Papy Bachelard était incontestablement hors de tout soupçons et les dernières vérifications d’usages le confirmèrent. Mais le doute n’était pas permis, on ne pouvait se fier à personne dans ces heures sombres. Pourtant mettre en examen un homme si correct que Sigmund n’était pas une tâche des plus agréables qu’Arsène était rassuré d’effectuer avec la charmante compagnie, bien que légèrement à remettre en question, de Catherine M. Ewing. La jeune femme semblait avoir un avis très particulier à son sujet, fait qui le vexait particulièrement étant donné qu’ils n’avaient jamais eu à faire l’un avec l’autre. Après tout, c’était elle l’idiote et elle ne méritait probablement pas qu’il lui accorde la moindre attention. Ce qu’il s’efforça de faire durant tout l’entretien en mettant en avant son professionnalisme et en laissant de coté la jolie brune et ses manières, disons bien peu féminines et distinguées.

Le sortilège effectué par la jeune auror apaisa l’atmosphère lorsqu’il s’avéra que le papy était totalement hors de tout soupçon. Les talents de la jeune femme étaient à la hauteur de ce qu’on pouvait espérer trouver dans les membres de l’Ordre du Phénix. Le sourire qui lui fut adressé le déconcerta quelque peu sans qu’il ne laisse rien percevoir de son étonnement. Décidément cette femme était bien peu orthodoxe et très imprévisible. Il le lui rendit, instinctivement et poliment, l’air pensif. Mais déjà le regard de la brune se dirigeait vers le vieux Sigmund, alors que celui d’Arsène resta figé sur elle, profitant de ses paroles pour la détailler d’un peu plus près.

Le soulagement pouvait se lire sur les trois visages, du moins s’en était la perception d’Arsène lorsque le papy prit la parole pour les remercier et se retirer. Il fut convenu que Bachelard soit conduit au square ultérieurement, lors de leur prochaine réunion, afin d’éviter les allées et venues trop indiscrètes qui mettraient en danger leur couverture.

C’est un honneur pour nous de vous avoir recruté Sigmund. Vous êtes une valeur sûre dans le domaine de la sorcellerie et je pense que l’Ordre se retrouve renforcé grâce à votre présence parmi nous.

Arsène avait retrouvé le calme intérieur qui l’habitait avant que Catherine ne débarque comme une furie dans son bureau et chamboule l’ambiance. Son regard se reposa sur elle quelques instants alors que le papy se levait pour gagner la porte d’entrée. Il se leva à son tour pour la lui ouvrir et lui souhaiter une bonne rentrée.

Le calme resterait-il à présent que le sujet de leur rencontre venait de les quitter ? Arsène espérait intérieurement que leur première rencontre ne se solderait pas par un échec. D’un coté il s’en fichait royalement de savoir ce que pouvait bien penser cette femme si particulière qui se permettait d’étaler sa mauvaise humeur dans son bureau de si mauvaise grâce. Mais quelque part, il était curieux de savoir ce qui avait déclenché chez la brune à l’air si sombre de telles réactions à son égard. En était-il pleinement responsable ? faisait-elle partie de ces femmes insatisfaites qui ne supportent pas de rencontrer la perfection en sa personne ? Quoi qu’il en soit, il serait très frustrant pour le médicomage de la voir ressortir de son bureau dans le même état d’esprit qu’à son arrivée.

Il se retourna lentement et se dirigea non pas vers son bureau, mais directement vers Catherine, en la fixant de ses yeux noisette, sur ses gardes. C’était rare, voir inexistant habituellement, mais Arsène avait de la peine à trouver les mots pour ne pas agacer une nouvelle fois l’auror et s’énerver par la même occasion. Il avait un peu l’impression de se retrouver devant une bête sauvage blessé qu’il fallait approcher sans l’effrayer. C’était quoi au juste le but au final ?

Puis-je vous offrir autre chose que du thé, que vous ne semblez guère apprécier, afin de repartir sur de meilleures bases ?

La vue de la tasse à moitié pleine qui trainait près de Catherine, lui donna l’impulsion nécessaire pour prendre la parole et se jeter à l’eau. Il n’avait aucune idée de la réaction de la jeune femme et s’attendait au pire comme au meilleur, plongé dans un sentiment de mal-être qu’il ne pouvait contrôler.