre planète. Aujourd’hui encore, il ne savait pas très bien où se situer. Marqué par deux cultures, il se tenait entre deux rives, s’adaptait assez pour faire oublier ses origines peu glorieuses aux dires de ses camarades verts et argent, et gardait une opinion modérée. Etait-ce un atout ? Une chance ? Il n’en savait rien. Des contradictions le heurtaient souvent, et les crises identitaires le guettaient parfois. James semblait stupéfait par la révélation de sa maison. Ce n’était guère surprenant. Les héritiers de Salazar prônaient le sectarisme, et le blason avait longtemps favorisé les sangs purs. La tendance restait. A Serpentard, les amis né-moldus s’étaient raréfiés, il avait pris l’habitude de rire des maladresses des petits nouveau qui débarquaient, surtout lorsqu’ils arboraient les teintes rouges et or. Où devait-il se placer ? Etait-il toujours bienvenu chez les moldus ? Les réponses étaient de moins en moins évidentes. Depuis la mort du directeur, ses convictions s’obscurcissaient. Un sourire presque nostalgique passa sur ses lèvres lorsque James répéta son titre glorieux. Une sommité oui, il ne croyait pas si bien dire. Cette année, ses frasques avaient fait le tour de l’école. Malgré ses origines et ses goûts à contre courant, il était respecté. Il ne pensait pas arriver si haut et si vite en découvrant l’école de magie et son blason. Mais tout s’effondrerait peut être.

Sans un mot, il acquiesça lentement et préféra retourner à des futilités. Hélas, il n’aurait manifestement pas la chance de visiter le passage gay sorcier aujourd’hui. Le jeune homme n’avait pas l’air d’en avoir entendu parler. Il rougissait toujours pourtant, sensible à son invitation. Cette attitude intriguait de plus en plus Isaac. Qu’avait-il à craindre d’un gamin de quatorze ans ? Le jugeait-il plus âgé ? Lui découvrait-il un charme inattendu ? Il fallait le vérifier. L’expérience donnerait plus de piquant à leur rencontre, car le jeu du « faisons connaissance » trouvait vite ses limites si l’on ne s’attachait pas à une foule de détails à libre interprétation avant de provoquer enfin le trouble total et parfait. La partie lui changerait les idées. Et il ne pouvait résister à l’envie d’emmener le sorcier perdu dans un endroit typiquement moldu. L’observation s’annonçait intéressante, et il garderait un avantage certain. De plus, l’étudiant lui accordait gracieusement cet ascendant. C’était plutôt bon signe, et le paquet de cigarette qu’il sortit de sa poche attira cette pensée. Dans les films, les personnages fumaient souvent pour calmer leur nervosité. Il lança cependant un regard un peu perplexe à James lorsqu’il lui proposa une cigarette. En général, les adultes, même jeunes, évitaient d’en offrir aux adolescents de son âge. Il fallait croire que les sorciers accordaient moins d’important à ces règles d’éthique. N’avait-il pas fumé au narguilé avec Grim jusqu’à atteindre un état mental relativement critique ? Cette fois cependant, il ne céda pas à cette nouvelle tentation. Entrer dans le cercle des fumeurs ne lui disait vraiment rien. Par conséquent, il n’avait pas de briquet sur lui. Mi navré mi amusé, il répondit, le regard brillant :


- Non… Comme c’est dommage, on dirait que tu vas devoir t’en passer !

Il le fixa un instant. Son embarras d’un genre nouveau lui donnait une expression plutôt adorable. Visiblement, James ne savait pas comment s’adresser à un moldu pour demander le même service. Dans la rue, les fumeurs étaient nombreux pourtant. Il chercha le regard de l’un d’entre eux, un jeune homme coiffé en pics et dont le t-shirt portait les inscriptions dorées d’une marque à la mode. D’un pas droit, il s’approcha de lui.


- Excuse moi, tu n’auras pas du feu pour mon ami ?
– Puis il lui fit signe de s’approcher et murmura à son oreille sur un ton entendu. – C’est la première fois qu’il vient ici, et bien sûr il faut qu’il fasse son grand timide… Dis, tu ne connaitrais pas une bonne adresse pour le débaucher un peu ?
- Bien sûr !

Le garçon, ravi de partager une confidence de ce genre lui tendit son briquet et, suivant le même jeu, il lui souffla le nom d’un bar relativement libre en lui donnant de rapides indications. Un sourire satisfait tira les lèvres du Serpentard. Il ouvrit le feu devant James au lieu de le laisser se débrouiller avec le briquet et posa une main sur son épaule pour le forcer à s’abaisser à la hauteur de son visage, là où la flamme dansait.


- Tu as de la chance, on dirait que je ne peux rien te refuser...


Toujours très joueur, il rendit à son complice le briquet en lui envoya un clin d’œil. Sa main descendit le long du bras de l’étudiant avant de se retirer.


- Bien, j’ai peut être une idée pour le bar. Le plus proche est justement dans la rue derrière si je me souviens bien.


Léger, il emboita le pas de James et le guida jusqu’à l’enseigne indiquée, l’Opale. Les vitres ne donnaient qu’un vague aperçu de l’intérieur. La lumière bleutée dissimulait la clientèle. Sur la porte, un petit drapeau arc en ciel résistait au passage du temps. Il poussa la poignée d’un geste assuré, comme s’il avait déjà pris ces habitudes dans ce petit bar évité du grand publique. Une population essentiellement masculine se tourna vers lui, et il essaya d’oublier son malaise. La présence de James l’aidait à trouver de l’assurance. Elle était nécessaire pour que son jeune âge n’alerte personne. Cependant, la clientèle des lieux ne semblait pas très regardante. Le sol métallique raisonnait sous leurs pieds, des visages intéressés s’attardaient sur eux. Par pure provocation, Isaac pris sans réfléchir la main de son compagnon et décida pour lui de la destination. Une alcôve au fond de l’allée étroite était meublée de quelques fauteuils défoncés, plus confortables que les sièges en plastique phosphorescents de l’entrée. Dans le coin opposé, un couple à moitié monté dessus s’embrassait dans l’indifférence générale. Une musique électronique brutale pulsait dans les enceintes. L’endroit lui plaisait.


- Voilà, c’est mieux ici. Tu en pense quoi ?
demanda-t-il en saisissant la carte plastifiée des boissons. Tu as une idée de ce que tu veux prendre ?

Son regard s’attarda sur les cocktails. Depuis la fête de Serpentard, il s’était largement familiarisé avec les différentes recettes, et commençait à y prendre goût, tandis que l’alcool pur n’arrivait pas à éveiller son intérêt.
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  • James Kirkby
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MessageSujet: Re: [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]   [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini] EmptyMer 19 Aoû - 21:07:55

Pas la peine de le prendre pour un demeuré et de lui faire l'histoire de l'art et de l'industrie des Moldus depuis l'âge de la pierre polie, hein. James n'avait peut-être pas brillé aux BUSE en étude des Moldus, mais il se rappelait tout de même suffisamment de choses pour pouvoir retracer à peu près l'évolution des inventions moldues... Sa question ne portait pas réellement sur la façon dont les appareils s'étaient perfectionnés, mais plutôt sur leur origine. Comment un type avait-il pu un jour imaginer de construire un objet pour se parler à distance, ou pour trimballer de la musique ? Comment l'idée était-elle venue, avait-elle germé dans un cerveau ? La question se posait tout aussi bien pour les inventions magiques, cela dit : comment avait-on inventé les sorts, les potions qui formaient le quotidien des sorciers ? Qui le premier avait pensé que mélanger tel et tel ingrédient, dans tel ordre, durant un temps T, donnerait une potion destinée à un usage particulier ? Étrange genèse des innovations humaines, sur laquelle James s'interrogeait depuis fort longtemps. Les explications d'Isaac tombèrent un peu à plat, le jeune Mangemort se contentant de lancer un regard bref et assez glacial à l'appareil. Tout cela l'intéressait finalement assez peu ; il avait eu le sentiment (surtout après sa note aux BUSE) que le mondu moldu et lui-même n'étaient faits ni pour se rencontrer, ni, a fortiori pour se comprendre. Que chacun suive son évolution dans son coin, et tout irait pour le mieux.

Vaguement irrité, James jeta un regard tout autour de lui, à la foule bigarrée qui se pressait dans la rue, tout en tournant sa cigarette entre deux doigts. Apparemment, demander du feu était une pratique courante chez les Moldus, mais qui semblait suffisamment rebutante au sorcier pour qu'Isaac le perçoive immédiatement. Il railla gentiment le fumeur, mais accosta un jeune homme bizarre pour lui emprunter un briquet. James ne prêta guère attention à la transaction, et ne remarqua pas que les deux adolescents avaient échangé quelques mots ; le Mangemort s'était mis à observer un tout jeune homme qui exerçait visiblement l'honorable profession de pickpocket, et qui écumait la foule avec souplesse, faisant mine de se frayer un chemin avec le sourire, tandis que ses mains s'égaraient dans les poches et les sacs. Il était plutôt adroit, mais un regard exercé avait tôt fait de repérer les constantes de son comportement, des invariants auquel les passants ne prêtaient pas attention : le mouvement de hanches, la tape sur l'épaule pour s'excuser d'avoir bousculé...

James tourna vivement la tête : Isaac lui offrait du feu, un sourire narquois aux lèvres, et il lâcha une petite phrase équivoque – encore une. Et, pour souligner encore l'ambiguité de la formulation, il caressa un instant le bras de James, le bras gauche... D'un geste vif, comme s'il venait de se brûler, le Mangemort retira son bras, rompant brutalement le contact entre eux : pas question que ce garçon puisse, par inadvertance, appuyer sur la Marque des Ténèbres... La brusquerie du retrait ferait passer ce mouvement pour un simple réflexe de pudeur, le Serpentard se gausserait encore de la pruderie de son aîné, et voilà. James tira nerveusement une bouffée de tabac, blême à l'idée que le garçon ait pu alerter le Seigneur des Ténèbres... La balade à Soho se serait alors changée en mortelle randonnée, mais Isaac n'en avait pas la moindre idée. D'ailleurs, il ne semblait pas s'être formalisé du mouvement convulsif du jeune homme, et il venait de lui indiquer la localisation d'un bar proche. Docile- ou désemparé, mais cela revenait au même- James prit la direction indiquée, Isaac à ses côtés.

L'adolescent l'entraîna jusqu'à un bar qui ne payait pas de mine vu de l'extérieur – cela rassura grandement James qui avait craint de se retrouver en pleine cage aux folles – situé dans une rue adjacente. La façade n'annonçait rien d'incendiaire ; un petit bar un peu vieillissant, une enseigne relativement discrète, et un drapeau arc-en-ciel auquel James, faute d'en connaître la signification, n'accorda aucune attention. Rasséréné, le jeune homme suivit Isaac à l'intérieur, mais il sentit son coeur s'emballer immédiatement lorsque la main du gamin se referma sur la sienne.Le Mangemort essaya d'ôter sa main de celle du préfet, mais le garçon le tenait fermement, et il fut obligé de subir cette étreinte, en priant pour que personne de connu ne le croise dans cette fâcheuse posture. Encore que pour trouver un membre de la famille ou un autre Mangemort dans ce bar, il faudrait se trimballer une guigne hors catégorie...

Vu de dedans, le bar était beaucoup moins paisible et insignifiant qu'il n'en avait l'air. Des lumières crues éclairaient une population interlope, surtout des hommes, dont les regards jaugeaient sans retenue les deux nouveaux arrivants ; certains se pelotaient joyeusement, pas gênés pour deux mornilles, tandis que d'autres s'embrassaient comme s'ils n'avaient rien mangé depuis deux jours... Chacun vivait son vice tranquillement, sans complexe, et James sentit une bouffée de fureur monter en lui. Des bêtes, voilà tout... Le Seigneur des Ténèbres avait raison, et chacun d'eux aurait mérité une mort atroce en châtiment de cette débauche... Les doigts du Mangemort se crispèrent désespérément sur sa baguette, tandis que le long de sa gorge, le picotement de la brûlure lui rappelait le châtiment infligé par le Seigneur des Ténèbres.

Sans même s'en rendre compte, James s'était assis, les mâchoires serrées, et il avait pris une carte qu'il regardait sans la voir. La voix du garçon de Serpentard vint miraculeusement, par-dessus la musique exaspérante, le tirer de la névrose meurtrière où il s'enfonçait. Ce qu'il allait prendre ? James lui jeta un regard désorienté, avant de revenir à la réalité. Bar. Carte. Boisson. Commander. Un regard fébrile sur la carte plus tard, le sorcier répondit d'un ton monocorde :


-Bloody brain...

Il ignorait de quoi se composait ce mélange, mais le nom l'avait attiré, comme un écho à ses pulsions violentes. Il jeta la carte sur la table, ressortit ses cigarettes et, confiant dans l'indifférence de la clientèle (les seuls qui auraient pu le voir étaient trop occupés à se manger le museau), alluma une clope d'un mouvement de baguette. Le tabac l'aida à se calmer, et, plus avenant, il demanda à Isaac :

-Et toi, Isaac, que prends-tu ? Le serveur arrive, tu as choisi ?

Un dandy décoloré s'avançait d'une démarche dansante vers eux, un carnet à la main, un cendrier dans l'autre. Il plaisantait au passage avec la plupart des clients, et James remarqua à haute voix :

-Il n'y a que des habitués ici. Tu viens souvent ?
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MessageSujet: Re: [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]   [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini] EmptySam 22 Aoû - 14:29:00

Des hommes s’embrassaient dans un bar, n’était-ce pas incroyable ? Une vague de satisfaction emportait le jeune garçon. Il avait quitté la rue, abandonné la masse des curieux et pénétrait les arcanes de la vie homosexuelle. Les clients vivaient cette folie tous les jours. Ils avaient l’air heureux, comblés. Les rires fusaient, les ragots s’échangeaient. Savez-vous la dernière ? Mais oui, dans les toilettes de son patron ! On ouvrait de grands yeux, on s’étonnait, scandalisait un peu puis les plaisanteries écartaient les critiques. Plus loin, un groupe d’étudiants parlait des signes qui ne trompaient pas. La bague au majeur était-elle une valeur sûre ? Un mythe urbain voulait que l’index fût une meilleure garantie. Les conversations étaient irréelles, très différentes de celles qu’il surprenait dans les cafés ordinaires. Le ton léger ne s’inquiétait pas de choquer. Les hommes parlaient de sexe en toute liberté et évitaient les raccourcis grossiers. Ils étaient agréablement déplacés, filaient un humour particulier, propre au milieu. D’autres, à peine plus sérieux, se livraient à des débats qui dépassaient le sens commun. Des références tombaient de temps à autre, pour appuyer un trait d’esprit ou une comparaison sarcastique. L’effet sur l’auditoire était immédiat et Isaac regrettait de ne pas saisir le grand comique d’un « le gars il se croyait encore au Stonewall ! ». Il avait encore beaucoup à apprendre. L’oreille aux aguets, la main serrée sur celle de James, il saisissait tout, évaluait chaque visage. La plupart des garçons gardait un style assez sobre, mais certains arboraient une allure franchement ridicule. Les montures épaisses et branchées n’allaient pas à tous les visages. Elles n’avaient jamais rendues plus classe quelqu’un qui ne l’était pas de base. Une espèce d’artiste intello, fier de son t-shirt Blondie customisé façon pop-art, aurait mieux fait de s’en rappeler avant de brancher un blond fasciné par le contenu de son demi.

Malgré la présence de James, Isaac avait du mal à retrouver ses esprits. Il ne voulait rien manquer des scènes qui se passaient sous ses yeux, suivait toutes les conversations à la fois en maudissant les entraves sonores de la musique. Les questions posées à son compagnon se faisaient plus distraites. Il ne songeait pas à reprendre leur conversation avortée à propos des technologies moldues ou de la vie à Poudlard. Son esprit et son corps s’imprégnaient tout entiers de l’atmosphère d’un lieu qu’il avait fantasmé depuis le début de l’année, surtout lorsque, dans ses mauvais jours, la conscience de sa solitude le frappait. Chez lui, ce n’était pas beaucoup mieux. Il détestait la vie de ses parents, leurs inhibitions morales et leurs soirées entre collègues. Mr et Mrs Deniel ne savaient pas s’amuser. Tout ce qui dépassait les standards les choquait. Ils vénéraient les existences droites, ne sortaient presque jamais de leur travail et croyaient encore leur fils lorsqu’il prétendait rendre visite à des amis qu’il avait perdu de vue depuis deux ans afin d’explorer Londres sans leur permission.

L’enthousiasme des premiers instants retomba. Le fil de ses pensées ne lui plaisait plus. Et les propos de James, glissés au milieu, lui arrachèrent un regard perplexe. Un cerveau sanglant ? La musique lui était-elle à ce point insupportable ? Il haussa un sourcil, puis la lumière se fit. Bloody brain, bien sûr ! C’était le nom d’un cocktail ! Mais il teintait d’une étrange façon. Les titres éloquents des boissons servaient parfois à transmettre des messages au moment de la commande. Qu’y avait-il de plus séducteur qu’un Sex on the beach dont les syllabes détachées s’appuyaient d’un regard aguicheur ? Le Serpentard n’avait pas très envie de se prêter à ce petit jeu. Il ne s’offrait pas au jeune homme et celui ne semblait pas vraiment disposé à goûter ce genre de cliché. James était assez étrange. Il n’était pas facile à cerner. La réaction brutale qu’il avait eue lorsque sa main s’était posée sur son bras dans la rue, avait mis Isaac dans le doute. Pourtant, l’étudiant réticent l’avait suivi, sans un commentaire. Pourquoi ne disait-il rien ? Où cette rencontre devait-elle les mener ? Il fallait le découvrir. Cette fois, Isaac n’éprouvait pas le besoin de connaître l’inconnu. Il n’espérait pas soulever des pans entiers de sa vie. L’exception s’était produite avec Grim, et elle ne reviendrait pas de si tôt. Non. Il voulait le tester, évaluer ses réactions, mesurer ses troubles, les provoquer, sans s’attarder sur son histoire.


- Une tequila sunrise…


Surtout, rien qui pût contenir de la vodka. C’était un peu stupide, et il ne comprenait pas lui-même sa réserve, mais les circonstances de cette rencontre ressemblaient beaucoup trop à celle qui l’avait liée à Grim en janvier. Le russe l’avait marqué ce jour là en descendant la moitié d’une bouteille de vodka. Et s’il prenait à son tour le même alcool ce serait comme si… Comme si quoi ? Il l’ignorait. Mais l’idée abstraite qui s’en dégageait le gênait.
Son regard suivait les pantomimes du serveur déluré qui s’approchait. Il prenait tout son temps, s’immisçait dans les discussions, lançait quelques piques de connivence, envoyait clins d’œil à ses petits favoris. Tous semblaient le connaître. Cependant, les apparences n’étaient pas toujours vraies. Il était facile de feindre la grande amitié avec une personne à peine rencontrée, surtout lorsque les rapports étaient professionnels. Maître d’une sociabilité de surface, Isaac établissait vite un excellent contact avec les vendeurs et les serveurs. Il aimait être reconnu lorsqu’il entrait quelque part.


- Oh oui, je viens très souvent depuis le début de l’été…
, murmura-t-il dans un sourire. On fait plein de rencontres ici, surtout en bas, du côté des toilettes… Ils sont toujours tous après moi. Au début je trouvais ça super. Tu imagines ? Il suffit d’y rester pour profiter de tous les hommes qui passent… Mais à force, tout cela perd de sa saveur. J’en avais marre de me faire brancher par des vieux de quarante ans et plus. Et je réalise que c’est mieux de venir ici accompagné, ça change de ne pas se faire regarder comme un garçon juste baisable…

Un soupir las lui échappa, et il adressa à James un sourire innocent, déroutant. Que racontait-il ? Un véritable tissu de mensonges. Il s’inventait une vie de débauche, celle qu’il brûlait de découvrir. C’était plutôt drôle. Le jeune homme ne savait rien de lui. Il pouvait lui faire croire absolument n’importe quoi, et amener de cette façon les réactions qu’il espérait. Ses yeux d’obsidienne plongèrent dans les siens, plus insistants. Une musique électronique plus énergique venait commencer. Une mesure frénétique frappait les murs métalliques. L’atmosphère indicible du morceau arrivait à vous glacer l’esprit tout en donnant envie de s’élever, de chercher la chaleur d’un corps et de danser.* Ses doigts pianotèrent en rythme sur la table abîmée. Et il ajouta incidemment :


- Mais peut-être qu’au fond, tu es comme eux…


Le ton ressemblait presque à une invitation inavouée. Cependant, l’intérêt insouciant qu’il porta aussitôt au serveur ne laissait rien deviner.


- Alors mes chéris, qu’est ce que je vous sers ?
demanda-t-il en s’asseyant sur la table d’où côté, comme s’il se préparait à engager une conversation plus longue.
- Donc nous disions une téquila surnise pour moi et un bloody brain pour ce charmant garçon, déclara Isaac sur le même ton.
- Ça marche !

- La semaine se passe bien ?

- Oh, ça va ça vient… Ces coquines me délaissent un peu pendant les vacances, mais elles reviendront bientôt. Ils s’ennuient les pauvres. Et puis, l’été de nouvelles têtes se pointent… Des jeunes hommes aux accents affolants…
- Forcément, ce n’est pas tout le monde qui peut se payer des vacances à Mykonos !
Il ricana doucement et le serveur, après un sourire, prit des airs offensés largement exagérés :
- Allons ! Leurs soirées ne valent certainement pas les nôtres ! Ces grecs se croient tout permis…

- Il faut leur pardonner, ils sont restés bloqués à l’antiquité… Et ce n’est pas un tas de pierre qui va fidéliser le public…

L’homme éclata de rire et retourna vers le bar en trottinant à moitié. Etablir un bon contact n’était vraiment pas compliqué. Isaac avait essayé de le vérifier. Mykonos était la destination gay par excellence. La référence obligeait la complicité. Ainsi, l’illusion était gardée. Le serveur venait de l’adopter, et un regard extérieur le prendrait pour un habitué. On ne s’étonnait de rien ici. Le caractère communautaire impliquait une familiarité directe avec qui le voulait.


- J’aime bien la musique…
, dit-il soudain.

Les notes se succédaient à un rythme endiablé. Il se retourna vers James. Le numéro avec le serveur était terminé. Il n’y avait plus lieu de s’en soucier. Sa proie avait bien plus d’apprêts.


- Quand je l’entends, je me dis qu’il manque une place pour danser, poursuivit-il d’une voix tranquille. Dommage… Tu as déjà fait des soirées ? A Poudlard, on dit que les Serdaigle ne savent pas s’amuser… Mais vous n’êtes pas toujours si sérieux n’est ce pas ? Tu n’étais jamais allé dans ce genre de bar toi ?


Tandis qu’il méditait sa prochaine approche, Isaac revenait sur un sujet plus classique. Il estimait en avoir assez fait pour le moment, et, tout en préparant le terrain, évitait d’aller trop loin. Une candeur tranquille glissait sur ses mots. Il parlait, loin de l’agitation ambiante, un sourire engageant au bord des lèvres. L’attention rivée sur James, il donnait l’impression d’un garçon que rien ne pouvait distraire.



*[ici pour la musique et en plus le titre c'est Grim x) (la coïncidence m'amusait u_u)
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  • James Kirkby
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MessageSujet: Re: [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]   [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini] EmptyDim 23 Aoû - 15:13:16

L'étrange musique, amplifiée par des appareils disposés aux quatre coins du bar, résonnait jusque dans le corps même de James, dans son estomac, dans ses pieds, dans sa poitrine. Il avait l'impression que c'était son propre organisme qui vibrait, en même temps que le sol métallique et les murs balayés par une lumière crue projetée à toute allure. Sensation inconnue du jeune homme, qui, dans un premier temps, était incapable de dire si cette drôle de trépidation était agréable ou pas ; elle était tellement inédite qu'il s'abandonnait d'abord à ce qu'il éprouvait, un peu gêné par le volume sonore des espèces de volutes musicales (il ne savait comment les appeler autrement) ; devant lui, sur la table, ses mains posées à plat lui renvoyaient chaque oscillation de la musique, et son corps tout entier investi par ces sonorités si insolites lui semblait allégé, comme s'il s'était mis à léviter à quelques centimètres au-dessus du sol. Isaac semblait nettement moins dépaysé que lui ; de ses doigts, il marquait le rythme du morceau sur la table, tout en promenant un regard attentif sur la salle.

Le jeune Mangemort, quant à lui, préférait éviter de trop regarder les hommes présents dans le bar ; leur seule vue suffisait à le mettre en rage, une rage d'autant plus insupportable qu'elle faisait écho, douloureusement, à ses propres contradictions. Voir ces types assumer aussi joyeusement leur bestialité était intolérable, mais une pointe d'envie rongeait également le jeune sorcier lorsqu'il voyait les mains se lier, les sourires s'échanger, sans crainte aucune. Lui n'avait pas le droit à cette liberté ; sa famille, son sang, les convenances et, surtout, Lord Voldemort la lui interdisaient ; un homme dans les bras d'un homme, un homme pris comme une femme, un homme s'offrant aux caprices d'un amant dominateur, c'était impensable, dégradant, contre-nature. Le jeune homme cherchait à s'en persuader, pour mieux réprouver sa propre attitude ; ces gens étaient des erreurs de la nature, lui compris - sa gorge se serrait lorsqu'il en venait à cette conclusion. Il n'y avait pas à y revenir ; ceux qui oubliaient suffisamment qui ils étaient pour se comporter en femelles méritaient un châtiment exemplaire, aussi humiliant que douloureux, comme un avertissement à leurs semblables... James avait entendu parler, parfois, de représailles menées contre le fils Untel, qui souillait son sang en se livrant à la bestialité ; en général, ces garçons mouraient, pour le plus grand soulagement de leurs familles, assassinés par les vrais mâles du lignage soucieux de préserver l'honneur du clan. On se racontait leur fin à mi-voix, entre hommes, en insistant plaisamment sur les raffinements inventés pour faire expier à « la pédale » son vice et son comportement ; la torture infligée par les frères, les cousins, les oncles surpassait en cruauté tout ce que l'on pouvait imaginer : il fallait de la sauvagerie pour laver l'offense, pour couper clairement tout lien entre le réprouvé et le reste du clan. C'était par crainte de finir comme ces garçons que James avait commencé à apprendre l'occlumancie ; car si sa famille venait à découvrir ses penchants homosexuels, et même si Grim lui avait promis sa protection, il risquait fort de passer un très sale quart d'heure.

Isaac, quant à lui, ne connaissait probablement pas ce genre de scrupules. Du haut de ses seize ans, il était nettement plus à l'aise que le jeune adulte, et il se fondait à la perfection dans ce milieu sophistiqué. Il se mit à raconter un paquet d'horreurs au sujet des rencontres qu'il faisait dans les toilettes du bar... Les yeux arrondis par la surprise, James mit quelques instants avant de comprendre ce que signifiait le « peut-être qu'au fond tu es comme eux ». Horrifié, il secoua négativement la tête, en assurant
:

-Mais non... mais non... pas du tout...

Pour qui le prenait-on ? Un pervers en manque de chair fraîche, obligé de faire la sortie des écoles pour jouer au docteur avec des garçons sans méfiance ? Mais il n'avait guère le loisir d'être en manque, avec Grim... et de toute façon, il n'était pas du genre à draguer les adolescents dans les toilettes des bars. Ça devait se voir, non ? Et puis... James rougit en se l'avouant : en matières d'hommes, il n'était guère entreprenant. Lorsqu'il lui arrivait, en compagnie de Grim, de prendre une initiative, la certitude de ne pas être à sa place l'empêchait de se sentir à l'aise, de sorte qu'il ne quittait que rarement le rôle passif qui lui convenait mieux. Peut-être n'était-ce dû qu'au caractère de Grim et à l'alchimie particulière qui s'était nouée entre eux ; toujours est-il que James, plutôt hardi avec les femmes, ne s'imaginait avec d'autres hommes que soumis – et même draguer un gamin l'effarait. Même si, à tout prendre, il ne devait pas être désagréable, bien au contraire, de posséder un corps aussi jeune et aussi attirant, de se comporter en souverain absolu, de soumettre l'adolescent à chacun de ses caprices... Stupéfait par l'audace de ses propres pensées, James se redressa légèrement, en souriant, et écouta sans y participer la conversation entre Isaac et le serveur. Leurs plaisanteries demeuraient obscures pour lui, et la fin de la discussion le laissa un peu sur sa faim, comme un étranger ou plutôt, comme un non initié que les private jokes laissent de marbre. Près de lui, Isaac parlait soudain de danser, mais ce fut, fort heureusement, pour regretter l'absence d'une piste de danse ; James ne se voyait pas danser avec lui, pas plus d'ailleurs qu'avec n'importe qui d'autre présent entre ces murs – et en plus, il n'imaginait pas comment on pouvait danser sur une musique de ce genre. Rougissant légèrement – mais la lumière rendait cette rougeur imperceptible – le jeune homme répondit, en évitant délibérément de parler de danse :

-Non, je n'étais jamais allé dans un bar comme... comme ici. Mais tu sais, je viens d'une famille assez traditionnelle, alors... euh...

Pas de pédés chez moi, qu'on se le dise. Moi, à seize ans, je ne me faisais pas prendre à la chaîne par tous les passants dans les toilettes d'un bar. Sans développer cet aspect de sa pensée, James poursuivit en souriant :

-Mais ça n'a rien à voir avec le fait d'être à Serdaigle ou pas... Tiens, moi, à mon époque, on disait que les Serpentard étaient de grands réactionnaires, c'est pour ça que j'ai eu l'air surpris quand tu m'as dit que tu étais préfet de Serpentard. D'ailleurs, les préfets en général étaient des gens pas spécialement drôles, quand j'étais à l'école. On n'en aurait jamais trouvé aucun ici, et...

Et dans cette tenue, avait-il eu envie d'ajouter. Il s'était retenu, mais son regard sur les ongles et le sac à main du garçon voulait tout dire.
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  • Isaac Deniel
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MessageSujet: Re: [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]   [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini] EmptyLun 24 Aoû - 21:25:44

Cette vie était possible, songeait-il en composant son mensonge. En bas, des hommes attendaient le sacrifice de sa jeunesse. Tous n’étaient pas très regardants sur l’âge. Il pouvait enflammer les désirs, se glisser entre les bras d’un inconnu, et offrir à son corps ce qu’il réclamait de plus en plus ardemment. Son affabulation choquante n’était pas le fruit d’un caprice soudain. Il imaginait la scène souvent depuis le début de l’été. A Poudlard, le contexte scolaire, bridait une inclination naturelle à la débauche. Ses camarades n’osaient pas franchir le pas et, de toute façon, ils n’arrivaient pas à éveiller son intérêt. Isaac aimait les hommes. Les garçons de quinze ans ne dégageaient rien de très excitants pour son esprit adolescent. Les fantasmes portaient l’innocence. Il voyait des rêves, des torses solides, des épaules larges, des joues rugueuses. Il façonnait son idéal, et se gaussait avec ses amies des belles gueules qui se la jouaient starlettes de l’école. Les filles s’extasiaient devant des visages insipides. Il approuvait tout au plus le fanatisme qui aiguisait les cris autour d’Arsène Vawdrey. Le personnage n’avait pas le charisme de Grim, mais au moins, il ressemblait à un mâle. Son histoire avec Alix n’était qu’un accident. Leurs âmes s’étaient retrouvées un soir de faiblesse. Beaucoup de relations se construisaient de cette façon. Les couples s’associaient mal et duraient. Ils survivaient, chaque partie s’accrochait et renonçait à ce qu’il avait toujours désiré. Un jour, il fallait revenir à la réalité, et s’adapter. Apprendre à apprécier ce que le hasard vous donnait. Avec son petit ami d’une saison, Isaac avait cautionné ce raisonnement idiot. Ils avaient essayé, sans succès. Leur liaison ne devait pas dépasser la fin de l’année. Le souvenir de cette aventure ne le rendait même pas nostalgique. Il s’en fichait et éprouvait au contraire un grand soulagement à l’idée d’être débarrassé de cet efféminé mal dans sa peau. Cette première expérience avec un garçon, le premier venu, disons le tout de suite, n’était cependant pas à jeter. Elle lui avait permis d’évoluer, de vivre son homosexualité, et de comprendre où étaient ses besoins. Poudlard ne serait jamais qu’une école peuplée de gamins pré-pubères. Son corps et ses pensées changeaient. Même à côté d’Alix, c’était une évidence et les choses auraient pu déraper si le garçon n’avait pas été si frigide. Après tout, recherchait-on désespérément un compagnon à son âge pour connaître l’amour ? C’était un mythe monté de toutes pièces par les esprits bien pensants. Il n’avait pas besoin de s’encombrer d’un copain collant et énervant pour découvrir ce qu’il cherchait. Une soirée à Soho pourrait l’initier aux mystères les plus séduisants du monde « adulte ». Alors qu’attendait-il ? La logique était sans failles, et il hésitait encore. Ses propos exprimaient un présent possible, contré par une sensiblerie ridicule. Au lieu de se choquer, James aurait pu la déceler à travers l’expression « garçon juste baisable ». L’inconscient frappait. Il ne voulait pas d’une première fois avec un inconnu qu’il n’aurait même pas choisi, contre les murs sales d’une backroom sordide. Quel plaisir, quelle gloire en tirer ? Avait, il voulait jouer. Dominer d’abord pour s’abandonner ensuite, avec la certitude d’être violemment désiré. Peu importait les sentiments, peu importait la suite.

Etait-ce ce qu’il faisait avec James ? Oh, ses intentions ne le menaient pas si loin. Tant que son interlocuteur réagirait à ses provocations, il ne le lâcherait pas. Le jeune homme goba toute son histoire, alors qu’il lui avait précisé avant de le faire entrer dans le bar qu’il ne connaissait pas l’endroit. Le malheureux s’égarait. Il écoutait, effaré, l’étalage de ses turpitudes imaginaires. Incarner un démon de vices ne déplaisait pas au garçon. Sa vertu était, somme toute, très relative. Il ne comptait plus la garder très longtemps et ne se voyait vraiment pas en enfant de cœur. En fait, alors que son compagnon perdait pied, il gagnait en assurance, affirmait son rôle. James s’empressa de démentir ses insinuations, troublé, comme s’il venait de lui arracher ou de lui insuffler des pensées particulièrement honteuses. Cela ne revenait-il pas au même ? Un sourire amusé frôla les lèvres du Serpentard. Il ne s’inquiétait pas de savoir si l’étudiant pouvait le désirer. Il était attirant, et il le savait. Sous un déguisement de fille, il était même capable de mettre les hétéros à ses pieds. On ne réagissait pas de cette façon face à un laideron dont la sensualité passait sous le degré zéro. Les hommes étaient tous les mêmes. Mais James était mignon, plein de pudeur et d’inhibitions semblait-il. Deux choses qu’il adorait mettre à mal. Les gens n’étaient pas assez sincères avec eux même, alors il s’appliquait à renverser tous les mensonges de façade, puis suivait l’évolution des sentiments révélés. Cette fois cependant, il reporta ses malices à plus tard. Le serveur avait ouvert une parenthèse plus détendue à laquelle le jeune homme ne se mêla pas. La référence lui échappait probablement puisqu’il ne partagea pas leur hilarité. Les gays sorciers allaient-ils aussi à Mykonos ? Possible. Isaac avait remarqué que leurs lieux de rencontre avaient tendance à communiquer avec ceux des moldus. C’était logique. S’il fallait se contenter des gays du monde magique, certains collectionneurs finiraient vite frustrés. Ils n’étaient pas assez nombreux et, niveau tolérance, la société sorcière avait pris du retard, comme pour à peu près tout d’ailleurs.

James rejoignit sa pensée en précisant la fermeture de son milieu. Qu’il fût élevé dans une famille très Sang pur, fière de ses vingt siècles de retard et de ses préceptes éculés ne l’étonnait pas. Il parlait à demi-mots, n’osait rien, se laissait entraîner puis rougissait, gêné, comme un gamin pris en faute. Isaac lui renvoya un sourire plus doux, à la fois encourageant et désolé. Comment pouvait-on cloisonner l’opinion de son enfant ? Le brider au point d’étouffer sa personnalité ? Malgré sa réserve, James s’en sortait assez bien. Il évitait les deux extrêmes critiques de cette forme d’éducation, qui donnait des caractères violents, unilatéraux, qui suivaient sans les comprendre le raisonnement de leurs parents, et les faibles, condamnés à ramper, et à étreindre chaque jour les barreaux de leur prison morale. Où était-il ? En équilibre, prêt à sombrer, ou à se redresser. S’il le suivait dans le quartier gay, au milieu des moldus, il hésitait encore. Son homosexualité aidait. Puisqu’elle n’était pas vraiment refoulée, elle apportait une dimension nouvelle au carcan traditionnel. La nature balayait les certitudes imposées à l’enfance. Ceux qui l’écoutaient apprenaient à vivre par eux-mêmes, ils fuyaient, reniaient père, mère et ne revenaient jamais. Isaac avait été le témoin de ce genre de phénomène. Les crétins coincés au début du siècle, abêtis par la religion faisaient légion dans son entourage. Et lorsque les enfants, se dressaient contre leurs parents, des années de privation se retournaient contre les foyers. Un monde parfait se déchirait. Et, derrière le standard de la famille parfaite, la colère éclatait, comme si l’ordre devait forcer l’amour. Sans, ils se haïssaient, parce qu’ils n’avaient jamais appris à s’accepter tels qu’ils étaient. Chez les sorciers, ces réactions étaient dramatiques. La magie favorisait les empires tyranniques. Isaac se réjouissait d’échapper à ces ambiances sordides. Bien sûr, ses parents vénéraient les mœurs très propres. Mais ils ne tenaient pas de discours violents, et méprisaient à distance. Ils lui laissaient le choix, le cadrait lorsqu’il déviait trop sévèrement, mais ne le contraignaient à rien. Qu’aurait-il fait dans un univers plus strict ? Un carnage sans doute. Il ne se voyait pas un instant à la place du manipulé. Ces histoires de passé qui expliquait vos réactions présentes étaient le fantasme des esprits faibles. Il n’y croyait pas.

Un sourire de contentement éclaira son visage lorsque James lui avoua que son titre de préfet le surprenait. Un sang de bourbe, homo, à la tête de Serpentard, qui l’eût cru ? A l’époque, ses penchants n’étaient qu’une rumeur. Il avait à peine treize ans, et aucune expérience connue. C’était jeune pour coller une étiquette sexuelle à un garçon. Mais beaucoup de verts et argents avaient essayé de contester sa position. Les premières semaines avaient été assez pénibles. Ses aînés ignoraient son pouvoir, et n’hésitaient pas à le traiter d’usurpateur notoire. Sans le soutient de ses amis, et de sa petite copine du moment, qui avait accepté l’idée d’un couple stratégique, il aurait probablement perdu sa place avant juin. En outre, ses excentricités, toujours plus marquées, n’étaient pas toujours très bien vues. Si les Serpentard plus jeunes s’amusaient de ses provocations éhontées, un groupe plus âgé et conservateur rêvait de le faire tomber. La maison vivait un choc de générations. Isaac espérait, tout idéaliste qu’il était, faire évoluer les mentalités et abattre les clichés liés à son blason. Malheureusement, la mort de Dumbledore mettait à mal ses petites restructurations. Les protestations des consanguins s’élevaient à nouveau, plus virulentes que jamais, et les plus jeunes se laisseraient emporter… Il releva un regard plus droit en relevant une nouvelle hésitation de la part de James. Les yeux de son compagnon contemplaient ses ongles vernis, grande zone de trouble et d’incompréhension pour lui semblait-il. Sa réaction ne se fit pas attendre. Il compléta, d’une voix franche et crue, comme il le faisait si bien avec Alix.


- Et quoi ? Tu me trouves trop pédé pour gouverner c’est ça ?
– Une lueur de défi s’anima dans ses prunelles sombres. – A t’entendre, on dirait que tu n’as pas mis les pieds à Poudlard depuis deux générations. Ou alors, les choses ont bien changées en quelques années… C’est peut-être ma faute qui sait… Parce que, en fait, les Serpentard sont assez égales à eux-mêmes. Trop de familles puissantes ont leurs enfants dans cette maison. Et chez les sorciers, quand on parle des parents fortunés d’un Serpentard, l’idée d’un esprit ouvert n’est pas celle qui s’impose la première. Chez les moldus, ce serait le genre de famille à payer des écoles privées et bien catho. Mais passons, je suppose que l’exemple ne te parle pas.

Il se tut un instant pour accueillir le serveur et prendre son verre orangé tapissé de pourpre. Un remueur fluorescent perçait la surface dorée de son verre et il le tourna distraitement en poursuivant :


- Ne crois pas que je suis aimé de tous. La plupart de mes aînés m'ont toléré parce qu’ils n’avaient pas le choix, et parce que certains de mes amis n’ont rien à envier à leurs familles. Dawster ou McLane par exemple. Et à vrai dire, je n’étais pas ouvertement gay quand je suis devenu préfet. J’étais…


Cette fois, c’était à son tour d’hésiter. Il n’avait pas l’habitude de parler de lui, de montrer qu’il lui arrivait de douter, comme tout le monde, de passer par des périodes incertaines et douloureuses. Ses conclusions semblaient faciles et arrêtées. Alix lui reprochait souvent cette tendance à faire croire que tout était simple. Mais c’était sa façon à lui de dissimuler ses faiblesses et ses souffrances personnelles.


- J’étais avec la fille aînée des McLane
, acheva-t-il, un peu honteux de revenir sur cette épisode. On a été nommés préfets en même temps. Quand j’ai appris la nouvelle j’étais très surpris, mais au final, le fait que je m’entende bien avec Précieuse a dû aider. Et ensuite, nous mettre ensemble était la meilleure façon d’être respecté par les pires conservateurs de la maison. On ne peut pas dire que ça ait marché entre nous, - En effet, ils s’étaient à peine touchés. Un petit rire ironique lui échappa. – mais c’était une alliance purement stratégique. On a décidé d’arrêter tout ce cinéma quand j’ai dansé avec un garçon au bal de Noël…

Et voilà, l’honneur était sauf ! Pourtant, la gravité pesait sur son front. Il lâcha le bout de plastique lumineux et fixa d’un œil vague les remous de son cocktail. Les glaçons s’entrechoquaient doucement. Ne fuyait-il pas lui aussi ? Il occultait toute une partie de ses réflexions passées. Ses doutes lui semblaient absurdes aujourd’hui. Comment avait-il pu croire un seul instant qu’il arriverait à s’habituer aux filles ? Tout lui criait le contraire, et il avait souffert inutilement plusieurs mois, parce que la société voulait qu’il en fût autrement. Mais ces mois n’étaient rien à côté des années d’enfer que pouvait vivre d’autres et que vivait peut être James. Il devait parler. La poitrine plus serrée, il reprit, d’une vois lente :


- En fait… je mens un peu quand je dis que c’était purement stratégique. C’est vrai que je n’aimais pas cette fille… C’était une amie, mais elle ne m’attirait pas. Tu vois, je me rends compte que je mens comme je me suis menti à l’époque. Parce que je savais déjà… Mais j’essayais de me prouver je ne sais pas trop quoi… Que je pouvais faire comme les autres peut-être. A treize ans, on a pas envie de se sentir différent. C’est effrayant, de réaliser soudain qu’on ne peut plus s’identifier aux autres. Que les filles qui commencent à intéresser tes copains ne te font rien, alors que la présence de ton meilleur ami est… Enfin… Désolé je ne sais pas ce qui me prend de te dire tout ça. Et je n’ai même pas encore bu, c’est dire !


Il agita sa main, comme pour écarter les mots de trop, et rit légèrement pour dissimuler l’importance de ses révélations. Voilà pourquoi il ne parlait jamais. Lorsqu’on commençait à se livrer, on finissait toujours par trop parler. Evidemment, face à un inconnu, couvert par une musique entêtante, et répétitive, oublier sa réserve était plus facile. Il devait faire attention.


- Santé donc !


Il leva son verre et le fit tinter contre celui de James, un sourire à nouveau insondable fiché sur les lèvres. Puis il but une longue gorgée sucrée, délicieusement relevée par l’alcool. La chaleur de l’été et son embarras ne l’incitait pas à la mesure.
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MessageSujet: Re: [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]   [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini] EmptyJeu 27 Aoû - 21:45:12

La musique répétitive, toujours crachée à fond par des hauts-parleurs puissants, commençait à produire un effet négatif chez James : un léger mal de tête le gagnait, accentué par les efforts qu'il devait faire, dans ce boucan, pour comprendre les paroles de l'adolescent pourtant proche. Les vibrations des basses dans son corps étaient assez agréables, mais depuis quelques instants, le jeune homme sentait naître une lourdeur au-dessus de ses yeux. Il n'écoutait guère de musique, et était plus habitué au silence qu'à autre chose ; la faute, encore une fois, à une famille totalement soumise aux exigences du patriarche. Aucun récepteur de radio magique n'avait jamais franchi les portes de Wolf's Den : Lord Kirkby avait toujours refusé que ces "machines à bruit" puissent pénétrer chez lui. Pour les informations, les journaux existaient, et pour la musique... ça ne servait à rien. Les trois enfants avaient bien appris quelques comptines dans leurs jeunes années, mais c'étaient à peu près les seules chansons à avoir résonné entre les murs sombres de la demeure. Quelques berceuses, quelques petites chansonnettes pour enfants jusqu'à trois ou quatre ans, puis rien. Le silence, le sacro-saint silence que le chef de famille exigeait. Il avait enduré de mauvaise grâce les jeux de ses trois petits-fils, tout en les incitant constamment à des activités moins bruyantes ; de sorte que les enfants étaient devenus des adolescents studieux, solitaires, repliés sur eux-mêmes, et pas mélomanes pour deux sous. Sur ce point comme sur quelques autres, le benjamin était le moins marqué par l'influence familiale, et il lui arrivait parfois d'écouter de la musique ; mais jamais de ce genre, jamais si fort, et jamais en continu, de sorte qu'il commençait à se sentir mal à l'aise dans ce bar. La lumière violente n'aidait pas, et la conversation d'Isaac elle-même n'était pas de nature à soulager le mal de tête naissant de James.

Trop pédé pour gouverner, qu'est-ce que ça voulait dire ? Il n'avait pas parlé de ça... Il avait simplement dit que les préfets, de son temps, ne fréquentaient pas les bars, et ne se signalaient pas par leur originalité. Sans songer un seul instant que cette réplique de l'adolescent pouvait n'être qu'une provocation, l'étudiant se lança aussitôt dans une explication bégayante :


-Non... Je ne disais pas...

Il n'eut pas le temps d'argumenter ; la mine soudain grave, Isaac reprenait la parole, expliquant un peu son parcours. En l'ententant, James eut la certitude qu'il n'en avait encore jamais parlé à personne ; le fait qu'il soit un parfait inconnu devait aider aux confidences, et il écouta attentivement, sans interrompre le Serpentard, mis à part pour murmurer un vague merci au serveur. Isaac était soudain devenu sérieux, d'un sérieux un peu déconcertant, qui cadrait peu avec son comportement antérieur. Il se lança dans une explication assez détaillée, qui gêna un peu James : jamais encore personne ne lui avait tenu ce genre de discours, personne n'avait ainsi formulé ce que lui-même, confusément, ressentait. Encore que pour James, les choses étaient difféntes ; il ne pouvait pas dire que les femmes le laissaient indifférent, mais il connaissait l'attirance pour les hommes. Pas pour tous, bien sûr ; pour Grim, en premier lieu, et pour (même s'il s'en défendait) pour les hommes virils qui lui rappelaient son amant. L'âge ajoutait à la différence de situation ; à l'âge d'Isaac, il n'avait aucune attirance pour les hommes ; il ne l'avait pas encore découverte, même si certains de ses propres regards vers ses camarades le gênaient parfois.

Un bref silence suivit les paroles d'Isaac ; James adressa un sourire au jeune garçon, trempa ses lèvres dans son verre, et, après un temps d'hésitation, répondit :


-Tu dois me trouver idiot, complètement à côté du problème... Mais je n'ai pas connu le même Poudlard que toi. Ce n'est pas tellement l'école qui a changé que nos points de vue qui sont différents. Je viens d'une de ces familles anciennes que tu ne sembles pas apprécier. L'un de mes frères était à Serpentard, et tout ce que j'ai connu de cette maison, c'est ce que lui m'en a raconté, lui et ses amis, des gens des mêmes familles... Et dans ces familles, il n'y a pas de place pour les... euh... pour l'homosexualité. C'est le déshonneur que d'avoir un homosexuel dans sa famille, et en général, ça se termine... très mal.

Très mal à l'aise, il but une gorgée de son cocktail, alluma une cigarette dont il tira une longue bouffée, et reprit d'une voix sourde :

-À ton âge, je ne... enfin... je n'avais jamais été avec un homme. Mes deux frères aînés étaient à Poudlard, ils m'auraient tué... Et puis il y a un an, j'ai rencontré un mec, ça s'est fait tout naturellement... Mais si ma famille l'apprend, je suis mort.

Il leva un regard désolé vers Isaac et conclut :

-C'est pour ça que je dois te sembler bizarre, ou ignare, ou je ne sais quoi... Mon mec me dit la même chose.

Un sourire passa sur son visage. C'était la première fois qu'il parlait de Grim, la première fois qu'il l'évoquait non comme un incident de parcours mais comme l'homme avec qui il vivait, et cela faisait du bien. Ce faisant, il s'affirmait comme le le compagnon officiel de Grim, comme son amant, comme sa propriété, et une fierté légitime l'envahissait. Il regarda Isaac un instant, souriant toujours à la pensée du Russe, et murmura :

-Moi aussi je me laisse aller aux confidences... C'est mauvais signe. Il faut vraiment que je me mette à boire, je suis beaucoup trop sérieux. Quand je serai saoul, j'aurai des choses beaucoup plus... euh... pittoresques à te raconter...

Il cligna de l'oeil, l'air entendu, sans se douter que le si débauché adolescent était en fait aussi vierge qu'au jour de sa naissance, avant de sécher son verre en trois gorgées.
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  • Isaac Deniel
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MessageSujet: Re: [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]   [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini] EmptyJeu 3 Sep - 22:08:49

Ses mains se resserrèrent autour vu verre. Il s’y accrochait, troublé, dépassé par ses mots, tant il s’était habitué au silence de ses pensées. Ses réflexions lui appartenaient. Il tenait les réponses. Avait-il besoin de parler ? Les gens n’avaient rien à lui apprendre. Ils se trompaient ou trouvaient, au mieux, ce qu’il savait déjà. Isaac était persuadé qu’il n’avait pas besoin de parler. Il se débrouillait seul. Les autres ne pouvaient pas comprendre. Ils ne vivaient pas la même chose que lui, ne s’intéressaient qu’à leurs petites histoires sans intérêt. S’ils écoutaient, ils prenaient un air grave, se taisaient, ou hasardaient un commentaire stupide. Se confier, à n’importe qui, pour soulager son âme, ne l’apaisait pas. Il n’aimait pas s’entendre. Les autres raisonnent à haute voix. Ils y trouvent un réconfort. Ils s’étalent, s’épandent, déroulent leur existence, impudiques, et imaginent passionner les foules. Ils attendent les « je comprend », les vagues hochements de tête, et continuent jusqu’à ce que la fatigue les surprenne. Pendant ce temps, les problèmes ne changent pas. D’un jour à l’autre, ils restent là. Ils les chérissent, leurs problèmes. Ils ne les quittent pas ou s’en séparent quelques temps, afin de tenir un public lassé en haleine. Puis, ils les brandissent à nouveau, avec un dramatisme calculé. Parfois, Isaac se surprenait à les envier. Mais ses tourments étaient de ceux qui ne s’avouaient pas. On les soupçonnait à peine. N’était-il pas plus simple de coller une étiquette, une condamnation directe et injuste ? De rire, en lançant, tout fort, « Il est gay, c’est évident ! » en oubliant que les apparences ne définissaient rien à l’intérieur. Absolument rien. Jouer sur les clichés convainquait les autres, qui, après tout, ne demandaient qu’un ami original ou un marginal à lyncher. Il fallait que tout paraisse simple. Allait-il invoquer le soutient du commun des mortels alors qu’il se détachait du droit chemin ? Ils ignoraient sa solitude, ne prêtaient pas attention à ses longues heures isolées, au mépris de plus en plus vif qu’il réservait à son entourage. Des sentiments contraires s’entrechoquaient, douloureux, en lui. Il aimait ses amis, mais devait se fermer à eux. A force, il ne voyait plus qu’un être de surface, posé sur une toile de relations fausses et vaines. S’il oubliait un instant la découverte assurée de son homosexualité, il se rappelait d’une troisième année fulgurante, animée au possible. L’impression désagréable d’une vie accélérée, où personne n’arrivait à s’écouter, ternissait le bonheur de ses souvenirs. Il le réalisait, et la musique l’approuvait. Le tempo accélérait la cadence de son cœur. Les platines tournaient, les notes se répétaient, sans s’arrêter. Il n’y avait pas de répit, juste un bruit obsédant, mécanique, métallique, et artificiel. L’électronique était comme les scènes de ses pensées. Son rythme semblait heureux, grisant, mais ce n’était rien de plus qu’un chaos sans âme. Derrière les pulsions endiablées qui déchaînaient les corps, tout était vide et froid. Pas d’instruments, juste une machine et des sons. Une angoisse étrange s’emparait de lui. Les enceintes diffusaient l’expression parfaite de la vanité, elles la célébraient. L’electro avait ce pouvoir effrayant de changer au gré de l’humeur. Lorsque les mensonges tombaient, elle se révélait à son tour telle qu’elle était, glaciale, sombre, désespérée. Et c’était beau. D’une certaine façon.

Il ne trouvait pas James idiot. Maintenant qu’il s’était ouvert à lui, il était plus disposé à comprendre. Le jeune homme ne l’avait pas jugé, il se dévoilait, pour la première fois semblait-il. Ce partage l’apaisait. Combien de fois avait-il souhaité rencontrer quelqu’un qui pourrait partager son expérience avec lui ? Un mal être profondément ancré en lui se dissipait. James se livrait, et ses derniers démons l’abandonnaient. Il songeait alors à tout ce qui les séparait et les rapprochait. N’était-il pas étrange de se dire que, malgré leurs vies opposées, ils étaient liés par un réseau de pensées semblables ? Pour l’étudiant, les révélations étaient venues plus tard, à cause d’un homme. Mais ce n’était pas ridicule. Son éducation l’emprisonnait. La logique voulait des couples mixtes, des mariages, et des enfants. Les familles traditionnelles refusaient de voir plus loin. Tout ce qui n’entrait pas dans le cadre dit moral ou naturel était pure déviance. Etre homosexuel menait à l’exclusion, et à pire, s’il saisissait bien la portée tragique d’un « ça se finit très mal ». Isaac s’intéressait depuis peu aux sévices dont les gens comme lui étaient victimes. Le peu de récits, trouvés sur internet, l’avait beaucoup heurté. Et les quelques témoignages sorciers lui donnaient, hélas, une belle idée des traitements infligés aux gays dans les milieux conservateurs. Ils devaient se réfugier, changer de pays, disparaître à jamais ou devenir plus puissant que le clan qui avait juré leur mort. Pour Isaac, ces échappés étaient de véritables héros. Ils avaient réussi à s’affirmer ouvertement dans une société qui les condamnait au feu. Ils risquaient leur vie, ignorés de la justice même, car le monde magique ne s’occupait pas des affaires des sorciers puissants. Ces monstres dirigeaient tout, achetaient tout. Mais n’était-ce pas incroyable de se dire que, du jour au lendemain, des parents aimant pouvaient concevoir l’idée de supprimer leur enfant ? Il n’avait pas changé pourtant. Ce qui se passait au lit avait donc tant d’importance ? Isaac savait que ses parents réagiraient mal à son coming out, ou, plutôt, qu’ils ne voudraient jamais rien entendre. Il ne les voyait cependant pas changer de visage, le frapper et le mettre à la porte à quinze ans parce qu’il ne rapporterait pas de fille à la maison. Par une entente tacite, ils feraient comme si rien n’avait été dit.

James se laissait aller. Il osait, déliait des mots plus francs, et cita même son compagnon d’une façon qui ne laissait pas de doute possible. L’euphémisme « mon ami » ne prenait pas. La périphrase « l’homme avec qui je suis » n’entra pas en scène. Mon mec. Formule nette et tranchante. Isaac lui renvoya un sourire amusé, très différent de celui de son interlocuteur. Il avait l’air plus tranquille soudain, presque rêveur, comme si la présence de cet amant absent l’enveloppait, le protégeait, et lui apportait le réconfort qui lui avait manqué. Il devait beaucoup l’aimer. Il avait de la chance.
La promesse d’en entendre davantage plus tard, lorsque l’alcool aurait fait effet, lui arracha un petit rire. Isaac n’était pas gêné, bien au contraire. Il lui tardait d’entendre des discours moins conventionnels, et, surtout de voir jusqu’au quel point de garçon à l’air si introverti était capable de se lâcher.

- Oh… j’ai hâte…
, souffla-t-il de la même façon, le regard brillant.

A l’inverse de James, il sirota sa tequila fruitée sans se presser. Il ne pouvait pas vider son verre en quelques gorgées, sa tête ne le supporterait pas et il se mettrait trop vite à délirer. Ce n’était pas parce que sa dernière rencontre avec un inconnu l’avait laissé dans un état lamentable à cause d’un narguilé qu’il devait recommencer avec des cocktails.


- Pourquoi tu te descends comme ça ?
demanda-t-il d’une voix posée. Je ne te trouve pas stupide, ou du moins, je n’ai encore rien dit. Parle pour toi. Parce qu’en réalité, c’est ce que tu pense. Tu pense que tu es idiot, bizarre et ignare, pour reprendre des mots. Dans ce cas, demande-toi tout ce qu’il te reste à faire pour avoir une meilleure image de toi… Moi, je ne te connais pas assez pour juger, mais on dirait que tu as déjà bien avancé pour quelqu’un qui vient d’une… Grande et Respectable famille sorcière.

Il avait mis un accent ironique sur les derniers mots. Ce n’était pas contre James, juste contre tout ce que représentait sa famille. L’étudiant avait déjà relevé le peu d’estime qu’il portait à cette classe sorcière, et il ne le détrompa pas. Le discours de James avait très largement enflammé sa rage. Et sa rancœur parut soudain dans ses yeux sombres. Les mots tombèrent, durs, brutaux.


- Non je n’apprécie pas ce milieu. Enfin, c’est un faible mot. Je les déteste, pour tout un tas de raisons. La première, très logique, c’est qu’ils ne m’aiment pas, ils haïssent tout ce que je suis. Et pourquoi ? Dis-le-moi ? Il n’y a rien de plus idiot, et facile, de condamner quelqu’un pour sa naissance, ses origines, ou ses préférences. La plupart ne savent même pas pourquoi ils le font. La deuxième raison, c’est qu’ils tueraient tous ceux qui ont des points communs avec moi. Alors, en quelque sorte, c’est comme si on me frappait moi, ou, de manière plus soft, à l’échelle de Poudlard tiens, comme si on m’insultait. Hum… par conséquent, en ce moment, je peux dire que je déteste ta famille. Je déteste l’idée qu’ils puissent te tuer, si c’est vrai, parce que tu ne corresponds pas au portrait du fils idéal. Lo ye’ouman ! Enfin, c’est à ça que se limite les valeurs familiales pour eux ? Tu ne serais rien qu’une image bien droite dans un cadre doré ? Ils auraient besoin de critères pour t’aimer ? Je trouve ça écœurant.

Isaac avait l’art de s’énerver tout seul. Le regard mauvais, contrarié, comme si on venait de l’attaquer personnellement, il but une gorgée plus longue et croisa les bras en se laissant aller brusquement contre les fauteuils. Dans ces moments, il semblait qu’il en voulait à la terre entière et qu’un mot de trop ferait exploser la bombe qu’il gardait en lui. Ses rapports avec ses parents étaient peut-être froids, mais, il avait toujours grandi entouré, aimé, avec des grands parents qui ne manquaient pas une occasion pour lui rappeler que la famille serait toujours là, quoiqu’il arrive. C’était une constance sacrée. Un noyau dans lequel tous étaient accueillis. Du côté de sa mère, les valeurs étaient moins évidentes, mais il savait aussi qu’ils l’aimaient d’un amour sincère qu’aucune révélation ne pourrait durablement entacher.


- Evidemment, je n’ai pas suivi la même éducation. Chez nous, ce serait presque sacrilège de renier un membre de la famille. C’est pour ça que mon père a pu épouser ma mère sans rompre avec tous les siens… Alors…
- plus calme, il soupira. – Ils n’ont pas intérêt à te faire du mal ah sheli.

L'alcool, qui montait doucement, éteignait ses ardeurs, le rendaient plus lunatique. Pour une raison peut être obscure, les derniers mots, qui sonnaient fort peu anglais, avec une sonorité qui n’était même pas connue de la langue, lui arrachèrent un sourire de connivence. Il savait qu’il risquait de froisser James et s’en fichait. Il n’était pas dans ses habitudes de modérer ses propos pour les autres, surtout lorsqu’ils semblaient cautionner en partie une situation révoltante. Il n’avait pas plus ménagé Lynn Bower qu’Alix. Ce jeune homme ne faisait pas exception, tout simplement parce qu’il ne supportait pas de voir les autres souffrir de choses qui n’avaient pas lieu d’être. Mais que pourrait-il faire malgré ses belles paroles ? Rien. Pour le moment. Un jour, il se donnerait les moyens d'agir, c'était certain.
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  • James Kirkby
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MessageSujet: Re: [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]   [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini] EmptyDim 6 Sep - 13:15:55

Une véritable petite scène de théâtre se déroulait au comptoir, sous les yeux rigolards du serveur et de quelques clients. Un type baraqué, la cinquantaine bien sonnée, venait de s'agenouiller, et déclarait sa flamme à une folle de trente ans son cadet – sa cadette ? - avec une grandiloquence outrée. La main sur le coeur, il jurait que le minet oxydé était le soleil de ses nuits, son oxygène, l'hypéronyme de son coeur, et l'intéressé accueillait ce discours avec des minauderies de jeune fille en fleur. Tu parles d'une fleur, songea James, il n'y a guère que le Magicobus qui ne lui soit pas passé dessus... Les témoins s'adressaient des sourires de connivence, commentaient sans retenue le spectacle et les déclarations caricaturales du Roméo, et les éclats de rire parvenaient par instants à couvrir la musique. James s'intéressa quelques secondes à la pathétique comédie, avant de reposer son regard bleu glacial sur Isaac. L'adolescent s'était lancé dans une virulente diatribe contre le milieu dont était issu le jeune Kirkby, et l'ambiance cordiale du début risquait fort de tourner au vinaigre. James détestait qu'on critique sa famille, dont il tenait les valeurs pour sacro-saintes... Lui dérogeait à ces principes, mais la culpabilité l'étouffait, et il n'envisageait finalement l'homosexualité que comme quelque chose de provisoire ; une erreur de jeunesse, avant un mariage raisonnable et une tripotée d'enfants de sang pur. La bague au doigt, il réintègrerait les valeurs de sa famille, de sa caste, et, surtout, de son Maître. Lord Voldemort avait sévèrement châtié ses errements homosexuels, ce n'était pas pour rien... et encore le jeune Mangemort s'estimait-il heureux d'être toujours en vie. Il n'était pas question d'être aimé – le mot semblait presque incongru, appliqué à la sinistre famille Kirkby – mais de correspondre à une norme, à ce que la nature avait prévu. Les hommes avec les femmes, tout simplement. James passa nerveusement une main sur sa gorge, là où il lui semblait parfois que le brûlure infligée par le Seigneur des Ténèbres se réveillait... Soudain brutal, il lança, la voix tremblant de colère :

-Ferme-la un peu, tu veux ? Tu es qui, toi ? Comment peux-tu juger et critiquer sans savoir ? C'est toi qui es écoeurant avec tes certitudes...

Une moue de dégoût passa sur le visage de James tandis qu'il assistait à la conclusion de la scène du comptoir. Le minet avait sauté de son tabouret et enlacé le cinquantenaire qu'il menait à présent vers l'escalier des toilettes. Au passage, il heurta doucement, délibérément, le jeune Mangemort, et se pencha sur lui pour souffler, d'une voix lascive :

-Excuse-moi, mon joli brun... Si tu veux te joindre à nous avec ton petit copain...

Le cinquantenaire, pressé, fit avancer le jeune qui lui adressait un dernier sourire, et ils s'engagèrent bruyamment dans l'escalier métallique. James demeura un instant interdit, puis déclara :

-Je m'en vais. Je ne supporte plus ni ce boucan, ni tous ces... euh... ces gens...

Il fouilla ses poches, et jeta un Gallion sur la table, avant de se rendre compte de son erreur. Il n'avait pas d'argent moldu sur lui, jamais. Il pourrait bien utiliser une métamorphose pour changer son Gallion en livres sterling, mais il ignorait totalement comment se présentait cette étrange monnaie. Il lui sembla voir passer un sourire narquois sur le visage d'Isaac, et il avertit d'une voix sourde :

-Pas la peine de rigoler, hein. Oui, je suis un sorcier, oui je viens d'une famille traditionnelle, et je ne vois pas pourquoi ce serait moins respectable que... Non, laisse tomber, je suppose que tu n'as aucune envie de comprendre.

Soudain accablé, il alluma une autre cigarette, et tira fébrilement une profonde bouffée de tabac qui le calma une seconde. Il détestait ces moments de tension entre ses deux aspirations fondamentales – se fondre dans la masse, dans le clan auquel il appartenait, et assumer un mode de vie totalement réprouvé par ce même clan. Le gamin venait de toucher là où ça faisait mal, et le Mangemort se sentait, comme à chaque fois, sali par son propre comportement. Il posa sur Isaac un regard noir de rancune, et, renonçant à partir, appela le serveur d'un signe de la main pour lui commander du whisky. Pour le paiement, on verrait plus tard. Pour le moment, il voulait boire, s'alcooliser suffisamment pour ne plus penser à tout ça.
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  • Isaac Deniel
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MessageSujet: Re: [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]   [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini] EmptyVen 11 Sep - 21:24:44

Les rires et les cris humains accompagnaient une musique qui refusait de s’arrêter. Il les entendait à peine. Les yeux rivés sur James, il s’enfermait à nouveau en lui-même. L’empathie se rompait, à cause de lui, il le savait. Ses belles confidences ne tenaient plus. La violence avait pris le pas sur la douceur. Il aurait aimé qu’il en fût autrement. Plus de diplomatie ne ferait pas de mal à ses relations. Elles se brisaient une à une, écrasées par sa brutalité agacée. La franchise, sous sa forme la plus crue, n’était qu’une qualité fantasmée. Les gens l’abhorraient. La vérité ne se crachait pas au visage, les certitudes de l’un s’accordaient rarement avec celles de l’autre. Mais Isaac ignorait les sensibilités. Il parlait, heurtait les esprits, se mettait le monde à dos, et, au fond, c’était sans importance, puisqu’il gardait sa logique. Il avait raison. Les mots contenus de James ne le déstabilisaient pas. Il pratiquait la rhétorique des vaincus. Ses questions, classiques et attendues, tentaient de rétablir l’équilibre du discours. Elles tombaient à plat, frôlaient, tout au plus, le sourire détaché de ses lèvres. Comment pouvait-il juger sans savoir ? Ces paroles revenaient des centaines de fois. Il avait eu droit à toutes les variantes, des « tu ne sais pas de quoi tu parles ! » larmoyants, aux « Si tu avais vécu la moitié de mes malheurs… » tragiques. Tous se croyaient uniques, à part. Ils se livraient, puis se jugeaient insondables lorsque les reproches devançaient la compréhension. A quoi s’attendait-il ? A une approbation tranquille ? Ses propos mesurés le dégoutaient. Il n’était pas difficile, avec un petit effort d’analyse, d’entrevoir un jeune homme perdu, attaché à des valeurs qui contrariaient ses désirs et tenté par la fuite. James en avait exprimé bien plus qu’il ne le pensait. Il était passé par tout et son contraire. Il n’en fallait pas plus pour enflammer le Serpentard. Les girouettes dénuées de volonté propre ne l’attendrissaient pas longtemps. Il ne jouait leur jeu que s’il y avait un objectif à la clé. A force d’utiliser la délicatesse pour tromper, il la bannissait des conversations sincères. Quel intérêt avait-il à manipuler l’ex Serdaigle ? Le petit jeu du début était terminé. Leurs révélations mutuelles les unissaient d’une autre façon. James n’était plus un pauvre refoulé à tourmenter. Il avait gagné un statut d’être humain, et il pouvait même lui attribuer un rôle de confident. L’évolution de la discussion les menait déjà au crash. Isaac avait l’habitude des amitiés éclaires. Pourtant, le départ imminent de l’étudiant déclenchait en lui un vague sentiment d’amertume. Devait-il regretter sa fureur révoltée ? Elle l’avait emporté trop tôt. Si James partait, il emporterait le souvenir d’une rencontre inachevée.

Et, pendant ce temps, la clientèle fermentait autour de la parade nuptiale d’un couple ridicule. Il n’avait pas envie de les trouver drôles. Ces gens s’accordaient à la musique, ils vivaient décomplexés, piégés par le démon de la superficialité. Le trentenaire décoloré reçut un regard profondément hostile lorsqu’il s’approcha de James. N’avait-il pas l’impression de déranger, cet ado attardé ? La stupéfaction du sorcier manqua un instant de lui arracher un rire, en parfaite contradiction avec ses pensées. L’étudiant renouait avec toutes ses inhibitions. Il avait à nouveau ce visage d’étranger égaré. Il se réveillait, comme un somnambule que les pas avaient conduit vers une destination inconnue. Le gallion tomba sur la table. Isaac, conditionné par le monde magique et assommé par l’alcool, ne réagit pas tout de suite. Mais la moquerie tira vite son visage. Il avait anticipé cette scène. Le hasard n’agissait jamais qu’à moitié avec lui. Au moment de prendre la commande, il s’était douté que le descendant d’une noble famille sorcière n’avait pas d’argent moldu. Evidemment, il avait préféré se taire, pour profiter de son embarras au moment de payer. Ce n’était qu’une simple facétie, un moyen détourné de dominer la situation. Or, la malice venait de sauver leur rencontre. Contrarié, James se sentit obligé de rester. Il leva vers le garçon un sourcil ironique et se retint de ricaner en recevant sa mise en garde compassée. Peu importait, il avait gagné cette manche.

Son compagnon se cala dans le canapé. La méfiance, la peur d’être jugé, semblait-il, lui rappela tout le mal qu’il avait pu dire de sa famille. Isaac l’assumait parfaitement. Mais James ressassait ses paroles. Elles l’avaient marquées, c’était bien. Le jeune homme l’intéressait de plus en plus. La séduction était mise de côté, pour le moment. Tout ce qu’il pouvait dire était bon à entendre. Ainsi, la rupture de sa phrase le décevait. S’il refusait d’assimiler son raisonnement, il voulait le connaître. Après tout, il était le témoin vivant d’une existence qu’il n’avait pas envisagé au-delà de la théorie. On ne lui avait jamais présenté un adulte partagé entre sa nature et son milieu social. Le regard du Serpentard s’adoucit. Il sentait qu’il devait faire un effort et renoncer, pour une fois, à son attitude agressive et provocante. Il l’avait bien vu quelques instants plus tôt, les gens parlaient peu lorsqu’on les brusquait. Que pouvait-il changer en une conversation de toute façon ?


- Et qui es-tu pour supposer à ma place ?
lança-t-il d’une voix lente. Mais pour répondre à ta question, je suis… je ne laisserais personne contrôler ma vie ou l’influencer de quelque manière que ce soit. Je ne veux pas avoir l’impression de passer à côté de moi, et de vivre l’idéal d’un autre. Je suis comme ça. Appelle cela des certitudes si tu veux. Il en faut bien. Ce sont les moins fausses que j’ai trouvé.

Parce qu’il ne se mentait pas à lui. Cette idée devenait obsessionnelle. Etait-il possible de vivre vraiment sans respecter ses aspirations profondes ? Il arrivait à faire éclater tous les carcans, à s’approcher, croyait-il, de l’essence même de ce qu’il était. Pourtant, il n’était pas heureux. Et rien ne l’apaisait. Sa logique n’était pas une solution, elle touchait un absolu qui le rassurait en lui donnant la meilleure illusion du Vrai.

- Et je ne crois pas que comprendre soit une question d’envie. Tu peux continuer… Je ne te promets pas de comprendre, ni de faire semblant, mais je t’écoute, si tu as toujours besoin de te justifier…


Il exécuta un mouvement d’épaules désinvolte et aspira une autre gorgée d’alcool. La moitié du grand verre était vidée, et une chaleur tranquille engourdissait sa tête. Sa conscience tiendrait bon. Mais son humeur taquine le rattrapait. Il ouvrit sur James des prunelles brillantes.

- Je m’énerve rarement deux fois de suite tu sais... De toute façon, tu ne veux rien me prouver… n’est ce pas ? C’est toi que tu veux rassurer…


Ses yeux le fixèrent intensément. James ne s’était pas beaucoup défendu. Avait-il seulement envie de développer ses arguments ? Il en doutait. Cependant, il baissa les paupières et poursuivit en tournant le bâton fluorescent de son cocktail. Une ambigüité certaine accompagnait la phrase. Il l’appuya en lui tournant un regard de biais.

- Maintenant, si tu as des histoires plus amusantes à me raconter, je t’écouterais aussi… puisque je n’ai pas envie de te laisser partir en fait…


Il sortit le remueur du verre et le porta à ses lèvres pour suçoter les gouttes d’alcool. Cette fois, le geste n’était pas vraiment calculé. Il ne réalisa pas tout de suite la trivialité de sa portée. C’était venu spontanément. L’ivresse s’occupait de prendre les devants.
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  • James Kirkby
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MessageSujet: Re: [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]   [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini] EmptyLun 14 Sep - 20:21:30

Clang ! Clang ! Clang ! Le pas lourd du cinquantenaire décrut dans l'escalier métallique, et James s'amusa un instant à imaginer la suite. Qui ferait quoi ? Dans quelle position ? En bas, d'après ce qu'avait dit Isaac, c'étaient les toilettes, et le jeune homme se voyait mal faire l'amour dans des toilettes. Grim et lui ne se refusaient aucune position, mais ils tenaient à conserver un cadre correct et confortable pour leurs ébats. Des toilettes, c'était bon pour un coup vite fait, l'affaire de cinq minutes, mais avec le Russe, il fallait avoir tout son temps devant soi. Cinq minutes, c'était parfois le temps qu'il mettait à simplement déshabiller son jeune amant, à grand renfort de commentaires crus, ses mains errant librement sur le corps offert. À force, James s'était habitué, et il se prêtait plus librement aux caprices du blond ; il rougissait toujours lorsqu'un ordre chuchoté était gênant, mais il n'hésitait plus avant de l'exécuter.

Un sourire nostalgique aux lèvres – et pourquoi la nostalgie ? ce soir, demain, il se retrouverait entre les mains de Grim, soumis et comblé – James cessa de penser aux deux types qui venaient de descendre, et posa un regard rêveur sur Isaac. Se laissait-il entraîner par des vieux cochons presque impotents, grands amateurs de chair fraîche, mais dont le corps les trahit au point qu'ils laissent tout faire au jeune gigolo qu'ils lèvent ? Se prêtait-il, ce fier jeune homme si épris de liberté et de vérité, à ces parties glauques, où le seul amour qui s'exprimait était, en général, celui de l'argent ? Il avait bien laissé entendre qu'en bas, dans les toilettes, il collectionnait les rencontres furtives... Et il venait ensuite donner des leçons, parler sur le ton péremptoire de l'ado gâté, et reprocher à James... Reprocher quoi, d'ailleurs ? De se débattre entre sa famille, les valeurs traditionnelles, et ce qu'il vivait avec Grim ? Comme si cela le concernait, lui nuisait personnellement... Ne pouvait-il pas se contenter de sa vie, puisqu'apparemment il savait la mener avec tant de dextérité ?

Le whisky était arrivé, et James, renfrogné, trempa aussitôt ses lèvres dedans. Il n'avait aucune envie d'argumenter ou de préciser son raisonnement ; face à un garçon si installé dans ses certitudes, cela ne servait qu'à perdre du temps, ou à le persuader qu'il avait raison de dire que James ne cherchait qu'à se rassurer lui-même. Ce n'était pas le cas : il n'en avait pas besoin, il vivait assez bien ses contradictions en tissant mensonge sur mensonge. Le seul à qui il ne pouvait mentir était Lord Voldemort, c'était là le seul point délicat ; pour le reste, ce n'était qu'une question de souplesse intellectuelle, comme disait Grim en comparaison avec la souplesse physique de son amant...

Isaac était ivre. Son regard avait depuis un moment un éclat curieux, et il suggérait avec un regard entendu que James pourrait bien lui raconter les fameuses histoires lestes dont il avait parlé... L'ennui était que le jeune homme n'avait pas très envie d'accéder à ce désir. Le Serpentard avait beau l'assurer qu'il ne s'énerverait plus, ses réflexions acerbes avaient quelque peu refroidi son interlocuteur. Il se rattrapa, l'air de rien, en se donnant des airs de lycéenne bimbo en train de draguer un copain de son grand frère... c'est-à-dire pas de la façon la plus classe, en suçotant sans vergogne le remueur de son verre. D'autres passaient une langue lascive sur leurs lèvres ou se mettaient à gémir plutôt qu'à parler... Chacun sa méthode, après tout. James n'en était jamais venu à de telles pratiques ; il n'aurait pas pu se comporter de façon aussi débridée, et surtout continuer à sourire tranquillement après. Fort heureusement, Grim lui épargnait ces pénibles extrémités : le Russe n'avait pas besoin qu'on le drague, il fallait même plutôt le réfréner... Incrédule, James fixa Isaac qui n'avait pas l'air gêné pour deux mornilles, et profita d'une pause dans la musique pour murmurer :


-Tu es bien sûr que c'est ma conversation qui t'intéresse ?

Excité, soudain, il se cala contre le dossier de la banquette, jambes écartées, dans une positon suffisamment abandonnée pour que le Serpentard puisse se rendre compte in vivo qu'il ne le laissait pas indifférent.
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  • Isaac Deniel
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MessageSujet: Re: [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]   [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini] EmptySam 19 Sep - 21:18:31

[L'album de ce rp et la musique du bar]

Les rythmes excités se brisèrent sur le chant déchiré d’une femme retournée à l’enfance. La playliste versa des notes plus aériennes, douces et lointaines, étouffées par le coton des nuages, elles se délièrent lentement. Le son n’éclatait pas. Il stagnait dans l’air, rampait sur la poussière, pénétrait les cœurs, possédait les corps, la pièce, liait tout un monde, confinait chaque chose avant de battre, sourd, contre les enceintes. Dans le bar, la clientèle bavardait toujours, indifférente au changement. Des jeunes hommes entraient, s’arrêtaient près du patron, plaisantaient, s’installaient là où ils trouvaient de la place. L’heure avançait. Alors que les boutiques fermaient, les cafés se remplissaient. L’atmosphère était au début de soirée. Ces garçons qui ne vivaient que pour la fête étaient plongés dans l’attente fébrile de la nuit. Ils se guettaient les uns les autres, établissaient le programme et Isaac songeait avec tristesse que sa petite escapade s’arrêterait avant les premiers émois du quartier. Ses parents le croyaient à la maison, il n’avait pas préparé de mensonge cette fois. Si son absence se prolongeait, toutes les autorités de la ville seraient averties. Il était condamné à retrouver sous peu les saines activités de son âge, des heures de jeu devant sa console ou son ordinateur. C’était d’un ennui ! Il avait tellement mieux devant lui. James ne le quitterait pas, c’était sûr à présent. Il posa le remueur incandescent sur la table abîmée. Tous les mots qu’il avait pu dire semblaient vides. Soudain, il n’y avait plus rien à ajouter. Ses gestes provocateurs scellaient la suite de leur rencontre. Il la voyait à peine. La musique trempée dans son cocktail écarlate lui donnait une incroyable impression de légèreté. Ses intentions étaient évidentes, maintenant que son corps vibrait tout entier. Que faisait-il avec ce jeune homme ? Il avait réveillé sa malice, c’était vrai. Son embarras invitait le jeu, ses origines sorcières lui rappelaient sa solitude, son besoin de compagnie. Mais, surtout, il l’avait trouvé attirant. Oh, pas au point de le draguer honteusement. Toutes ses armes de séduction n’étaient pas de cette partie. Il n’y avait pas songé, pas avant de sentir l’imminence de son départ.

Un sourire pimenté tira ses lèvres brillantes de grenadine alcoolisée. James, sensible à ses messages subliminaux, avait changé d’attitude et de position. Le garçon bien sur lui s’enfonçait, lascif, dans le divan usé. Il rencontra son regard intense. L’agréable certitude de plaire lui fit murmurer en retour :


- Puisque tu me pose la question, je crois que…


Sa main avança sur les coussins fatigués. Il s’appuya et le reste de son corps suivit. Son compagnon était tout proche de lui. Il pouvait toucher sa cuisse en étendant son bras, mais il préféra effleurer, d’un air distrait, le dos fragile de sa main du bout des doigts. La phrase en suspend maintenait la tension au milieu des volutes de notes qui oppressaient les murs sales, taggués et parsemés de tracts jaunis. Parler avec un inconnu dans ce genre de lieu, qu’était-ce, si ce n’est qu’une comédie de plus ? Une façon de se rassurer peut-être, d’établir un climat de confiance, de contenir le désir. Mais il ne désirait pas ce jeune homme. Pas encore. Il le suivait simplement sur un terrain qui l’intriguait, qui l’appelait. La séduction lui était naturelle. Déjà exercé avec Orion, il agissait de la même façon, guidé par son instinct, à la seule différence que, cette fois, il y avait peu de chance pour que la proie se dérobe, tant qu’il ne faisait pas de faux pas. Le visage tourné vers lui, il semblait préparé à ce dénouement qu’il ne maîtrisait pas depuis le début. Ses pensées confuses écartaient les réflexions à froid. Il n’était plus temps de penser.

- Que je ne t’aurais pas conduit juste ici pour le simple plaisir de débattre avec toi. Rien ne me disait que tu avais de la conversation James…
- Sa main, recourbée au bord de sa cuisse s’étira doucement pour presser discrètement la chair. Plus haut, le sourire d’Isaac gardait une indifférence imperturbable. – Il n’y a qu’une chose dont je sois certain…

Sa main gauche attrapa le bâtonnet abandonné. Il remua son verre, le regard distant, comme si la suite lui demandait une profonde réflexion. A force de se dérouler, ses doigts s’appuyaient entiers sur la cuisse de James. La suite de ses mots demeurait silencieuse. Il était inutile d’en dire plus. Ce qu’il faisait ? Il n’en était pas certain lui-même. Son corps demandait, il exécutait. Il échouait dans un jeu où il devenait aussi le pion. Le remueur ne franchit pas la barrière de ses lèvres lorsqu’il le rapprocha à nouveau de son visage. Il glissa dessus comme un baume, et déposa une traînée de perles sucrées. L’œil attentif, Isaac ne quittait plus l’étudiant. Ses prunelles sombres, brûlée d’un feu ardent, l’absorbaient tout entier. Il attendait à son tour, tranquille et insolant.
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  • James Kirkby
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    James Kirkby
MessageSujet: Re: [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]   [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini] EmptyJeu 24 Sep - 11:51:37

La musique s'était apaisée, et l'humeur de James s'améliora presque immédiatement. Plus de notes vibrantes résonnant dans toute sa chair comme un écho à sa colère, plus de sons se répercutant aux quatre coins de la pièce et jusque dans son crâne ; les sonorités étaient toujours métalliques, synthétisées, mais plus assourdies, moins violentes, plus... Le jeune homme chercha le mot, le regard perdu sur le mouvement des doigts d'Isaac... mystérieuses ? underground ? Il ignorait ce que signifiait exactement ce mot, mais il aimait bien l'appliquer à cette musique électronique propice au déferlement incontrôlé des pensées dans son esprit. Sensible aux inflexions des notes, le jeune Mangemort laissait les perceptions venir à leur rythme, n'imposait aucun rythme à ses songeries, et elles prenaient un cours qui le surprenait et lui plaisait tout à la fois. Il était assis parmi les Moldus, dans un bar ouvertement homosexuel, où des hommes ne prenaient même pas la peine de se cacher pour se livrer à des jeux hautement érotiques – il suffisait de voir les deux clients les plus proches, allongés l'un sur l'autre sur la banquette usée – et il n'arrivait pas, malgré une colère passagère, à en avoir honte. Raconterait-il à Grim dans quel endroit interlope il s'était laissé entraîner ? Ou garderait-il ce secret comme un précieux talisman, comme l'aveu d'un crime délicieux ?... Il n'en savait encore rien ; pour le moment, comme un enfant qui a enfreint les limites imposées par sa famille, il se sentait à la fois fier de son audace, prompt à la clamer sur tous les toits, et soucieux de ne pas révéler à quelles turpitudes il se laissait aller... Il serait si agréable de se faire passer pour un jeune homme rangé, tout en se remémorant avec une volupté furtive ces instants irréels.

C'était un presque enfant qui l'avait mené dans ce bar, mais un enfant déluré, parfaitement conscient du trouble qu'il causait, et qui jouait à faire monter la pression à grand renfort de gestes presque innocents. Il adressa un sourire embué de grenadine à James, qui eut aussitôt une furieuse envie d'aller lécher ces gouttes rouges et sucrées, avant d'aller voir si le reste de ce corps était aussi appétissant... Mais il ne bougea pas, partagé entre la concupiscence la plus bestiale et un restant de timidité bon chic bon genre... Il laissa le garçon s'approcher, effleurer sa main, soumis par avance à ses désirs. Isaac était nettement plus jeune que lui, mais James lui laissait tacitement la direction des opérations. Comment ne pas se soumettre corps et âme à un aussi charmant maître, visiblement rompu aux mille et une méthodes de séduction ? Le Mangemort était au supplice, son corps tendu criait merci, mais sa bouche ne se résolvait pas encore à demander pitié. Le jeu pouvait durer longtemps ; Isaac s'amusait apparemment beaucoup, et il murmurait des choses que James ne comprenait pas tout ce qu'il disait : ses doigts s'étaient posés sur sa cuisse, et le brun avait perdu tout contact avec la réalité. Était-il possible que la simple proximité d'un adolescent suffise à le mettre dans cet état ? Mais il ne s'agissait plus de simple proximité physique : le manège d'Isaac était de plus en plus suggestif, et, l'alcool aidant, toutes les inhibitions tombaient. James posa une main légère sur celle qu'Isaac tenait négligemment sur sa cuisse et, d'un geste doux, amena la paume de l'adolescent sur sa braguette tendue. Comme ça, sans honte, sans retenue, alors que le Serpentard était de toute évidence mineur. Au diable les lois et les convenances... Le lieu n'incitait pas à la circonspection et au respect vertueux des règles, et mineur ou pas, Isaac avait l'air de savoir ce qu'il faisait et ce qu'il voulait. Profitant d'une pause dans la musique, James laissa basculer sa tête sur le côté, de façon à ce que leurs visages soient tout proches, et murmura :


-Moi je suis sûr d'une chose... Tu me fais de l'effet...

Il eut un sourire un peu coupable, et ôta sa main droite, qui maintenait doucement celle d'Isaac sur son entrejambe. Que le garçon se sente libre de laisser ou d'enlever sa main ; il n'ignorait plus quel émoi il causait chez le jeune homme, et James, soumis, le laissait diriger. Lui seul déciderait de la suite, et il pouvait très bien laisser sa victime sans secours... Les adolescents sûrs de leur pouvoir s'y amusaient parfois, jouissant cruellement de leur toute-puissance sur des adultes conquis... Les yeux fermés, la respiration soudain courte, James chuchota :

-Tu me mets au supplice...

Rouvrant les yeux, il passa un index doux sur les lèvres d'Isaac avant de le porter à sa bouche pour goûter la grenadine, et ajouta un peu plus fort, d'une voix rendue sourde par le désir :

-Et je suis sûr que ça t'amuse follement... garnement...

L'aveu de sa propre impuissance était fait. Il ne bougerait pas, ne tenterait rien qu'Isaac n'ait décidé ; il acceptait de n'être qu'un jouet entre les mains vives d'un gamin, certain que tel était son rôle avec les hommes, si jeunes fussent-ils.
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  • Isaac Deniel
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MessageSujet: Re: [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]   [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini] EmptyMar 29 Sep - 17:15:04

N’étaient-ils pas au palais du faux ? Là où rien ne portait à conséquence ? Le possible s’épandait sur les ocelles de lumières dansantes et colorées. Dehors, la vie battait le pavé. Le monde donnait l’apparence de la pureté. Dans la rue, il n’était qu’un adolescent asexué, trop jeune, trop mignon pour goûter à des plaisirs dépravés. Il avait le temps, disaient les adultes. Mais avaient-ils eu son âge, ces adultes qui s’abritaient derrière leur prétendue maturité ? Avaient-ils oublié les pensées et les tourments de la puberté ? Deux ans était un délai trop grand. Avant vingt ans, toutes les saisons s’accompagnaient de changements. Les idées évoluaient, les désirs aussi, certains amusements se perdaient, à regret, et d’autres rêveries les remplaçaient. L’ère du jeu se fermait, à jamais. Le rayon enfant n’attirait plus son regard, la gamme des super-héros, figés dans leurs boîtes en carton, n’éveillait plus ses passions. Quand il se retournait sur son passé, elles lui semblaient incompréhensibles. Avait-il pu bondir de joie pour des figurines en plastique ? Une éternité étirait les quatre années qui le séparaient de ces derniers instants. Le gamin lui devenait étranger, il ne voulait plus en entendre parler. L’enfance ressemblait à une époque maudite qu’il fallait quitter à tout prix. Entre le parc de jeu et le bar où des hommes n’hésitaient pas à s’embrasser sur un canapé exposé ou à se glisser dans les ténèbres d’un escalier pour un abandon que le monde extérieur nierait, le choix était vite fait. Il les contemplait, depuis son entrée, avec un intérêt croissant. Près de James, plongé dans ses yeux bleus, il entrait sur leur terrain de jeu, et c’était un déroulement logique qui ne le surprenait pas. Il attendait, espérait, la rencontre de leurs visages, mais la main du jeune homme s’aventura la première sur la sienne. Sans résister, il se laissa guider. L’alcool, la musique évinçaient l’obscénité d’un geste qu’il avait à peine calculé. A dire vrai, il ne savait plus ce qu’il faisait. Les limites s’envolaient, emportées par les vagues grisantes d’une mélodie d’ambiance. Elles s’évaporaient sous les flammes de l’envie. Tout était permis.

Le murmure de l’étudiant le ramena à lui. Il sentait la bosse sous sa paume, savait qu’il touchait un lieu interdit, le temple du vice, celui-là même qu’Alix lui avait refusé un mois plus tôt, quand il laissait traîner ses mains de plus en plus bas en priant pour qu’il ne le repousse pas. Mais ce gamin les détournait toujours. Cette fois, on les invitait à se poser ici, comme une évidence. Il resta étonné un instant, placide et perdu, peut-être. S’il ne se retirait pas, il n’était plus très certain de la suite à donner à cette affaire. N’allait-il pas trop loin ? Le cœur se serrait sans s’agiter au creux de sa poitrine. Il n’était pas plus gêné que paniqué. James ne cherchait pas à le piéger. Plus troublant, il semblait se donner à lui. N’était-ce pas sa partie ? N’avait-il pas déclenché ce jeu dangereux, inspiré par des hormones trop actives ? Face à des adolescents, ses ambigüités frôlaient les cibles sans les atteindre. Il venait de passer un niveau. Un jeune homme ne pouvait pas le craindre. Mieux, il était capable d’assumer son attirance. A force de l’allumer, Isaac obtenait ce qu’il voulait, et cette réalité concrète dépassait de loin tous les scénarios qu’il aurait pu composer à la sortie du bar, au moment de se quitter. La pression de sa main augmenta légèrement pour aplatir le tissu bâillant. Ce geste, d’abord curieux, fit monter le sang jusqu’à ses joues. Son âge flirtait avec un péché de premier ordre, c’était exquis. Et il dirigeait encore. Le garçon aux prunelles saphir haletait déjà, pris en tenaille par des souvenirs d’alcôve brûlants. Isaac n’avait que son imagination. Elle le laissait à la fois plus ému et plus froid. Il se sentit frémir pourtant lorsque l’index de James traça la ligne sensible de ses lèvres. C’était incroyable, tout ce pouvoir, toute cette énergie vibrante, concentrée au bout d’un seul doigt. Il s’était touché des millions de fois le visage sans rien éprouver, et là, cette simple caresse, accompagnée du désir d’un autre, exsudait par tous les pores de sa peau.

Un sourire malicieux lui redonna très vite contenance. Garnement… Le mot, délicieux à l’oreille, lui rappelait ses objectifs. Ce n’était pas à lui de sombrer. La chaleur montait en lui parce que James le désirait. L’inverse ne tenait pas. Si l’étudiant était resté indifférent à ses charmes, il n’aurait rien provoqué. Isaac avait une idée assez précise du type d’homme qui lui plaisait, et, si celui-ci l’attirait, il n’avait pas assez de qualités pour inverser les rôles. Sa paume s’appuya davantage.


- Mais je crois que tu y trouve une certaine complaisance…
, souffla-t-il en passant un bras derrière sa nuque.

Sa main se souleva, ses doigts se recourbèrent très doucement, et tournèrent, léger, d’une façon presque suggérée. James se disait au supplice. Il exagérait. Il voulait voir jusqu’à quel point il pouvait le mettre à sa merci. Au fond, ces choses là n’étaient pas plus sérieuses que les autres. C’était un nouveau jeu, auquel il était probablement agréable de perdre.


- Il parait…
, poursuivit-il en s’approchant de son oreille, Il parait que ceux qui ont l’air le plus propres sur eux sont les pires…

Il pinça le lobe de son oreille entre ses lèvres, puis attarda un baiser et la pointe de sa langue sur la tempe du jeune homme. Il n’était pas habitué à ces démonstrations plus raffinées. Alix demandait peu d’attention, et il n’avait pas envie de se donner tout ce mal pour lui. Les faiblesses étaient faciles à trouver, il se contentait de les deviner. Son pouls s’accélérait en retour maintenant qu’il sentait l’odeur masculine de l’étudiant. La main posée sur son épaule se resserra, comme s’il redoutait la chute. Sans interrompre le mouvement de la première, il souffla le long de la mâchoire de James et s’interrompit, lèvres entrouvertes, au moment de l’embrasser. D’une voix plus étouffée, il murmura :


- Au fond… je ne sais pas si tu entre dans cette catégorie…


Ses cils noirs révélèrent l’obscurité brillante de ses prunelles. Il s’arrêtait sur cette pique facile. C’était au tour de James. Pas question de prendre toutes les directives, ce serait tellement moins drôle alors qu’il avançait dans l’inconnu.
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  • James Kirkby
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MessageSujet: Re: [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]   [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini] EmptySam 3 Oct - 16:17:47

Sale gosse... Petit salaud... Dans l'esprit de James se succédaient les insultes à l'égard d'Isaac, de plus en plus grossières, de plus en plus crues – mais il n'y avait pas la moindre rancoeur dans ces termes offensants soigneusement pensés, pas la moindre méchanceté ; ils étaient moins déplacés que ne l'auraient été des mots tendres, et ils sonnaient plus comme des aveux de faiblesse, voire comme des témoignages d'affection, que comme de réelles injures. On ne parlait pas encore d'affection, cependant ; les deux garçons n'avaient pas dépassé le stade de l'attirance charnelle simple, des instincts bestiaux, ceux qui s'affichaient le plus volontiers dans ce bar. Aucun des hommes présents n'avait de gestes tendres envers son compagnon ; on se sautait dessus, on se pelotait autoritairement, on clouait le bec de l'autre d'un baiser impérieux, on se lançait des qualificatifs grivois au visage ; il y avait dans ce mélange de séduction et de débauche quelque chose d'étourdissant, que James appréciait finalement assez, puisque cela lui rappelait ses propres relations avec Grim ; le Russe ne manquait pas une occasion de s'affranchir des carcans de l'amour trop policé, et il usait de tous les moyens pour que leur quotidien fût plus dépravé que romantique. Les insultes, les coups (dans une certaine limite), le refus de toutes les barrières morales avaient été imposés peu à peu à James, et ses réticences premières avaient rapidement cédé ; Grim avait modelé un amant à son goût, soumis, sans tabou, attentif à reculer sans cesse les frontières de son propre consentement...

Le jeu était en honneur dans ce bar ; le serveur prenait un air outré après s'être violemment fait claquer les fesses par un client à l'air de voyou, qui jetait ensuite son dévolu sur un minet à l'air timide ; un ordre, d'une voix sèche, et le jeune venait se blottir contre le voyou ; sans tendresse, avec un intérêt tout médical, celui-ci procédait d'une main ferme à un examen de son corps sous les vêtements, comme on évaluait, au marché, la maturité d'un fruit. On n'était pas là pour s'aimer, mais pour jouir l'un de l'autre, sans complexe. James adressa un sourire un peu absent à Isaac ; le garçon n'avait pas ôté sa main, et il s'amusait, au contraire, à bouger un peu ses doigts. Un contact léger comme une plume, obstiné, presque douloureux à force de suggérer les choses sans aller plus loin. Le jeune Mangemort ferma un instant les yeux, et une impression curieuse de chavirement le prit, comme une ivresse légère. Il soupira d'aise en sentant les lèvres et la langue d'Isaac sur son oreille et sur sa tempe ; il était particulièrement sensible à ce genre de caresses, le gosse l'avait bien vu. Dans l'esprit surchauffé de James, la certitude d'avoir affaire à un expert se renforça, étouffant les derniers scrupules : oui, il était mineur, mais il se comportait avec tant d'aisance... Il savait où il voulait en venir, et cela, d'une certaine façon, faisait passer son âge au second plan.

James sentit le souffle sucré du garçon sur ses lèvres tandis qu'il murmurait une phrase pleine de sous-entendus, et il répondit à voix basse, en souriant :


-Et il paraît que de nos jours, les collégiens de Poudlard sont de fameux vicieux, surtout les préfets...

Sans attendre, avec quelque chose de la brutalité du voyou du comptoir, il prit les lèvres de l'adolescent dans un long baiser au goût de grenadine. Sa main droite maintenait la nuque du Serpentard, la gauche s'égara sous sa chemise fine, et un gémissement ponctua la fin du baiser. Ce garçon avait une bouche délicieuse... et le reste de son corps, caressé par la main fébrile de James, était tout aussi appétissant. La peau blanche et douce, le torse mince, et cette gorge charnue, palpitante... Le Mangemort posa un regard un peu bizarre sur son compagnon, et déclara :

-Tu me donnes faim, tu le sais, Isaac ?

Et il planta doucement ses dents dans la gorge de l'adolescent, à la manière d'un vampire, sans serrer, juste pour le plaisir de goûter à ce cou. Il sentit Isaac se raidir un peu, et il cessa un instant pour murmurer :

-Sale gosse... tu me plais, tu sais... tu sais que je n'ai jamais été infidèle à mon mec, et que tu me donnes envie de l'être ? Détestable tentateur...

Il retourna à la gorge d'Isaac, mais sans mordre ; il déposa un baiser sous le menton, ponctué d'un petit coup de langue, et remonta du bout des lèvres jusqu'à la bouche du garçon, qu'il reprit délicatement, le coeur battant à tout rompre, des éclairs aveuglants sous ses paupières closes.
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  • Isaac Deniel
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MessageSujet: Re: [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]   [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini] EmptyJeu 8 Oct - 16:11:01

Il s’appelait James. Quel âge avait-il ? Où vivait-il ? Quelles études menait-il ? Il n’en savait rien. La conversation avait laissé les lieux communs aux rencontres plus académiques. Ils connaissaient leurs blasons d’écoliers, c’était bien assez. Les garçons du bar pouvaient-ils tracer un portrait plus complet de leur mignon ? Des regards se croisaient, des mains s’enlaçaient, et les bouches se liaient. Les sens racontaient la suite. Parler n’était rien. Les mots s’accordaient aux notes. D’une phrase à l’autre, ils diffusaient milles charmes et les reprenaient aussitôt. Les vents contraires agitaient l’âme humaine. Instable, elle aimait et méprisait en même temps. Le désir de l’esprit n’était qu’une fable inventée sous couvert de la vertu. Il appelait la raison, étouffait les passions, rompait la magie de l’abandon. Sur les canapés fatigués, le respect des conventions était la plus mauvaise des plaisanteries. La vie brûlait dans l’instant. Se reverraient-ils, ces amants ardents ? Rien n’était moins sûr. Mais Isaac ne pensait pas encore de cette façon. Les lèvres tendues, le souffle court, il ne réclamait qu’un baiser. James ne se réduisait pas à un tas de chair, à consommer au plus vite, pour satisfaire un besoin et passer à autre chose. L’après n’existait pas. Ses recherches le précipitaient vers un noir absolu. Il devinait, au fond du néant, la caresse insolente d’un brasier. Un enfant, discret, frémissait dans un coin de son cœur. Il l’écoutait, et l’apaisait en multipliant les gestes indécents. Ce n’était rien, lui disait-il. Le petit s’endormait, enveloppé par la chaleur des lèvres qui s’unissaient, violentes et enfiévrées. Isaac n’avait pas l’intention d’oublier l’étudiant. Etait-ce seulement possible ? Il découvrait le langage du corps, là où celui de l’esprit l’avait toujours déçu, même avec lui, le débat n’avait rien donné. Avec Alix, le schéma était semblable. Il fallait s’embrasser pour ne pas se quereller. Tant pis s’ils ne s’entendaient jamais, puisqu’il lui plaisait. Les hommes en face n’attendaient pas l’amour, ils l’avaient sans doute connu, puis découvert que la débauche s’en passait. Isaac ne partageait pas leurs conclusions. Une impatience naïve et pure, en dépit de tout, l’animait.

Il voulait fermer les yeux, et se coucher sur les charbons ardents qui le consumaient de l’intérieur. Le baiser de James le surprenait dans sa brutalité. Habitué à des lèvres plus hésitantes, il basculait doucement sur l’autre rive, suivait sans rien maîtriser. Sa peau tressaillit lorsque des mains étrangères s’insinuèrent sous son vêtement. Les caresses n’avaient rien de tendre, il les devinait perverses. Elles le sondaient, laissaient sur son ventre, son torse, ses hanches, une marque cuisante, impersonnelle. James disait qu’il lui donnait faim. C’était le mot. S’ils avaient dédaigné l’esprit, il ne restait que la viande, une proie et un loup affamé. Un malaise troublant s’emparait de lui. Etait-il bien, était-il mal ? Il l’ignorait. La pensée même de son humiliation accélérait son pouls, le plongeait dans une situation d’urgence, et le paralysait à la fois. Il aimait l’idée d’être piégé entre les mains savantes du jeune homme. La honte et l’ivresse s’entrechoquaient. L’angoisse succédait au plaisir. Il aurait pu tout regretter, tout arrêter. Pourtant, une température grisante montait en lui. Elle le perdait. L’enfant, confus, implorait le départ, mais la distance qui séparait leurs corps était un supplice. Sa voix revint, plus forte, lorsque les dents de James mordillèrent son cou. Il s’était figé, quoiqu’il fût incapable de résister. Sa curiosité ne se refusait rien. La raison, murmurait en filigrane, que la frontière entre plaisir et souffrance était parfois très mince…

Les mots de l’étudiant tombaient, chaotiques, dans l’imbroglio de son esprit. Il était sale… Détestable… Les dépréciatifs lui rendirent un sourire espiègle, absent. James avait soin d’entretenir le discours. L’attention était plus fine qu’elle n’en paraissait. Elle rompait l’animalité de leur rapport tout en l’appuyant. A travers ses insultes, Isaac se sentait aimé. On lui offrait une victoire sur un plateau. Ce jeune homme, qui se prétendait fidèle, était près à mettre son couple entre parenthèses pour lui. L’expression d’une fierté provocante tira son visage. Il soupirait à nouveau d’aise, la tête légèrement renversée, une fébrile toujours crispée sur l’épaule de James lorsque deux ombres couvrirent la scène. Pour le moment, l’étudiant n’avait pas l’impression de tromper son compagnon. Il fallait aller plus loin, sombrer pour de bon. Cette idée vague devenait de plus en plus concrète. Allait-il vraiment franchir le seuil du fantasme ? Peut-être… Il n’arrivait pas à y croire. Les choses pouvaient-elles se faire si facilement, si rapidement ? Oui. Il suffisait de ne jamais reculer lorsque l’occasion se présentait. Mais s’aventurait-il sur un terrain certain ? Oh, il ne rêvait pas d’un coup de foudre, d’une relation durable construite de cette façon, cependant, ce garçon avait quelqu’un d’autre. Il ne se sentait pas coupable. N’était-il pas libre d’aller vers un autre s’il le souhaitait ? Il fallait plus d’une tromperie charnelle et imprévue pour dissoudre un amour solide.

Et c’était probablement le fond du problème. Il n’était rien. Ses yeux s’ouvrirent sur le vide. Une personne l’embrassait, et ce n’était pas la bonne. Le cœur lourd, il sentait son souffle revenir sur ses lèvres. La brutalité des premiers instants retombait. Mais, lorsque James reprit le baiser, il lui sembla qu’il accédait à une relation plus profonde. Le rythme plus lent, plus appliqué, étreignait ses réserves. Il s’étendit à moitié sur le jeune homme et le repoussa au fond du divan, une jambe coincée entre les siennes. Sa poitrine était sur le point d’exploser, il voulait le sentir contre lui. Et ne lui avait-il pas avoué qu’il pouvait enfreindre les règles d’un couple sincère pour lui ? Juste pour lui. Une bouffée de chaleur brûla ses joues et son ventre. Non, pas ici, ni maintenant. Ce n’était pas possible. Pourtant, la cœur battant, il imposa à son tour une langue fougueuse à James et s’appuya davantage contre lui. Il n’entendait plus la musique ni l’enfant. Leurs corps ondulaient légèrement. Les conversations, les regards des autres, leurs jeux sans âme ne comptaient pas. Que savait-il de l’étudiant ? Peu de choses. Il enlaçait un ex-Serdaigle, et il était bien. C’était suffisant.
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  • James Kirkby
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MessageSujet: Re: [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]   [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini] EmptyVen 9 Oct - 9:47:24

Le corps d'Isaac était si proche, à présent, que James ne savait plus si les battements de coeur qu'il sentait étaient les siens ou ceux de l'adolescent. Il sentait le Serpentard fébrile frissonner sur lui, et il ne pouvait s'empêcher de lui en avoir une certaine gratitude : ce garçon si décomplexé, si expérimenté croyait-il, était encore capable d'éprouver quelque émotion en se faisant embrasser et caresser. Il aurait pu avoir le détachement des adolescents qui plaisent, et qui collectionnent les conquêtes par simple jeu ; il aurait pu prendre un air ennuyé, il aurait pu avoir le pouls calme d'un garçon endormi, mais il n'en était rien. Sa fièvre répondait en tous points à celle de James, leurs deux coeurs cognaient à l'unisson, leurs souffles étaient pareillement courts, leurs lèvres pareillement brûlantes. Bien loin de se douter de la raison exacte du trouble d'Isaac, James le laissa s'installer sur lui, et ses mains se firent plus caressantes, moins bestialement exploratrices. D'un doigt léger, il flattait la cambrure des reins, sans descendre assez bas pour gêner Isaac (après tout, ce n'était qu'un gamin, lui répétait un semblant de bonne conscience) ; simplement, il allait et venait à l'endroit où le dos se creuse, perd de sa dureté, savourant le grain fin de la peau.

L'adolescent prenait l'initiative, et, une fois encore, James lui fut reconnaissant ; lui-même venait de prendre conscience de sa propre infamie, et il suspendait ses caresses tandis que son coeur battait la chamade. Qu'était-il en train de faire ? Embrasser un garçon inconnu, le caresser et laisser sa langue forcer ses lèvres, est-ce que ce n'était pas déjà tromper Grim ? Le Russe ne lui avait jamais formellement interdit de se donner à d'autres hommes, mais il lui avait suffisamment répété « tu es à moi » pour que James s'impose de lui-même une fidélité quasi conjugale. Et voilà qu'au détour d'une promenade dans Londres, il manquait, pour la première fois, à une fidélité qu'il n'avait jamais promise, mais toujours scrupuleusement respectée.


« Mais Grim n'en saura rien, murmura une voix convaincante en diable. Les yeux qui ne voient pas ne pleurent pas... »

Bien sûr, il n'en saurait rien, jamais... James s'abandonna à nouveau au baiser du garçon, mordillant doucement ses lèvres, tandis que ses doigts reprenaient leur caresse sur sa peau. Sa main gauche se perdit dans les cheveux de jais d'Isaac, mais sans tenir la tête comme il l'avait fait auparavant ; juste pour le plaisir de sentir la chevelure soyeuse sous ses doigts, à la façon de certaines femmes. Le baiser s'interrompit enfin, et Isaac laissa aller sa tête sur l'épaule de James qui n'osait bouger ; leurs deux corps étaient enchevêtrés, et d'après ce que le jeune homme sentait contre sa cuisse, le Serpentard avait réagi favorablement à ce baiser. Lui aussi, d'ailleurs, au point d'en avoir presque mal ; il fallait se calmer, ne serait-ce que pour quitter ce bar où on commençait à les regarder avec un peu trop d'intérêt. Profitant de la proximité entre sa bouche et l'oreille du garçon, James murmura :

-Tu sais, Isaac... Je crois qu'on devrait partir... Je ne voudrais pas que tu me prennes pour un pervers de plus, mais je suis...

Comment dire ce genre de choses sans être vulgaire ? Une sorte de gêne le prenait soudain, et il s'excusa d'un sourire. De toute manière, avait-il réellement besoin de s'expliquer ? Le problème était assez tangible pour le dispenser de l'exposer. Désignant d'un signe de tête les quelques hommes du comptoir qui observaient sans gêne, il ajouta :

-En plus, ils sont tous à nous regarder, comme s'ils attendaient je ne sais quoi...

Je ne sais quoi ? Mais si tu le sais, James, et chacun ici, Isaac le premier, le sait aussi... Sale hypocrite. Amorçant un mouvement pour se dégager, le jeune homme annonça :

-Je ne peux pas rester davantage comme ça. Je ne veux pas que tu te sentes obligé à quoi que ce soit, Isaac, je ne suis pas un satyre... alors c'est toi qui choisis... Je ne veux rien faire si tu n'es pas d'accord. Quoi qu'il en soit, ça a été un plaisir de te connaître. J'espère qu'on pourra se revoir...

Il déposa un baiser affectueux sur le bout du nez d'Isaac, puis un autre, très bref, sur ses lèvres, souriant. Comment allait-il marcher, avoir une démarche à peu près normale, pour sortir de ce bar ? Son regard rencontra la rambarde de l'escalier de métal, et il apprécia soudain la délicate attention des gens qui avaient conçu ce bar. Le sous-sol, là était la solution.
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  • Isaac Deniel
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    Isaac Deniel
MessageSujet: Re: [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini]   [Londres, Soho] Jh cherche jh avec forfait illimité [Fini] EmptySam 10 Oct - 17:55:55

Les réserves, la morale, la peur, l’enfance, la vertu, l’ignorance, tout s’estompait. Sous la chaleur du baiser, les pensées suffoquaient. Il fermait les yeux, humait la vapeur musquée des peaux halitueuses, s’en remettait aux instincts les plus primaires. Son esprit s’égarait, et son corps s’ouvrait tout entier, sensible aux moindres frôlements, ployant à toutes les caresses. Une incroyable fragilité traversait sa chair. Il redoutait et espérait les mains de James, leur passage électrique, glacé puis brûlant. Le sang, impétueux, battait ses tempes. Il quittait les lèvres pour mieux les reprendre, variait les mouvements, allant de la pudeur raffinée, douce et subtile, aux explorations audacieuses, vives et exaltées. Les premiers filaient un supplice délicat, ils attisaient l’envie, la maintenait au seuil du tolérable. Pourtant, ils ne se savouraient pas longtemps, bientôt remplacés par la fougue des seconds. Elle montait sans jamais s’arrêter. Lorsque la flamme se calmait, que le baiser retrouvait un rythme plus agréable, sa peau s’affinait sous les doigts du jeune homme. Il lui semblait que son corps se liquéfiait, bouillait au cœur de ses entrailles, et il replongeait, conquis, avide et frémissant. L’extrême sensibilité de sa chair le fascinait. Elle teintait ses soupirs de gémissements discrets, à peine assumés. Songer au garçon qu’il tenait serré contre lui, le bassin appuyé sur sa cuisse, l’émouvait peu. Il l’avait désiré trop vite. Son caprice adolescent tournait sa fièvre vers l’interdit. Un jeune adulte, fidèle et correct, rejetait toutes les convenances pour lui, dans un lieu où régnait la débauche homosexuelle. Ils s’embrassaient à la vue de tous, offraient un spectacle saisissant à tous les voyeurs du bar. Où ses parents le croyaient-ils ? S’ils savaient la réalité, ils pâliraient, choqués, dépassés. O Dieu, ô Yavé, qu’avaient-ils ratés ?A l’intérieur, Isaac souriait, mesquin et sans pitié. Corrompre une pureté chère aux géniteurs de la façon la plus sale qui soit, était une jouissance de l’âme, une victoire stérile et enfantine sur l’autorité sacrée du carcan familial.

Il ne remarqua pas les hésitations de James. Les caresses s’arrêtèrent un temps, il reprit son souffle, tranquille, et se cambra davantage sur lui lorsqu’un baiser les enchaîne à nouveau. La main de l’étudiant glissa entre ses mèches d’ébène. Une secousse dévala jusqu’au bas de sa colonne. Il les imaginait ailleurs, ces mains douces et timides. Des pensées coupables se bousculaient dans son esprit échauffé, figé sur le bonheur présent. La question n’était plus, que pouvait-il faire de plus ? Elle devenait, comment pouvait-il faire plus ? A force de jouer avec le plaisir, il s’aplatissait sous son poids douloureux. Le baiser s’affaiblit et s’arrêta. Il voulait continuer, mais s’était impossible. Il mourrait s’il insistait. Le ventre brûlant à lui en faire mal, il posa sa tête sur l’épaule de James, les lèvres entrouvertes sur sa gorge, la respiration lente et nerveuse. Et maintenant, que devait-il faire ? Trouver la force de se lever, se retirer, effacer l’écart, oublier ce garçon sans histoire. Le corps inconnu vibrait sous le sien. Le laisser ? L’idée de la séparation était aussi intolérable que leur proximité. Il ne bougea pas lorsque James lui suggéra de partir. Un peu hébété il retrouvait difficilement une pensée ordonnée. Où était passée sa maîtrise du début ? Il se sentait comme un gamin à qui l’on venait de lâcher la main. Tous les regards qui s’attardaient sur eux n’avaient plus rien de drôle. Les hommes les observaient d’un œil lubrique, guettaient sans doute le moment où, n’y pouvait plus, ils s’enfonceraient dans les ténèbres de la backroom. Mais Isaac s’y refusait. La flétrissure avait ses limites. Ne méritait-il pas mieux que ça ?

James parlait à demi mots, il le repoussait sans violence, et Isaac s’écarta à regret. Son regard, d’abord perdu, retrouva au fil du discours l’intelligence surprenante qu’il avait pour son âge et qui arrivait le faire passer pour plus expérimenté qu’il ne l’était. Il gardait une mine grave. Il pouvait rester ou partir, il préférait qu’on l’emporte sans rien dire. Bien sûr, il était d’accord. Mais, face à la proposition, il n’en était plus certain. Serait-ce de la lâcheté s’il laissait l’étudiant partir ? Oui. Il n’avait pas l’habitude de se défiler au dernier moment. Ce serait tellement stupide, tellement indigne de lui. Voulait-il rentrer frustré, hanté par les remords ? Les dernières phrases de James achevèrent de le convaincre. Rien ne l’obligeait à les ajouter. S’il rentrait, il retrouverait son compagnon. Il n’avait pas besoin de le revoir, et ne rejetait pas l’éventualité. Etait-ce des paroles en l’air ? Les adultes aimaient les discours sans valeurs. Ils décevaient à outrance, sacrifiaient les espoirs à la beauté d’une tournure. Or, malgré tout ce qu’il savait, elle le touchait, le confortait dans l’idée qu’il n’était pas méprisé. Les deux baisers affectueux glissèrent sur ses lèvres humides un sourire de biais. Sur son visage aigu, la candeur passagère s’effaçait derrière une malice diablotine. Le départ du jeune homme laissait son corps vide, insatisfait, et sa bouche gonflée d’une présence absente. Il vida son verre d’un trait imprudent et posa un billet de vingt livres sur la table, plus qu’il n’en fallait, mais il n’avait pas la tête à compter. Il n’en pouvait plus et se releva lentement, à la suite du garçon qui contemplait les escaliers d’acier. Sa main glissa dans la sienne.


- Tu as dit qu’on devait partir, et c’est vrai qu’il est tard. Mais alors, ne me dit pas au revoir maintenant, attend d’être dehors, ou je vais croire que tu n’as été gentil avec moi que pour le style. Tu m’accompagnes ?
– Puis, baissant le ton il souffla avant de le tirer avec lui : - Si je suis un tentateur, tu ne peux pas être un satyre…

Où allait-il ? Il n’en savait rien, mais il ne voulait pas descendre. Le pas incertain, la vision encore floue, il se dirigea vers la sortie. Des sourires entendus s’étiraient à son passage. Et sa tête restait haute, même lorsque les cils se baissaient, semblait-il, vers son pantalon blanc. Plus tard, il se ferait un plaisir de les rabrouer, de leur montrer à quel points ils étaient ridicules et vains. Mais là, le cœur battant, il se serait élancé vers la porte si elle ne paraissait pas tant éloignée. Et une fois la porte fermée, où irait-il ? La rue devait-elle les séparer ? Non, un message clair flottait entre eux. Si James le voulait, ils se retrouveraient très vite. Dehors, ils aviseraient. Il ne tenait plus la main du garçon par provocation. A présent, il ne la lâcherait plus avant d’obtenir ce qu’il voulait, la promesse d’une rencontre prolongée.
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